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28/11/2024 | FRANCE | N°21BX01567

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 1ère chambre, 28 novembre 2024, 21BX01567


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... C..., Mme D... B... et M. E... B... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 3 septembre 2018 par lequel le maire d'Andernos-les-Bains a accordé à la société LBV Holding un permis de construire en vue de la rénovation et de l'extension d'une maison d'habitation sur un terrain cadastré BE n°51, situé 4 allée des Mouettes, ainsi que la décision de rejet implicite de leur recours gracieux.



Par un jugement n°190097

2 du 10 février 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.



Par une...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C..., Mme D... B... et M. E... B... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 3 septembre 2018 par lequel le maire d'Andernos-les-Bains a accordé à la société LBV Holding un permis de construire en vue de la rénovation et de l'extension d'une maison d'habitation sur un terrain cadastré BE n°51, situé 4 allée des Mouettes, ainsi que la décision de rejet implicite de leur recours gracieux.

Par un jugement n°1900972 du 10 février 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

Par une ordonnance n°2201784 du 29 mars 2022 le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Bordeaux a transmis à la cour administrative d'appel la demande de M. A... C..., M. E... B... et Mme D... B... tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 janvier 2022 par lequel le maire d'Andernos-les-Bains a accordé à la société LBV Holding un permis de construire modificatif en vue de la rénovation et de l'extension d'une maison d'habitation sur un terrain cadastré BE n°51 situé 4 allée des Mouettes, en application de l'article L. 600-5-2 du code de l'urbanisme.

Procédure devant la cour :

Par un arrêt avant dire droit du 2 novembre 2023, la Cour, statuant sur les requêtes n° 21BX01567 et 22BX00978 de M. A... C..., M. E... B... et Mme D... B... tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 10 février 2021, ainsi que du permis de construire du 3 septembre 2018, de la décision de rejet implicite de leur recours gracieux formé contre ce permis et du permis de construire modificatif du 27 janvier 2022, après avoir joint ces deux requêtes, a, d'une part, jugé que le permis du 3 septembre 2018 en litige méconnaissait les articles UB 6.1 et UB 10.1 du règlement du plan local d'urbanisme et, d'autre part, après avoir écarté tous les autres moyens comme non fondés, sursis à statuer sur ces requêtes, en application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, pour permettre à la société LBV Holding et à la commune d'Andernos-les-Bains de lui notifier un permis de construire modificatif régularisant les vices entachant le permis de construire délivré le 3 septembre 2018, dans un délai de quatre mois, courant à compter de la notification de l'arrêt avant dire droit.

Par des mémoires enregistrés, dans les deux dossiers n° 21BX01567 et 22BX00978, les 7 mars, 16 mai et 18 octobre 2024, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, la société LBV Holding a transmis la demande de permis de construire modificatif et le permis de construire modificatif qui lui a été délivré le 12 avril 2024 par le maire d'Andernos-les-Bains et demande à la cour de constater la régularisation des vices relevés dans l'arrêt avant-dire droit du 2 novembre 2023.

Elle soutient que :

- s'agissant de la méconnaissance de l'article UB 6.1 du plan local d'urbanisme, la régularisation de ce vice est intervenue par application des dispositions dérogatoires de l'article UB 6.5, compte tenu de la singularité de l'implantation de la construction existante, en oblique de la voie selon un angle à 45° et de ce que la surélévation n'empiète pas sur la marge de recul observée sur l'existant, dès lors que la surélévation se situe à une distance de 3,25 mètres là où l'existant se situe à une distance de 3,11 mètres ; en tout état de cause, cet empiètement ne génère aucune nuisance ;

- s'agissant de la méconnaissance de l'article UB 10.1 du plan local d'urbanisme, la régularisation de ce vice est intervenue par application des dispositions de l'article UB 10.2, alors que les deux volumes en extension, qui reprennent les caractéristiques des toits à forte pente dévolue à l'architecture des villas du bassin d'Arcachon et se justifient par des considérations techniques, ont une hauteur de 8,98 mètres après déduction de la côte seuil NGF de 4,35 mètres.

Par des mémoires enregistrés, dans les deux dossiers n° 21BX01567 et 22BX00978, les 1er, 4 et 21 octobre 2024, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, la commune d'Andernos-les-Bains, représentée par Me Delavallade, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. C... et autres.

Elle soutient que le permis de construire modificatif a régularisé les vices constatés dans l'arrêt avant dire droit.

Par un mémoire enregistré, dans les deux dossiers n° 21BX01567 et 22BX00978, le 1er octobre 2024, M. A... C..., M. E... B... et Mme D... B..., représentés par Me Fouchet, maintiennent leurs précédentes conclusions et demandent en outre d'annuler l'arrêté portant permis de construire modificatif délivré le 12 avril 2024 par le maire d'Andernos-les-Bains.

Ils soutiennent que le permis de construire modificatif n'a pas régularisé les vices constatés dans l'arrêt avant dire droit.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Béatrice Molina-Andréo,

- les conclusions de M. Michaël Kauffmann, rapporteur public,

- et les observations de Me Eizaga, représentant M. C... et les consorts B..., de Me Martel, représentant la commune d'Andernos les Bains et de Me Lapprand, représentant la société LBV Holding.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 3 septembre 2018, le maire d'Andernos-les-Bains a délivré à la société LBV Holding un permis de construire en vue de la rénovation et de l'extension d'une maison d'habitation existante sur un terrain cadastré BE n°51 situé sur le territoire de la commune, au l4 allées des Mouettes. M. C..., M. B... et Mme B... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler cet arrêté ainsi que la décision par laquelle le maire a implicitement rejeté leur recours gracieux. Par une requête enregistrée sous le n° 21BX01567, M. C... et autres relèvent appel du jugement 10 février 2021 par lequel le tribunal a rejeté leur demande. Ultérieurement, le 27 janvier 2022, le maire d'Andernos-les-Bains a délivré à la société LBV Holding un permis de construire modificatif pour ce même projet, et M. C... et autres ont saisi le tribunal administratif de Bordeaux d'un recours pour excès de pouvoir contre ce permis de construire modificatif. Par une ordonnance du 29 mars 2022, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif, se fondant sur l'article L. 600-5-2 du code de l'urbanisme, a transmis ce recours à la cour administrative d'appel où il a été enregistré sous le n° 22BX00978.

2. Par un arrêt avant-dire droit du 2 novembre 2023, contre lequel le pourvoi en cassation n'a pas été admis, la cour, après avoir joint ces deux requêtes, a, d'une part, jugé que le permis du 3 septembre 2018 en litige méconnaissait les articles UB 6.1 et UB 10.1 du règlement du plan local d'urbanisme et, d'autre part, après avoir écarté tous les autres moyens comme non fondés, sursis à statuer sur ces requêtes, en application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, pour permettre à la société LBV Holding et à la commune d'Andernos-les-Bains de lui notifier un permis de construire modificatif régularisant les vices entachant le permis de construire délivré le 3 septembre 2018, dans un délai de quatre mois, courant à compter de la notification de l'arrêt avant dire droit. Par un mémoire enregistré le 16 mai 2024, la société LBV Holding a transmis à la cour le permis de construire modificatif qui lui a été délivré le 12 avril 2024 par le maire d'Andernos-les-Bains.

Sur la régularisation des vices retenus dans l'arrêt avant-dire droit :

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article UB 10.1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune d'Andernos-les-Bains :

3. Lorsqu'un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance des permis de construire, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée dès lors que le permis modificatif ou de régularisation assure le respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises. Il peut, de même, être régularisé par un permis modificatif ou de régularisation si la règle relative à l'utilisation du sol qui était méconnue par le permis initial a été entretemps modifiée. Un permis de régularisation délivré en vertu de l'article L. 600-5-1 peut revoir l'économie générale du projet, sous réserve de ne pas lui apporter un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même.

4. Par une délibération n° 2023-080 adoptée le 3 août 2023, le conseil municipal d'Andernos a approuvé la modification n° 1 du plan local d'urbanisme et notamment le nouvel article UB 10.1 du règlement, qui mentionne désormais : " La hauteur maximale des constructions, mesurée selon les dispositions indiquées dans les dispositions générales, ne peut excéder : / - 4,50 mètres au point haut de l'acrotère pour les toits plats, / - 6 m à l'égout et 8,50 mètres au faitage pour les toits en pentes ; toutefois une adaptation d'1 m au faitage pourra être admise pour les toits en pente supérieure à 40% et de style arcachonnais, à condition que cela ne puisse pas générer de la surface de plancher supplémentaire (en niveau supplémentaire ou en comble aménagée), et qu'il n'y ait pas d'effets cumulés de hauteur supplémentaire avec les nécessités de surélévations des cotes de plancher dans les secteurs éventuellement concernés par le PPRISM (l'ensemble cumulé des adaptations est donc limité à 1mètre). ".

5. Par l'arrêté du 12 avril 2024, le maire d'Andernos, au visa de ces nouvelles dispositions devenues exécutoires, a accordé à la société LBV Holding un permis de construire modificatif en relevant " que le projet reprend les éléments significatifs de l'architecture de style arcachonnais et que la hauteur n'excède pas 8,5 mètres au faîtage et l'adaptation de 1 mètre admise pour les toits en pente supérieure à 40 % et de style arcachonnais ". Il ressort des pièces du dossier et en particulier des plans versés à l'appui de la demande de permis de construire modificatif que les deux surélévations de la maison ancienne existante se situent à une hauteur de 9,05 mètres après déduction de la côte de seuil NGF, soit au-delà de la hauteur maximale de 8,50 mètres au faitage. Toutefois, alors que le toit, de style arcachonnais, comporte une pente de plus de 50 %, sans qu'il ne soit fait état d'une surface de plancher supplémentaire, une adaptation au faitage pouvait être admise sur le fondement des nouvelles règles d'urbanisme adoptées le 3 août 2023. Si une surélévation des constructions égale ou supérieure à 30 centimètres par rapport à la côte du terrain naturel a été respectée à titre préventif pour tenir compte de l'hypothèse d'élévation du niveau de la mer retenu dans le plan de prévention du risque de submersion marine du bassin d'Arcachon, il ne ressort pas des pièces du dossier que les effets cumulés de hauteur supplémentaire au sol et au faitage excéderaient la limite fixée à un mètre par les nouvelles dispositions du règlement du plan local d'urbanisme. Par suite, l'arrêté du 12 avril 2024 a eu pour effet de régulariser le permis de construire initial sur ce point.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article UB 6.1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune d'Andernos-les-Bains :

6. Aux termes de l'article UB 6.1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune d'Andernos-les-Bains relatif aux implantations par rapport aux voies et emprises publiques, applicable au permis de construire modificatif : " Les constructions doivent être implantées à une distance minimale de 5 mètres des voies existantes, à modifier ou à créer (...) ". L'article UB 6.5 prévoit que " (...) Une implantation différente peut être envisagée pour l'extension des constructions existantes ne respectant pas les règles ci-dessus, dans le cas où le projet est justifié par sa nature, son implantation ou par la configuration du terrain, et à condition qu'il s'inscrive dans le prolongement du bâtiment existant et qu'il n'empiète pas dans la marge de recul observée par l'existant. / (...) ".

7. La cour, par son arrêt avant-dire-droit, a considéré que la surélévation du bâtiment ancien au droit de l'ancienne véranda, se trouve à moins de 5 mètres de la voie publique, en méconnaissance de l'article UB 6.1 du plan local d'urbanisme de la commune d'Andernos-les-Bains, sans que la surélévation envisagée puisse être justifiée par la nature du projet, son implantation ou par la configuration du terrain au sens de l'article UB 6.5. Il ressort de l'examen de la demande de permis de construire modificatif que la société, qui a maintenu une distance de seulement 3,27 mètres entre la surélévation projetée et la voie publique, a entendu obtenir le bénéfice de la dérogation prévue à l'article UB 6.5 du plan local d'urbanisme. Le permis de construire modificatif du 12 avril 2024, qui fait droit à cette demande, justifie l'application de la dérogation de l'article UB 6.5 par la configuration du terrain. Toutefois, dès lors que la cour a estimé que le projet ne relève pas de cette dérogation prévue à l'article UB 6.5 du PLU, la régularisation sur ce point devait nécessairement porter sur l'implantation de la construction nouvelle en vue de respecter une distance minimale de 5 mètres avec la voie publique. Par suite, le permis de construire modificatif ne peut être regardé comme régularisant sur ce point le permis de construire initial.

Sur les conséquences de l'absence de régularisation d'un des deux vices retenus :

8. Le vice affectant l'arrêté du 3 septembre 2018 délivrant un permis de construire à la société LBV Holding, tenant à la méconnaissance des dispositions de l'article UB 6.1 du règlement du PLU, n'ayant pas été régularisé, M. C... et autres sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 10 février 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ce permis et de la décision implicite rejetant leur recours gracieux. Par voie de conséquence, les arrêtés portant permis de construire modificatifs des 27 janvier 2022 et 12 avril 2024 doivent également être annulés.

Sur les frais liés aux instances :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les sommes demandées par la société LBV Holding et la commune d'Andernos-les-Bains soient mises à la charge de M. C... et autres, qui ne sont pas parties perdantes. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la société LBV Holding et de la commune d'Andernos-les-Bains le versement de la somme de 750 euros chacune à M. C... et autres, en application des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 10 février 2021 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 3 septembre 2018, la décision implicite rejetant le recours gracieux formé contre cet arrêté et les arrêtés des 27 janvier 2022 et 12 avril 2024 sont annulés.

Article 3 : La société LBV Holding et la commune d'Andernos-les-Bains verseront chacune la somme de 750 euros à M. C... et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la société LBV Holding et de la commune d'Andernos-les-Bains présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., en qualité de représentant unique des requérants en application de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, à la commune d'Andernos-les-Bains et à la société LBV Holding.

Délibéré après l'audience du 14 novembre 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Béatrice Molina-Andreo, présidente-assesseure,

Mme Kolia Gallier Kerjean, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 novembre 2024.

La rapporteure,

Béatrice Molina-Andréo

La présidente,

Evelyne Balzamo

La greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21BX01567, 22BX00978


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21BX01567
Date de la décision : 28/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PAUZIÈS
Rapporteur ?: Mme Christelle BROUARD-LUCAS
Rapporteur public ?: M. KAUFFMANN
Avocat(s) : SCP CORNILLE - POUYANNE-FOUCHET

Origine de la décision
Date de l'import : 05/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-28;21bx01567 ?
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