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05/11/2024 | FRANCE | N°22BX03154

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 3ème chambre, 05 novembre 2024, 22BX03154


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... et la société civile immobilière (SCI) La Conche ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner la commune de Blaye à leur verser la somme de 1 572 600,75 euros en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis.



Par un jugement n° 2102045 du 26 octobre 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée l

e 23 décembre 2022, ainsi qu'un mémoire enregistré le 30 août 2024 qui n'a pas été communiqué, M. A... et la société La Co...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... et la société civile immobilière (SCI) La Conche ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner la commune de Blaye à leur verser la somme de 1 572 600,75 euros en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis.

Par un jugement n° 2102045 du 26 octobre 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 décembre 2022, ainsi qu'un mémoire enregistré le 30 août 2024 qui n'a pas été communiqué, M. A... et la société La Conche, représentés par Me Coussy, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 26 octobre 2022 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) de condamner la commune de Blaye à leur verser la somme de 1 572 600,75 euros en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis, assortie des intérêts au taux légal à compter du 18 janvier 2021 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Blaye la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- c'est à tort que les premiers juges ont écarté le moyen relatif à la responsabilité pour faute de la commune de Blaye en ce qu'elle a transmis une information erronée relative à la caducité du permis de construire ; les premiers juges ont commis une erreur de droit en ne statuant pas sur la faute et sur le lien de causalité entre cette faute et la perte de chance de poursuivre les travaux ;

- en s'abstenant de réaliser les travaux qui lui incombaient au terme du bail emphytéotique qu'elle a conclu, la commune de Blaye a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; les premiers juges ont commis une erreur de fait en retenant qu'ils ne rapportaient pas la preuve d'une faute contractuelle de la commune de Blaye ;

- la responsabilité de la commune doit être engagée en raison d'une rupture du principe de l'égalité devant les charges publiques ; ils subissent un préjudice anormal et spécial du fait de la carence de la commune de Blaye, qui était tenue d'exécuter ces travaux ;

- ils ont subi un préjudice économique correspondant aux fonds apportés en pure perte, qui s'élèvent à la somme de 572 600,75 euros ainsi qu'à la perte de valeur du fonds de commerce, qui s'évalue à la somme de 1 000 000 euros.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 avril 2024, la commune de Blaye, représentée par la SELARL Boissy Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. A... et de la société La Conche au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable s'agissant de la société La Conche, dès lors qu'elle méconnait l'autorité de la chose jugée qui s'attache au jugement n°s 1604943, 1605449 du tribunal administratif de Bordeaux du 5 novembre 2018, confirmé par l'arrêt n° 19BX00121 rendu par la cour administrative de Bordeaux le 22 décembre 2021 ;

- aucun agissement fautif ne lui est imputable.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Vincent Bureau,

- les conclusions de M. Julien Dufour, rapporteur public,

- et les observations de Me Dumet, représentant M. A... et la société La Conche.

Considérant ce qui suit :

1. En 2004, la commune de Blaye a lancé un appel à projet pour l'aménagement d'un terrain situé sur les berges de l'estuaire, à proximité de la citadelle. Par une délibération du 16 juin 2005, le conseil municipal a retenu la proposition de la société civile immobilière (SCI) Les Grands Randeaux de l'Ermitage, qui proposait de créer un site de restauration. Le 18 janvier 2007, un permis de construire a été accordé à la société Les Grands Randeaux de l'Ermitage pour édifier, sur le terrain de la halte nautique, un bâtiment à usage de restaurant. Pour permettre la réalisation du projet d'aménagement retenu, la commune de Blaye a, le 27 septembre 2007, conclu avec la société La Conche, laquelle s'était substituée à la société Les Grands Randeaux de l'Ermitage, un bail emphytéotique administratif d'une durée de soixante-quinze ans. La commune mettait ainsi un terrain à la disposition de sa cocontractante, à charge pour cette dernière d'y faire édifier et d'y exploiter un restaurant. Les travaux prévus au bail ont débuté en octobre 2007 avant d'être interrompus en février 2009, ce qui a conduit la direction départementale des territoires à constater le 3 septembre 2010 la péremption du permis de construire en raison d'une interruption des travaux supérieure à un an. Le 19 novembre 2010, la société La Conche a sollicité un nouveau permis auprès du maire de Blaye, qui a refusé d'instruire cette demande au motif que l'Etat était désormais seul compétent pour se prononcer sur l'autorisation sollicitée, une partie du terrain d'assiette du projet ayant été classé monument historique à la suite d'un arrêté ministériel du 11 mai 2009. La société La Conche a alors déposé une demande d'autorisation de travaux auprès du ministre de la culture et de la communication, qui a rejeté sa demande par décision du 18 octobre 2011. Par courrier du 1er août 2016, la commune de Blaye a mis en demeure la société La Conche de se conformer à ses obligations contractuelles sous peine de résiliation du bail. En définitive, le maire a résilié le bail emphytéotique administratif par une décision du 30 septembre 2016, ce qui a conduit la société la Conche à adresser à la commune, le 28 octobre 2016, une réclamation indemnitaire préalable qui a été implicitement rejetée. Le tribunal administratif de Bordeaux, par un jugement du 5 novembre 2018, a rejeté le recours indemnitaire formé devant lui par la société. Ce jugement a été confirmé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux n° 19BX00121 du 22 décembre 2021. Entre-temps, la société La Conche et son gérant, M. A..., ont présenté une nouvelle demande indemnitaire, également rejetée par la commune de Blaye. Ils relèvent désormais appel du jugement du 26 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande de condamnation de la commune de Blaye à leur verser la somme de 1 572 600,75 euros en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis.

Sur l'exception de chose jugée :

2. Le précédent arrêt de la cour en date du 22 décembre 2021 est devenu définitif à la suite du refus d'admission du pourvoi en cassation de la société La Conche, prononcé par le Conseil d'Etat le 12 décembre 2022. Par cet arrêt, la cour a exclu la responsabilité de la commune de Blaye, tant sur le terrain de la responsabilité contractuelle pour faute que sur celui de la rupture d'égalité devant les charges publiques. La présente requête concerne la même société et est appuyée de moyens se rattachant aux mêmes causes juridiques que ceux soulevés dans l'instance précédente. Dès lors, l'autorité qui s'attache à la chose jugée par l'arrêt du 22 décembre 2021 par suite de la triple identité de parties, d'objet et de cause entre le litige alors tranché et celui aujourd'hui soumis à la cour fait obstacle à ce que les prétentions de la société La Conche puissent être accueillies.

Sur les conclusions indemnitaires de M. A... :

3. En premier lieu, M. A..., tiers au bail emphytéotique administratif conclu entre la commune de Blaye et la société La Conche dont il était le gérant, ne saurait utilement, à l'appui de ses conclusions indemnitaires, invoquer la méconnaissance par la commune de Blaye de ses obligations contractuelles.

4. En deuxième lieu, pour demander la réparation du préjudice économique et la perte de valeur du fonds de commerce, M. A... soutient que la commune de Blaye lui a adressé une information erronée quant à la caducité du permis de construire délivré à la société La Conche le 19 janvier 2007, qui ne pouvait selon lui intervenir avant le 13 janvier 2011. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que cette information, à la supposer erronée, ait été le motif déterminant de la résiliation du bail, alors que selon un courrier adressé au maire de Blaye par la société le 25 septembre 2008, celle-ci se trouvait dans l'incapacité d'obtenir un financement bancaire, situation que corrobore l'interruption des travaux du 9 février 2009 au 23 février 2010 et qui n'est en revanche pas sérieusement remise en cause par la production, par le requérant, de trois courriers peu précis émanant d'investisseurs potentiels, datés de février et mars 2011.

5. Enfin, dès lors que la résiliation du bail ne trouve pas sa cause dans l'abandon du projet par la commune de Blaye mais dans le défaut d'exécution de ses obligations contractuelles par la société La Conche, M. A... ne peut davantage se prévaloir d'une rupture de l'égalité devant les charges publiques.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... et la société La Conche ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... et de la société La Conche la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Blaye au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de la commune de Blaye, qui n'est pas la partie perdante.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... et de la société La Conche est rejetée.

Article 2 : M. A... et la société La Conche verseront à la commune de Blaye la somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à la société la Conche et à la commune de Blaye.

Délibéré après l'audience du 15 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

M. Laurent Pouget, président,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,

M. Vincent Bureau, conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 novembre 2024.

Le rapporteur,

Vincent Bureau

Le président,

Laurent Pouget

Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 22BX03154


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX03154
Date de la décision : 05/11/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. POUGET
Rapporteur ?: M. Vincent BUREAU
Rapporteur public ?: M. DUFOUR
Avocat(s) : COUSSY BORDEAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 10/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-05;22bx03154 ?
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