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04/11/2024 | FRANCE | N°24BX00329

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 3ème chambre, 04 novembre 2024, 24BX00329


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... A... B... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté n° 2024-01-09a du 9 janvier 2024 par lequel le préfet des Hautes-Pyrénées a rejeté sa demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit tout retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, et l'arrêté du même jour n° 2024-01-09b par lequel la même autorité

l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... A... B... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté n° 2024-01-09a du 9 janvier 2024 par lequel le préfet des Hautes-Pyrénées a rejeté sa demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit tout retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, et l'arrêté du même jour n° 2024-01-09b par lequel la même autorité l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 2400050 du 17 janvier 2024, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Pau a renvoyé devant une formation collégiale du tribunal les conclusions de M. A... B... dirigées contre le refus de titre de séjour prononcé par l'arrêté n° 2424-01-09a du 9 janvier 2024, a annulé la mesure d'interdiction de retour en France pour une durée de deux ans relevant de ce même arrêté et a rejeté le surplus de ses conclusions.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 12 février 2024 et le 11 mars 2024, M. A... B..., représenté par Me Dumaz Zamora, demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 4 du jugement du tribunal administratif de Pau du 17 janvier 2024 ;

2°) d'annuler l'arrêté n° 2424-01-09a du 9 janvier 2024 en tant que le préfet des Hautes-Pyrénées lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination ;

3°) d'annuler l'arrêté n° 244-01-09b du 9 janvier 2024 par lequel le préfet des Hautes-Pyrénées l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours ;

4°) d'enjoindre au préfet des Hautes-Pyrénées de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans un délai d'une semaine à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

5°) d'enjoindre au préfet des Hautes-Pyrénées de lui restituer son passeport dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

6°) d'enjoindre au préfet des Hautes-Pyrénées de procéder à l'effacement du signalement aux fins de non-admission dont il est l'objet dans le système d'information Schengen sans délai à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

7°) de mettre à la charge de l'État et au bénéfice de Me Dumaz Zamora une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- le jugement est irrégulier dans la mesure où la magistrate déléguée, qui lui a adressé une mesure d'instruction tendant à ce qu'il verse à l'instance les arrêtés attaqués alors qu'il revenait au préfet des Hautes-Pyrénées de les produire par application de l'article R. 776-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a statué au vu de décisions incorrectement présentées ;

- la magistrate déléguée n'a pas statué sur le moyen soulevé au soutien de l'exception d'illégalité du refus de délivrance d'un titre de séjour, tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet des Hautes-Pyrénées dans l'application de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la magistrate déléguée n'a pas statué sur le moyen dirigé contre la mesure d'éloignement, tiré de ce que celle-ci a des conséquences manifestement disproportionnées sur sa situation personnelle ;

- la magistrate déléguée n'a pas statué sur le moyen dirigé contre la décision lui refusant un délai de départ volontaire, tiré de ce que celle-ci a des conséquences manifestement disproportionnées sur sa situation personnelle ;

- la magistrate déléguée n'a pas statué sur les moyens soulevés au soutien des conclusions tendant à l'annulation de la décision portant assignation à résidence ;

- le jugement n'est pas fondé ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle n'a pas été précédée d'un examen de sa situation personnelle ni de l'avis de la commission du titre de séjour en méconnaissance de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est dépourvue de base légale en conséquence de l'illégalité du refus de délivrance d'un titre de séjour qui résulte de ce que ce refus est insuffisamment motivé en méconnaissance des dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ; il méconnait les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et porte une atteinte disproportionnée à son droit à une vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il a des conséquences manifestement disproportionnées sur sa situation personnelle ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle porte atteinte à son droit à un procès équitable tel qu'il est garanti par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la mesure où son éloignement du territoire national l'empêche d'être présent pour l'instruction de l'affaire pénale dans le cadre de laquelle il est mis en examen ;

- elle emporte des conséquences manifestement disproportionnées sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne le refus de délai de départ volontaire :

- il est insuffisamment motivé ;

- il est dépourvu de base légale en conséquence de l'illégalité de la mesure d'éloignement ;

- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il emporte des conséquences manifestement disproportionnées sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est dépourvue de base légale en conséquence de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire national ;

En ce qui concerne l'assignation à résidence :

- elle est dépourvue de base légale en conséquence de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire ;

- la contrainte d'une présentation aux services de police à 8h00 alors qu'il doit suivre à la même heure la formation dispensée par l'école des métiers à Tarbes porte une atteinte disproportionnée à sa situation personnelle.

M. A... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 février 2024.

Par une ordonnance du 7 mai 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 14 juin 2024 à 12h00.

Un mémoire en défense présenté par le préfet des Hautes-Pyrénées a été enregistré le 29 août 2024.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme C... Réaut.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant camerounais né le 16 juillet 1992, déclare être entré en France en février 2016. Sa première demande de titre de séjour, déposée le 2 mai 2019, a été rejetée par un arrêté du préfet des Hautes-Pyrénées du 22 juin 2021 qui, en outre, l'obligeait à quitter le territoire national sans délai et lui interdisait un retour en France durant deux ans. A la suite de son mariage avec une ressortissante française, célébré le 29 avril 2023, il a déposé le 7 juin 2023 une demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale ". Par un arrêté du 9 janvier 2024, le préfet des Hautes-Pyrénées a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit tout retour en France pendant deux ans. Par un arrêté du même jour, la même autorité l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. M. A... B... relève appel de l'article 4 du jugement du 17 janvier 2024 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et l'assignant à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des termes du jugement que, dans le cadre de l'examen de l'exception d'illégalité du titre de séjour, le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il en est de même pour les moyens présentés au soutien des conclusions tendant à l'annulation de l'assignation à résidence. Ces moyens n'étaient pas inopérants.

3. Il s'ensuit que l'article 4 du jugement du 17 janvier 2024, qui rejette les conclusions dirigées contre ces actes, est irrégulier et doit être annulé. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes présentées par M. A... B... devant le tribunal et tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et l'assignant à résidence.

Sur la légalité des décisions en litige :

En ce qui concerne la mesure d'éloignement :

4. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; / (...) / 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivré ou s'est vu retirer un de ces documents ; /(...)/ 5° Le comportement de l'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois constitue une menace pour l'ordre public ; ". L'article L. 613-1 du même code dispose que : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. / Dans le cas prévu au 3° de l'article L. 611-1, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. Toutefois, les motifs des décisions relatives au délai de départ volontaire et à l'interdiction de retour édictées le cas échéant sont indiqués. ".

S'agissant de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour :

5. En premier lieu, le préfet a énoncé les textes sur lesquels il s'est fondé pour refuser de délivrer un titre de séjour à M. A... B... ainsi que les considérations de fait pertinentes pour apprécier le droit au séjour de ce dernier. Par suite, le préfet a satisfait à l'obligation de motivation à laquelle il était tenu en application des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration

6. En deuxième lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits fondamentaux et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1./ Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine./L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

7. Il ressort des pièces du dossier que M. A... B... a déclaré être entré en France en février 2016, à l'âge de 23 ans, s'est maintenu en situation irrégulière jusqu'à sa première demande de titre de séjour présentée le 2 mai 2019 et n'a pas exécuté la mesure d'éloignement qui assortissait le refus de séjour prononcé par un arrêté du préfet des Hautes-Pyrénées du 22 juin 2021. S'il invoque son mariage avec une ressortissante française, celui-ci, célébré le 29 avril 2023, était récent à la date de la décision contestée, de même que sa vie commune avec son épouse, dont il n'établit pas l'antériorité. Par ailleurs, le requérant n'est pas dépourvu de liens dans son pays d'origine, ou vivent ses deux enfants nés d'une première union. Enfin, la formation en réparation de carrosserie qu'il a engagée depuis le 22 septembre 2023 à l'école des métiers des Hautes-Pyrénées était également récente à la date de la mesure en litige et ne suffit pas à témoigner d'une réelle insertion professionnelle. Au vu de ces éléments, le refus de titre de séjour ne peut être regardé comme ayant porté au droit de M. A... B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par cette mesure. Le préfet n'a, dès lors, pas méconnu les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le refus de titre de séjour n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'appelant.

8. En troisième lieu, M. A... B... ne remplissant pas les conditions pour obtenir la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi qu'il vient d'être dit, il ne peut utilement soutenir que le préfet devait, avant de se prononcer, saisir pour avis la commission du titre de séjour en application des dispositions de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

9. En quatrième lieu, eu égard notamment à ce qui a été dit au point 7, M. A... B... ne fait état d'aucune considération humanitaire ou de motif exceptionnel de nature à justifier son admission exceptionnelle au séjour au titre de sa vie privée et familiale sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

10. Il résulte de ce qui précède que l'appelant n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de délivrance d'un titre de séjour.

S'agissant des autres moyens :

11. En premier lieu, il résulte de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la décision portant obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de M. A... B... sur le fondement du 3° de l'article L. 611-1 du même code n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision portant refus de séjour qui, ainsi qu'il a été dit au point 4, est suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la mesure d'éloignement doit être écarté.

12. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient M. A... B..., la motivation de l'arrêté contesté révèle que le préfet des Hautes-Pyrénées s'est livré à un examen particulier et circonstancié de sa situation personnelle.

13. En dernier lieu, aux termes du § 3 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "Tout accusé a droit notamment à : a. être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu'il comprend et d'une manière détaillée, de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui ; b. disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ; c. se défendre lui-même ou avoir l'assistance d'un défenseur de son choix et, s'il n'a pas les moyens de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat d'office, lorsque les intérêts de la justice l'exigent ; d. interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et l'interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge ; e. se faire assister gratuitement d'un interprète, s'il ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l'audience. "

14. Il ressort des pièces du dossier que M. A... B... a été mis en examen pour des faits de vol avec arme et violence, usage ou menace d'arme, commis le 29 novembre 2018, et qu'à la date de la mesure d'éloignement, aucun procès n'avait eu lieu. Il soutient qu'en lui faisant obligation de quitter le territoire national, le préfet a méconnu les stipulations énoncées au point précédent qui lui garantissent le droit d'assister à son procès pénal non encore avenu et qu'il sera empêché de se rendre aux convocations du juge d'instruction. Cependant, et alors que les premiers juges ont annulé l'interdiction de retour en France qui assortissait l'obligation de quitter le territoire, M. A... B... ne démontre pas qu'il ne pourra obtenir ultérieurement un visa aux fins d'exercer effectivement son droit de se défendre et d'assister à son procès. Par suite, le préfet n'a pas méconnu les stipulations du §3 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne la décision refusant l'attribution d'un délai de départ volontaire :

15. En premier lieu, les moyens dirigés contre l'obligation de quitter le territoire français étant écartés, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision refusant de lui attribuer un délai de départ volontaire serait dépourvue de base légale.

16. En deuxième lieu, contrairement à ce qui est soutenu, l'arrêté comporte les motifs de droit et de fait qui fondent la décision refusant à M. A... B... un délai de départ volontaire. Par suite, le préfet a satisfait à l'obligation de motivation qui lui incombait en vertu de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

17. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; / 2° L'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était manifestement infondée ou frauduleuse ; / 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". L'article L. 612-3 du même code précise que : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour / (...)/ 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) ".

18. Il est constant que M. A... B... n'a pas exécuté la précédente mesure d'éloignement dont il a fait l'objet par arrêté du préfet des Hautes-Pyrénées du 22 juin 2021. Le risque qu'il se soustraie à l'exécution d'une nouvelle mesure d'éloignement suffit à fonder la décision lui refusant un délai de départ volontaire. Le préfet n'a dès lors pas fait une inexacte application de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni n'a porté une atteinte disproportionnée à sa situation personnelle

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

19. Dès lors que le présent arrêt écarte les moyens de M. A... B... dirigés contre l'obligation de quitter le territoire français, celui-ci n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination serait dépourvue de base légale.

En ce qui concerne la mesure portant assignation à résidence :

20. Dès lors que le présent arrêt écarte les moyens de M. A... B... dirigés contre l'obligation de quitter le territoire français, celui-ci n'est pas fondé à soutenir que la décision portant assignation à résidence serait dépourvue de base légale.

21. Aux termes de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants : 1° L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins d'un an auparavant, pour laquelle le délai de départ vo2ontaire est expiré ou n'a pas été accordé ; (...) ".

22. Le préfet des Hautes-Pyrénées a assigné M. A... B... à résidence à son domicile pendant quarante-cinq jours à compter de la notification de l'arrêté du 9 janvier 2024 et l'a contraint à se présenter au commissariat de police de Tarbes tous les matins à 8h00, du lundi au vendredi. Si le requérant fait valoir qu'une telle contrainte de présentation l'a empêché d'assister à la formation dispensée par l'école des métiers à Tarbes, il ne produit toutefois aucune pièce émanant de cette école ou bien de l'entreprise dans laquelle il effectuait un stage en alternance qui attesterait de l'incompatibilité alléguée. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet a fait une inexacte application de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni qu'il a porté une atteinte disproportionnée à sa situation personnelle par rapport à l'objectif poursuivi par ces dispositions.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

23. Dès lors que le présent arrêt rejette les conclusions aux fins d'annulation de M. A... B..., ses conclusions aux fins d'injonction doivent être également rejetées.

Sur les frais de l'instance :

24. L'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions de M. A... B... présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : L'article 4 du jugement du tribunal administratif de Pau du 17 janvier 2024 est annulé.

Article 2 : La demande de M. A... B... devant le tribunal administratif de Pau, en tant qu'elle porte sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et l'assignant à domicile, est rejetée.

Article 3 : Les conclusions d'appel de M. A... B... à fin d'injonction et fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E... A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Hautes-Pyrénées.

Délibéré après l'audience du 1er octobre 2024 à laquelle siégeaient :

M. Laurent Pouget, président,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,

Mme Valérie Réaut, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 novembre 2024.

La rapporteure,

C... Réaut

Le président,

Laurent PougetLe greffier

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 24BX00329 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 24BX00329
Date de la décision : 04/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. POUGET
Rapporteur ?: Mme Valérie RÉAUT
Rapporteur public ?: M. DUFOUR
Avocat(s) : DUMAZ ZAMORA

Origine de la décision
Date de l'import : 10/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-04;24bx00329 ?
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