Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association France Nature Environnement Midi-Pyrénées, l'association France Nature Environnement Hautes-Pyrénées et l'association Nature en Occitanie ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 26 avril 2019 par lequel le préfet des Hautes-Pyrénées a autorisé pour une période complémentaire allant du 15 mai 2019 au 14 septembre 2019 la vènerie sous terre du blaireau dans le département des Hautes-Pyrénées.
Par un jugement n° 1901506 du 17 mars 2022, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 23 mai 2022, l'association France Nature Environnement Midi-Pyrénées, l'association France Nature Environnement Hautes-Pyrénées et l'association Nature en Occitanie, représentées par Me Galinon, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 17 mars 2022 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 26 avril 2019 par lequel le préfet des Hautes-Pyrénées a autorisé pour une période complémentaire allant du 15 mai 2019 au 14 septembre 2019 la vènerie sous terre du blaireau dans le département des Hautes-Pyrénées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- l'arrêté attaqué est entaché d'un vice de procédure compte tenu du caractère lacunaire de la note de présentation mise à disposition du public ;
- il est entaché d'erreur d'appréciation ;
- il méconnaît l'article L. 424-10 du code de l'environnement.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 septembre 2023, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le moyen tiré de la recherche de solution alternative satisfaisante à la vènerie du blaireau est inopérant ;
- les autres moyens soulevés par les associations requérantes ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 29 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 30 octobre 2023 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'environnement ;
- l'arrêté du 18 mars 1982 modifié relatif à l'exercice de la vènerie ;
- l'arrêté du 26 juin 1987 modifié fixant la liste des espèces de gibier dont la chasse est autorisée ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lucie Cazcarra,
- et les conclusions de Mme Pauline Reynaud, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 26 avril 2019, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le 30 avril suivant, le préfet des Hautes-Pyrénées a autorisé dans ce département l'exercice de la vènerie sous terre du blaireau pour une période complémentaire allant du 15 mai 2019 au 14 septembre 2019. L'association France Nature Environnement Midi-Pyrénées, l'association France Nature Environnement Hautes-Pyrénées et l'association Nature en Occitanie ont demandé l'annulation de cet arrêté au tribunal administratif de Pau, qui a rejeté leur demande par un jugement du 17 mars 2022. Ces trois associations interjettent appel de ce jugement.
Sur la légalité de l'arrêté du préfet des Hautes-Pyrénées autorisant une période complémentaire de vènerie sous terre du blaireau :
2. Aux termes de l'article L. 123-19-1 du code de l'environnement : " I.-Le présent article définit les conditions et limites dans lesquelles le principe de participation du public, prévu à l'article 7 de la Charte de l'environnement, est applicable aux décisions, autres que les décisions individuelles, des autorités publiques ayant une incidence sur l'environnement lorsque celles-ci ne sont pas soumises, par les dispositions législatives qui leur sont applicables, à une procédure particulière organisant la participation du public à leur élaboration (...) / II.-Sous réserve des dispositions de l'article L. 123-19-6, le projet d'une décision mentionnée au I, accompagné d'une note de présentation précisant notamment le contexte et les objectifs de ce projet, est mis à disposition du public par voie électronique (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que la note de présentation mise à disposition du public par voie électronique entre le 17 janvier 2019 et le 6 février 2019 inclus, par les services de la préfecture des Hautes-Pyrénées et jointe au projet d'arrêté en litige, fait état du cadre juridique applicable à la vènerie du blaireau pour une période complémentaire, de la présentation de l'espèce, de son état de conservation, de la présence de trois foyers de tuberculose bovine dans plusieurs communes du département en 2018 et du nombre " d'équipages de déterrages " du blaireau. Ce document n'apporte toutefois aucune indication, même générale, sur les populations et effectifs de blaireaux dans le département, le nombre de blaireaux prélevés selon la vénerie sous terre par année ainsi que sur les nécessités pratiques de la vénerie sous terre. Il ressort pourtant des pièces versées au dossier que le préfet des Hautes-Pyrénées autorise chaque année, depuis 2011, l'exercice de la vénerie du blaireau pour une période complémentaire. La note de présentation ne fait par ailleurs mention d'aucune estimation du nombre de terriers sur le territoire du département des Hautes-Pyrénées, ni sur les zones de ce département qui seraient plus particulièrement touchées et ne précise nullement quelles sont les perspectives de prélèvements sur la période complémentaire autorisée. Enfin, si la note de présentation relève que la mesure en litige a pour objectif de réduire les dégâts causés par les blaireaux affectant les cultures, les matériels agricoles et, plus largement, les dégâts matériels et la sécurité des personnes, il ressort du tableau des déclarations de dégâts figurant dans la note que le nombre de déclarations relevées en 2018 confirme la tendance à la baisse des dégâts enregistrés depuis 2016. Sur les années 2016, 2017 et 2018, le nombre de déclarations de dégâts enregistrées s'est en effet respectivement élevé à 28, 21 et 15. Quant à la perte estimée à 8 368 euros au titre des dégâts imputés aux blaireaux pour l'année 2018, elle est nettement inférieure aux pertes relevées depuis 2011. Par conséquent, en s'abstenant d'apporter aux administrés des informations précises sur le contexte et les objectifs de la mesure proposée permettant le respect effectif du principe de participation du public, le préfet des Hautes-Pyrénées a méconnu les dispositions de l'article L.123-19-1 du code de l'environnement.
4. Un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable n'est toutefois de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de cette décision ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.
5. En l'espèce, la méconnaissance par l'autorité administrative de l'obligation prévue par les dispositions précitées du code de l'environnement, préalablement à l'édiction de l'arrêté litigieux, a privé le public d'une garantie. Il s'ensuit que l'association France Nature Environnement Midi-Pyrénées et autres sont fondées à soutenir que l'arrêté en litige a été pris à la suite d'une procédure irrégulière dans des conditions de nature à l'entacher d'illégalité.
6. Dans ces conditions, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, les associations France Nature Environnement Midi-Pyrénées, France Nature Environnement Hautes-Pyrénées et Nature en Occitanie sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté leur demande.
Sur les frais liés à l'instance :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à l'association France Nature Environnement Midi-Pyrénées, l'association France Nature Environnement Hautes-Pyrénées et l'association Nature en Occitanie au titre des frais qu'elles ont exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Pau du 17 mars 2022 est annulé.
Article 2 : L'arrêté du préfet des Hautes-Pyrénées du 26 avril 2019 est annulé.
Article 3 : L'Etat versera à l'association France Nature Environnement Midi-Pyrénées, l'association France Nature Environnement Hautes-Pyrénées et l'association Nature en Occitanie une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'association France Nature Environnement Midi-Pyrénées, à l'association France Nature Environnement Hautes-Pyrénées, à l'association Nature en Occitanie et à la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques.
Délibéré après l'audience du 3 octobre 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente,
Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,
Mme Lucie Cazcarra, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 octobre 2024.
La rapporteure,
Lucie CazcarraLa présidente,
Frédérique Munoz-Pauziès La greffière,
Laurence Mindine
La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 22BX01428