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22/10/2024 | FRANCE | N°23BX01202

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 5ème chambre, 22 octobre 2024, 23BX01202


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... C... a demandé au tribunal administratif de la Réunion d'annuler les deux délibérations du 13 avril 2021 par lesquelles le conseil d'administration du centre communal d'action sociale (CCAS) de La Possession a accordé la protection fonctionnelle à Mme Vanessa Miranville, présidente, et à Mme Jacqueline Lauret, vice-présidente.



Par un jugement n° 2100713 du 31 janvier 2023, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 2 mai 2023, M. C..., représent...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de la Réunion d'annuler les deux délibérations du 13 avril 2021 par lesquelles le conseil d'administration du centre communal d'action sociale (CCAS) de La Possession a accordé la protection fonctionnelle à Mme Vanessa Miranville, présidente, et à Mme Jacqueline Lauret, vice-présidente.

Par un jugement n° 2100713 du 31 janvier 2023, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 mai 2023, M. C..., représenté par Me Maillot, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2100713 du tribunal administratif de la Réunion du 31 janvier 2023 ;

2°) d'annuler les deux délibérations du 13 avril 2021 par lesquelles le conseil d'administration du centre communal d'action sociale (CCAS) de La Possession a accordé la protection fonctionnelle à Mme Vanessa Miranville, présidente, et à Mme Jacqueline Lauret, vice-présidente :

3°) de mettre à la charge du CCAS de La Possession le versement de la somme de 2 193 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il a intérêt à agir pour contester ces délibérations ; il est contribuable et citoyen de la commune de La Possession ; les décisions sont contraires à l'intérêt général et ont un impact sur les finances de la commune et du CCAS dès lors qu'elles ne fixent aucune limite quant aux actions prises en charge et à leur quantum ; l'équilibre financier fragile du CCAS de La Possession est directement menacé ; l'octroi de la protection fonctionnelle n'est pas réversible puisque le Conseil d'Etat a jugé qu'il s'agit d'une décision créatrice de droit ; de plus, c'est à tort que le tribunal a cru pouvoir cumuler les budgets communaux et ceux du CCAS alors qu'il s'agit de deux budgets distincts ; en outre, il est l'auteur d'une plainte en harcèlement moral à l'encontre des bénéficiaires des délibérations et il existe un risque d'utilisation de la protection fonctionnelle pour poursuivre le harcèlement à son encontre ; enfin, les faits de harcèlement constituent une faute nécessairement personnelle détachable du service et le CCAS se rendra coupable de complicité de détournement de fonds en accordant la protection fonctionnelle ; lors de l'audience publique, le raisonnement du rapporteur public s'est appuyé à tort sur une décision contestée devant le Conseil d'Etat et donc non définitive ;

- aucun motif ne justifiait l'urgence à convoquer le conseil d'administration ;

- le caractère public de la séance n'a pas été respecté ;

- l'assemblée délibérante n'a pas été suffisamment ni correctement informée de l'objet de la délibération, en méconnaissance de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales ; il appartient au CCAS de produire la note d'information et ses documents annexes ; des informations mensongères ont été portées à la connaissance des membres de l'assemblée délibérante ; plusieurs éléments d'information fiables et objectifs n'ont pas davantage été portés à la connaissance des membres de cette assemblée ;

- les modalités, notamment financières, de la protection n'ayant pas été définies, les délibérations sont entachées d'incompétence négative ;

- les délibérations sont entachées d'erreur de droit dès lors que les faits de dénonciation de harcèlement moral au titre desquels est accordée la protection fonctionnelle ont le caractère de fautes détachables du service au sens du deuxième alinéa de l'article L. 2123-34 du code général des collectivités territoriales ;

- les délibérations sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 août 2023, le CCAS de La Possession, représenté par Me Benoiton, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 700 euros soit mise à la charge de M. C..., au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que la requête est irrecevable, M. C... étant dépourvu d'intérêt à agir contre des délibérations accordant la protection fonctionnelle à des tiers, tandis qu'il bénéficie lui-même d'une décision similaire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Ellie, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., recruté en 2003 pour exercer les fonctions de directeur du centre communal d'action sociale (CCAS) de La Possession, a été évincé de ce poste en août 2014 et a reçu de nouvelles fonctions de " chargé de mission ". En 2017, il a déposé plainte pour harcèlement moral à l'encontre de Mme Miranville, présidente du CCAS, et de Mme Lauret, vice-présidente. Par deux délibérations en date du 13 avril 2021, le conseil d'administration du CCAS, statuant à nouveau sur les demandes de Mmes Miranville et Lauret, a confirmé l'octroi de la protection fonctionnelle à ces deux élues. M. C... relève appel du jugement du 31 janvier 2023 par lequel le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces délibérations.

2. En premier lieu, et d'une part, aux termes de l'article L. 123-4 du code général des collectivités territoriales : " Un centre communal d'action sociale est créé dans toute commune de 1 500 habitants et plus. Il peut être créé dans toute commune de moins de 1 500 habitants... ". Aux termes de l'article L. 123-5 du même code : " Le centre d'action sociale est un établissement public administratif communal ou intercommunal. Il est administré par un conseil d'administration présidé, selon le cas, par le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale ". L'article L. 123-8 de ce code dispose que : " Le président du centre communal ou intercommunal d'action sociale a le droit d'accepter, à titre conservatoire, des dons et legs et de former, avant l'autorisation, des demandes en délivrance (...) ". Aux termes également de l'article R. 123-25 du code de l'action sociale et des familles " Les recettes d'exploitation et de fonctionnement du centre d'action sociale peuvent comprendre notamment : 1° Les subventions versées par la commune ; 2° Les produits provenant des prestations de services fournies par le centre ; 3° Les versements effectués par les organismes d'assurance maladie, d'assurance vieillesse, les caisses d'allocations familiales ou par tout autre organisme ou collectivité au titre de leur participation financière aux services et aux établissements gérés par le centre ; 4° Le produit des prestations remboursables mentionnées au premier alinéa de l'article L. 123-5 ; 5° Les subventions d'exploitation et les participations ; 6° Les remboursements des frais liés à l'établissement des dossiers de demandes d'aide sociale légale ; 7° Les ressources propres du centre, notamment celles provenant des dons et legs qui lui sont faits ; 8° Le tiers du produit des concessions de terrains dans les cimetières accordées en vertu des articles L. 2223-14 et L. 2223-15 du code général des collectivités territoriales. ".

3. D'autre part, lorsque la délibération d'un CCAS emporte une perte de recettes ou des dépenses supplémentaires, le contribuable de la commune dont dépend cet établissement public communal n'est recevable à demander l'annulation pour excès de pouvoir d'une délibération d'un tel établissement que s'il établit que cette décision a une incidence suffisamment directe et certaine sur les finances de la commune.

4. M. C..., qui invoque sa qualité de contribuable de la commune de La Possession, fait valoir notamment que la situation financière du CCAS est fragile et que les délibérations en cause ne fixent aucune limite quant aux actions et au quantum de la prise en charge dont bénéficient Mmes Miranville et Lauret. Toutefois, il n'établit pas que lesdites délibérations comportent nécessairement une incidence directe et certaine sur les finances de la commune.

5. En deuxième lieu, la circonstance que le bénéfice de la protection fonctionnelle accordée aux deux élues serait susceptible d'être qualifié de détournement de fonds par le juge pénal, si une faute personnelle était avérée, est par elle-même sans incidence sur l'intérêt à agir de M. C... en qualité de citoyen de la commune.

6. En troisième lieu, M. C..., à qui le CCAS a également accordé la protection fonctionnelle à raison des faits de harcèlement moral qu'il dénonce, ne peut pas utilement soutenir qu'il aurait, personnellement, intérêt à ce que ce que les personnes qui seraient les auteures de ce délit ne puissent pas bénéficier de la protection fonctionnelle dès lors que le bénéfice de cette protection, de droit lorsque les accusations en cause ne sont pas détachables du service, n'a ni pour objet ni pour effet de préjudicier à ses intérêts.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Réunion a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. C... la somme demandée par le CCAS au même titre.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du CCAS de La Possession présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. A... C..., au centre communal d'action sociale (CCAS) de La Possession, à Mme Vanessa Miranville et à Mme Jacqueline Lauret.

Délibéré après l'audience du 1er octobre 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

M. Nicolas Normand, président-assesseur,

Mme Clémentine Voillemot, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 octobre 2024.

Le rapporteur,

Nicolas B...

La présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au préfet de La Réunion en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23BX01202


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX01202
Date de la décision : 22/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: M. Nicolas NORMAND
Rapporteur public ?: M. ELLIE
Avocat(s) : BENOITON

Origine de la décision
Date de l'import : 03/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-22;23bx01202 ?
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