Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 21 juillet 2023 par lequel le préfet de la Gironde a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné, et d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour.
Par un jugement n° 2304423 du 20 décembre 2023, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 4 janvier 2024, M. A..., représenté par Me Chrétien, demande la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2304423 du tribunal administratif de Bordeaux du 20 décembre 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 21 juillet 2023 par lequel le préfet de la Gironde a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, et ce sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté attaqué est disproportionné au sens des articles 8-5° et 15-11° de la directive 2014/36 UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 ; c'est à tort que le tribunal administratif de Bordeaux a estimé que ce moyen était inopérant à l'encontre de l'arrêté attaqué, alors que les dispositions de l'article R. 421-59 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoient qu'elles sont applicables ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l' arrêté attaqué est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mai 2024, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête en faisant valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 2 mai 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 14 juin 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la directive 2014/36/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 établissant les conditions d'entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d'un emploi en tant que travailleur saisonnier ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Pauline Reynaud a été entendu à l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant marocain né le 25 juillet 1985, est entré sur le territoire français le 18 septembre 2021 en possession d'un visa long séjour. L'intéressé s'est vu délivrer le 17 janvier 2022 un titre de séjour en qualité de travailleur saisonnier, dont il a demandé le renouvellement le 13 mars 2023. Par un arrêté du 21 juillet 2023, le préfet de la Gironde a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être renvoyé. M. A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux l'annulation de cet arrêté. L'intéressé relève appel du jugement n° 2304423 du 20 décembre 2023 rejetant sa demande.
Sur la légalité de l'arrêté du 21 juillet 2023 :
2. En premier lieu, le requérant soutient que l'arrêté attaqué méconnait les dispositions de la directive 2014/36/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 établissant les conditions d'entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d'un emploi en tant que travailleur saisonnier. Cette directive a toutefois été transposée en droit interne à l'article 86 de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, la loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France, le décret n° 2016-1456 du 28 octobre 2016 pris pour l'application de la loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 et portant diverses dispositions relatives à l'entrée, au séjour et au travail des étrangers en France et par l'arrêté du 28 octobre 2016 fixant la liste des pièces à fournir pour l'exercice, par un ressortissant étranger, d'une activité professionnelle salariée. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté est disproportionné au regard des dispositions de cette directive ne peut qu'être écarté comme inopérant.
3. En deuxième lieu, selon l'article L. 421-34 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui exerce un emploi à caractère saisonnier, tel que défini au 3° de l'article L. 1242-2 du code du travail, et qui s'engage à maintenir sa résidence habituelle hors de France, se voit délivrer une carte de séjour pluriannuelle portant la mention " travailleur saisonnier " d'une durée maximale de trois ans. (...) / Elle autorise l'exercice d'une activité professionnelle et donne à son titulaire le droit de séjourner et de travailler en France pendant la ou les périodes qu'elle fixe et qui ne peuvent dépasser une durée cumulée de six mois par an (...) ".
4. M. A... s'est vu délivrer un titre de séjour portant la mention " travailleur saisonnier ", sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 421-34, lesquelles imposent que la durée de séjour et de travail en France ne dépasse pas une durée cumulée de six mois par an. Or, si M. A... établit, par la production de son passeport, être retourné au Maroc du 13 au 27 mars 2022, du 1er au 5 mai 2022, du 31 juillet au 11 septembre 2022 et du 17 décembre 2022 au 7 janvier 2023, la durée cumulée de ces séjours au Maroc est inférieure à six mois. Dans ces conditions, c'est sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation que le préfet de la Gironde, a, pour ce motif, opposé un refus de titre de séjour à M. A....
5. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré en France en septembre 2021, soit moins de deux ans à la date de l'arrêté attaqué, et s'est vu délivrer un titre de séjour en qualité de travailleur saisonnier, ne lui conférant pas un droit au séjour supérieur à 6 mois par an. Par ailleurs, M. A..., célibataire sans charge de famille sur le territoire, ne justifie pas d'attaches personnelles et familiales sur le territoire, alors qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de 36 ans et où résident ses parents et ses deux sœurs. Dans ces conditions, le préfet de la Gironde n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels l'arrêté attaqué a été pris et n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Les conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 25 juin 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Evelyne Balzamo, présidente,
Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,
Mme Pauline Reynaud, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 juillet 2024.
La rapporteure,
Pauline Reynaud La présidente,
Evelyne BalzamoLe greffier,
Christophe Pelletier
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 24BX000222