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04/07/2024 | FRANCE | N°24BX00297

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 1ère chambre, 04 juillet 2024, 24BX00297


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2022 par lequel le préfet des Hautes-Pyrénées a rejeté sa demande d'admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.



Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2022 par lequel le préfet des Hautes-Pyrénées a rejeté sa demande d'admission

au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2022 par lequel le préfet des Hautes-Pyrénées a rejeté sa demande d'admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2022 par lequel le préfet des Hautes-Pyrénées a rejeté sa demande d'admission au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n°2202442, 2202444 du 26 décembre 2023, le tribunal administratif de Pau a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée sous le n°24BX00297 le 8 février 2024, M. A... C..., représenté par Me Soulié, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 26 décembre 2023 ;

2°) d'enjoindre au préfet des Hautes-Pyrénées, à titre principal, de lui délivrer le titre de séjour sollicité à compter de l'arrêt à intervenir et à titre subsidiaire, de réexaminer son dossier dans un délai de 15 jours à compter de l'arrêt à intervenir, et dans l'attente, de lui délivrer un titre de séjour provisoire ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il n'a pas été informé de son droit d'obtenir la copie d'éléments dans une langue qu'il comprend, en méconnaissance de l'article L. 613-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- en l'absence de production d'une délégation de signature régulière, l'auteur de l'arrêté attaqué est incompétent ;

- l'arrêté attaqué méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il a droit à un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en tant qu'accompagnant d'un étranger malade, à savoir son épouse ;

- sa situation ainsi que celle de son épouse ont été examinées sans qu'aucun avis médical n'ait été rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration dans le cadre de l'instruction du dossier de demande de titre de séjour de Mme C... ;

- l'état de santé de son épouse nécessite une prise en charge médicale en France ;

- il ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français eu égard à son état de santé et à l'impossibilité d'être convenablement pris en charge en Albanie.

Par ordonnance du 3 mai 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 6 juin 2024.

Un mémoire présenté par le préfet des Hautes-Pyrénées a été enregistré le 13 juin 2024.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 février 2024.

II. Par une requête enregistrée sous le n°24BX00298 le 8 février 2024, Mme B... C..., représentée par Me Soulié, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 26 décembre 2023 ;

2°) d'enjoindre au préfet des Hautes-Pyrénées, à titre principal, de lui délivrer le titre de séjour sollicité à compter de l'arrêt à intervenir et à titre subsidiaire, de réexaminer son dossier dans un délai de 15 jours à compter de l'arrêt à intervenir, et dans l'attente, de lui délivrer un titre de séjour provisoire ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle n'a pas été informée de son droit d'obtenir la copie d'éléments dans une langue qu'elle comprend, en méconnaissance de l'article L. 613-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- en l'absence de production d'une délégation de signature régulière, l'auteur de l'arrêté attaqué est incompétent ;

- aucun avis médical n'a été rendu par le collège des médecins de l'OFII dans le cadre de l'instruction de sa demande de demande de titre de séjour ;

- l'arrêté attaqué méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que son état de santé nécessite une prise en charge médicale en France et que l'interruption de sa prise en charge médicale aurait des conséquences extrêmement graves ;

- elle a droit à un titre de séjour vie privée et familiale en tant qu'accompagnant d'un étranger malade, à savoir son époux, sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par ordonnance du 3 mai 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 6 juin 2024.

Un mémoire présenté par le préfet des Hautes-Pyrénées a été enregistré le 13 juin 2024.

Mme C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 février 2024.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Edwige Michaud a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C..., ressortissants albanais, sont entrés régulièrement sur le territoire français le 2 janvier 2017. Leurs demandes d'asile ont été rejetées par décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 15 mai 2017, confirmées par décisions de la Cour nationale du droit d'asile du 31 août 2017. Le 5 avril 2022, M. C... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'" étranger malade " et Mme C... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en tant qu'accompagnante d'un étranger malade. Par deux arrêtés du 17 octobre 2022, le préfet des Hautes-Pyrénées a rejeté ces demandes, a obligé les intéressés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement du 26 décembre 2023, le tribunal administratif de Pau a rejeté les demandes de M. et Mme C... qui relèvent appel de ce jugement. Les requêtes enregistrées sous les numéros 24BX00297 et 24BX00298 sont relatives aux situations de deux époux et présentent à juger des questions similaires. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 613-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel est notifiée une décision portant obligation de quitter le territoire français est également informé qu'il peut recevoir communication des principaux éléments, traduits dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu'il la comprend, des décisions qui lui sont notifiées en application des chapitres I et II. ".

3. Les conditions dans lesquelles sont notifiées les décisions administratives sont, en elles-mêmes, sans incidence sur leur légalité. Par suite, M. et Mme C... ne sauraient utilement se prévaloir des dispositions précitées de l'article L. 613-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre des arrêtés attaqués.

4. En deuxième lieu, par un arrêté du 30 septembre 2022, régulièrement publié le 3 octobre 2022 au recueil des actes administratifs de la préfecture des Hautes-Pyrénées n°65-2022-247, le préfet de ce département a donné délégation à Mme Nathalie Guillot-Juin, secrétaire générale de la préfecture des Hautes-Pyrénées, et signataire des arrêtés attaqués, à l'effet de signer tous arrêtés à l'exception de certaines décisions au nombre desquelles ne figurent pas les décisions attaquées. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de ces arrêtés manque en fait.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. / Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée. (...). ".

6. D'une part, il ressort de l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 22 juin 2022 que l'état de santé de M. C... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et qu'au vu des éléments du dossier et à la date de l'avis, son état de santé peut lui permettre de voyager sans risque vers son pays d'origine. M. C... produit un certificat médical d'un médecin interne au centre hospitalier de Bigorre en date du 19 octobre 2018 indiquant qu'" il présente une affection relevant d'une ALD nécessitant des traitements en hospitalisation toutes les 4 semaines, traitement consistant en une immunothérapie n'existant pas dans tous les pays ". Il produit également un certificat médical d'un médecin généraliste du 26 octobre 2022 dans lequel ce praticien précise que selon les informations qu'il a récupérées, aucune prise en charge ne semble possible en Albanie tant sur le plan des examens spécifiques que sur le plan du traitement. Toutefois, ces seuls certificats médicaux, qui ne précisent pas de manière circonstanciée sur quels éléments ils se fondent pour affirmer que le traitement de l'intéressé n'est pas disponible en Albanie, ne permettent pas de remettre en cause l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration selon lequel eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé en Albanie, M. C... peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Par suite, le moyen tiré de ce que le refus de séjour pris à l'encontre de M. C... méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

7. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme C... aurait sollicité un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou que les services préfectoraux auraient examiné d'office si elle avait droit à un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions. Par suite, Mme C... ne peut utilement se prévaloir de ce que le refus d'admission au séjour pris à son encontre méconnaitrait l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. En quatrième lieu, dès lors que Mme C... n'a présenté aucune demande de titre de séjour en tant qu'étranger malade, les moyens tirés de ce que la situation de Mme C... a été examinée sans avis médical du collège des médecins de l'OFII et que M. C... a droit à un titre de séjour en tant qu'accompagnant d'un étranger malade, sont inopérants.

9. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".

10. M. et Mme C..., nés respectivement en 1958 et en 1960, sont entrés régulièrement en France le 2 janvier 2017. Ils ont donc vécu la majeure partie de leur vie en Albanie où une de leur fille réside encore. M. et Mme C... n'allèguent ni n'établissent l'intensité, l'ancienneté et la stabilité de leurs conditions d'existence et de leur insertion dans la société française au sens des dispositions précitées de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ne prévoient pas spécifiquement les conditions d'attribution d'un titre de séjour " accompagnant malade ". Par suite, compte tenu des conditions de séjour en France des appelants, le préfet des Hautes-Pyrénées n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en prenant à leur encontre une décision de refus de séjour.

11. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) ; 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...). ".

12. Eu égard à ce qui a été dit au point 6, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de M. C... méconnaitrait les dispositions précitées de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté.

13. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande. Leurs requêtes doivent donc être rejetées, en toutes leurs conclusions.

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. C... et de Mme C... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à Mme B... C... et au ministère de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet des Hautes-Pyrénées.

Délibéré après l'audience du 27 juin 2024 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Claude Pauziès, président,

Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,

Mme Edwige Michaud, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juillet 2024.

La rapporteure,

Edwige MichaudLe président,

Jean-Claude Pauziès

La greffière,

Marion Azam Marche

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 24BX00297,24BX00298


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 24BX00297
Date de la décision : 04/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PAUZIÈS
Rapporteur ?: Mme Edwige MICHAUD
Rapporteur public ?: M. KAUFFMANN
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS MAUVEZIN SOULIE

Origine de la décision
Date de l'import : 14/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-04;24bx00297 ?
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