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03/07/2024 | FRANCE | N°22BX01754

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 3ème chambre, 03 juillet 2024, 22BX01754


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 13 septembre 2021 par lequel le préfet de la Dordogne lui a ordonné de se dessaisir de toutes les armes de toute catégorie en sa possession et lui a fait interdiction d'acquérir ou de détenir des armes de toute catégorie, avec inscription de cette interdiction au fichier national des interdits d'acquisition et de détention d'armes.



Par un jugement n° 2106017 du 19 avril 202

2, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette demande.



Procédure devant la co...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 13 septembre 2021 par lequel le préfet de la Dordogne lui a ordonné de se dessaisir de toutes les armes de toute catégorie en sa possession et lui a fait interdiction d'acquérir ou de détenir des armes de toute catégorie, avec inscription de cette interdiction au fichier national des interdits d'acquisition et de détention d'armes.

Par un jugement n° 2106017 du 19 avril 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 juin 2022, M. B..., représenté par Me Le Gouill, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 19 avril 2022 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 septembre 2021 du préfet de la Dordogne ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- il ne pouvait être privé du droit de détenir une arme pour la seule infraction commise, à savoir la conduite d'un véhicule en état d'ivresse ; il détient une arme en vue d'exercer la chasse ; il n'est ni violent ni dangereux.

Par un mémoire enregistré le 29 août 2022, le préfet de la Dordogne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par M. B... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 19 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 27 octobre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité intérieure ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy ;

- et les conclusions de Mme Isabelle Le Bris.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 13 septembre 2021, le préfet de la Dordogne a ordonné à M. B... de se dessaisir de toutes les armes de toute catégorie en sa possession et lui a fait interdiction d'acquérir ou de détenir des armes de toute catégorie, avec inscription de cette interdiction au fichier national des interdits d'acquisition et de détention d'armes. M. B... relève appel du jugement du 19 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes de l'article L. 312-11 du code de la sécurité intérieure : " Sans préjudice des dispositions de la sous-section 1, le représentant de l'Etat dans le département peut, pour des raisons d'ordre public ou de sécurité des personnes, ordonner à tout détenteur d'une arme, de munitions et de leurs éléments de toute catégorie de s'en dessaisir (...) ". Aux termes de l'article L. 312-13 du même code : " Il est interdit aux personnes ayant fait l'objet de la procédure prévue à la présente sous-section d'acquérir ou de détenir des armes, munitions et leurs éléments de toute catégorie. / Cette interdiction est levée par le représentant de l'Etat dans le département s'il apparaît que l'acquisition ou la détention d'armes, de munitions et de leurs éléments par la personne concernée n'est plus de nature à porter atteinte à l'ordre public ou à la sécurité des personnes ". Aux termes de l'article L. 313-16 de ce code : " Un fichier national automatisé nominatif recense : 1° Les personnes interdites d'acquisition et de détention d'armes, de munitions et de leurs éléments en application des articles L. 312-10 et L. 313-13 (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 312-67 de ce code: " Le préfet ordonne la remise ou le dessaisissement de l'arme ou de ses éléments dans les conditions prévues aux articles L. 312-7 ou L 312-11 lorsque : (...) 3° Il résulte de l'enquête diligentée par le préfet que le comportement du demandeur ou du déclarant est incompatible avec la détention d'une arme ; cette enquête peut donner lieu à la consultation des traitements automatisés de données personnelles mentionnés à l'article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 (...) ".

3. Pour prendre l'arrêté en litige, le préfet de la Dordogne a considéré que M. B... présentait un risque d'atteinte à l'ordre public ou à la sécurité des personnes en se fondant sur les résultats de l'enquête administrative diligentée par ses soins, et en particulier sur l'enquête de gendarmerie du 30 janvier 2021 dont il ressort, sur la base de la consultation du fichier de traitement des antécédents judiciaires (TAJ), que l'intéressé est défavorablement connu des services de police. Toutefois, si le TAJ consulté le 30 janvier 2021 fait mention de faits de violences et de vol à main armée commis en 2006, 2007 et 2009 alors que M. B... était mineur, de tels faits sont anciens et auraient d'ailleurs dû être effacés du fichier à la date à laquelle il a été consulté. De plus, alors que l'enquête diligentée par la gendarmerie s'est bornée à la seule consultation du TAJ, il ne ressort pas des pièces du dossier que les services préfectoraux auraient pris l'attache du procureur de la République afin de vérifier l'exactitude des mentions figurant sur ce fichier et les suites données aux procédures pénales. Or, le requérant soutient sans être contredit que les faits, mentionnés au TAJ, de vol en bande organisée en 2010, de dégradation de bien d'autrui en 2017 et d'usage illicite de stupéfiants en 2019, n'ont donné lieu à aucune poursuite pénale. Le requérant établit également, par la production du jugement correctionnel du tribunal judiciaire de Nantes du 24 février 2021, qu'il a été entièrement relaxé des poursuites engagées à son encontre à raison de faits, également mentionnés au même fichier, de violences aggravées, violences en réunion, vol et tentative de vol, destruction du bien d'autrui et délit de fuite les 24 et 25 février 2018. Ainsi, au regard des seules infractions poursuivies que le requérant ne conteste pas avoir commises, à savoir des faits de destruction et dégradation de biens publics commis le 5 mai 2013, soit plus de 8 ans avant l'édiction de l'arrêté en litige, et de conduite d'un véhicule sous l'emprise d'un état alcoolique commis le 25 juillet 2019, le préfet de la Dordogne a commis une erreur d'appréciation en considérant qu'au jour de sa décision, l'intéressé constituait un risque d'atteinte à l'ordre public ou à la sécurité des personnes de nature à justifier la mise en œuvre des dispositions précitées du code de la sécurité intérieure.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Dordogne du 13 septembre 2021 lui ordonnant de se dessaisir des armes en sa possession et lui a interdit d'acquérir ou de détenir des armes de toutes catégories.

5. Enfin, M. B... n'ayant pas sollicité, dans le cadre de la présente instance, le bénéfice de l'aide juridictionnelle, ses conclusions tendant à ce qu'une somme soit versée à son conseil sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2106017 du 19 avril 2022 du tribunal administratif de Bordeaux et l'arrêté du préfet de la Dordogne du 13 septembre 2021 sont annulés.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. B... sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Dordogne.

Délibéré après l'audience du 11 juin 2024 à laquelle siégeaient :

M. Laurent Pouget, président,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 juillet 2024.

La rapporteure,

Marie-Pierre Beuve-Dupuy

Le président,

Laurent Pouget La greffière,

Chirine Michallet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 22BX01754


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX01754
Date de la décision : 03/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. POUGET
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre BEUVE-DUPUY
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : LE GOUILL

Origine de la décision
Date de l'import : 07/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-03;22bx01754 ?
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