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27/06/2024 | FRANCE | N°22BX03151

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 5ème chambre, 27 juin 2024, 22BX03151


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler la décision implicite par laquelle le conseil communautaire de la communauté d'agglomération Pays basque a rejeté sa demande d'abrogation partielle de la délibération du 9 novembre 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté d'agglomération Pays basque a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune d'Urrugne.



Par un jugement n° 2002146 du 18 octobre 2022, le tribunal

administratif de Pau a rejeté cette demande.



Procédure devant la cour :



Par ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler la décision implicite par laquelle le conseil communautaire de la communauté d'agglomération Pays basque a rejeté sa demande d'abrogation partielle de la délibération du 9 novembre 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté d'agglomération Pays basque a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune d'Urrugne.

Par un jugement n° 2002146 du 18 octobre 2022, le tribunal administratif de Pau a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 décembre 2022, Mme A... B..., représentée par l'association d'avocats à responsabilité professionnelle individuelle Tejas Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 18 octobre 2022 du tribunal administratif de Pau ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le conseil communautaire de la communauté d'agglomération Pays basque a rejeté sa demande d'abrogation partielle de la délibération du 9 novembre 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté d'agglomération Pays basque a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune d'Urrugne ;

3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Pays Basque la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le classement retenu est entaché d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, les parcelles litigieuses jouxtent des parcelles bâties ; le secteur comporte une trentaine de constructions, les parcelles se situent donc dans une partie urbanisée de la commune et constituent une dent creuse qui doit être comblée ; elles sont desservies par les réseaux ;

- contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, le classement retenu est incohérent avec les orientations du projet d'aménagement et de développement durable (PADD) ; l'axe intitulé " protéger le cadre naturel et patrimonial constitutif d'une identité paysagère unique, depuis la corniche jusqu'à la Rhune ", ne trouve pas application aux parcelles qui sont précisément situées en dehors de cet axe ; elles s'inscrivent au contraire dans l'objectif de densification des dents creuses ;

- le classement retenu est contraire aux dispositions de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme dès lors que les parcelles litigieuses ne présentent aucun potentiel agricole ; elles ne sont pas exploitées et sont inexploitables en raison de leur caractère en pente.

Par un mémoire en défense enregistré le 11 juillet 2023, la communauté d'agglomération Pays Basque, représentée par Me Gauci, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge des appelants la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 3 janvier 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 1er septembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Héloïse Pruche-Maurin ;

- les conclusions de M. Sébastien Ellie ;

- et les observations de Me Gauci représentant la communauté d'agglomération Pays Basque.

Un note en délibéré présentée par le cabinet AARPI Tejas avocats pour Mme B... a été enregistrée le 21 juin 2024.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 29 juin 2015, le conseil municipal de la commune d'Urrugne a prescrit la révision de son plan local d'urbanisme (PLU) et fixé les modalités de la concertation. Par une délibération du 9 novembre 2019, le conseil communautaire de la communauté d'agglomération Pays Basque (CAPB), à qui la compétence avait été transférée, a approuvé la révision du plan local d'urbanisme de la commune d'Urrugne. Par un courrier du 22 juin 2020, reçu par le président de la CAPB le 2 juillet 2020, Mme B..., propriétaire des parcelles cadastrées section BO n°84, 85 et 86 situées au lieu-dit Anxosemebaita à Urrugne, a demandé l'abrogation partielle de cette délibération en tant qu'elle classe ses parcelles en zone agricole. En l'absence de réponse, une décision implicite de rejet du président de la CAPB est née le 2 septembre 2020. Mme B... relève appel du jugement du 18 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande d'annulation de cette décision implicite de rejet.

2. D'une part, aux termes de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. ". Aux termes de l'article L. 151-9 de ce code : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées. ". Aux termes de l'article R. 151-22 du même code : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles ". Il résulte de ces dispositions qu'une zone agricole, dite " zone A " du plan local d'urbanisme a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles.

3. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme, qui ne sont pas liés par les modalités existantes d'utilisation du sol, de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

4. D'autre part, aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique : " L'extension de l'urbanisation se réalise en continuité avec les agglomérations et villages existants./ (...) ". Le V de l'article 42 de la même loi précise que les mots " en continuité avec les agglomérations et villages existants " - qui remplacent les mots : " soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement " s'appliquent " sans préjudice des autorisations d'urbanisme délivrées avant la publication de la présente loi ". Cette modification de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme ne s'applique pas " aux demandes d'autorisation d'urbanisme déposées avant le 31 décembre 2021 ni aux révisions, mises en compatibilité ou modifications de documents d'urbanisme approuvées avant cette date ". La révision en litige ayant été approuvée le 9 novembre 2019, les dispositions du V citées ci-dessus sont applicables en l'espèce. Il résulte des dispositions du premier alinéa de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, dans cette version applicable en l'espèce, que l'extension de l'urbanisation doit se réaliser, dans les communes littorales, soit en continuité avec les agglomérations et les villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. Constituent des agglomérations ou des villages où l'extension de l'urbanisation est possible, au sens et pour l'application de ces dispositions, les secteurs déjà urbanisés caractérisés par un nombre et une densité significatifs de constructions.

5. Mme B... est propriétaire de trois parcelles cadastrées section BO n°84, 85 et 86 situées au lieu-dit Anxosemebaita à Urrugne. Le PLU en litige maintient le classement de la parcelle BO84 en agricole et classe les parcelles BO85 et 86, anciennement classées en zone constructible, en zone agricole. La requérante soutient que ces classements sont entachés d'erreur manifeste d'appréciation, qu'ils sont incohérents avec les orientations du PADD et qu'ils méconnaissent les dispositions de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme dès lors que ces parcelles ne présentent aucun potentiel agricole.

6. Il ressort des pièces du dossier que le PADD fixe comme orientations générales, d'une part, d'assurer la protection du cadre naturel et patrimonial constitutif d'une identité paysagère unique de la corniche jusqu'à La Rhune, en garantissant notamment la préservation des paysages ruraux agricoles et la préservation et la valorisation des ressources naturelles, d'autre part, d'assurer un développement urbain maîtrisé conforme aux obligations de la loi Littoral, et, enfin, de créer les conditions favorables au développement de l'emploi et au développement économique notamment en pérennisant la polyculture et l'élevage comme principal mode d'occupation du territoire communal. Dans le cadre de la première orientation, le PADD prévoit " d'assurer la pérennité des espaces agricoles sur le long terme ", " en maîtrisant l'urbanisation future en s'appuyant sur une optimisation du foncier disponible dans le tissu urbain existant ". Dans le cadre de la deuxième orientation, le PADD prévoit d'axer le développement urbain sur les cinq agglomérations et le village d'Olhette tels que délimités par le rapport de présentation, secteurs dans lesquels les parcelles en litige ne sont pas incluses. Le rapport de présentation indique, pour justifier des choix opérés dans la délimitation des zones agricoles, que le " PLU fait ainsi le choix de reclasser le plus possible des terres aujourd'hui encore considérées comme terres agricoles en zone agricole A ". Plusieurs critères de choix ont guidé ce reclassement au nombre desquels le parcellaire agricole.

7. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles en litige, représentant une surface totale d'environ 10 586 m², sont situées au sud-est du territoire communal, dans un secteur qui s'implante au pied du massif de la Rhune, entre l'agglomération de Bérroueta et le village d'Olhette, tel que définis par le rapport de présentation au sens de la loi Littoral. Si les parcelles BO85 et 68 jouxtent à l'est deux parcelles bâties, elles s'ouvrent au nord, au sud et à l'ouest sur un vaste espace agricole et naturel, dans lequel s'inclut la parcelle BO84, déjà classée en zone A par le précédent PLU et les deux parcelles bâties situées à l'est n'appartiennent pas à un front bâti mais correspondent à des constructions isolées. Ainsi, et contrairement à ce que soutient la requérante, elles ne s'inscrivent ni en continuité de l'urbanisation de Bérroueta et d'Olhette, ni dans un secteur marqué par un nombre et une densité significatifs de constructions dans lequel elles combleraient une dent creuse. S'agissant de leur potentiel agricole, elles ne sont certes pas recensées dans le recensement parcellaire agricole établi en 2016 au titre de la politique agricole commune, mais le vaste secteur agricole dans lequel elles s'insèrent comprend de nombreuses parcelles recensées à ce titre. Il ressort en outre du rapport de présentation que les parcelles BO84 et 85 sont recensées comme étant utilisées par un exploitant agricole. Dans ces conditions, les auteurs du PLU, qui ne sont pas liés par les modalités existantes d'utilisation du sol et qui ont justifié dans le rapport de présentation les choix opérés en matière d'urbanisation du territoire communal et de préservation des secteurs agricoles, n'ont pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en classant les parcelles litigieuses en zone agricole et ce en cohérence avec les orientations générales du PADD. Ils n'ont pas non plus méconnu les dispositions de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme. Par suite, l'ensemble de ces moyens doivent être écartés.

8. Il résulte de tout ce qui précède, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande d'annulation de la décision implicite par laquelle la communauté d'agglomération Pays basque a rejeté sa demande d'abrogation partielle de la délibération du 9 novembre 2019 par laquelle son conseil communautaire a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune d'Urrugne. Par suite, les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme B... doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté d'agglomération Pays Basque, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par Mme B... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme B... une somme de 1 500 euros à verser à la communauté d'agglomération Pays Basque au même titre.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Mme B... versera une somme de 1 500 euros à la communauté d'agglomération Pays Basque au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la communauté d'agglomération Pays Basque.

Une copie en sera adressée à la commune d'Urrugne.

Délibéré après l'audience du 18 juin 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

Mme Karine Butéri, présidente assesseure,

Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 juin 2024.

La rapporteure,

Héloïse Pruche-Maurin

La présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Atlantiques en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 22BX03151


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX03151
Date de la décision : 27/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Héloïse PRUCHE-MAURIN
Rapporteur public ?: M. ELLIE
Avocat(s) : SELARL BASSET & MACAGNO

Origine de la décision
Date de l'import : 07/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-27;22bx03151 ?
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