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18/06/2024 | FRANCE | N°24BX00030

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 4ème chambre, 18 juin 2024, 24BX00030


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 5 mai 2023 par lequel le préfet de la Guadeloupe a rejeté sa demande de titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination.



Par un jugement n° 2300890 du 3 novembre 2023, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour administ

rative d'appel :



Par une requête enregistrée le 6 janvier 2024, et la production de pièces complément...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 5 mai 2023 par lequel le préfet de la Guadeloupe a rejeté sa demande de titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 2300890 du 3 novembre 2023, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour administrative d'appel :

Par une requête enregistrée le 6 janvier 2024, et la production de pièces complémentaires enregistrées le 21 mars 2024, et des pièces complémentaires enregistrées le 24 mai 2024 qui n'ont pas fait l'objet de communication, Mme A..., représentée par Me Navin, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 3 novembre 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 mai 2023 par lequel le préfet de la Guadeloupe a rejeté sa demande de titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Guadeloupe de lui délivrer une carte de séjour temporaire à compter de la date de notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et de mettre en œuvre la procédure d'effacement du signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen dans le délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

S'agissant du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français :

- il doit être justifié de la compétence de l'auteur de l'acte ;

- son droit d'être entendue a été méconnu ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnait sa situation familiale et personnelle ;

- la décision méconnait l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision méconnait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

S'agissant du signalement aux fins de non admission dans le fichier d'information Schengen des personnes recherchées :

- la décision est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

Par ordonnance du 27 mars 2024, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 13 mai 2024.

Le préfet de la Guadeloupe a produit un mémoire en défense enregistré le 28 mai 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Martin,

- et les observations de Me Navin, représentant Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante haïtienne, née le 25 février 2004, est entrée en France le 16 mars 2019 selon ses dires. Elle a été prise en charge, en tant que mineure puis en qualité de jeune majeure, par les services de la maison départementale de l'enfance à compter du 20 janvier 2022. Le 26 juillet 2022, elle a sollicité son admission au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 5 mai 2023, le préfet de la Guadeloupe a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée. Mme A... relève appel du jugement du 3 novembre 2023 par lequel le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 mai 2023 portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Il ressort des pièces du dossier que Mme A..., entrée en France en 2019, à l'âge de 15 ans, a bénéficié d'une prise en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance du département de la Guadeloupe en qualité de mineure étrangère isolée, puis de jeune majeure du 20 janvier 2022 au 31 juillet 2024. Depuis son entrée en France, elle a été scolarisée pour suivre des études dans un cursus professionnel " hygiène-propreté-stérilisation " dans lequel elle a obtenu d'excellents résultats tant auprès des enseignants que des professionnels auprès desquels elle a suivi des stages en entreprise. Elle a fait preuve d'un excellent comportement, et a su s'intégrer malgré ses difficultés familiales. Alors même qu'elle est célibataire sans charge de famille, elle fait valoir qu'elle n'a plus de contact, ni avec sa mère, qui aurait quitté Haïti pour tenter d'émigrer aux Etats-Unis d'Amérique, ni avec son père, résidant à Saint-Martin et qui, sollicité par l'équipe éducative, a opposé un refus de lui venir en aide. Ainsi, dans les circonstances de l'espèce, alors qu'elle justifie être isolée dans son pays d'origine et compte tenu de la durée de sa présence en France et de la qualité de son insertion, le préfet de la Guadeloupe a commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de délivrer à Mme A... un titre de séjour. Celle-ci est ainsi fondée à demander l'annulation de la décision de refus de titre de séjour et, par voie de conséquence, de la mesure d'éloignement prise à son encontre sur le fondement de ce refus de titre de séjour.

3. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du préfet de la Guadeloupe du 5 mai 2023.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

4. Eu égard au motif d'annulation retenu, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet de la Guadeloupe, en l'absence de changement de circonstances de droit ou de fait y faisant obstacle, de délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à Mme A... dans un délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

5. L'arrêté en litige ne comporte aucune prescription de signalement de Mme A... au fichier Schengen. Par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de procéder à l'effacement de son signalement dans ce fichier ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros que demande Mme A... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2300890 du tribunal administratif de la Guadeloupe du 3 novembre 2023 et l'arrêté du préfet de la Guadeloupe du 5 mai 2023 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Guadeloupe de délivrer à Mme A... une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 200 euros à Mme A... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Guadeloupe.

Délibéré après l'audience du 28 mai 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,

Mme Pauline Reynaud, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 juin 2024.

La rapporteure,

Bénédicte MartinLa présidente,

Evelyne BalzamoLe greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 24BX00030


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24BX00030
Date de la décision : 18/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Bénédicte MARTIN
Rapporteur public ?: Mme GAY
Avocat(s) : NAVIN

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-18;24bx00030 ?
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