Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 2 avril 2021 par laquelle la préfète de la Gironde a rejeté sa demande d'agrément en qualité d'agent de sûreté aéroportuaire et d'enjoindre sous astreinte à la préfète de lui délivrer l'agrément sollicité, ainsi que de retirer la décision de refus du 2 juillet 2021 prise après réexamen.
Par un jugement n° 2102621 du 27 janvier 2022, le tribunal a requalifié ses conclusions à fin d'annulation comme dirigées contre la décision de la préfète de la Gironde du 2 juillet 2021 et a rejeté la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 25 mars 2022 et un mémoire enregistré le 23 janvier 2023, M. A..., représenté par Me Stinco, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision de la préfète de la Gironde du 2 juillet 2021 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer l'agrément sollicité sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision du 2 juillet 2021 est insuffisamment motivée ;
- il a fourni à son cousin une somme de 1 000 euros à sa demande sans avoir aucune connaissance de l'existence d'un trafic de drogue, il n'a pas été placé en garde à vue du 18 au 22 février 2019, mais seulement durant quelques heures, et il a été remis en liberté après son audition ; l'ordonnance du juge d'instruction renvoyant l'affaire devant le tribunal correctionnel de Pontoise démontre que contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, aucune complicité dans une affaire de trafic de stupéfiants ne lui est imputable ; si sa compagne a déposé plainte à son encontre pour violences conjugales, elle a menti sous le coup de la colère, ainsi qu'elle en atteste ; au demeurant, ces faits matériellement inexacts étaient anciens à la date de la décision, et il a seulement été condamné le 13 avril 2017 à une amende délictuelle de 600 euros sans mention au bulletin n° 2 du casier judiciaire ; ainsi, la matérialité des faits sur lesquels la décision est fondée n'est pas établie ;
- il a toujours été irréprochable dans l'exercice de ses fonctions, ainsi qu'en attestent plusieurs de ses collègues, et un nouveau contrat lui a été proposé le 4 février 2022 par la société ICTS chargée du recrutement des agents de sûreté de l'aéroport de Mérignac ; dès lors qu'il ne représente aucun risque d'atteinte à la sûreté de l'Etat, à la sécurité publique ou à la sécurité des personnes, la décision est entachée d'erreur d'appréciation.
Par des mémoires en défense enregistrés le 22 décembre 2022 et le 24 mai 2023, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- la décision du 2 juillet 2021, qui a abrogé et remplacé celle du 2 avril 2021, est suffisamment motivée ;
- l'enquête administrative a mis en évidence, d'une part, une condamnation de M. A... à une peine de 600 euros d'amende pour violences par concubin ayant entraîné une ITT de 3 jours, et d'autre part, sa mise en garde à vue du 18 au 22 février 2019 en qualité de complice dans une affaire d'acquisition non autorisée de stupéfiants ; l'ordonnance de non-lieu partiel produite, non datée mais nécessairement postérieure au 5 mai 2021, est volontairement tronquée ; le courrier de la compagne de M. A... ne dément pas les violences, mais les confirme ; ainsi, la décision n'est entachée ni d'erreur de droit, ni d'erreur d'appréciation.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 mars 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code des transports ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- les conclusions de Mme Isoard, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par une décision du 2 avril 2021, la préfète de la Gironde a rejeté la demande d'agrément en qualité d'agent de sûreté aéroportuaire présentée au bénéfice de M. A... par son employeur, la société Hub Safe Régional. M. A... a demandé l'annulation de cette décision devant le tribunal administratif de Bordeaux, ainsi que la suspension de son exécution. Par une ordonnance n° 2102622 du 22 juin 2021, le juge des référés a fait droit à cette dernière demande au motif que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision était de nature à créer un doute sérieux sur sa légalité. Par une décision du 2 juillet 2021, la préfète de la Gironde a rejeté à nouveau la demande de la société Hub Safe Régional, et par un jugement
du 27 janvier 2022 dont M. A... relève appel, le tribunal, après avoir requalifié les conclusions à fin d'annulation comme dirigées contre la décision du 2 juillet 2021 qui s'était substituée à celle
du 2 avril 2021, les a rejetées.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / (...) / 7° Refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions du a au f du 2° de l'article L. 311-5 ; / (...). " Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée (...) doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".
3. La décision du 2 juillet 2021 vise les dispositions de l'article L. 6342-4 du code des transports qui prévoient que les agréments des agents de sûreté des aéroports sont refusés lorsque la moralité de la personne ou son comportement ne présentent pas les garanties requises, relève que M. A... a été condamné le 13 avril 2017 pour des violences aggravées ayant entraîné une incapacité temporaire de travail de trois jours et qu'il a été placé en garde à vue dans une affaire d'acquisition de cocaïne, et conclut à une incompatibilité avec l'exercice d'une mission de sûreté aéroportuaire. Cette motivation, qui précise la nature des faits sur lesquels la préfète s'est fondée pour rejeter la demande d'agrément, est suffisante au regard des dispositions précitées.
4. En second lieu, aux termes de l'article L. 6342-4 du code des transports : " (...) / II. - Les opérations d'inspection-filtrage des personnes, des objets qu'elles transportent et des bagages ainsi que les opérations d'inspection des véhicules peuvent être réalisées, sous le contrôle des officiers de police judiciaire et des agents des douanes, par des agents de nationalité française ou ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, désignés par les entreprises ou organismes mentionnés à l'article L. 6341-2 ou les entreprises qui leur sont liées par contrat. / Ces agents doivent avoir été préalablement agréés par le représentant de l'Etat dans le département et le procureur de la République. (...) / (...) IV. - Les agréments prévus au II sont précédés d'une enquête administrative donnant lieu, le cas échéant, à consultation du bulletin n° 2 du casier judiciaire et des traitements automatisés de données à caractère personnel gérés par les services de police et de gendarmerie nationales relevant des dispositions de l'article 31 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, à l'exception des fichiers d'identification. / (...) / Les agréments sont refusés ou retirés lorsque la moralité de la personne ou son comportement ne présentent pas les garanties requises au regard de la sûreté de l'Etat, de la sécurité publique, de la sécurité des personnes ou de l'ordre public ou sont incompatibles avec l'exercice des missions susmentionnées. / (...). "
5. D'une part, M. A... produit lui-même le relevé de condamnation pénale indiquant qu'il a été reconnu coupable et condamné, par un jugement du tribunal correctionnel de Bordeaux du 13 avril 2017, à une amende délictuelle de 600 euros avec sursis pour des faits de violence sur conjoint commis le 26 février 2017. Contrairement à ce que soutient le requérant, le courrier de sa compagne, avec laquelle il vit toujours, exprimant des regrets pour avoir appelé la police compte tenu des conséquences de l'incident sur la situation professionnelle de son conjoint, n'indique pas qu'elle aurait menti, mais précise que lors d'une dispute, M. A... l'a giflée, bousculée et secouée à plusieurs reprises. Ainsi, la matérialité des violences conjugales est établie.
6. D'autre part, le rapport de l'enquête administrative réalisée par les services de la police aux frontières produit par l'administration en première instance indique que M. A... a été placé en garde à vue en 2019 en qualité de complice dans une affaire d'acquisition non autorisée de stupéfiants (cocaïne) en provenance de Martinique. Si M. A... fait valoir qu'il se serait trouvé impliqué contre sa volonté dans un trafic de stupéfiants organisé par son cousin et qu'il aurait seulement, par naïveté, dépanné ce dernier d'une somme d'argent sans poser aucune question, il ne le démontre pas en se bornant à produire un extrait non daté d'une ordonnance de non-lieu partiel qui ne comporte aucun élément le concernant. En outre, le requérant produit une délibération de la commission nationale d'agrément et de contrôle du conseil national des activités privées de sécurité du 9 décembre 2020 lui refusant le renouvellement de sa carte professionnelle d'agent de sécurité pour les mêmes motifs que ceux retenus par la préfète en relevant, notamment, qu'il avait été placé en garde à vue pour avoir envoyé, à la demande de son cousin, une somme d'argent à une personne chargée de récupérer un colis contenant de la cocaïne. Dans ces circonstances, l'inexactitude des faits de participation à un trafic de stupéfiants reprochés par la préfète de la Gironde ne peut être regardée comme établie.
7. Si les faits isolés de violences conjugales étaient relativement anciens à la date de la décision contestée, ceux de complicité dans un trafic de stupéfiants étaient récents, et révèlent un comportement et une moralité qui ne présentent pas les garanties requises au sens des dispositions de l'article L. 6342-4 du code des transports, sans que M. A... puisse utilement se prévaloir ni de l'absence de poursuites pénales à son encontre, ni de son professionnalisme attesté par plusieurs collègues, ni d'une nouvelle proposition d'embauche par la société ICTS chargée du recrutement des agents de sûreté de l'aéroport de Bordeaux Mérignac. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision du 2 juillet 2021 serait entachée d'erreur d'appréciation doit être écarté.
8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des
outre-mer. Une copie en sera adressée au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 7 mai 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, présidente,
Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,
M. Olivier Cotte, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mai 2024.
La rapporteure,
Anne C...
La présidente,
Catherine GiraultLa greffière,
Virginie Guillout
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22BX00943