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23/05/2024 | FRANCE | N°23BX01504

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 1ère chambre, 23 mai 2024, 23BX01504


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de la Martinique d'annuler d'une part, l'arrêté n° PC 972209 19BR045 du 4 octobre 2019 par lequel le maire de la commune de Fort-de-France a accordé à la SASU M.A.T. un permis de construire en vue de la démolition d'une maison d'habitation et de l'édification d'une résidence de deux bâtiments comportant 30 logements de type F2 à F4 sur une parcelle située quartier Beauséjour, d'autre part, l'arrêté n° P

C 972209 19BR045 M02 du 27 janvier 2022 par lequel le maire de la commune de Fort-de-Franc...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de la Martinique d'annuler d'une part, l'arrêté n° PC 972209 19BR045 du 4 octobre 2019 par lequel le maire de la commune de Fort-de-France a accordé à la SASU M.A.T. un permis de construire en vue de la démolition d'une maison d'habitation et de l'édification d'une résidence de deux bâtiments comportant 30 logements de type F2 à F4 sur une parcelle située quartier Beauséjour, d'autre part, l'arrêté n° PC 972209 19BR045 M02 du 27 janvier 2022 par lequel le maire de la commune de Fort-de-France a accordé à la SASU Résidence Florial, qui a bénéficié du transfert du permis de construire délivré le 4 octobre 2019 à la SASU M.A.T., un permis de construire modificatif en vue de porter le nombre total de logement à 42 logements de type F2 à F4 et, enfin, l'arrêté n° PC 972209 19BR045 M02 du 20 février 2022 par lequel le maire de la commune de Fort-de-France a rectifié l'arrêté du 27 janvier 2022.

Par un jugement n° 2200421 du 4 mai 2023, le tribunal administratif de La Martinique a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 juin 2023, M. et Mme B..., représentés par Me Monotuka, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 4 mai 2023 du tribunal administratif de La Martinique ;

2°) d'annuler les arrêtés du maire de la commune de Fort-de-France du 4 octobre 2019, 27 janvier 2022 et 20 février 2022 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Fort-de-France et de la SASU M.A.T. une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ces permis ont été délivrés en méconnaissance des articles A. 431-5 et A. 431-4 du code de l'urbanisme ;

- ils méconnaissent les dispositions de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme ;

- les demandes de modification ont méconnu l'article A431-7 du code de l'urbanisme ;

- ils méconnaissent les articles R. 431-8 et R. 431-10 du code de l'urbanisme dès lors que la notice architecturale, les plans et les documents graphiques sont insuffisants pour appréhender l'insertion du projet et son impact sur les lieux ;

- ils ont été délivrés en méconnaissance de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme ;

- ils n'ont pas respecté les dispositions des articles R. 424-15 et A421-7 du code de l'urbanisme en l'absence de preuve de l'affichage en mairie et sur le terrain ;

- ils subissent un trouble de voisinage et les riverains ont exprimé leur opposition à ce projet ;

- ils sont dans l'impossibilité de communiquer le dossier de demande de modification déposé le 15 juillet 2021 dès lors que la mairie leur a répondu que ce dossier avait disparu ; le tribunal aurait dû demander aux parties adverses la production de ce document.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 octobre 2023, la société résidence Florial, représentée par Me Especel, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge des époux B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors que la notification prévue par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme a été faite à une adresse erronée ;

- les conclusions dirigées contre le permis du 4 octobre 2019 sont tardives ;

- les requérants ne justifient pas d'un intérêt à agir contre le permis modificatif dès lors qu'ils n'expliquent pas en quoi ce permis leur fait grief dès lors que l'emprise du projet n'augmente que de 7,6% ;

- les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 20 décembre 2023, la commune de Fort-de-France, représentée par Me Nicolas, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 8 000 euros soit mise à la charge des époux B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions dirigées contre le permis délivré en 2019 sont irrecevables dès lors que les requérants ne justifient pas de la notification intégrale du recours administratif préalable et du recours contentieux ;

- les requérants ne justifient pas d'un intérêt à agir contre les décisions attaquées dès lors que leurs allégations ne sont pas étayées par des commencement de preuve ;

- les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Christelle Brouard-Lucas,

- les conclusions de M. Michaël Kauffmann, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SASU M.A.T. a déposé le, 1er avril 2019, une demande de permis de construire en vue de la démolition d'une maison d'habitation et de l'édification d'une résidence de deux bâtiments comportant 30 logements de type F2 à F4 sur une parcelle située quartier Beauséjour sur le territoire de la commune de Fort-de-France. Ce permis lui a été accordé par un arrêté du 4 octobre 2019 du maire de Fort-de-France. Par un nouvel arrêté du 20 octobre 2020, il a autorisé le transfert du permis de construire au profit de la SASU Résidence Florial. Cette société a déposé, le 15 juillet 2021, une demande de permis modificatif afin de transformer les logements privés prévus par le permis initial en logements sociaux et de porter à un total de 42 le nombre de logements du projet. Le permis modificatif sollicité a été délivré par un arrêté du 27 janvier 2022, rectifié par un nouvel arrêté du 20 février 2022. Les époux B..., voisins du projet, ont demandé au tribunal administratif de la Martinique d'annuler les arrêtés du 4 octobre 2019, du 27 janvier 2022 et du 20 février 2022. Ils relèvent appel du jugement du 4 mai 2023 par lequel le tribunal a rejeté leurs demandes.

Sur la régularité du jugement :

2. Si en faisant valoir que le tribunal aurait dû demander directement aux parties adverses le versement du dossier de demande de permis de construire modificatif, les requérants ont entendu contester la régularité du jugement, il ressort des pièces du dossier de première instance que le tribunal a également adressé cette demande à la commune de Fort-de-France. En outre, le jugement n'est pas fondé sur cette pièce ou son absence de communication. Par suite ce moyen doit être écarté.

Sur la légalité des décisions attaquées :

3. En premier lieu, les époux B... se bornent à reprendre en appel, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer utilement la réponse qui a été apportée par le tribunal administratif, les moyens tirés de ce que les demandes de permis de construire initiale et de modification d'un permis de construire déposées par la SASU M.A.T. et la SASU Résidence Florial n'étaient pas conformes aux dispositions des articles A. 431-4 et A. 431-5 du code de l'urbanisme. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges aux points 2 et 3 du jugement.

4. En deuxième lieu, aux termes de A431-7 du code de l'urbanisme : " La demande de modification d'un permis de construire en cours de validité est établie conformément au formulaire enregistré par le secrétariat général pour la modernisation de l'action publique sous le numéro Cerfa 13411 ".

5. Il ressort des pièces du dossier que le formulaire joint à la demande de permis de construire modificatif déposée le 15 juillet 2021 par la société pétitionnaire a été établi sur un formulaire portant le numéro Cerfa 13411. Par suite, ce moyen manque en fait.

6. En troisième lieu, en se bornant à citer les dispositions de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme et à soutenir qu'elles ont été méconnues par les permis de construire attaqués, les requérants n'assortissent pas ce moyen des précisions suffisantes pour permettre à la cour d'en apprécier le bien-fondé.

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article R* 431-8 du code de l'urbanisme " Le projet architectural comprend une notice précisant : 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; d) Les matériaux et les couleurs des constructions ; e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement ". Aux termes de l'article R* 431-10 de ce code : " Le projet architectural comprend également : a) Le plan des façades et des toitures ; lorsque le projet a pour effet de modifier les façades ou les toitures d'un bâtiment existant, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; b) Un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain ; lorsque les travaux ont pour effet de modifier le profil du terrain, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse. "

8. Il ressort du dossier de demande des permis de construire initial et modificatif en litige qu'ils comportaient une notice descriptive suffisamment précise, complétée du plan de masse, de plans des façades et en coupe ainsi que de documents graphiques portant sur l'insertion du projet et son impact visuel et de photographies de l'environnement proche et lointain, permettant au service instructeur de porter une appréciation sur ces projets. Ainsi, et alors que les requérants se bornent à soutenir de manière générale que ces dispositions ont été méconnues, sans aucune précision sur les insuffisances alléguées de la notice architecturale et des plans figurant dans les dossiers de demande, le moyen tiré de ce que les dossiers de permis de construire aurait été incomplets au regard de ces dispositions doit être écarté.

9. En cinquième lieu, comme l'ont retenu les premiers juges, en se bornant à reproduire en intégralité les dispositions de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme et à soutenir que le projet a méconnu les dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords, sans préciser en quoi le projet méconnaîtrait ces dispositions, les requérants n'ont pas assorti le moyen ainsi soulevé des précisions suffisantes pour permettre au juge d'en apprécier le bien-fondé. Il doit, par suite, être écarté.

10. En sixième lieu, ainsi que l'ont retenu les premiers juges, les circonstances que les arrêtés attaqués des 4 octobre 2019, 27 janvier 2022 et 20 février 2022 n'auraient pas fait l'objet des formalités d'affichage en mairie prévues à l'article R. 424-15 du code de l'urbanisme et que la société pétitionnaire n'aurait pas procédé à un affichage régulier du permis de construire sur le terrain d'assiette du projet sont sans incidence sur la légalité des permis de construire attaqués. Par suite, ce moyen doit être écarté comme inopérant.

11. Enfin, dès lors que les requérants n'invoquent la méconnaissance d'aucune disposition légale ou règlementaire par le projet, la circonstance que cette construction serait à l'origine pour eux et les résidents des parcelles voisines de troubles de voisinage, de nuisances visuelles, sonores et de pollutions de toutes sortes ne peut qu'être écarté. Il en est de même de la circonstance que les riverains se sont mobilisés contre ce projet qui " altèrerait tant ces êtres humains que leur environnement ".

12. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées en défense, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de La Martinique a rejeté leurs demandes dirigées contre les arrêtés des 4 octobre 2019, 27 janvier 2022 et 20 février 2022 du maire de Fort-de-France.

Sur les frais liés au litige :

13. Parties perdantes à l'instance, M. et Mme B... ne peuvent voir accueillies leurs conclusions présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

14. Il y a lieu, en revanche, de mettre à leur charge la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Fort-de-France et la somme de 1 500 euros à verser à la société résidence Florial sur le fondement de ces dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.

Article 2 : M. et Mme B... verseront à la commune de Fort-de-France la somme de 1 500 euros et à la société résidence Florial la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et Mme C... B..., à la commune de Fort-de-France, à la SASU M.A.T et à la société résidence Florial.

Délibéré après l'audience du 2 mai 2024, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Claude Pauziès, président,

Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,

Mme Edwige Michaud, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 mai 2024.

La rapporteure,

Christelle Brouard-LucasLe président,

Jean-Claude Pauziès

La greffière,

Marion Azam Marche

La République mande et ordonne au préfet de La Martinique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23BX01504 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23BX01504
Date de la décision : 23/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PAUZIÈS
Rapporteur ?: Mme Christelle BROUARD-LUCAS
Rapporteur public ?: M. KAUFFMANN
Avocat(s) : MONOTUKA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-23;23bx01504 ?
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