Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 31 mars 2023 par lequel le préfet de la Corrèze lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an.
Par un jugement n° 2300773 du 15 juin 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 23 août 2023, M. A..., représenté par Me Akakpovie, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 15 juin 2023 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges ;
2°) d'annuler l'arrêté du 31 mars 2023 du préfet de la Corrèze ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Corrèze de réexaminer sa situation dans un délai de tente jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir et de " régulariser sa situation " dans un délai de sept jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le tribunal n'a pas répondu à son moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles L. 611-1 et L. 542-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) ait statué sur son recours dirigé contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) ; il n'est pas établi que la CNDA avait statué sur ce recours à la date de l'arrêté en litige ;
- il n'a pas bénéficié du droit d'être entendu avant l'édiction de l'obligation de quitter le territoire français ;
- les décisions fixant le pays de renvoi et lui faisant interdiction de retour sur le territoire français sont privées de base légale.
Par ordonnance du 5 février 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 20 février 2024.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 septembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant guinéen né le 1er mai 1992, est entré en France en juin 2021 et a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 7 mars 2022. Par un arrêté du 31 mars 2023, le préfet de la Corrèze lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an. M. A... relève appel du jugement du 15 juin 2023 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il résulte de l'examen du jugement attaqué que le premier juge s'est prononcé, au point 13 du jugement attaqué, sur le moyen soulevé par M. A... tiré de la méconnaissance des dispositions combinées des articles L. 611-1 4° et L. 542-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Contrairement à ce que soutient le requérant, le jugement n'est ainsi pas entaché d'une insuffisance de motifs.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 542-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " En l'absence de recours contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides dans le délai prévu à l'article L. 532-1, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin à la notification de cette décision. Lorsqu'un recours contre la décision de rejet de l'office a été formé dans le délai prévu à l'article L. 532-1, le droit du demandeur de se maintenir sur le territoire français prend fin à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile ou, s'il est statué par ordonnance, à la date de la notification de celle-ci. ". L'article L. 542-4 du même code dispose : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 542-2 et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français ". Enfin, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / (...) / 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, à moins qu'il ne soit titulaire de l'un des documents mentionnés au 3° ".
4. M. A... soutient qu'à la date à laquelle l'arrêté en litige a été édicté, la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) n'avait pas statué sur son recours dirigé contre la décision de l'OFPRA du 7 mars 2022 rejetant sa demande d'asile. Le préfet de la Corrèze a toutefois produit devant la cour la fiche " Telemofpra " relative à la demande d'asile de M. A..., dont il ressort que la CNDA a statué sur son recours par une décision lue en audience publique le 10 mars 2023. Il ressort ainsi des pièces du dossier que ce dernier ne bénéficiait plus, à la date du 31 mars 2023, du droit de se maintenir en France durant l'examen de son recours par cette juridiction. Il n'est dès lors pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance des dispositions citées au point précédent.
5. En deuxième lieu, lorsqu'il sollicite la délivrance du statut de réfugié, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de rejet de sa demande, il pourra faire l'objet, le cas échéant, d'une mesure d'éloignement du territoire français avec ou sans délai de départ volontaire et d'une interdiction de retour. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Le droit d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne la décision prise sur sa demande, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ou de compléter ses observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français, sur l'octroi ou non d'un délai de départ volontaire, sur la fixation du pays de destination et sur l'interdiction de retour, lesquels sont pris concomitamment et en conséquence du refus de la qualité de réfugié. Par suite, dans la mesure où M. A... a pu être entendu à l'occasion de l'examen de sa demande de reconnaissance de sa qualité de réfugié et dès lors que la décision portant obligation de quitter le territoire français fait suite au constat que la reconnaissance du statut de réfugié lui a été définitivement refusée, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu doit être écarté.
6. En dernier lieu, dès lors que le présent arrêt écarte les moyens présentés au soutien des conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français, les moyens tirés de ce que la décision fixant le pays de renvoi et l'interdiction de retour sur le territoire français seraient privées de base légale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ne peuvent qu'être écarté.
7. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Corrèze du 31 mars 2023. Ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, par suite, être accueillies.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Corrèze.
Délibéré après l'audience du 19 mars 2024 à laquelle siégeaient :
M. Laurent Pouget, président,
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 avril 2024.
La rapporteure,
Marie-Pierre Beuve-Dupuy
Le président,
Laurent Pouget Le greffier,
Anthony Fernandez
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 23BX02315