Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... D... B... a demandé au tribunal administratif de Limoges, d'une part d'annuler l'arrêté du 31 mars 2023 par lequel le préfet de la Haute-Vienne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé l'Algérie comme pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français, d'autre part d'annuler l'arrêté du même jour l'assignant à résidence.
Par un jugement n° 2300510, 2300511 en date du 5 avril 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Limoges a renvoyé en collégiale la demande concernant le refus de séjour, et annulé les autres décisions.
Par un jugement du 20 juin 2023, le tribunal a rejeté la demande d'annulation du refus de titre de séjour.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 3 juillet 2023, M. C... B..., représenté par Me Duponteil, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Limoges du 20 juin 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 31 mars 2023 du préfet de la Haute-Vienne en tant qu'il lui refuse un titre de séjour ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un certificat de résidence dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le refus de séjour est insuffisamment motivé en ce qu'il se borne à rappeler son casier judiciaire sans tenir compte de ses efforts pour éviter le renouvellement des faits reprochés ;
- l'arrêté méconnaît les dispositions du 4° et du 5° de l'article 6 de l'accord
franco-algérien, alors qu'il est père d'une enfant française, qu'il exerce son droit de visite et participe à son entretien lorsqu'il est en situation régulière, et que l'unique condamnation dont il a fait l'objet ne suffit pas à caractériser une menace pour l'ordre public ; il a travaillé en intérim et ne manquera pas de trouver un emploi quand il aura un titre de séjour, comme en témoigne la promesse d'embauche obtenue ;
- l'arrêté est entaché d'une erreur d'appréciation de sa situation personnelle et familiale au regard des stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors qu'il réside en France depuis 2008 et y vit avec toute sa famille.
M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 27 juillet 2023.
Par un mémoire enregistré le 12 octobre 2023, le préfet de la Haute-Vienne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens ne sont pas fondés
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien né en 1995, est entré en France en 2008. Par un arrêté du 9 avril 2014, le préfet de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français. Si cette mesure d'éloignement a été annulée par jugement du 11 février 2015 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse, les conclusions dirigées contre la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour ont été rejetées par une formation collégiale par jugement du 27 août 2015, confirmé par un arrêt du 3 mai 2016 de la cour administrative d'appel de Bordeaux. De novembre 2016 à novembre 2019, M. B... s'est vu délivrer des certificats de résidence en qualité de père d'une fille de nationalité française, Kaïna, née le 21 juillet 2014, qu'il a reconnue le 28 août 2014. Le 26 avril 2021, il a été placé en détention provisoire pour des faits de violences. Le 5 mai 2021, il a fait l'objet d'un arrêté par lequel le préfet de la
Haute-Vienne lui a fait obligation de quitter le territoire français et a prononcé à son encontre une interdiction de retour d'une durée de deux ans. Libéré le 13 octobre 2021, M. B... a demandé, le 14 juin 2022, la délivrance d'un certificat de résidence d'un an en qualité de père d'une fille française. Après que, par un avis du 7 décembre 2022, la commission du titre de séjour s'est prononcée en défaveur de la délivrance d'un titre de séjour, la préfète de la Haute-Vienne a, par un arrêté du 31 mars 2023, refusé de lui délivrer le certificat de résidence sollicité, assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français sans délai, fixé le pays de renvoi et prononcé une interdiction de retour sur le territoire français de deux ans, en assignant l'intéressé à résidence. Par un jugement n° 2300510,2300511 en date du 5 avril 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Limoges a renvoyé en collégiale la demande concernant le refus de séjour, et annulé les autres décisions en retenant une exception d'illégalité du refus de titre de séjour. Par un jugement du 20 juin 2023, le tribunal a rejeté la demande d'annulation du refus de titre de séjour. M. B... relève appel de ce dernier jugement.
2. En premier lieu, M. B... fait valoir que le refus de séjour serait insuffisamment motivé en ce qu'il n'a pas pris en compte ses efforts d'insertion. Cependant, l'arrêté contesté comporte l'énoncé de la situation familiale de l'intéressé, les motifs pour lesquels il est défavorablement connu des services de police comme étant l'auteur de nombreux délits, tels qu'appels téléphoniques malveillants réitérés, vol à l'étalage, violence ayant entraîné une incapacité de travail n'excédant pas 8 jours, détention frauduleuse de documents administratifs, non représentation d'enfant à une personne ayant le droit de le réclamer, refus par le conducteur d'un véhicule d'obtempérer à une sommation de s'arrêter, conduite sans permis, et mentionne enfin sa condamnation par le tribunal correctionnel de Limoges à une peine de quatre mois d'emprisonnement avec sursis pour des faits de violence suivie d'une incapacité n'excédant pas huit jours par une personne étant ou ayant été conjoint, de maintien irrégulier sur le territoire français après rétention ou assignation à résidence d'un étranger ayant fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français et de fourniture d'identité imaginaire pouvant provoquer des mentions erronées au casier judiciaire. Dans ces conditions, l'intéressé était en mesure de connaître les motifs conduisant le préfet à le regarder comme constituant une menace pour l'ordre public et de les contester au fond, ce qui n'affecte pas la régularité de la motivation.
3. En second lieu, l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 stipule que : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 4) au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins. Lorsque la qualité d'ascendant direct d'un enfant français résulte d'une reconnaissance de l'enfant postérieure à la naissance, le certificat de résidence d'un an n'est délivré au ressortissant algérien que s'il subvient à ses besoins depuis sa naissance ou depuis au moins un an ; / 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ". Ces stipulations ne privent pas l'autorité compétente du pouvoir qui lui appartient de refuser à un ressortissant algérien la délivrance du certificat de résidence d'un an lorsque sa présence en France constitue une menace pour l'ordre public.
4. M. B... fait valoir que contrairement à ce que relevait le préfet dans la décision attaquée, il s'occupe de sa fille française née le 21 juillet 2014, et contribue à son entretien. S'il ressort des pièces du dossier que 83 rencontres avaient été organisées à la suite de l'ordonnance du juge aux affaires familiales du 29 mai 2015 lui accordant un droit de visite médiatisé deux fois par mois, et qu'il en a honoré 75, il apporte peu d'éléments établissant une contribution à l'entretien de l'enfant. S'il a effectué diverses missions d'intérim peu rémunérées et obtenu d'un membre de sa famille une promesse d'embauche en qualité d' " ouvrier manutentionnaire polyvalent ", de telles circonstances n'établissent pas une insertion particulière au sein de la société française, et comme l'a relevé le tribunal, il ne conteste pas sérieusement les délits reprochés lors de ses interpellations, mentionnés au point 2, en se bornant à souligner qu'il n'a été condamné que par un seul jugement, avec sursis, pour violences avec usage ou menace d'une arme sur son ex-compagne. Au regard des violences exercées et des menaces de mort réitérées proférées à l'encontre de la mère de son enfant, faits dont la gravité ne saurait être minimisée, la décision lui refusant un titre de séjour en considération de la menace qu'il représente pour l'ordre public ne peut être regardée comme méconnaissant ni l'accord franco-algérien, ni la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.
5. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation du refus de titre de séjour. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Vienne.
Délibéré après l'audience du 12 mars 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, présidente,
Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,
M. Olivier Cotte, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 avril 2024.
La présidente-assesseure,
Anne MeyerLa présidente, rapporteure
Catherine A...La greffière,
Virginie Guillout
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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23BX01818