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06/02/2024 | FRANCE | N°22BX02267

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 06 février 2024, 22BX02267


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



L'association des amis de Saint-Palais-sur-Mer a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2020 par lequel le maire de la commune de Saint-Palais-sur-Mer a délivré à la société à responsabilité limitée Le Jardin des Hêtres un permis de construire en vue de l'édification de sept bâtiments comprenant quarante-cinq logements, la décision du 9 février 2021 rejetant son recours gracieux, ainsi que l'arrêté du 28 décembre 2021 par leq

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association des amis de Saint-Palais-sur-Mer a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2020 par lequel le maire de la commune de Saint-Palais-sur-Mer a délivré à la société à responsabilité limitée Le Jardin des Hêtres un permis de construire en vue de l'édification de sept bâtiments comprenant quarante-cinq logements, la décision du 9 février 2021 rejetant son recours gracieux, ainsi que l'arrêté du 28 décembre 2021 par lequel le maire de la commune de Saint-Palais-sur-Mer a délivré à la SARL Le Jardin des Hêtres un permis de construire modificatif.

Par un jugement n° 2100975 du 16 juin 2022, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 13 août 2022, 12 octobre 2022 et 20 juin 2023, l'association des amis de Saint-Palais-sur-Mer, représentée par Me Geniteau, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2100975 du tribunal administratif de Poitiers du 16 juin 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2020 par lequel le maire de la commune de Saint-Palais-sur-Mer a délivré à la société à responsabilité limitée Le Jardin des Hêtres un permis de construire en vue de l'édification de sept bâtiments comprenant quarante-cinq logements, la décision du 9 février 2021 rejetant son recours gracieux ainsi que l'arrêté du 28 décembre 2021 par lequel le maire de Saint-Palais-sur-Mer a délivré à la société Le Jardin des Hêtres un permis de construire modificatif ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Palais-sur-Mer la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au titre des frais exposés non compris dans les dépens.

Elle soutient que :

- le dossier de demande de permis de construire est incomplet dès lors qu'il ne comporte pas le tableau indiquant le nombre de logements familiaux et la part de ces logements correspondant à des logements locatifs sociaux définis à l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-16-3 du code de l'urbanisme ;

- aucune autorisation de défrichement n'a été sollicitée pour le projet de construction autorisée, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 425-6 du code de l'urbanisme ;

- l'arrêté attaqué ne justifie pas du respect des dispositions de l'article L. 302-9-1-2 du code de la construction et de l'habitation relatives au taux de logements locatifs sociaux prévus par le projet en litige ;

- en accordant le permis sollicité, le maire de Saint-Palais-sur-Mer a commis une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme dès lors que le projet porte une atteinte particulièrement grave à un espace naturel d'une grande richesse ;

- en délivrant l'arrêté attaqué, le maire de Saint-Palais-sur-Mer a commis une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme ;

- aucune demande de dérogation n'a été sollicitée au titre des espèces protégées ;

- l'arrêté attaqué méconnait l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme ;

- il provoque la destruction de sites de reproduction de l'azuré du serpolet, en méconnaissance des articles L. 121-23 et R. 121-4 du code de l'urbanisme ;

- le permis de construire est illégal du fait de l'illégalité du classement en zone AU des terrains d'assiette du projet compte tenu des enjeux environnementaux très forts, de la présence d'espèces protégées sur ces terrains ; le PLU finalement approuvé par la commune supprime d'ailleurs l'OAP n° 6 du Pierrail et le classement en zone constructible ;

- le permis attaqué n'aurait pas dû être délivré au regard des articles L. 111-11 et R. 111-2 du code de l'urbanisme, dès lors que la capacité du système de traitement des eaux usées de Saint-Palais-sur-Mer est insuffisante ;

- le permis de construire modificatif, délivré le 28 décembre 2021 sera en tout état de cause annulé par voie de conséquence de l'annulation du permis de construire, délivré le 28 novembre 2020 ;

- en application des articles R. 111-26 et R. 111-27 du code de l'urbanisme, suite à l'enquête publique sur la révision du plan local d'urbanisme, le maire de la commune de Saint-Palais-sur-Mer aurait dû surseoir à statuer dans l'attente de l'approbation de la révision du plan local d'urbanisme.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2022, la commune de Saint-Palais-sur-Mer, représentée par Me Valette-Berthelsen, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'association des amis de Saint-Palais-sur-Mer le paiement de la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués par l'association requérante ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 mars 2023, la société à responsabilité limitée Le Jardin des Hêtres, représentée par Me Clerc, conclut à titre principal au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'association requérante le versement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à titre subsidiaire, à ce que la cour l'invite à déposer un permis de construire modificatif visant à régulariser un éventuel vice de légalité dont serait entaché l'arrêté du 18 novembre 2020, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, ou à défaut de prononcer l'annulation partielle de l'arrêté du 18 novembre 2020 en application de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme.

Elle soutient que :

- la requête est manifestement irrecevable, dès lors que l'association requérante ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour agir ;

- les moyens invoqués par l'association requérante ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 26 juin 2023, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 4 septembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code forestier ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Pauline Reynaud,

- les conclusions de Mme Nathalie Gay, rapporteure publique,

- et les observations de Me Clerc, représentant la société Le Jardin des Hêtres.

Une note en délibéré présentée pour la société Le Jardin des Hêtres a été enregistrée le 16 janvier 2024.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 18 novembre 2020, le maire de la commune de Saint-Palais-sur-Mer a délivré à la société à responsabilité limitée Le Jardin des Hêtres un permis de construire en vue d'édifier sept bâtiments collectifs d'une surface de plancher de 3 168 m², comprenant 45 logements, situés 59 avenue des Acacias à Saint-Palais-sur-Mer. Le recours gracieux formé par l'association des amis de Saint-Palais-sur-Mer le 12 janvier 2021 contre ce permis a été rejeté par une décision du maire de la commune du 9 février 2021. Par un arrêté du 28 décembre 2021, le maire de Saint-Palais-sur-Mer a délivré à la société Le Jardin des Hêtres un permis de construire modificatif. L'association des amis de Saint-Palais-sur-Mer a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2020, la décision du 9 février 2021 et l'arrêté du 28 décembre 2021. Cette association relève appel du jugement n° 2100975 du 16 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Sur la fin de non-recevoir :

2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire (...) que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Enfin, eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

4. Aux termes de l'article 2 des statuts de l'association des amis de Saint-Palais-sur-Mer, relatif aux buts et moyens : " L'association a pour but de réunir tous les amis de Saint-Palais-sur-Mer afin de leur permettre de prendre dans le cadre de l'association toutes mesures nécessaires à la sauvegarde de la commune et à la protection de son site et, plus généralement, de nature à favoriser la protection de l'environnement en Pays Royannais, en particulier par une politique d'aménagement respectueuse des richesses naturelles et une gestion optimale de l'eau. / L'association entend parvenir à son but (...) par tous moyens légaux appropriés ".

5. Il ressort des pièces du dossier que le projet en litige prévoit la construction de sept bâtiments collectifs d'une surface de plancher de 3 168 m², comprenant 45 logements. Dès lors, compte tenu de son objet social et de la nature de l'arrêté attaqué, l'association des amis de Saint-Palais-sur-Mer justifie d'un intérêt à contester les décisions en litige. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par la société Le jardin des Hêtres doit être écartée.

Sur le bien-fondé du jugement :

6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 425-6 du code de l'urbanisme : " Conformément à l'article L. 341-7 du nouveau code forestier, lorsque le projet porte sur une opération ou des travaux soumis à l'autorisation de défrichement prévue aux articles L. 341-1 et L. 341-3 du même code, celle-ci doit être obtenue préalablement à la délivrance du permis ". Selon l'article L. 341-3 du code forestier : " Nul ne peut user du droit de défricher ses bois et forêts sans avoir préalablement obtenu une autorisation (...) ". Enfin, en vertu de l'article L. 342-1 du même code : " Sont exemptés des dispositions de l'article L. 341-3 les défrichements envisagés dans les cas suivants : / 1° Dans les bois et forêts de superficie inférieure à un seuil compris entre 0,5 et 4 hectares, fixé par département ou partie de département par le représentant de l'Etat, sauf s'ils font partie d'un autre bois dont la superficie, ajoutée à la leur, atteint ou dépasse ce seuil ; (...) ". Par un arrêté du 8 novembre 2004, le préfet de la Charente-Maritime a fixé le seuil prévu par les dispositions précitées à 1 hectare.

7. Il ressort des pièces du dossier, en particulier des photographies produites et de la notice descriptive du dossier de demande de permis, que la maîtrise foncière de l'opération porte sur une superficie de 27 008 m², et que le terrain d'assiette du projet, d'une superficie de 9 556 m², présente une végétation sauvage importante mais de très petites dimensions. Par ailleurs, il ressort de l'expertise écologique réalisée par le bureau d'études ETEN Environnement que sur le terrain d'assiette du projet, ont été relevés un fourré sur pelouse sèche, une prairie ainsi qu'une pelouse calcaire sèche. Le tableau listant les différents habitats recensés sur le terrain, annexé au dossier de demande de permis, mentionne également la présence d'une chênaie thermophile, d'un boisement mixte et de fourrés. Dans ces conditions, eu égard à ses caractéristiques, le terrain d'assiette du projet doit être regardé comme constituant un bois au sens des dispositions précitées de l'article L. 342-1 du code forestier. Il ressort par ailleurs des photographies produites que le terrain d'assiette du projet s'inscrit dans un vaste espace boisé d'une superficie supérieure au seuil d'un hectare défini par l'arrêté du 8 novembre 2004, au-delà duquel le projet est soumis à autorisation de défrichement. Par suite, l'association des amis de Saint-Palais-sur-Mer est fondée à soutenir que le projet en litige a été pris en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 425-6 du code de l'urbanisme.

8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 302-9-1-2 du code de la construction et de l'habitation : " Dans les communes faisant l'objet d'un arrêté au titre de l'article L. 302-9-1, dans toute opération de construction d'immeubles collectifs de plus de douze logements ou de plus de 800 mètres carrés de surface de plancher, au moins 30 % des logements familiaux sont des logements locatifs sociaux définis à l'article L. 302-5, hors logements financés avec un prêt locatif social ". L'article L. 111-24 du code de l'urbanisme prévoit que : " Conformément à l'article L. 302-9-1-2 du code de la construction et de l'habitation, dans les communes faisant l'objet d'un arrêté au titre de l'article L. 302-9-1 du même code, dans toute opération de construction d'immeubles collectifs de plus de douze logements ou de plus de 800 mètres carrés de surface de plancher, au moins 30 % des logements familiaux sont des logements locatifs sociaux définis à l'article L. 302-5 dudit code, hors logements financés avec un prêt locatif social ".

9. Le dossier de demande de permis comporte une pièce cotée PC 17, représentant un tableau de surfaces, lequel indique que sur 45 logements, le projet prévoit la construction de 37 logements sociaux, parmi lesquels 24 bénéficieront d'un prêt locatif à usage social (PLUS), et 13 bénéficieront d'un prêt locatif aidé d'intégration (PLAI). Ainsi, conformément aux dispositions précitées, au moins 30 % des logements créées sont des logements locatifs sociaux, hors logements financés par un prêt locatif social. Par suite, l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué ne justifie pas du respect des dispositions de l'article L. 302-9-1-2 du code de la construction et de l'habitation.

10. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme : " Le permis (...) doit respecter les préoccupations d'environnement définies aux articles L. 110-1 et L. 110-2 du code de l'environnement. Le projet peut n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si, par son importance, sa situation ou sa destination, il est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement. Ces prescriptions spéciales tiennent compte, le cas échéant, des mesures mentionnées à l'article R. 181-43 du code de l'environnement ". Il résulte de ces dispositions qu'elles ne permettent pas à l'autorité administrative de refuser un permis de construire, mais seulement de l'accorder sous réserve du respect de prescriptions spéciales relevant de la police de l'urbanisme, telles que celles relatives à l'implantation ou aux caractéristiques des bâtiments et de leurs abords, si le projet de construction est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement.

11. L'association requérante soutient que l'arrêté en litige porte une atteinte grave à un espace naturel marqué par une grande richesse et se prévaut de la présence dans le secteur d'implantation du projet, d'une des dernières pelouses sèches calcicoles du pays royannais, abritant de nombreuses espèces végétales et animales, en particulier l'azuré du serpolet, espèce de papillon protégée. D'une part, le courrier de l'association Objectifs biodiversités du 23 juin 2019 produit par l'association des amis de Saint-Palais-sur-Mer, qui précise les habitats des pelouses sèches calcicoles présents sur le secteur en litige, auquel est joint une photographie satellite localisant des populations des différentes espèces dans le secteur concerné, n'est toutefois accompagné d'aucune explication permettant d'estimer que ces affirmations reposent sur des observations scientifiques objectives et contemporaines de la décision contestée. D'autre part, l'association requérante se prévaut de l'expertise réalisée par ETEN environnement dans le cadre de la révision du plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Palais-sur-Mer, qui constate la présence d'espaces verts incluant des habitats d'intérêt communautaire et de nidation. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'article 2 de l'arrêté attaqué prévoit qu'en application de l'article L. 425-15 du code de l'urbanisme, le permis de construire en litige ne pourra être mis en œuvre avant la délivrance de la dérogation prévue au 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement. Dans ces conditions, compte tenu des mesures prises par le pétitionnaire, l'arrêté attaqué ne peut être regardé comme étant de nature à avoir des conséquences dommageables au sens des dispositions précitées. Le moyen doit, par suite, être écarté.

12. En quatrième lieu, selon l'article R. 111-27 de ce même code : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ".

13. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet se situe en continuité d'un secteur urbanisé de la commune de Saint-Palais-sur-Mer ne présentant pas de caractère ou d'intérêt particulier. Par ailleurs, l'association n'apporte aucun élément de nature à justifier que, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou aspect extérieur, les constructions projetées que seraient de nature à porter atteinte à l'intérêt des lieux avoisinants et paysages naturels ou urbains.

14. D'autre part, l'association soutient que plusieurs bâtiments projetés surplombent le talweg voisin et que, dès lors que la pente naturelle du terrain d'assiette du projet est orientée vers ce talweg, il existerait un risque de pollution des eaux de baignade de la plage de Nauzan. L'association des amis de Saint-Palais-sur-Mer n'apporte toutefois aucun élément de nature à établir l'existence d'un tel risque. Par suite, l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué méconnait les dispositions précitées de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme.

15. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 425-15 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet porte sur des travaux devant faire l'objet d'une dérogation au titre du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement, le permis ou la décision de non-opposition à déclaration préalable ne peut pas être mis en œuvre avant la délivrance de cette dérogation ".

16. L'association requérante ne peut utilement se prévaloir des dispositions précitées du code de l'urbanisme à l'encontre de l'arrêté du 18 novembre 2020 dès lors qu'elles ont uniquement pour objet de subordonner la mise en œuvre du permis de construire qui a déjà été accordé à la délivrance, lorsqu'elle est requise, d'une dérogation d'atteinte aux espèces protégées. Par suite, la circonstance qu'à la date de l'arrêté attaqué, aucune dérogation prévue par les dispositions précitées n'ait été sollicitée est sans incidence sur la légalité de celui-ci.

17. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme : " L'extension de l'urbanisation se réalise en continuité avec les agglomérations et villages existants. (...) ".

18. D'une part, il est constant que la commune de Saint-Palais-sur-Mer est une commune littorale soumise aux dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet en litige, classé en zone AUc du plan local d'urbanisme de la commune approuvé le 8 août 2012, se situe en continuité, à l'ouest, au nord et au sud, de secteurs urbanisés de la commune de Saint-Palais-sur-Mer. Dans ces conditions, nonobstant la circonstance que le terrain d'assiette s'ouvre, à l'est, sur un vaste espace naturel, l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que le projet de construction ne se situerait pas en continuité de l'agglomération existante. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme ne peut qu'être écarté.

19. En septième lieu, aux termes de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme : " Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques (...) ". L'article R. 121-4 du même code prévoit que : " En application de l'article L. 121-23, sont préservés, dès lors qu'ils constituent un site ou un paysage remarquable ou caractéristique du patrimoine naturel et culturel du littoral et sont nécessaires au maintien des équilibres biologiques ou présentent un intérêt écologique : (...) / 6° Les milieux abritant des concentrations naturelles d'espèces animales ou végétales telles que les herbiers, les frayères, les nourriceries et les gisements naturels de coquillages vivants, ainsi que les espaces délimités pour conserver les espèces en application de l'article L. 411-2 du code de l'environnement et les zones de repos, de nidification et de gagnage de l'avifaune désignée par la directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages ; (...) ".

20. L'association requérante soutient que l'arrêté attaqué ne peut que provoquer la destruction de sites de reproduction de l'azuré du serpolet, en méconnaissance des dispositions précitées du code de l'urbanisme. Toutefois, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, il ne ressort pas des pièces du dossier que le secteur d'implantation du projet constituerait un site ou paysage remarquable au sens des dispositions précitées, justifiant ainsi qu'il soit préservé. Dans ces conditions, l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué porterait atteinte aux dispositions précitées des articles L. 121-23 et R. 121-4 du code de l'urbanisme.

21. En huitième lieu, aux termes de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme : " Les zones à urbaniser sont dites "zones AU". Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs destinés à être ouverts à l'urbanisation (...) ". Selon l'article R. 151-24 du même code : " Les zones naturelles et forestières sont dites "zones N". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : / 1° Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; (...) ".

22. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. S'ils ne sont pas liés pour déterminer l'affectation future des différents secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme, leur appréciation peut cependant être censurée par le juge administratif au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

23. Il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit au point 14, que les parcelles en litige se situent dans la continuité de secteurs urbanisés de l'agglomération de Saint-Palais-sur-Mer, et sont entourées, au nord, au sud et à l'ouest, par des zones urbanisées. Par ailleurs, les parcelles en cause sont desservies par les réseaux et la voirie. Si l'association requérante se prévaut des études réalisées en 2018 par ETEN environnement, révélant la richesse écologique du terrain d'assiette du projet, de l'avis de la MRAE émis le 29 octobre 2021 et des recommandations du commissaire enquêteur dans le cadre de la révision du plan local d'urbanisme de la commune tendant à ce que la parcelle soit classée en zone N, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier qu'en 2012, la parcelle en litige aurait présenté un intérêt écologique justifiant son classement en zone N du plan local d'urbanisme. Dans ces conditions, l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que les auteurs du plan local d'urbanisme, en classant le secteur en zone d'urbanisation future, ont commis une erreur manifeste d'appréciation. Par suite, le moyen tiré de l'exception d'illégalité du classement des parcelles en litige en zone AUc doit être écarté.

24. En neuvième lieu, aux termes de l'article R. 153-11 du code de l'urbanisme : " (...) / L'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l'article L. 424-1, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan dès lors qu'a eu lieu le débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable ".

25. L'association appelante soutient que le maire de Saint-Palais-sur-Mer aurait dû surseoir à statuer dans l'attente de l'approbation du plan local d'urbanisme, en cours de révision. Il ressort toutefois de la délibération approuvant le plan local d'urbanisme que le projet d'aménagement et de développement durables a été débattu le 17 décembre 2020, soit postérieurement à l'arrêté attaqué. Par suite, le moyen ne peut qu'être écarté.

26. En dixième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme : " Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l'aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés ". L'article R. 111-2 du même code dispose que : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ".

27. L'association requérante soutient que la station d'épuration de la commune de Saint-Palais-sur-Mer est saturée, et que le système d'assainissement des eaux de la commune n'a pas de capacité suffisante pour qu'y soit raccordé le projet de construction en litige. Il ressort toutefois des pièces du dossier que les services techniques de la communauté d'agglomération de Royan Atlantique ont émis le 3 juillet 2020 un avis favorable au projet en litige et indiquent que le système d'assainissement de la commune est suffisant. Ainsi, le raccordement des constructions projetées ne peut être regardé comme nécessitant des travaux sur le réseau public d'assainissement du fait d'une insuffisante capacité de la station de Saint-Palais-sur-Mer. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme doit, par suite, être écarté. Il en va de même s'agissant du moyen tiré de l'erreur d'appréciation commise au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.

28. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Aux termes de l'article L. 600-5-1 du même code : " (...) le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé ".

29. Il résulte de ces dispositions que lorsque le ou les vices affectant la légalité de l'autorisation d'urbanisme dont l'annulation est demandée sont susceptibles d'être régularisés, le juge doit surseoir à statuer sur les conclusions dont il est saisi contre cette autorisation.

30. Le vice relevé au point 7 du présent arrêt, tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 425-6 du code de l'urbanisme, est susceptible d'être régularisé. Il y a lieu, dès lors, de surseoir à statuer, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, et de fixer à la société Le jardin des Hêtres un délai de six mois, à compter de la notification du présent arrêt, aux fins de notifier à la cour la mesure de régularisation nécessaire.

DECIDE :

Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête de l'association des amis de Saint-Palais-sur-Mer jusqu'à l'expiration d'un délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt, afin de permettre à la société Le jardin des Hêtres de notifier, le cas échéant, à la cour une mesure de régularisation du vice mentionné au point 7 du présent arrêt.

Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association des amis de Saint-Palais-sur-Mer, à la société à responsabilité limitée Le Jardin des Hêtres, et à la commune de Saint-Palais-sur-Mer.

Délibéré après l'audience du 16 janvier 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,

Mme Pauline Reynaud, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 février 2024.

La rapporteure,

Pauline ReynaudLa présidente,

Evelyne Balzamo La greffière,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 22BX02267 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX02267
Date de la décision : 06/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Pauline REYNAUD
Rapporteur public ?: Mme GAY
Avocat(s) : CABINET D'AVOCAT VALETTE-BERTHELSEN

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-06;22bx02267 ?
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