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31/05/2021 | FRANCE | N°19BX02844

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 31 mai 2021, 19BX02844


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler la décision du 13 décembre 2010 par laquelle le recteur de l'académie de la Guadeloupe a refusé de requalifier son contrat en contrat à durée indéterminée, d'enjoindre au recteur de requalifier ses contrats en contrat à durée indéterminée et de régulariser sa situation dans un délai de trois mois à compter du jugement à intervenir et de condamner l'État à lui verser une indemnité de 10 000 euros en réparation des préju

dices qu'il estime avoir subis.

Par un jugement n° 1100087 du 30 juin 2014, le tri...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler la décision du 13 décembre 2010 par laquelle le recteur de l'académie de la Guadeloupe a refusé de requalifier son contrat en contrat à durée indéterminée, d'enjoindre au recteur de requalifier ses contrats en contrat à durée indéterminée et de régulariser sa situation dans un délai de trois mois à compter du jugement à intervenir et de condamner l'État à lui verser une indemnité de 10 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis.

Par un jugement n° 1100087 du 30 juin 2014, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 14BX02672 du 2 novembre 2016, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel formé par M. B... contre ce jugement.

Par une décision n° 407410 du 24 juillet 2019, le Conseil d'État, statuant au contentieux, a annulé l'arrêt de la cour du 2 novembre 2016 en tant qu'il rejette les conclusions de M. B... dirigées contre le jugement du 30 juin 2014 en ce qu'il rejette sa demande tendant à l'annulation de la décision du 13 décembre 2010 et il a, dans cette mesure, renvoyé l'affaire à la cour.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 11 septembre 2014, 13 avril 2015, 27 août 2015 et 4 novembre 2019, M. A... B..., représenté par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 30 juin 2014 ;

2°) d'annuler la décision du 13 décembre 2010 par laquelle le recteur de l'académie de la Guadeloupe a refusé de requalifier son contrat en contrat à durée indéterminée ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports de régulariser sa situation de façon rétroactive dans un délai de trois mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et de lui verser les traitements et accessoires y afférents ;

4°) de mettre à la charge de l'État le paiement de la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il remplit les conditions prévues par l'article 13 de la loi du 26 juillet 2005 pour bénéficier d'un contrat à durée indéterminée ;

- l'interruption de son service pendant trois mois du 1er juin au 1er septembre 2004 est constitutive d'une manoeuvre de la part des services du rectorat pour le soustraire au bénéfice des dispositions législatives ;

- la décision du recteur est contraire à celle du ministre de l'éducation nationale du 12 novembre 2009 confirmée le 6 septembre 2010.

Par des mémoires enregistrés le 15 avril 2015 et le 29 novembre 2019, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 13 décembre 2010 sont irrecevables dès lors que cette décision est purement confirmative des décisions des 19 juillet 2006 et 12 juin 2009 devenues définitives ; si les conclusions d'excès de pouvoir étaient dirigées contre la décision du 12 juin 2009, elles seraient tardives ;

- les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'éducation ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 ;

- le décret n° 81-535 du 12 mai 1981 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020, et notamment son article 5 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D... C...,

- et les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., initialement recruté par le recteur de l'académie de la Guadeloupe par un contrat à durée déterminée pour la période allant du 5 novembre au 30 décembre 1997 afin d'exercer des fonctions d'enseignement en remplacement du titulaire du poste au lycée général et technique de Grand-Bourg, a ensuite bénéficié, de 1998 à 2010, de plusieurs engagements similaires pour exercer dans différents collèges et lycées de l'académie. Par une lettre du 19 juillet 2006, le recteur lui a fait connaître que, contrairement à la proposition qui lui avait été faite par un précédent courrier, il ne remplissait pas les conditions lui permettant de bénéficier d'un contrat à durée indéterminée. Le 12 juin 2009, le recteur de l'académie de la Guadeloupe a rejeté le recours gracieux dont l'avait saisi M. B... par lettre du 10 mai 2009. Le 12 novembre 2009, sur recours hiérarchique de M. B..., le ministre de l'éducation nationale a indiqué à l'intéressé que, " sous réserve de vérification des éléments d'information (...) transmis ", il demandait au recteur de régulariser sa situation. Le 13 décembre 2010, le recteur de l'académie de la Guadeloupe a confirmé à M. B... qu'il estimait non remplies les conditions d'un recrutement par contrat à durée indéterminée.

2. M. B... relève appel du jugement du 30 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 13 décembre 2010, d'autre part, à la condamnation de l'État à lui verser une indemnité d'un montant de 10 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis. Par un arrêt du 2 novembre 2016, la cour a rejeté ses conclusions dirigées contre ce jugement. Par une décision du 24 juillet 2019, le Conseil d'État, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt en tant qu'il porte sur la demande de M. B... tendant à l'annulation de la décision du 13 décembre 2010 et il a, dans cette mesure, renvoyé l'affaire à la cour.

3. Aux termes de l'article 13 de la loi du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique : " I. - Lorsque l'agent, recruté sur un emploi permanent, est en fonction à la date de publication de la présente loi (...), le renouvellement de son contrat est soumis aux conditions prévues aux quatrième, cinquième et sixième alinéas de l'article 4 de la même loi. / Lorsque, à la date de publication de la présente loi, l'agent est en fonction depuis six ans au moins, de manière continue, son contrat ne peut, à son terme, être reconduit que par décision expresse et pour une durée indéterminée. / II. - Le contrat est, à la date de publication de la présente loi, transformé en contrat à durée indéterminée, si l'agent satisfait, le 1er juin 2004 ou au plus tard au terme de son contrat en cours, aux conditions suivantes : 1° Être âgé d'au moins cinquante ans ; 2° Être en fonction (...) ; 3° Justifier d'une durée de services effectifs au moins égale à six ans au cours des huit dernières années ; 4° Occuper un emploi en application de l'article 4 ou du premier alinéa de l'article 6 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée, dans les services de l'État ou de ses établissements publics administratifs. ". Aux termes de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, dans sa rédaction applicable au litige : " Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 du titre Ier du statut général, des agents contractuels peuvent être recrutés dans les cas suivants : 1° Lorsqu'il n'existe pas de corps de fonctionnaires susceptibles d'assurer les fonctions correspondantes ; 2° Pour les emplois du niveau de la catégorie A et, dans les représentations de l'État à l'étranger, des autres catégories, lorsque la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient. / Les agents ainsi recrutés sont engagés par des contrats à durée déterminée, d'une durée maximale de trois ans. Ces contrats sont renouvelables, par reconduction expresse. La durée des contrats successifs ne peut excéder six ans. / Si, à l'issue de la période maximale de six ans mentionnée à l'alinéa précédent, ces contrats sont reconduits, ils ne peuvent l'être que par décision expresse et pour une durée indéterminée (...) ". Aux termes de l'article 6 de cette même loi : " Les fonctions qui, correspondant à un besoin permanent, impliquent un service à temps incomplet d'une durée n'excédant pas 70 % d'un service à temps complet, sont assurées par des agents contractuels. / Les fonctions correspondant à un besoin saisonnier ou occasionnel sont assurées par des agents contractuels, lorsqu'elles ne peuvent être assurées par des fonctionnaires titulaires. ".

4. En premier lieu, et d'une part, il ressort des pièces du dossier qu'au cours de l'année scolaire 2003-2004, M. B... a tout d'abord été recruté par un contrat pour la période allant du 1er septembre 2003 au 29 février 2004, puis, pour remplacer un enseignant titulaire bénéficiant d'un congé de formation professionnelle, pour la période allant du 1er mars au 31 mai 2004. La circonstance invoquée par M. B... selon laquelle le mois de juin est traditionnellement consacré aux révisions et aux examens est sans incidence sur la fin de son contrat intervenue le 31 mai 2004 en raison de la fin du congé de formation professionnelle de l'enseignant titulaire qu'il remplaçait. M. B..., qui a ensuite été de nouveau recruté par un contrat à compter du 1er septembre 2004, ne remplissait donc pas, à la date de publication de la loi du 26 juillet 2005, la condition tenant à un exercice des fonctions de façon continue pendant au moins six ans, ni même d'ailleurs celle tenant à un recrutement sur un emploi permanent, fixée par les dispositions du I de l'article 13 de cette loi, de sorte que le contrat conclu ensuite le 4 octobre 2005 ne saurait être requalifié en contrat à durée indéterminée, alors au surplus que ce contrat ne peut être regardé comme la reconduction du contrat précédent. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date de la décision litigieuse du 13 décembre 2010, M. B... aurait exercé des fonctions d'enseignant contractuel sur un emploi permanent pendant une période continue de six ans justifiant que l'un de ses contrats dût être requalifié en contrat à durée indéterminée.

5. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que M. B..., né le 15 juillet 1964, ne remplissait pas la condition d'âge minimal, fixé à cinquante ans au plus tard au terme de son contrat en cours à la date de la publication de la loi du 26 juillet 2005, pour bénéficier, en vertu des dispositions du II de l'article 13 de cette loi, de la transformation en un contrat à durée indéterminée de son contrat, même à le supposer en cours au 27 juillet 2005.

6. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 13 de la loi du 26 juillet 2005 doit être écarté.

7. En deuxième lieu, si par sa décision du 12 novembre 2009 le ministre de l'éducation nationale, saisi d'un recours hiérarchique de M. B..., a " annulé " la décision initiale du recteur de l'académie de la Guadeloupe du 19 juillet 2006 et lui a demandé de régulariser la situation de l'intéressé " sous réserve de vérification des éléments d'information (...) transmis ", cette circonstance ne faisait pas, en elle-même, obstacle à ce que le recteur s'oppose, par sa décision du 13 décembre 2010, à la demande de l'intéressé tendant à la requalification de son contrat en un contrat à durée indéterminée, par une exacte application de la loi comme il a été dit aux points 4 à 6 ci-dessus. Il en est de même d'ailleurs pour ce qui est de la position exprimée par le médiateur de la République. Le moyen tiré d'une erreur de droit doit ainsi être écarté.

8. En troisième et dernier lieu, et contrairement à ce que soutient M. B..., la circonstance qu'il n'aurait pas été recruté au cours de la période allant du 1er juin au 1er septembre 2004 ne peut être regardée, dans les circonstances de l'espèce, comme constitutive d'une manoeuvre de la part des services du rectorat visant à l'exclure du bénéfice des dispositions de la loi du 26 juillet 2005, laquelle n'était au demeurant pas intervenue à la date des faits reprochés. Dès lors, le moyen tiré d'un détournement de pouvoir, ainsi soulevé, doit être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées par le ministre, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du recteur de l'académie de la Guadeloupe du 13 décembre 2010. Ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.

Copie en sera transmise, pour information, au recteur de l'académie de la Guadeloupe.

Délibéré après l'audience du 29 avril 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

M. D... C..., président-assesseur,

Mme G... E..., première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mai 2021.

La présidente,

Marianne Hardy

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

4

N° 19BX02844


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19BX02844
Date de la décision : 31/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Enseignement et recherche - Questions propres aux différentes catégories d'enseignement - Enseignement du second degré - Personnel enseignant - Maîtres auxiliaires.

Fonctionnaires et agents publics - Agents contractuels et temporaires.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: M. Didier SALVI
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : EXCELEGIS

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-05-31;19bx02844 ?
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