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19/05/2020 | FRANCE | N°18BX01220

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 19 mai 2020, 18BX01220


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Brux Patrimoines et Paysage, Mme G..., M. et Mme J..., M. E..., M. et Mme I..., M. et Mme H... et M. et Mme K... ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 14 mai 2016 par lequel le préfet de la Vienne a délivré à la société La Plaine de Nouaille un permis de construire un parc éolien composé de quatre aérogénérateurs sur le territoire de la commune de Brux ainsi que la décision du préfet rejetant leur recours gracieux contre ce permis.

L'association

Brux Patrimoines et Paysage, Mme G..., M. et Mme J..., M. E..., M. et Mme I..., M. ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Brux Patrimoines et Paysage, Mme G..., M. et Mme J..., M. E..., M. et Mme I..., M. et Mme H... et M. et Mme K... ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 14 mai 2016 par lequel le préfet de la Vienne a délivré à la société La Plaine de Nouaille un permis de construire un parc éolien composé de quatre aérogénérateurs sur le territoire de la commune de Brux ainsi que la décision du préfet rejetant leur recours gracieux contre ce permis.

L'association Brux Patrimoines et Paysage, Mme G..., M. et Mme J..., M. E..., M. et Mme I..., M. et Mme H... et M. et Mme K... ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 14 avril 2016 par lequel le préfet de la Vienne a autorisé la société La Plaine de Nouaille à exploiter un parc éolien composé de quatre aérogénérateurs sur le territoire de la commune de Brux.

Par deux jugements n° 1602427 et n° 1601577 du 17 janvier 2018, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I - Par une requête enregistrée le 26 mars 2018 sous le n° 18BX01220, l'association Brux Patrimoines et Paysage, Mme G..., M. E..., M. et Mme I... et M. et Mme K..., représentés par Me M..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1602427 du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) d'annuler le permis de construire du 14 mai 2016 et la décision rejetant leur recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent, en ce qui concerne la recevabilité de leur demande de première instance, que :

- l'association justifie d'un intérêt à agir à l'encontre du permis de construire en litige eu égard à son objet social défini dans ses statuts ;

- les autres requérants justifient aussi d'un intérêt à agir dès lors qu'ils sont domiciliés à proximité du lieu d'implantation du parc éolien qui leur causera des nuisances sonores, visuelles et lumineuses.

Ils soutiennent, au fond, que :

- la demande de permis de construire a fait l'objet d'une décision implicite de rejet ; ainsi, le permis en litige ne pouvait être délivré sans que cette décision implicite soit retirée ou qu'une nouvelle demande de permis soit déposée ;

- la demande de permis de construire ne comporte pas la justification du dépôt de la demande d'autorisation de fonctionnement du parc éolien exigée au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement ; ainsi, le dossier de demande n'est pas conforme à l'article R. 431-20 du code de l'urbanisme ;

- l'étude d'impact produite par le pétitionnaire est entachée d'inexactitudes, d'omissions et d'insuffisances ; dès lors que cette étude a été communiquée par le pétitionnaire, le moyen tiré de ses insuffisances est opérant à l'encontre du permis délivré ; l'étude d'impact est insuffisante en ce qui concerne l'identification des conséquences du projet sur les sites, les paysages et le patrimoine culturel environnants ; les mesures compensatoires qu'elle comporte sont insuffisantes ; l'étude géologique jointe à l'étude d'impact est également insuffisante ; les mesures de stockage prévues pendant le temps de la réalisation du projet sont tout aussi lacunaires ;

- le permis vise un avis favorable de la direction régionale des affaires culturelles alors que celui-ci est en réalité défavorable ; le permis est ainsi entaché d'un vice de procédure ;

- l'avis du maire de Brux émis en application de l'article R. 423-72 du code de l'urbanisme est défavorable au projet, si bien que le permis de construire ne pouvait se fonder sur un avis prétendument favorable de ce maire ;

- le dossier de demande de permis de construire n'est pas conforme aux exigences des articles R. 431-8 et R. 421-10 du code de l'urbanisme ; les documents censés représenter l'insertion du projet dans son environnement sont sommaires et même erronés ; en particulier, les impacts visuels du projet sur le château d'Epanvilliers et l'église de Brux, monuments historiques, ne sont pas représentés de manière satisfaisante ; l'impact du projet depuis le château de la Maillolière et le Logis de Chémerault n'est pas présenté ;

- le permis de construire est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ; il existe un danger de projection de pales vers les habitations des requérants situées à proximité du futur parc éolien ; il existe aussi un danger d'accident en raison de la proximité du parc éolien vis-à-vis d'un aéroclub depuis lequel décollent des ULM ;

- le permis de construire est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-15 du code de l'urbanisme ; le projet s'inscrit dans un environnement sensible compte tenu de la présence, dans le secteur, de zones de protection spéciale et de zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique ; il existe aussi des gîtes de chauve-souris dans l'environnement proche du projet ; ces éléments sensibles ont été relevés par l'autorité environnementale dans son avis sur l'étude d'impact ; en dépit de cela, le pétitionnaire n'a pas prévu de plan de bridage des éoliennes ni de synchroniser les feux de balisage ;

- le permis de construire est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme ; ainsi, les éoliennes doivent être implantées dans une zone de plaine avec un relief peu marqué ; elles seront visibles depuis le clocher de l'église de Brux et le château d'Epanvilliers ; il y aura même une co-visibilité entre les éoliennes et ces monuments historiques ; le projet portera aussi atteinte à de nombreux sites touristiques avoisinants.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 octobre 2018, la société La Plaine de Nouaille, représentée par Me L..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de chacun des requérants la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que tous les moyens de la requête doivent être écartés comme infondés.

Par un mémoire, enregistré le 10 avril 2019, le ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales conclut au rejet de la requête.

Il soutient que tous les moyens de la requête doivent être écartés comme infondés.

Par ordonnance du 26 février 2019, la date au-delà de laquelle aucun moyen nouveau ne peut être invoqué en application de l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative a été fixée au 19 mars 2019 à 12h00.

Par ordonnance du 11 avril 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 13 mai 2019 à 12h00.

II - Par une requête, enregistrée sous le n° 18BX01221 et des mémoires complémentaires présentés le 26 mars 2018, le 19 mars 2019, le 23 mars 2019, le 10 avril 2019, le 13 mai 2019, l'association Brux Patrimoines et Paysage, Mme G..., M. E..., M. et Mme I... et M. et Mme K..., représentés par Me M..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1601577 du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) d'annuler l'autorisation d'exploiter du 14 avril 2016 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'enquête publique a été menée dans des conditions irrégulières car le commissaire enquêteur n'a pas suffisamment analysé les observations du public dans son rapport ; son avis est également insuffisamment motivé notamment parce qu'il n'a pas été émis sur la base d'un dossier complet ;

- l'étude d'impact produite par le pétitionnaire est entachée d'inexactitudes, d'omissions et d'insuffisances ; l'étude d'impact est insuffisante en ce qui concerne l'exposé de la méthodologie employée pour connaître les conséquences du projet sur son environnement ; l'analyse de l'état initial du site est incomplète ; l'étude d'impact prétend à tort que la population est favorable au projet ; l'étude paysagère décrit de manière insuffisante et erronée les impacts du projet sur le paysage, le bourg de Brux et les monuments historiques existants, comme le montre notamment l'avis défavorable du service territorial de l'architecture et du patrimoine ; les conditions de raccordement du parc éolien au réseau électrique ne sont pas étudiées ; l'étude géotechnique jointe à l'étude d'impact a négligé les conséquences du projet sur le sous-sol ;

- l'avis émis sur l'étude d'impact par l'autorité environnementale est irrégulier dès lors que cette autorité n'était pas indépendante de celle ayant délivré l'autorisation contestée ;

- les capacités financières et techniques du pétitionnaire font l'objet d'une présentation insuffisante dans le dossier de demande ; celui-ci contient un engagement vague de la société-mère au bénéfice du demandeur ;

- l'autorisation en litige a été délivrée sans qu'ait été pris en compte l'avis défavorable de la commune de Brux ;

- l'autorisation en litige méconnait les intérêts protégés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement ; ainsi, les éoliennes doivent fonctionner dans une zone de plaine avec un relief peu marqué ; elles seront visibles depuis le clocher de l'église de Brux et le château d'Epanvilliers, reconnus monuments historiques ; il y aura même une co-visibilité entre les éoliennes et ces monuments historiques ; le projet portera aussi atteinte à de nombreux sites touristiques avoisinants.

Par des mémoires en défense, enregistré le 2 octobre 2018, le 10 avril 2019, le 13 mai 2019 et le 31 mai 2019, la société La Plaine de Nouaille, représentée par Me L..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de chacun des requérants la somme de 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que tous les moyens de la requête doivent être écartés comme infondés.

Par un mémoire, enregistré le 10 avril 2019, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que tous les moyens de la requête doivent être écartés comme infondés.

Par ordonnance du 26 février 2019, la date au-delà de laquelle aucun moyen nouveau ne peut être invoqué en application de l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative a été fixée au 19 mars 2019 à 12h00.

Par ordonnance du 13 mai 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 14 juin 2019 à 12h00.

Dans les deux affaires visées ci-dessus, les parties ont été invitées, par courrier du 23 janvier 2020, à présenter leurs observations sur la possibilité de régulariser le vice tenant à la méconnaissance du principe d'autonomie de l'autorité environnementale que la cour est susceptible de retenir.

La société La Plaine de Nouaille a présenté des observations le 3 février 2020.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 ;

- l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale ;

- le code de l'environnement ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. F... A...,

- les conclusions de Mme Sylvande Perdu, rapporteur public,

- et les observations de Me L..., représentant la société La Plaine de Nouaille.

Des notes en délibéré présentées pour la société La Plaine de Nouaille ont été enregistrées le 19 mars 2020.

Considérant ce qui suit :

1. Le 6 février 2015, la société La Plaine de Nouaille a déposé en préfecture de la Vienne quatre demandes de permis de construire un parc éolien composé de quatre aérogénérateurs sur le territoire de la commune de Brux. Par un arrêté du 14 mai 2016, le préfet a délivré pour l'ensemble de la demande un permis de construire à l'encontre duquel l'association Brux Patrimoines et Paysage, Mme G..., M. et Mme J..., M. E..., M. et Mme I..., M. et Mme H... et M. et Mme K... ont exercé, le 5 juillet 2016, un recours gracieux. Ce recours ayant fait l'objet d'une décision implicite de rejet, ces mêmes personnes ont saisi le tribunal administratif de Poitiers d'une demande tendant à l'annulation du permis de construire délivré le 14 mai 2016 et de la décision rejetant leur recours gracieux. Par une requête enregistrée sous le n°18BX01220, l'association Brux Patrimoines et Paysage, Mme G..., M. E..., M. et Mme I... et M. et Mme K... relèvent appel du jugement rendu le 17 janvier 2018 par lequel le tribunal a rejeté leur demande.

2. Pour le même projet, la société La Plaine de Nouaille a déposé en préfecture, le 6 février 2015, une demande d'autorisation d'exploiter une installation de production d'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent. Par un arrêté du 14 avril 2016, pris au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement, le préfet de la Vienne a délivré l'autorisation sollicitée. Par une requête enregistrée sous le n° 18BX01221, l'association Brux Patrimoines et Paysage, Mme G..., M. E..., M. et Mme I... et M. et Mme K... relèvent appel du jugement rendu le 17 janvier 2018 par lequel le tribunal a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la jonction :

3. Il résulte des dispositions de l'article 15 de l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 dans sa version issue de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 et de celles de l'article L. 181-1 du code de l'environnement issu de cette même ordonnance que les arrêtés du 14 avril et du 14 mai 2016 portant, respectivement, autorisation au titre des installations classées pour la protection de l'environnement et permis de construire, forment ensemble l'autorisation environnementale instituée par l'ordonnance du 26 janvier 2017 dont la société La Plaine de Nouaille est ainsi titulaire pour la construction et l'exploitation du parc éolien projeté. Ces décisions sont relatives au même projet et leur contestation présentent à juger de questions similaires. Par suite, il y a lieu de joindre les requêtes visées ci-dessus et de statuer par un seul arrêt.

Sur le fond :

4. En vertu de l'article L. 181-17 du code de l'environnement, l'autorisation environnementale est soumise à un contentieux de pleine juridiction.

En ce qui concerne les moyens soulevés à l'encontre de l'arrêté du 14 mai 2016 portant permis de construire :

S'agissant du contenu de l'étude d'impact :

5. En vertu de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme, le permis de construire a pour objet de vérifier que les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords. L'article R. 431-16 du même code, relatif à certaines pièces complémentaires qui doivent être jointes à la demande de permis de construire en fonction de la situation ou de la nature du projet dispose que : " Le dossier joint à la demande de permis de construire comprend en outre, selon les cas : / a) L'étude d'impact, lorsqu'elle est prévue en application du code de l'environnement ; (...) ". Le tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement dresse la liste des travaux, ouvrages ou aménagements soumis à une étude d'impact, notamment lorsqu'ils sont subordonnés à la délivrance d'un permis de construire.

6. Il résulte de ces dispositions que l'obligation de joindre l'étude d'impact au dossier de demande de permis de construire prévue par l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme ne concerne que les cas où l'étude d'impact est exigée en vertu des dispositions du code de l'environnement pour des projets soumis à autorisation en application du code de l'urbanisme.

7. Le projet litigieux, qui correspond à un parc éolien comportant des aérogénérateurs dont le mât a une hauteur supérieure à 50 mètres, est soumis à autorisation au titre de la législation sur les installations classées sur le fondement de la rubrique n° 2980 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement. Il est, par voie de conséquence, soumis à étude d'impact en application du 1° du tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement. Dès lors, en revanche, qu'aucune rubrique du même tableau ni aucune disposition du code de l'environnement n'impose la réalisation d'une étude d'impact préalablement à la délivrance d'un permis de construire un parc éolien, une telle étude n'avait pas à figurer à titre obligatoire dans les dossiers de demande de permis présentés par la société La Plaine de Nouaille. Dans ces conditions, et alors même que le pétitionnaire a choisi de joindre une étude d'impact à son dossier de demande, les requérants ne peuvent utilement critiquer l'insuffisance de l'étude d'impact à l'appui de leurs conclusions à fin d'annulation du permis de construire.

S'agissant du contenu de la demande de permis de construire :

8. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants (...) ". Aux termes de l'article R. 431-10 du même code : " Le projet architectural comprend également : (...) c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. (...) ".

9. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

10. Il ressort des pièces du dossier que la demande de permis comporte, d'une part, deux documents graphiques représentant l'insertion des éoliennes projetées dans un panorama relativement vaste, d'autre part, deux photographies montrant l'environnement proche et lointain du site d'implantation. Cet environnement, essentiellement constitué de vastes parcelles agricoles, peut aussi être appréhendé à l'aide des vues aériennes jointes au dossier de demande. S'il est vrai que le dossier de permis ne comporte pas de développements consacrés aux impacts que le projet pourrait potentiellement avoir sur le château d'Epanvilliers, l'église de Brux, le Logis des Chémerault et le château de la Maillolière, classés monuments historiques, cette question était cependant traitée dans l'étude d'impact jointe à la demande d'autorisation d'exploitation que le pétitionnaire a parallèlement présentée au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement. Quant aux photomontages établis par les requérants, ils aboutissent à une représentation des éoliennes dans leur environnement qui apparait disproportionnée et qui, n'étant appuyés sur aucune méthodologie explicative suffisamment probante, ne permettent pas d'estimer que le pétitionnaire aurait cherché à sous-estimer l'impact visuel du projet en constituant sa demande. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisance du dossier de permis de construire doit être écarté.

11. En second lieu, aux termes de l'article R. 431-20 du code de l'urbanisme : " Lorsque les travaux projetés portent sur une installation classée soumise à autorisation, enregistrement ou déclaration en application des articles L. 512-1, L. 512-7 et L. 512-8 du code de l'environnement, la demande de permis de construire doit être accompagnée de la justification du dépôt de la demande d'autorisation, de la demande d'enregistrement ou de la déclaration. ".

12. Il ressort des pièces du dossier que la demande de permis de construire ne comportait pas la justification du dépôt de la demande d'autorisation d'exploiter le parc éolien présentée par le pétitionnaire au titre du code de l'environnement, contrairement aux exigences résultant des dispositions précitées de l'article R. 431-20. Il est toutefois constant que la société pétitionnaire a déposé en préfecture sa demande d'autorisation d'exploitation le 6 février 2015, soit le jour même du dépôt de son dossier de permis de construire, puis l'a complétée le 25 juin 2015. Dans ces conditions, le caractère incomplet sur ce point de la demande n'est pas susceptible d'avoir exercé une influence sur le sens de la décision contestée. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à elle seule, cette omission aurait nui à l'information du public ou aurait pu exercer une influence sur le sens de la décision.

S'agissant des avis consultatifs :

13. Aux termes de l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente recueille auprès des personnes publiques, services ou commissions intéressés par le projet, les accords, avis ou décisions prévus par les lois ou règlements en vigueur. ". Aux termes de l'article R. 423-72 du même code : " Lorsque la décision est de la compétence de l'Etat, le maire adresse au chef du service de l'Etat dans le département chargé de l'instruction son avis sur chaque demande de permis (...). Cet avis est réputé favorable s'il n'est pas intervenu dans le délai d'un mois à compter du dépôt à la mairie de la demande de permis ou dans le délai de quinze jours à compter du dépôt à la mairie de la déclaration. (...) ".

14. Une omission ou une erreur dans les visas d'un acte administratif ne sont pas de nature à affecter sa légalité. Par suite, à supposer que le préfet ait commis une erreur en indiquant dans les visas de sa décision que le service régional de l'archéologie de la direction régionale des affaires culturelles et que le maire de Brux sont réputés avoir émis un avis favorable au projet, cette circonstance serait, par elle-même, sans incidence sur la régularité du permis en litige.

S'agissant de la légalité du retrait de la décision rejetant implicitement la demande de permis de construire :

15. Il ressort des pièces du dossier qu'en l'absence de réponse expresse à la demande de permis de construire, celle-ci a fait l'objet d'une décision implicite de rejet le 6 février 2016. Aucune disposition législative ou réglementaires ni aucun principe n'impose au préfet, lorsqu'il décide d'accorder finalement l'autorisation sollicitée, de retirer explicitement le refus initial ou d'exiger du pétitionnaire qu'il présente une nouvelle demande. Par suite, le permis de construire délivré le 14 mai 2016, qui a implicitement mais nécessairement retiré le refus initial, n'est pas entaché d'illégalité sur ce point.

En ce qui concerne les moyens soulevés à l'encontre de l'arrêté du 14 avril 2016 portant autorisation d'exploiter :

S'agissant des capacités techniques et financières :

16. En vertu du 5° de l'article R. 512-3 du code de l'environnement, la demande d'autorisation doit mentionner les capacités techniques et financières de l'exploitant. Selon l'article L. 181-27 du code de l'environnement, dans sa version issue de l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017, l'autorisation prend en compte les capacités techniques et financières que le pétitionnaire entend mettre en oeuvre. En vertu de l'article D. 181-15-2 du code de l'environnement, l'exploitant peut justifier de ses capacités jusqu'à la date de mise en service de son installation. Ainsi, la société La Plaine de Nouaille n'est pas tenue de justifier de la réalité de l'ensemble de ses capacités techniques et financières dès la constitution de sa demande d'autorisation ou à la date de l'autorisation délivrée.

17. La demande d'autorisation d'exploiter comporte un volet intitulé " capacités techniques et financières " indiquant que la société La Plaine de Nouaille est une filiale du groupe RP-Global Austria Gmbh, spécifiquement constituée pour la construction et l'exploitation du parc éolien projeté. Elle comporte une description des capacités techniques du pétitionnaire, lesquelles reposent sur celles de sa société-mère, et sur une convention conclue avec la société RP Global France chargée de la supervision du site et du respect des impératifs liés à la réglementation sur la sécurité des installations classées. S'agissant du montage financier de l'opération, le document indique que la société pétitionnaire, qui est comme il a été dit, une société de projet, entend s'appuyer sur les structures et les capacités financières du groupe RP Global Austria GmbH qui est, comme la société RP Global France, entièrement contrôlée par le groupe autrichien international Hydrocontracting International, lequel intervient dans plusieurs pays pour la mise en oeuvre de projets de construction et d'exploitations d'infrastructures produisant des énergies renouvelables et dispose d'un capital de 25 millions d'euros. Ainsi, le moyen tiré de ce que la demande d'autorisation ne comportait pas, comme le prévoient les dispositions du 5° de l'article R. 512-3 du code de l'environnement, l'exposé des capacités techniques et financières de la société La Plaine de Nouaille doit être écarté.

S'agissant de l'étude d'impact :

18. Aux termes de l'article R. 122-5 du code de l'environnement : " I.- Le contenu de l'étude d'impact est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, ouvrages et aménagements projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine. II.- L'étude d'impact présente : 1° Une description du projet comportant des informations relatives à sa conception et à ses dimensions, y compris, en particulier, une description des caractéristiques physiques de l'ensemble du projet et des exigences techniques en matière d'utilisation du sol lors des phases de construction et de fonctionnement (...) 2° Une analyse de l'état initial de la zone et des milieux susceptibles d'être affectés par le projet, portant notamment sur la population, la faune et la flore, les habitats naturels, les sites et paysages, les biens matériels, les continuités écologiques (...) le patrimoine culturel et archéologique, le sol, l'eau, l'air, le bruit, les espaces naturels, agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, ainsi que les interrelations entre ces éléments ; 3° Une analyse des effets négatifs et positifs, directs et indirects, temporaires (y compris pendant la phase des travaux) et permanents, à court, moyen et long terme, du projet sur l'environnement, en particulier sur les éléments énumérés au 2° (...) la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses), l'hygiène, la santé, la sécurité, la salubrité publique, ainsi que l'addition et l'interaction de ces effets entre eux ; 4° Une analyse des effets cumulés du projet avec d'autres projets connus. (...) 7° Les mesures prévues par le pétitionnaire ou le maître de l'ouvrage pour : -éviter les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine et réduire les effets n'ayant pu être évités ; -compenser, lorsque cela est possible, les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine qui n'ont pu être ni évités ni suffisamment réduits. S'il n'est pas possible de compenser ces effets, le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage justifie cette impossibilité. (...) 8° Une présentation des méthodes utilisées pour établir l'état initial visé au 2° et évaluer les effets du projet sur l'environnement et, lorsque plusieurs méthodes sont disponibles, une explication des raisons ayant conduit au choix opéré ; 9° Une description des difficultés éventuelles, de nature technique ou scientifique, rencontrées par le maître d'ouvrage pour réaliser cette étude ; 10° Les noms et qualités précises et complètes du ou des auteurs de l'étude d'impact et des études qui ont contribué à sa réalisation (...) ".

19. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

20. En premier lieu, les dispositions précitées de l'article R. 122-5 du code de l'environnement n'imposent pas au pétitionnaire d'indiquer dans l'étude d'impact les modalités de la concertation avec le public organisée pendant la conception du projet.

21. En deuxième lieu, l'étude d'impact comporte une présentation du cabinet d'étude chargé de sa réalisation qui est conforme aux dispositions précitées du 10° de l'article R. 122-5 du code de l'environnement. Les ressources bibliographiques dont sont issus les documents utilisés par les auteurs de l'étude y sont indiquées et classées par thème. Quant aux allégations des requérants selon lesquelles le bureau d'étude ne justifierait pas des qualités d'impartialité et d'indépendance requises, elles ne sont, en tout état de cause, nullement corroborées par les éléments du dossier.

22. En troisième lieu, à la rubrique " méthodologie et démarche générale ", l'étude d'impact a analysé l'environnement du projet en distinguant une aire d'étude éloignée (25 km autour de l'aire d'étude immédiate), une aire d'étude intermédiaire (6 km autour de l'aire d'étude immédiate) et une aire d'étude rapprochée (2 km autour de l'aire d'étude immédiate). L'étude d'impact a justifié le choix des distances retenues pour chacun de ces périmètres en se conformant d'ailleurs aux préconisations du " guide de l'étude d'impact sur l'environnement des parcs éoliens terrestres " édité par le ministère de la transition écologique et solidaire.

23. En quatrième lieu, l'étude d'impact expose avec une précision suffisante les raisons qui ont conduit le pétitionnaire à choisir, parmi d'autres variantes envisagées, le site d'implantation et le parc éolien tel qu'autorisé par l'arrêté en litige.

24. En cinquième lieu, le bureau d'études ayant rédigé l'étude d'impact s'est servi des différents retours d'expérience résultant des parcs éoliens déjà mis en service, ce qui est d'ailleurs recommandé par le " guide de l'étude d'impact sur l'environnement des parcs éoliens terrestres ". Les impacts du projet sur son environnement humain, physique, paysager et naturel ont été étudiés et les développements de l'étude d'impact sur ces questions ne montrent pas, contrairement à ce que soutiennent les requérants, que ses auteurs en seraient restés à des considérations abstraites ayant négligé les spécificités de l'environnement local. Si l'étude d'impact comporte par ailleurs un exposé des limites méthodologiques et des difficultés rencontrées, comme l'exigent les dispositions du 9° de l'article R. 122-5, il ne résulte pas de l'instruction que ces dernières ont été susceptibles de rendre incertaines, de minimiser, voire de fausser les analyses du bureau d'études chargé de sa réalisation.

25. En sixième lieu, le volet paysager de l'étude d'impact présente, à l'aide notamment de photographies et de vues aériennes, les structures paysagères caractérisant les aires d'étude de manière satisfaisante. La présentation des boisements en tant qu'ils peuvent constituer des masques partiels pour les éoliennes est nuancée et ne révèle pas que l'étude d'impact aurait exagéré ce rôle. Les hameaux situés dans la zone du projet sont inventoriés sans que le pétitionnaire soit tenu de préciser leur disposition exacte et le nombre d'habitations les composant. Les sites touristiques et monuments historiques existants sont également présentés de manière exhaustive dans l'étude d'impact. L'analyse de l'état initial du site dans ses différentes composantes est suffisante.

26. En septième lieu, les impacts éventuels du projet sur l'église et le bourg de Brux peuvent être appréciés à l'aide d'un schéma montrant la distance et la topographie des sols qui séparent ces derniers du futur parc. Il ne résulte pas de l'instruction que cette présentation est insuffisante ou faussée. Quant au château d'Epanvilliers, si l'étude d'impact l'a identifié comme l'élément patrimonial présentant le plus de sensibilité en raison de sa proximité avec le projet, il ne résulte pas de l'instruction, en dépit de l'avis du service territorial de l'architecture et du patrimoine (STAP), que les photomontages réalisés ont atténué l'impact du projet sur cet édifice, le pétitionnaire ayant admis que des co-visibilités sont possibles entre ces derniers. Enfin, les propres photomontages produits par les requérants aboutissent à une représentation qui apparait à la fois approximative et disproportionnée des éoliennes, figurées de plus en couleur noire, ce qui accentue artificiellement leur perception alors que la réglementation exige qu'elles soient blanches.

27. En huitième lieu, aux termes de l'article R. 512-8 du code de l'environnement, dans sa version applicable : " (...) II. - Le contenu de l'étude d'impact est défini à l'article R. 122-5. Il est complété par les éléments suivants : (...) 2° Les mesures réductrices et compensatoires mentionnées au 7° du II de l'article R. 122-5 font l'objet d'une description des performances attendues, notamment en ce qui concerne (...) les conditions (...) du transport des produits fabriqués (...) ".

28. En vertu de ces dispositions, l'étude d'impact doit permettre d'apprécier l'incidence des mesures réductrices et compensatoires prévues sur les conditions de transport de l'électricité et non l'impact en tant que tel de ce transport sur l'environnement. Il ne résulte pas de l'instruction, comme l'a jugé à bon droit le tribunal, que les mesures de réduction ou de compensation prévues dans l'étude d'impact auraient une incidence sur le transport de l'électricité produite et, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir, au visa des dispositions précitées, que l'étude d'impact aurait insuffisamment présenté les conditions de raccordement du parc éolien au réseau électrique.

29. En neuvième lieu, à l'appui de leur moyen tiré de l'insuffisance de l'étude géotechnique, les requérants ne se prévalent devant la cour d'aucun élément de droit ou de fait nouveau par rapport à leur argumentation devant les premiers juges. Il y a lieu d'écarter leur moyen par adoption des motifs pertinents exposés par le tribunal au point 18 de sa décision.

30. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact doit être écarté en toutes ses branches.

S'agissant de la régularité de l'avis de l'autorité environnementale :

31. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement : " Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les autorités susceptibles d'être concernées par le projet, en raison de leurs responsabilités spécifiques en matière d'environnement, aient la possibilité de donner leur avis sur les informations fournies par le maître d'ouvrage et sur la demande d'autorisation. À cet effet, les États membres désignent les autorités à consulter, d'une manière générale ou au cas par cas. (...) ". L'article L. 122-1 du code de l'environnement, pris pour la transposition des articles 2 et 6 de cette directive, dispose, dans sa rédaction applicable en l'espèce, que " I. - Les projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements publics et privés qui, par leur nature, leurs dimensions ou leur localisation sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine sont précédés d'une étude d'impact. (...) / III. - Dans le cas d'un projet relevant des catégories d'opérations soumises à étude d'impact, le dossier présentant le projet, comprenant l'étude d'impact et la demande d'autorisation, est transmis pour avis à l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement. (...). / IV.- La décision de l'autorité compétente qui autorise le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage à réaliser le projet prend en considération l'étude d'impact, l'avis de l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement et le résultat de la consultation du public (...) ". En vertu du III de l'article R. 122-6 du même code dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " Dans les cas ne relevant pas du I ou du II, l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement mentionnée à l'article L. 122-1 est le préfet de la région sur le territoire de laquelle le projet de travaux, d'ouvrage ou d'aménagement doit être réalisé. (...). "

32. La directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics ou privés sur l'environnement a pour finalité de garantir qu'une autorité compétente et objective en matière d'environnement soit en mesure de rendre un avis sur l'évaluation environnementale des plans et programmes ou sur l'étude d'impact des projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement, avant leur approbation ou leur autorisation, afin de permettre la prise en compte de ces incidences.

33. Il appartient au juge du plein contentieux de l'autorisation environnementale d'apprécier le respect des règles de procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation. Il résulte de l'instruction que l'avis sur l'étude d'impact été rendu par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement du logement (DREAL) de Poitou-Charentes le 9 octobre 2015, soit à une date où ce service relevait de l'autorité du préfet de la région Poitou-Charentes qui était aussi préfet du département de la Vienne. Toutefois, à cette même date avait été votée la loi n° 2015-29 du 19 janvier 2015 qui a modifié l'article L. 4111-1 du code général des collectivités territoriales en supprimant la région Poitou-Charentes pour l'intégrer dans la région Nouvelle-Aquitaine à compter du 1er janvier 2016. Ainsi, au 14 avril 2016, date à laquelle il a délivré l'autorisation contestée, le préfet de la Vienne n'avait plus autorité sur la DREAL et dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de l'autonomie de l'autorité environnementale doit être écarté.

S'agissant du rapport et des conclusions du commissaire enquêteur :

34. Aux termes de l'article R. 123-19 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable : " Le commissaire enquêteur (...) établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions et contre-propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public. Le commissaire enquêteur (...) consigne, dans un document séparé, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables ou non à l'opération (...) ". En application de ces dispositions le commissaire-enquêteur, sans être tenu de répondre à chacune des observations recueillies, se doit d'indiquer, au moins sommairement et en livrant un avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de son avis.

35. Il résulte de l'instruction que le commissaire enquêteur a procédé à un inventaire détaillé des observations émises au cours de l'enquête publique et en a dressé la synthèse. Ce faisant, il a satisfait aux obligations qui découlent pour lui des dispositions précitées de l'article R. 123-19. Ses conclusions, d'ailleurs assorties de deux réserves et de trois recommandations, sont suffisamment motivées au regard des observations émises et des pièces composant le dossier d'enquête, lequel n'avait pas obligatoirement à comporter l'avis du STAP. Enfin, les conclusions du commissaire-enquêteur ne comportent pas d'ambiguïté susceptible de faire douter du sens réel de son avis, qui est bien favorable.

S'agissant de l'absence de prise en compte de l'avis de la commune de Brux :

36. A l'appui de ce moyen, les requérants ne se prévalent devant la cour d'aucun élément de droit ou de fait nouveau par rapport à leur argumentation devant les premiers juges. Il y a lieu d'écarter le moyen par adoption des motifs pertinents énoncés au point 20 du jugement.

En ce qui concerne les atteintes alléguées à la sécurité et à la santé publiques et aux paysages et patrimoine existants par les autorisations en litige :

37. Aux termes de l'article L. 181-3 du code de l'environnement : " I. - L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1 (...) ". Aux termes de l'article L. 511-1 du même code : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. ". Aux termes de l'article L. 512-1 dudit code : " Sont soumises à autorisation préfectorale les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l'article L. 511-1. L'autorisation ne peut être accordée que si ces dangers ou inconvénients peuvent être prévenus par des mesures que spécifie l'arrêté préfectoral. ". Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ". Aux termes de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme : " Le permis (...) doit respecter les préoccupations d'environnement définies aux articles L. 110-1 et L. 110-2 du code de l'environnement. Le projet peut n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si, par son importance, sa situation ou sa destination, il est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement. " Aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ".

S'agissant des risques pour la sécurité publique :

38. En premier lieu, pour soutenir que les dispositions précitées ont été méconnues, les requérants font état de la hauteur des éoliennes autorisées (150 mètres) et des risques de projection de pales vers les habitations voisines. Toutefois, compte tenu de la rareté de tels accidents et de la distance supérieure à 500 mètres qui sépare en l'espèce les éoliennes en projet des habitations présentes, les éléments avancés par les requérants ne permettent pas de retenir l'existence du risque allégué.

39. En second lieu, s'il existe un aérodrome situé à l'ouest de l'aire d'étude immédiate du projet, à 2,7 km de distance, il ressort de l'avis rendu le 22 juin 2015 par la direction générale de l'aviation civile, que le site retenu par le pétitionnaire n'est concerné par aucune servitude aéronautique de dégagement et radioélectrique de protection contre les obstacles. L'avis émis était ainsi favorable sous réserve de l'installation d'un balisage diurne et nocturne conforme à la réglementation du balisage des éoliennes situées en dehors des zones grevées d'une servitude aéronautique. Cette réserve a été reprise à l'article 2 du permis de construire en litige et il ne résulte pas de l'instruction que cette prescription serait insuffisante.

S'agissant des risques pour l'environnement :

40. Il ne résulte pas de l'instruction que l'implantation du projet aurait pour conséquence de porter atteinte à l'avifaune des zones de protection spéciale et des zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique, lesquelles sont situées dans l'aire d'étude éloignée du projet, les plus proches de ces zones étant à 5 et 6 km de celui-ci. S'il résulte de l'instruction que deux des éoliennes projetées se trouvent à moins de 200 mètres des haies les plus proches susceptibles d'abriter des chiroptères, il n'en reste pas moins, comme l'a d'ailleurs relevé l'inspecteur des installations classées dans son rapport, que le paysage de cultures dans lequel le projet doit s'insérer est peu propice à la présence de ces animaux. De plus, il est constant que la réalisation du projet n'entraîne la destruction d'aucune haie ou lisière boisée susceptible d'abriter les chiroptères. Pour autant, l'autorisation d'exploiter comporte un article 6-1 imposant au pétitionnaire de mettre en place un plan de bridage selon les résultats des suivis à réaliser sur la mortalité des chiroptères. Par ailleurs, le choix d'implanter en carré les éoliennes réduit la consommation des espaces et contribue à limiter les risques encourus pour l'avifaune du secteur, y compris l'avifaune migratrice. La circonstance que les faibles distances séparant les éoliennes entre elles n'offriraient pas de trouées suffisantes pour la circulation des oiseaux migrateurs se trouve compensée par l'étalement réduit du parc, lequel contribue à limiter l'effet de barrière susceptible de résulter du projet en litige. En l'absence de risques avérés pour l'avifaune et les chiroptères, le projet pouvait être autorisé par la décision en litige sans méconnaître les intérêts protégés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement et l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme.

S'agissant de l'atteinte aux paysages et au patrimoine :

41. Il résulte de l'instruction que le projet en litige doit être implanté au sein de l'unité paysagère des Terres Rouges au relief peu marqué, principalement dédiée à une activité agricole extensive sur de vastes parcelles. Selon l'atlas régional des paysages de Poitou-Charentes, les paysages des Terres Rouges sont peu identifiables et peu reconnus. Ainsi, le secteur dans lequel doit s'insérer le parc éolien ne présente, en lui-même, pas d'intérêt particulier même s'il existe quelques monuments historiques à proximité du futur parc dont les plus proches sont le château d'Epanvilliers et l'église de Brux.

42. Il ne résulte pas de l'instruction que le parc éolien, composé de quatre aérogénérateurs, porterait une atteinte visuelle significative au château d'Epanvilliers, situé à 2 km de distance, en raison de l'écran formé par les bâtiments communs de celui-ci et de la végétation existante. L'église de Brux, située à 1,5 km de distance des éoliennes, se trouve au coeur du bourg et il ne résulte pas de l'instruction que le parc éolien serait visible de manière significative depuis les abords de cet édifice. Quant au clocher de l'église, qui n'est d'ailleurs pas normalement accessible au public, aucun élément du dossier ne permet d'estimer qu'il émergerait sensiblement de la silhouette du village au point d'être particulièrement impacté par le projet en litige. Dans ces conditions, en dépit même de l'avis défavorable au projet émis par la direction régionale des affaires culturelles au demeurant contrebalancé par celui, favorable, de la commission départementale des paysages, de la nature et des sites, l'autorisation en litige n'a pas méconnu les intérêts protégés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement et l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme.

43. Il résulte de tout ce qui précède que les appelants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Il y a lieu, en revanche, de mettre à leur charge la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société La Plaine de Nouaille et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes n° 18BX01220 et 18BX01221 sont rejetées.

Article 2 : L'association Brux Patrimoines et Paysage, Mme C... G..., M. N... E..., M. et Mme D... I... et M. et Mme B... K..., pris ensemble, verseront à la société La Plaine de Nouaille la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Brux Patrimoines et Paysage, à Mme C... G..., M. N... E..., M. et Mme D... I..., M. et Mme B... K..., à la société La Plaine de Nouaille, au ministre de la transition écologique et solidaire et au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Copie pour information en sera délivrée au préfet de la Vienne et à la commune de Brux.

Délibéré après l'audience du 10 mars 2020 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, président,

M. F... A..., président-assesseur,

Mme Caroline Gaillard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 mai 2020

Le président,

Elisabeth Jayat

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et au ministre de la transition écologique et solidaire, chacun en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N°s 18BX01220, 18BX01221


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX01220
Date de la décision : 19/05/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Légalité interne du permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: M. Frédéric FAÏCK
Rapporteur public ?: Mme PERDU
Avocat(s) : LACOSTE LAREYMONDIE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-05-19;18bx01220 ?
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