Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision implicite intervenue le 22 mars 2022 par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour.
Par un jugement n° 2204288 du 15 juin 2023, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, un mémoire et des pièces complémentaires, enregistrés les 17 juillet 2023, 19 juillet 2023 et 16 novembre 2023, M. D..., représenté par Me Wantou, demande à la Cour :
1°) d'infirmer le jugement du tribunal administratif de Melun du 15 juin 2023 ;
2°) d'annuler la décision par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a rejeté implicitement sa demande de délivrance d'un titre de séjour ;
3°) d'enjoindre au préfet de prendre une nouvelle décision et de lui délivrer une carte de séjour dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision attaquée porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle a été prise en méconnaissance de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions ;
- elle méconnaît les dispositions de la circulaire du 28 novembre 2012 ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La requête a été communiquée au préfet de Seine-et-Marne qui n'a pas produit d'observation en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention de New-York relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Lorin a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un courrier réceptionné en préfecture le 22 novembre 2022, M. D..., ressortissant de la République démocratique du Congo né en 1985, a sollicité son admission au séjour au titre de la vie privée et familiale sur le fondement des articles L. 435-1 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en qualité de parent d'enfant malade. Une décision implicite de rejet est née du silence gardé sur cette demande. M. D... relève régulièrement appel du jugement du 15 juin 2023 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ". L'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".
3. M. D... fait valoir la durée de son séjour en France depuis le mois de mai 2010 et sa vie maritale avec une compatriote titulaire d'un titre de séjour valable jusqu'en 2027, avec laquelle il a eu deux enfants nés respectivement en 2015 et 2019 et a conclu un pacte civil de solidarité (PACS) enregistré le 21 juin 2019. Toutefois, il ne justifie pas de l'ancienneté et de la stabilité de sa résidence habituelle en France, même si sa présence ponctuelle peut être tenue pour établie, par la seule production de pièces constituées pour l'essentiel de déclarations ou d'avis d'imposition ne comportant aucun revenu depuis 2010, d'ordonnances médicales, de courriers de l'assurance maladie et d'un fournisseur d'énergie ou encore d'attestations de chargement d'abonnement aux transports en commun dont la valeur probante est insuffisante. Par ailleurs, M. D... n'établit pas plus en appel qu'en première instance sa participation à l'entretien et à l'éducation de ses enfants à la date de la décision attaquée. Cette contribution ne saurait être démontrée par un unique certificat médical daté du 26 janvier 2021 faisant état de sa présence régulière à des consultations médicales pour son fils B... et par l'attestation établie le 16 septembre 2021 par la directrice de l'établissement au sein duquel sa fille C... est scolarisée mentionnant sa présence notamment aux heures de sortie de classe. Les factures de cantine scolaire qu'il présente et qui ne sont accompagnées d'aucun justificatif de paiement, ne permettent pas d'établir qu'il contribuerait de manière effective à ces frais. L'intéressé qui n'établit ni même n'allègue avoir exercé une activité professionnelle depuis son arrivée sur le territoire national, ne justifie d'aucune intégration particulière. Dans ces conditions, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet de Seine-et-Marne n'a porté aucune atteinte disproportionnée au droit de M. D... au respect de sa vie privée et familiale. Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent par suite être écartés.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14 (...) ".
5. M. D..., qui ne fait état d'aucun argument distinct de ceux exposés au point 3 ci-dessus tenant à la durée de son séjour en France et aux attaches familiales dont il dispose sur le territoire français, ne démontre pas par ces seules circonstances que sa demande d'admission au séjour au titre de la vie privée et familiale répondrait à des considérations humanitaires ou serait justifiée par des motifs exceptionnels au sens de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de ces dispositions et de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour doivent être écartés.
6. En troisième lieu, M. D... ne peut utilement se prévaloir des orientations générales de la circulaire du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière que le ministre de l'intérieur a pu adresser aux préfets pour les éclairer dans la mise en œuvre de leur pouvoir de régularisation. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant refus de titre de séjour aurait été prise en méconnaissance de cette circulaire est inopérant et ne peut qu'être écarté.
7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
8. M. D... qui n'établit pas participer à l'entretien et à l'éducation de ses enfants ainsi qu'il vient d'être dit au point 3, ne démontre pas qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet de Seine-et-Marne aurait méconnu les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention de New-York, cette décision n'ayant ni pour objet ni pour effet de séparer l'intéressé de ses enfants.
9. En dernier lieu, M. D... soutient que son fils né en 2019 présente une malformation congénitale à l'origine d'un handicap moteur qui nécessite plusieurs rendez-vous médicaux hebdomadaires et une prise en charge médicale dont il ne pourrait bénéficier en République démocratique du Congo. D'une part, l'intéressé ne démontre par aucune pièce justificative la prise en charge de son jeune enfant au titre d'une telle pathologie. D'autre part, si les dispositions de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non celles de l'article L. 425-9 ainsi qu'il le soutient, sont susceptibles d'ouvrir droit sous certaines conditions à la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour au parent d'un étranger mineur soigné en France, M. D... n'établit pas, en tout état de cause, contribuer à l'entretien et à l'éducation de son enfant dont le séjour sur le territoire et l'accès aux soins ne sont au demeurant pas remis en cause par la situation administrative de son père.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Melun, a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de Seine-et-Marne. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles relatives aux frais liés à l'instance doivent également être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.
Délibéré après l'audience du 15 décembre 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Soyez, président,
- Mme Boizot, première conseillère,
- Mme Lorin, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour le 12 janvier 2024.
La rapporteure,
C. LORIN
Le président,
J.-E. SOYEZ
La greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23PA03155