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12/01/2024 | FRANCE | N°22PA04064

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 12 janvier 2024, 22PA04064


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 11 juin 2018 par lequel le maire de Longperrier lui a refusé le bénéfice du complément indemnitaire annuel au titre de l'année 2017 et l'arrêté du 14 juin 2018 en tant que le maire a fixé à 145,83 euros le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise, d'enjoindre à la commune de Longperrier à titre principal de procéder au retrait des arrêtés précités de son dossier

administratif et au versement de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'exercice d'un mon...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 11 juin 2018 par lequel le maire de Longperrier lui a refusé le bénéfice du complément indemnitaire annuel au titre de l'année 2017 et l'arrêté du 14 juin 2018 en tant que le maire a fixé à 145,83 euros le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise, d'enjoindre à la commune de Longperrier à titre principal de procéder au retrait des arrêtés précités de son dossier administratif et au versement de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'exercice d'un montant de 462,15 euros et du complément indemnitaire annuel à compter du 1er juillet 2018 dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réévaluer le montant de ces indemnités, selon les mêmes modalités, et de mettre à la charge de la commune de Longperrier la somme de 2 000 euros au titre de l'article

L761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1810025 du 5 juillet 2022, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés respectivement les 5 septembre 2022 et 5 septembre 2023, Mme A..., représentée par Me Lerat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1810025 du tribunal administratif de Melun du 5 juillet 2022 ou à titre subsidiaire de le réformer ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir l'arrêté du 11 juin 2018 par lequel le maire de Longperrier lui a refusé le bénéfice du complément indemnitaire annuel au titre de l'année 2017 et l'arrêté du 14 juin 2018 en tant que le maire a fixé à 145,83 euros le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise ;

3°) d'enjoindre au maire de Longperrier de retirer ces décisions de son dossier administratif et de procéder au versement de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise pour un montant de 462,15 euros à compter du 1er juillet 2018 et du complément indemnitaire, à titre subsidiaire de réexaminer le montant de ces indemnités dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Longperrier le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce qu'il est insuffisamment motivé ;

- le tribunal a à tort jugé que l'arrêté du 11 juin 2018 portant refus d'attribution du complément indemnitaire annuel pour l'année 2017 n'était pas soumis à une obligation de motivation ; par ailleurs cet arrêté était insuffisamment motivé ;

- le tribunal a à tort écarté le moyen tiré du vice de procédure, en jugeant qu'il ne pouvait être excipé de l'illégalité du compte rendu d'évaluation professionnelle pour 2016 et l'arrêté du

11 juin 2018 est bien entaché d'un vice de procédure dès lors qu'il ne pouvait se fonder sur les objectifs fixés dans l'entretien d'évaluation pour 2016 pour lesquels il est seulement indiqué " néant " ;

- l'arrêté du 11 juin 2018 est bien entaché d'illégalité en ce qu'il se fonde sur le compte -rendu d'évaluation pour l'année 2016 dont l'illégalité a été reconnue par le jugement n° 1805119 du 31 mars 2022 du tribunal administratif de Melun ;

- le tribunal a à tort rejeté les moyens tirés des détournements de pouvoir et de procédure et de l'existence d'une situation de harcèlement moral au sens des dispositions de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 ;

- l'arrêté du 14 juin 2018 portant diminution de l'indemnité liée aux fonctions, aux sujétions et à l'expertise (IFSI) à compter du 1er juillet 2018 est lui aussi insuffisamment motivé et le tribunal a dès lors rejeté à tort le moyen tiré de l'insuffisance de motivation ;

- le tribunal après avoir retenu l'illégalité du motif fondant cet arrêté a à tort procédé à une substitution de motifs en se fondant sur le changement de poste et la perte des responsabilités d'encadrement pour justifier la baisse de cette indemnité, alors que ces changements peuvent s'analyser comme une sanction disciplinaire déguisée ;

- ce second arrêté est lui aussi entaché de détournement de pouvoir et de détournement de procédure et s'inscrit dans le cadre d'un harcèlement moral ;

- il aurait dû se référer au compte rendu d'entretien pour 2016 au lieu de se référer à celui de 2017 ; de plus celui-ci était irrégulier pour avoir été mené par une personne qui n'avait été la supérieure hiérarchique de la requérante qu'à compter du 5 décembre 2017.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 juillet 2023, la commune de Longperrier représentée par Me Si Hassen, conclut au rejet de la requête et à ce que le versement de la somme de

2 000 euros soit mise à la charge de Mme A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n°2014-413 du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique d'Etat ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de Mme Dégardin, rapporteure publique,

- les observations de Me Sanches, avocat de Mme A...,

- et les observations de Me Si Hassen, avocat de la commune de Longperrier.

Considérant ce qui suit :

1. Titulaire du grade d'attaché territorial depuis 2009 après avoir été rédactrice territoriale, Mme B... A... exerce ses fonctions au sein de la commune de Longperrier depuis 2002. En 2015 elle a assuré l'interim de la directrice générale des services puis a rencontré d'importantes difficultés relationnelles avec la nouvelle titulaire du poste, ainsi qu'avec le maire et d'autres conseillers municipaux, au point d'avoir, de même que cette directrice générale des services, demandé, le 19 janvier 2016, le bénéfice de la protection fonctionnelle, qui lui a été refusé. Elle a par ailleurs fait l'objet de plusieurs arrêts de travail pour syndrome anxiodépressif depuis le 7 juin 2015 et a engagé divers contentieux avec la commune. Par arrêté du maire du 11 juin 2018, Mme A... s'est vu refuser le bénéfice du complément indemnitaire annuel au titre de l'année 2017, tandis que, par un autre arrêté du maire du 14 juin 2018, le montant de son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise était ramené à la somme de 145,83 euros, à compter du 1er juillet 2018. Elle a formé le 7 août 2018 à l'encontre de ces deux arrêtés des recours gracieux qui ont fait l'objet de décisions implicites de rejet, le 8 octobre 2018. Elle a dès lors saisi le tribunal administratif de Melun d'une demande tendant à l'annulation de ces arrêtés du maire de Longperrier des 11 et

14 juin 2018, mais le tribunal a rejeté cette demande par un jugement du 5 juillet 2022 dont elle relève dès lors appel.

Sur la régularité du jugement :

2. Si aux termes de l'article L9 du code de justice administrative " les jugements sont motivés ", ils ne sont néanmoins tenus de répondre qu'aux moyens soulevés devant le tribunal et non à tous les arguments présentés à l'appui desdits moyens ; par ailleurs la critique des motifs par lesquels le juge rejette un moyen est sans incidence sur la régularité du jugement et ne peut être formulée utilement, le cas échéant, que pour en contester le bien-fondé. Or il résulte du jugement attaqué que les premiers juges ont répondu de manière suffisamment détaillée au moyen tiré de l'erreur de fait soulevé à l'encontre de l'arrêté du 11 juin 2018, sans que la réponse ainsi apportée puisse être utilement critiquée pour invoquer l'irrégularité dudit jugement. Par ailleurs il ressort également du jugement attaqué que les premiers juges ont exposé les motifs pour lesquels ils écartaient l'argumentation tirée du harcèlement moral dont Mme A... estime avoir été victime ; dès lors ces motifs expliquant également pourquoi ils ont ensuite rejeté les moyens tirés des détournements de pouvoir et des détournements de procédure allégués, ils n'avaient pas à les reformuler entièrement pour répondre auxdits moyens.

Sur l'arrêté du 11 juin 2018 lui refusant le bénéfice du complément indemnitaire annuel au titre de l'année 2017 :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ".

4. Si la délibération du 20 décembre 2017 du conseil municipal de la commune de Longperrier a instauré, outre une indemnité liée aux fonctions, aux sujétions et à l'expertise (IFSE), un complément indemnitaire annuel susceptible d'être versé aux agents en fonction de leur valeur professionnelle et de leur investissement, il ne résulte ni de cette délibération ni d'aucune disposition applicable que l'attribution d'un tel complément indemnitaire annuel constituerait un droit pour les agents de la commune. Par suite, ainsi que l'a à juste titre jugé le tribunal, la décision n'attribuant pas à Mme A... le bénéfice du complément indemnitaire annuel ne refuse aucun avantage dont l'attribution constituerait un droit, et n'est donc pas au nombre des décisions devant être motivées, en application des dispositions précitées de l'article L. 211-1 du code des relations entre le public et l'administration. En tout état de cause l'arrêté attaqué vise notamment la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et en particulier son article 20, la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et notamment son article 88, la délibération de l'assemblée délibérante du 20 décembre 2017 relative à la mise en place du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP), puis il indique que les résultats de l'évaluation professionnelle déterminent le versement du complément indemnitaire et que le maire s'est appuyé sur les articles 45 et 48 de la délibération du conseil municipal du 20 décembre 2017 pour déterminer le montant attribué à l'agent. Ainsi cet arrêté, en tout état de cause, comporte les éléments de droit et de fait sur lesquels il se fonde.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 45 de la délibération du conseil municipal de Longperrier du 20 décembre 2017 : " l'entretien professionnel pris en compte sera celui de l'année n-1 pour un versement du CIA en année n. Ces montants ne sont pas reconductibles automatiquement d'une année sur l'autre et peuvent être compris entre 0 et 100% du montant maximal ". Aux termes de l'article 47 de la même délibération : " le CIA est versé en une fraction en année N selon la réalisation des objectifs issus de l'entretien professionnel réalisé en N-1 ".

6. Mme A... soutient que l'arrêté attaqué serait entaché d'un " vice de procédure " du fait que, pour lui refuser l'octroi du complément indemnitaire au titre de l'année 2017, il s'est fondé, en application de l'article 45 de la délibération du conseil municipal du 20 décembre 2017, sur le compte rendu d'entretien professionnel établi pour l'année 2016 alors que celui-ci était entaché d'illégalité et a d'ailleurs été annulé par le tribunal administratif de Montreuil par jugement du

31 mars 2022. Toutefois la légalité d'un acte administratif s'appréciant à la date à laquelle il a été pris, le maire pouvait légalement, pour édicter l'arrêté attaqué le 11 juin 2018, prendre en compte un compte rendu d'évaluation professionnelle qui n'a été annulé que plus de trois ans plus tard. Par ailleurs, en prenant en compte ce document, le maire s'est conformé aux dispositions des articles 45 et 47 de la délibération du 20 décembre 2017 du conseil municipal de la commune.

7. Enfin, l'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si cette dernière décision a été prise pour l'application du premier acte ou s'il en constitue la base légale. S'agissant d'un acte non réglementaire, l'exception n'est, en revanche, recevable que si l'acte n'est pas devenu définitif à la date à laquelle elle est invoquée, sauf dans le cas où l'acte et la décision ultérieure constituant les éléments d'une même opération complexe, l'illégalité dont l'acte serait entaché peut être invoquée en dépit du caractère définitif de cet acte. Or l'arrêté attaqué portant refus d'attribution du complément d'indemnité annuel, s'il prend en compte le compte-rendu d'évaluation professionnelle au titre de l'année N-1, ne peut pour autant être regardé comme une mesure d'application de ce compte rendu, qui n'en constitue pas non plus la base légale. Dès lors Mme A... ne peut utilement exciper de l'illégalité de ce compte-rendu d'entretien professionnel pour l'année 2016, annulé pour avoir été mené par un agent qui n'était pas la supérieure hiérarchique de la requérante, et du fait d'une absence d'appréciation générale.

8. Enfin si Mme A... fait valoir qu'elle avait jusqu'en 2015 toujours fait l'objet d'appréciations élogieuses, une telle circonstance est par elle-même sans incidence sur la légalité de la décision attaquée, qui doit, ainsi qu'il a été dit, se fonder sur la manière de servir de l'agent au cours de la seule année N-1, soit en l'espèce en 2016. Or la requérante ne justifie pas, par la production d'une note de synthèse établie cette année-là et par ses allégations sur le " sérieux et professionnalisme " avec lesquels elle aurait accompli ses missions, que la décision attaquée serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

9. En dernier lieu, si Mme A... soutient que la décision attaquée serait entachée de " détournement de pouvoir et de procédure " et d'erreur de droit du fait de la méconnaissance des dispositions de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983, elle soutient de la sorte, à l'appui de ces différents moyens, avoir été victime de harcèlement moral. Or une telle allégation ne peut qu'être écartée, par adoption des moyens retenus par les premiers juges, outre que l'existence d'un tel harcèlement a déjà été écarté par la Cour de céans dans son arrêt n° 20PA00709 du 5 mai 2022 devenu définitif. Par suite les moyens susénoncés, qui se fondent tous sur l'existence d'un tel harcèlement, ne peuvent qu'être rejetés.

Sur l'arrêté du 14 juin 2018 du maire de la commune de Longperrier fixant à 145,83 euros le montant de son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise :

10. En premier lieu il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué qu'il comporte le visa des textes applicables, notamment la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et en particulier son article 20, la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, ainsi que la délibération du 30 juin 2017 relative à la mise en place du régime indemnitaire (RIFSEEP), et la délibération du 20 décembre 2017 portant modification de cette délibération du 30 juin 2017. Il rappelle ensuite que les avantages consentis au titre du régime indemnitaire ont un caractère facultatif, fait référence à l'évaluation professionnelle de l'agent en date du 6 avril 2018, aux changements intervenus dans l'administration communale ayant conduit à la réorganisation des services, à l'avis du directeur des services nommé le 1er mars 2018, et indique s'être fondé sur les articles 5 et 44 de la délibération du 30 juin 2017 pour déterminer le nouveau montant d'IFSE devant s'appliquer à l'intéressée ; ainsi cet arrêté comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde et est par suite suffisamment motivé, nonobstant la circonstance que l'avis du directeur général des services, certes visé dans l'arrêté mais qui n'était pas le seul élément pris en compte par le maire pour prendre cette décision, n'a été communiqué à la requérante que trois ans plus tard. Par suite le moyen tiré de l'insuffisance de motivation manque en fait.

11. En deuxième lieu, aux termes de l'article 2 du décret n° 2014-413 du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique d'Etat : " Le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise est fixé selon le niveau de responsabilité et d'expertise requis dans l'exercice des fonctions.Les fonctions occupées par les fonctionnaires d'un même corps ou statut d'emploi sont réparties au sein de différents groupes au regard des critères professionnels suivants : / 1° Fonctions d'encadrement, de coordination, de pilotage ou de conception ; / 2° Technicité, expertise, expérience ou qualification nécessaire à l'exercice des fonctions ; / 3° Sujétions particulières ou degré d'exposition du poste au regard de son environnement professionnel. / Le nombre de groupes de fonctions est fixé pour chaque corps ou statut d'emploi par arrêté du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget et, le cas échéant, du ministre intéressé. / Ce même arrêté fixe les montants minimaux par grade et statut d'emplois, les montants maximaux afférents à chaque groupe de fonctions et les montants maximaux applicables aux agents logés par nécessité de service. / Le versement de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise est mensuel " ; par ailleurs l'article 88 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 dispose que : " Les organes délibérants des collectivités territoriales et de leurs établissements publics fixent les régimes indemnitaires, dans la limite de ceux dont bénéficient les différents services de l'Etat. / Ces régimes indemnitaires peuvent tenir compte des conditions d'exercice des fonctions, de l'engagement professionnel et, le cas échéant, des résultats collectifs du service. / Lorsque les services de l'Etat servant de référence bénéficient d'une indemnité servie en deux parts, l'organe délibérant détermine les plafonds applicables à chacune de ces parts et en fixe les critères, sans que la somme des deux parts dépasse le plafond global des primes octroyées aux agents de l'Etat. / Ces régimes indemnitaires sont maintenus dans les mêmes proportions que le traitement durant les congés mentionnés au 5° de l'article 57, sans préjudice de leur modulation en fonction de l'engagement professionnel de l'agent et des résultats collectifs du service. / Après avis du comité social territorial, l'organe délibérant peut décider d'instituer une prime d'intéressement tenant compte des résultats collectifs des services, selon les modalités et dans les limites définies par décret en Conseil d'Etat. / Les organes délibérants des collectivités territoriales et de leurs établissements publics peuvent décider de maintenir, à titre individuel, au fonctionnaire concerné, le montant indemnitaire dont il bénéficiait en application des dispositions réglementaires antérieures, lorsque ce montant se trouve diminué soit par l'application ou la modification des dispositions réglementaires applicables aux services de l'Etat servant de référence, soit par l'effet d'une modification des bornes indiciaires du grade dont il est titulaire ".

12. Enfin pour l'application au plan local de ce nouveau régime indemnitaire instauré pour la fonction publique d'Etat par le décret précité, la commune de Longperrier a pris la délibération du 20 décembre 2017, relative à la " prise en compte de l'expérience professionnelle donnant lieu à réexamen de l'IFSE " dont l'article 40 dispose que " ce montant fera l'objet d'un réexamen au regard de l'expérience professionnelle et /

- en cas de changement de fonctions ou d'emploi, /

- en cas de changement de grade ou de cadre d'emploi à la suite d'une promotion, d'un avancement de grade ou de la nomination suite à la réussite d'un concours, /

- au moins tous les quatre ans en fonction de l'expérience acquise par l'agent ; / L'IFSE pourra être modulée en fonction de l'expérience professionnelle. Il est proposé de retenir les critères de modulation suivants : /

- la diversification des compétences et des connaissances, /

- l'évolution du niveau des responsabilités, /

- la gestion d'un évènement exceptionnel permettant d'acquérir une nouvelle expérience ou d'approfondir les acquis ".

13. Mme A... soutient que l'arrêté du 14 juin 2018 serait entaché d'erreur de droit ; il est vrai que, comme l'ont, à juste titre, retenu les premiers juges, eu égard à l'objet et la finalité de l'IFSE, le maire ne pouvait légalement se fonder sur la manière de service de l'agent, notamment sur le compte-rendu d'évaluation établi le 6 avril 2018 au titre de l'année 2017 plutôt que sur la délibération du conseil municipal du 20 décembre 2017 et dès lors, ce motif de l'arrêté en litige est entaché d'une erreur de droit. Au demeurant, en application de l'article 40 précité de la délibération du 20 décembre 2017, le réexamen du montant de l'IFSE intervient notamment en cas de changement de fonctions ou d'emploi, or il ressort des pièces versées au dossier que Mme A... a fait l'objet au mois de mai 2016 d'un changement de fonctions, ce qui justifiait un tel réexamen. De plus il en ressort également que son nouveau poste, qui comprenait notamment la responsabilité du cimetière ne comportait pas, contrairement à son ancien poste, de fonctions d'encadrement, de coordination, de pilotage ou de conception, ce qui justifiait l'application de taux différents de ceux appliqués antérieurement. Enfin il ne résulte d'aucun texte applicable que l'agent aurait droit au maintien de son taux antérieur d'IFSE. Dans ces conditions, ainsi que l'a à juste titre retenu le tribunal, le maire aurait pris la même décision s'il s'était fondé sur le seul motif tiré du changement de fonctions.

14. En dernier lieu, si Mme A... soutient que l'arrêté attaqué aurait le caractère d'une sanction disciplinaire déguisée et serait entachée de détournement de pouvoir et de procédure, ces moyens ne peuvent qu'être écartés, pour les motifs énoncés au point 9.

15. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'annulation et à fins d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

16. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais liés à l'instance. Dès lors, les conclusions présentées à ce titre par Mme A... doivent être rejetées.

17. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de Mme A... la somme que demande la commune de Longperrier au titre des frais liés à l'instance.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Longperrier, tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de Longperrier.

Délibéré après l'audience du 28 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Marie-Isabelle Labetoulle, première conseillère,

- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 janvier 2024.

La rapporteure,

M-I. C...Le président,

I. LUBEN

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au préfet de Seine-et-Marne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA04064


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA04064
Date de la décision : 12/01/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Marie-Isabelle LABETOULLE
Rapporteur public ?: Mme DÉGARDIN
Avocat(s) : LERAT

Origine de la décision
Date de l'import : 14/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-01-12;22pa04064 ?
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