Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société anonyme (SA) Chargeurs a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de lui accorder la restitution du précompte mobilier dont elle s'est acquittée en 2001, 2002, 2003 et 2004, pour des montants respectifs de 1 892 168 euros, 6 039 744 euros, 6 129 713 euros et 4 568 548 euros, assortis des intérêts moratoires.
Par un jugement n° 0713439 du 31 mars 2014, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a prononcé la restitution, à hauteur de 334 810 euros et de 1 260 857 euros, du précompte mobilier dont s'est acquittée la société Chargeurs au titre des années 2001 et 2002 et rejeté le surplus de sa demande.
Par un arrêt nos 14VE01594, 14VE1595 du 23 juin 2020, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la société BNP Paribas contre ce jugement, porté à 611 188 euros et 5 776 281 euros le montant de la restitution prononcée en faveur de la société Chargeurs au titre des années 2001 et 2002, annulé le jugement en ce qu'il a de contraire et rejeté le surplus des conclusions de sa requête de la société Chargeurs.
Par une décision nos 442866, 443287 du 27 mars 2023, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux sur les pourvois formés par le ministre de l'économie, des finances et de la relance et la société Chargeurs, a annulé les articles 2 à 5 de l'arrêt du 23 juin 2020 de la cour administrative d'appel de Versailles, rejeté le pourvoi de la société Chargeurs et renvoyé, dans cette mesure, l'affaire à la cour.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 30 mai 2014, 26 octobre 2017, 31 décembre 2018 et 23 mai 2019, et après cassation, un mémoire récapitulatif et un mémoire en réplique enregistrés les 22 mai et 17 juillet 2023, la société Chargeurs, représentée par Me Espasa-Mattei, avocate, demande à la cour, dans le dernier état de son mémoire récapitulatif :
1°) d'annuler le jugement n° 0713439 rendu le 31 mars 2014 par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;
2°) à titre principal, de prononcer la restitution des montants de précompte mobilier dont elle s'est acquittée au titre des années 2001 à 2004 pour des montants de 1 892 168 euros, 6 039 744 euros, 5 207 299 euros et 3 626 293 euros, assortie des intérêts moratoires ;
3°) à titre subsidiaire, de prononcer la restitution au titre du précompte acquitté en 2001 d'une somme complémentaire de 276 378 euros et la restitution au titre du précompte acquitté en 2002 de la somme de 1 967 362 euros ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 15 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- à titre principal, elle est fondée à produire des déclarations rectificatives de précompte mobilier comportant des imputations fiscales conformes au droit de l'Union ; en vertu de l'article L. 199 C du livre des procédures fiscales, tout moyen nouveau est recevable ; la preuve de la redistribution de dividendes de source européenne peut être apportée par tous moyens ; la production de déclarations rectificatives trouve sa justification dans la jurisprudence de la CJUE Brussels Securities C-389/18 du 19 décembre 2019 et dans la jurisprudence du Conseil d'Etat qui admet certaines régularisations dans le délai de réclamation ; le juge de l'impôt ne peut se fonder sur des déclarations viciées par des imprimés déclaratifs non conformes au droit de l'Union ; elle disposait d'un stock de distributions reçues de ses filiales européennes qu'elle aurait nécessairement imputé en priorité et qui justifie la restitution de l'intégralité du précompte mobilier qu'elle a acquitté au titre des années 2001 à 2004 ;
- le taux du précompte étant de 50 %, pour calculer le montant à lui restituer, il y a lieu d'appliquer ce taux aux dividendes reçus de ses filiales européennes qu'elle a redistribués ; elle s'est acquittée du précompte sur ses réserves distribuables et non sur les revenus distribués ; elle est fondée à demander la restitution du précompte qu'elle a acquitté au hauteur de 50 % des dividendes redistribués, dès lors que les dividendes de source européenne ont été intégralement redistribués et que le précompte mobilier n'a pas été prélevé sur ces dividendes de source européenne, mais imputé sur d'autres revenus de ses filiales.
Par des mémoires en défense enregistrés les 29 septembre 2014, 1er avril et 29 juillet 2019, et après cassation les 28 juin et 18 août 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut à la restitution d'une somme complémentaire de 72 649 euros au titre du précompte mobilier acquitté en 2001 et d'une somme complémentaire de 1 242 163 euros au titre du précompte mobilier acquitté en 2002 et au rejet du surplus des conclusions de la requête.
Il fait valoir que la demande de restitution ne peut être accueillie qu'à hauteur d'une somme correspondant au tiers des dividendes reçus et redistribués, que la société Chargeurs n'est pas recevable à reprendre devant la juridiction de renvoi les moyens définitivement écartés par le rejet de son pourvoi, et que les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 19 juillet 2023, la clôture de l'instruction a été fixée, en application de l'article L. 613-1 du code de justice administrative, au 30 août 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- la directive 90/435/CEE du Conseil du 23 juillet 1990 ;
- l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne C-416/17 du 4 octobre 2018 ;
- l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne C-556/20 du 12 mai 2022 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dorion,
- les conclusions de M. Lerooy, rapporteur public,
- et les observations de Me Espasa-Mattei pour la société Chargeurs et de M. A... pour le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Une note en délibéré a été présentée le 15 décembre 2023 pour le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Considérant ce qui suit :
1. La société anonyme (SA) Chargeurs a demandé à l'administration fiscale de lui accorder la restitution du précompte mobilier dont elle s'est acquittée à raison de distributions de dividendes intervenues au cours des années 2001 à 2004, assortie des intérêts moratoires, pour des montants de 1 892 168 euros, 6 039 744 euros, 6 129 713 euros et 4 568 548 euros. Après le rejet de sa réclamation, la société Chargeurs a porté le litige devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, qui, par un jugement du 31 mars 2014, a prononcé la restitution, à hauteur des montants respectifs de 334 810 euros et de 1 260 857 euros, du précompte mobilier dont elle s'est acquittée au titre des années 2001 et 2002 et rejeté le surplus de sa demande. Par un arrêt du 23 juin 2020, la cour administrative d'appel de Versailles a, sur appel de la société Chargeurs, porté le montant de cette restitution à respectivement 611 188 euros et 5 776 281 euros au titre des années 2001 et 2002 et rejeté le surplus des conclusions de sa requête. Par une décision du 27 mars 2023, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a annulé les articles 2 à 5 de l'arrêt du 23 juin 2020 de la cour administrative d'appel de Versailles, rejeté le pourvoi de la société Chargeurs, et renvoyé, dans cette mesure, l'affaire devant la cour.
Sur l'étendue du litige :
2. Par deux courriers du 21 avril 2023 adressés à la société BNP Paribas, cessionnaire de la créance fiscale sur le Trésor public détenue par la société Chargeurs au titre du précompte acquitté en 2001, et à la société Chargeur, en vue de l'exécution de la décision du Conseil d'Etat du 1er mars 2023, l'administration fiscale a admis que le droit à restitution de la société Chargeurs au titre du précompte acquitté sur les dividendes reçus de ses filiales européennes redistribués à ses actionnaires devait être porté de la somme de 334 810 euros accordée par le tribunal à la somme de 407 459 euros, soit une restitution complémentaire de 72 649 euros au titre de l'année 2001, et de la somme de 1 260 857 euros accordée par le tribunal à la somme de 2 503 020 euros, soit une restitution complémentaire de 1 242 163 euros au titre de l'année 2002. En conséquence, elle a demandé aux sociétés BNP Paribas et Chargeurs, à la suite de l'exécution de l'arrêt du 23 juin 2020 de la cour et de la cassation partielle de cet arrêt, de rembourser à l'Etat les sommes de 203 729 euros et 3 273 261 euros déchargées à tort par la cour, et les intérêts moratoires correspondants. L'administration fiscale doit ainsi être regardée comme ayant dégrevé en cours d'instance les sommes de 407 459 euros et 2 503 020 euros. Par suite, il n'y a plus lieu de statuer sur la demande de la société Chargeurs à hauteur de ces sommes.
Sur les conclusions de la requête en tant qu'elles portent sur la restitution du précompte mobilier acquitté en 2003 et 2004 et sur la restitution d'une somme supérieure à 611 188 euros au titre du précompte mobilier acquitté en 2001 et de 5 776 281 euros en 2002 :
3. Seuls ont été annulés les articles 2 à 5 de l'arrêt n° 14VE01594, 14VE01595 du 23 juin 2020, par lesquels la cour a jugé que les montants de précompte mobilier à restituer à la société Chargeurs au titre des années 2001 et 2002 devaient être portés des sommes de 334 810 euros et de 1 260 857 euros respectivement aux sommes de 611 188 euros et de 5 776 281 euros, que le jugement n° 0713439 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 31 mars 2014 devait être réformé, en ce qu'il a de contraire, que pour l'exécution de cette décision, il serait tenu compte de ce que la société Chargeurs a cédé, à hauteur des sommes respectives de 1 892 169 euros et 2 027 674 euros, sa créance fiscale sur le Trésor public relative à la restitution du précompte dû pour les années 2001 et 2002 à la SA BNP Paribas par un acte en date du 4 avril 2008, notifié à l'administration le même jour, et que l'Etat devait lui verser une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les articles 1er et 6 de cet arrêt, par lesquels la cour a rejeté la requête de la SA BNP Paribas et le surplus de la requête de la société Chargeurs n'ont pas été annulés par la décision de cassation. Il s'ensuit que les conclusions réitérées par la société Chargeurs dans son mémoire récapitulatif après cassation, tendant à la restitution du précompte mobilier acquitté au titre des années 2003 et 2004 et à ce qu'il soit fait droit à sa demande de restitution en tant qu'elle excède les sommes de 611 188 euros au titre du précompte mobilier acquitté en 2001 et de 5 776 281 euros en 2002, ne sont plus en litige.
Sur le surplus des conclusions de la demande :
4. Par un arrêt du 12 mai 2022 Schneider Electric et autres (C-556/20), la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que le paragraphe 1 de l'article 4 de la directive du Conseil du 23 juillet 1990 devait être interprété en ce sens qu'il s'oppose à une réglementation nationale qui prévoit qu'une société mère est redevable d'un précompte en cas de redistribution à ses actionnaires de bénéfices versés par ses filiales lorsque ces bénéfices n'ont pas supporté l'impôt sur les sociétés au taux de droit commun, dès lors que les sommes dues au titre de ce précompte dépassent le plafond de 5 % prévu au paragraphe 2 de ce même article 4. Il s'ensuit, ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat dans sa décision nos 442866, 443287 du 27 mars 2023, qu'une société mère est fondée à obtenir la restitution du précompte qu'elle a acquitté à raison de la redistribution de dividendes reçus de ses filiales établies dans un Etat membre de l'Union européenne autre que la France, dès lors que l'article 4 de la directive du Conseil du 23 juillet 1990 fait obstacle à ce qu'elle soit soumise à une imposition sur de tels dividendes.
5. Aux termes de l'article 46 quater-0 D de l'annexe III du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : " I. Les distributions qui n'ouvrent pas droit à l'avoir fiscal prévu à l'article 158 bis du code général des impôts sont prélevées, par priorité, sur les bénéfices soumis à l'impôt sur les sociétés ou exonérés de cet impôt au titre du dernier exercice clos et, en cas d'insuffisance de ces bénéfices, sur ceux des exercices antérieurs les plus récents. / II. Les distributions qui ouvrent droit à l'avoir fiscal sont prélevées ensuite dans l'ordre suivant : D'abord, sur les bénéfices disponibles qui ont été soumis à l'impôt sur les sociétés au taux normal prévu au deuxième alinéa du I de l'article 219 du code déjà cité au titre du dernier exercice clos ; / Puis, sur les bénéfices disponibles qui ont été imposés à ce même taux au titre d'exercices antérieurs clos depuis cinq ans au plus ; / Enfin, sur tous autres bénéfices ou réserves disponibles. / Toutefois, si la personne morale a encaissé, au cours d'exercices clos depuis cinq ans au plus, des produits de participations ouvrant droit au régime des sociétés mères, les distributions peuvent être librement imputées sur ces produits. / II bis. Les distributions mises en paiement à compter du 1er janvier 2000, ouvrant droit ou non à l'avoir fiscal, sont prélevées d'abord sur les bénéfices soumis à l'impôt sur les sociétés ou exonérés au titre d'exercices clos depuis cinq ans au plus, puis sur tous les autres bénéfices ou réserves disponibles ". Aux termes du II de l'article 46 quater-0 E de la même annexe : " Les sommes dont l'imputation est réglée par le II et par le II bis [de l'article 46 quater-0 D] s'entendent du total des revenus distribués et du précompte afférent à la distribution ". Aux termes de l'article 46 quater 0 F de la même annexe : " La personne morale est tenue d'adresser au bureau désigné à l'article 381 T de la présente annexe une déclaration faisant connaître les imputations opérées conformément aux dispositions de l'article 46 quater-0 D. / Cette déclaration doit être souscrite dans le mois qui suit la répartition des produits, sur des imprimés fournis par l'administration ".
6. La déclaration de précompte a pour objet de permettre d'identifier les bénéfices sur lesquels les sommes distribuées par une société ont été prélevées et si ces bénéfices ont été imposés au taux normal de l'impôt sur les sociétés, afin de déterminer l'assiette du précompte dans les cas où celui-ci serait exigible. La circonstance que le droit de l'Union européenne fasse obstacle au prélèvement d'un précompte à raison de la redistribution de produits de filiales établies dans un Etat membre de l'Union autre que la France ne remet pas, par elle-même, en cause la possibilité de recourir aux éléments portés dans cette déclaration pour déterminer le montant du précompte dont une société demeure redevable à raison de la distribution d'autres bénéfices ainsi que celui dont elle est fondée à obtenir la restitution.
7. En premier lieu, la restitution du précompte ne peut être accordée qu'à la condition que son versement soit intervenu de manière effective, au titre de l'année en cause, à raison de la redistribution de dividendes issus de filiales établies dans un Etat membre de l'Union européenne autre que la France. L'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne C-389/18 du 19 décembre 2019 Brussels Securities dont elle se prévaut, qui a jugé contraire à la directive mère-fille le régime belge d'imputation des dividendes en ce qu'il pouvait conduire à imposer des dividendes reçus de filiales européennes, et auquel l'arrêt C-556/20 du 12 mai 2022 Schneider Electric ne fait référence que pour rappeler le principe de neutralité, sur le plan fiscal, de la distribution de bénéfices par une société filiale sise dans un État membre à sa société mère établie dans un autre État membre et l'interdiction d'une règlementation qui conduit directement ou indirectement à imposer ces dividendes, n'impose pas, contrairement à ce que soutient la société Chargeurs, que cette société soit admise à présenter des déclarations modificatives ne correspondant pas aux distributions qu'elle a effectivement réalisées. La société requérante n'est pas davantage fondée à soutenir que ses déclarations de précompte ont été viciées par le modèle de déclaration fourni par l'administration, dès lors que le formulaire de déclaration de précompte ne faisait pas obstacle au choix de la société d'imputation de ses dividendes à ses redistributions, lequel constitue une décision de gestion qui lui est opposable. Le respect de l'objectif de neutralité fiscale du régime des sociétés mères n'imposant pas d'autoriser les sociétés mères à imputer sur le précompte le crédit d'impôt attaché aux produits de participation qui n'ont pas été effectivement redistribués, la société requérante ne soutient pas utilement qu'elle disposait d'un stock de dividendes reçus de ses filiales européennes supérieur à celui qui figure dans ses déclarations de précompte, qu'elle aurait pu affecter prioritairement à ces distributions. Il s'ensuit que la société Chargeurs ne saurait obtenir la restitution d'un précompte mobilier calculé sur des redistributions excédant la redistribution effective des dividendes perçus de ses filiales européennes.
8. En second lieu, il résulte des dispositions de l'article 46 quater-0 E de l'annexe III au code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'imposition en litige que " les sommes dont l'imputation est réglée par le II et par le II bis [de l'article 46 quater-0 D de la même annexe] s'entendent du total des revenus distribués et du précompte afférent à la distribution ". Il s'ensuit que les montants mentionnés dans la déclaration de précompte comme imputés sur les différents postes de résultats disponibles s'entendent du total des revenus effectivement distribués et du précompte y afférent. Est dès lors sans incidence la circonstance que le précompte aurait été imputé sur d'autres fonds ou distributions ne provenant pas de dividendes de source européenne.
9. Il résulte de l'instruction que la société Chargeurs a déclaré avoir affecté à ses distributions à ses actionnaires, au titre de l'année 2001, la somme de 1 222 376 euros de dividendes de source européenne reçus en 1997 et, au titre de l'année 2002, une somme redistribuée de 11 552 562 euros provenant de dividendes reçus de ses filiales européennes au cours des années 1998, 1999 et 2000. Dès lors que le précompte est acquitté au titre de l'année de redistribution aux actionnaires, il n'y a pas lieu de tenir compte de " l'enveloppe de distribution composée de dividendes européens " au titre de chaque année au cours de laquelle ces dividendes ont été reçus. Le montant du précompte mobilier à restituer doit dès lors être fixé au tiers des dividendes de source européennes redistribués par la société Chargeurs, soit en l'espèce, aux sommes de 407 459 euros au titre de l'année 2001 et de 3'850'854 euros au titre de l'année 2002. L'administration fiscale ayant dégrevé les sommes de 407 459 euros au titre du précompte mobilier acquitté en 2001 et de 2 503 020 euros au titre du précompte mobilier acquitté en 2002, la société Chargeurs est seulement fondée à demander que lui soit restituée une somme complémentaire de 1 347'834 euros au titre de l'année 2002.
Sur les intérêts moratoires :
10. Aux termes de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales : " Quand l'Etat est condamné à un dégrèvement d'impôt par un tribunal (...), les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires dont le taux est celui de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du code général des impôts. Les intérêts courent du jour du paiement. Ils ne sont pas capitalisés. ".
11. En l'absence de litige né et actuel entre le comptable et la société requérante concernant les intérêts mentionnés à l'article L. 208 du livre des procédures fiscales. Les conclusions tendant au versement par l'Etat d'intérêts moratoires ne peuvent qu'être rejetées.
12. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle, que la société Chargeurs est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement n° 0713439 du 31 mars 2014, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté le surplus de sa demande de restitution du précompte mobilier au titre de l'année 2002, à hauteur d'une somme complémentaire au dégrèvement prononcé en cours d'instance de 1 347'834 euros.
Sur les frais de l'instance :
13. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur la demande de restitution du précompte mobilier acquitté par la société Chargeurs à hauteur des sommes de 407 459 euros au titre de l'année 2001 et 2 503 020 euros au titre de l'année 2002 dégrevées en cours d'instance.
Article 2 : Il est restitué à la société Chargeurs une somme complémentaire de 1 347'834 euros au titre du précompte mobilier acquitté en 2002.
Article 3 : Le jugement n° 0713439 du 31 mars 2014 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera la somme de 2 000 euros à la société Chargeurs au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Chargeurs est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SA Chargeurs et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 15 décembre 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Versol, présidente de chambre,
Mme Dorion, présidente-assesseure,
M. Tar, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 janvier 2024.
La rapporteure,
O. DORION La présidente,
F. VERSOLLa greffière,
S. LOUISERE
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
2
N° 23VE00624