Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a implicitement rejeté sa demande d'attribution de la nouvelle bonification indiciaire à compter du 1er janvier 2016.
Par un jugement n° 1903731 du 21 mars 2023, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de Mme B....
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 16 mai 2023, Mme B..., représentée par Me Farrugia, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1903731 du 21 mars 2023 du tribunal administratif de Nice ;
2°) d'annuler la décision du garde des sceaux, ministre de la justice, portant rejet de sa demande d'attribution de la nouvelle bonification indiciaire à compter du 1er janvier 2016 ;
3°) d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice, de lui attribuer le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire et de lui verser les sommes correspondantes qui porteront intérêt au taux légal à compter du 1er janvier 2019, et ce, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal administratif de Nice a ajouté aux textes légaux en indiquant que les locaux doivent être dans les quartiers sensibles ;
- il résulte des pièces versées aux débats que la ville de Nice est couverte par un contrat local de sécurité et elle exerce principalement ses fonctions dans un secteur couvert par le contrat local de sécurité, de sorte qu'elle doit bénéficier de la nouvelle bonification indiciaire.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 octobre 2023, le garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 6 octobre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 octobre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la sécurité intérieure ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991 ;
- le décret n° 2001-1061 du 14 novembre 2001 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné M. Revert, président assesseur, pour présider la formation de jugement de la 4ème chambre, en application des dispositions de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Martin,
- les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique,
- et les observations de Me Farrugia, représentant Mme B....
Une note en délibéré présentée par Mme B... a été enregistrée le 21 décembre 2023.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., éducatrice de la protection judiciaire de la jeunesse affectée depuis le 1er janvier 2016 au sein de l'unité éducative en milieu ouvert (UEMO) de Nice Ouest, a sollicité, par courrier du 15 mai 2019, l'attribution de la nouvelle bonification indiciaire à compter de la date de son affectation. Par un jugement du 21 mars 2023, dont Mme B... relève appel, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle l'administration a rejeté sa demande.
2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire. Les indemnités peuvent tenir compte des fonctions et des résultats professionnels des agents ainsi que des résultats collectifs des services (...) ". Aux termes de l'article 27 de la loi du 18 janvier 1991 portant dispositions relatives à la santé publique et aux assurances sociales : " La nouvelle bonification indiciaire des fonctionnaires et des militaires instituée à compter du 1er août 1990 est attribuée pour certains emplois comportant une responsabilité ou une technicité particulières dans des conditions fixées par décret. ". Aux termes de l'article 1er du décret du 14 novembre 2001 relatif à la nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville dans les services du ministère de la justice : " Une nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville (...) peut être versée mensuellement (...) aux fonctionnaires titulaires du ministère de la justice exerçant, dans le cadre de la politique de la ville, une des fonctions figurant en annexe au présent décret. ". Lesdites fonctions comprennent, selon l'annexe à ce décret en vigueur à compter du 1er janvier 2015 : " (...) Fonctions de catégories A, B, C de la protection judiciaire de la jeunesse : / 1. En centre de placement immédiat, en centre éducatif renforcé ou en foyer accueillant principalement des jeunes issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville ; / 2. En centre d'action éducative situé dans un quartier prioritaire de la politique de la ville ; / 3. Intervenant dans le ressort territorial d'un contrat local de sécurité ".
3. Il résulte des dispositions précitées de la loi du 18 janvier 1991 et du décret du 14 novembre 2001 que le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire n'est pas lié au corps d'appartenance ou au grade des fonctionnaires, mais aux emplois qu'ils occupent, compte tenu de la nature des fonctions attachées à ces emplois.
4. En premier lieu, d'une part, les contrats locaux de sécurité, définis par la circulaire du 28 octobre 1997 NOR : INTK9700174, sont des outils d'une politique de sécurité s'appliquant en priorité aux quartiers sensibles, conclus sous l'impulsion du maire d'une ou plusieurs communes et du représentant de l'Etat dans le département, lorsque la délinquance est particulièrement sensible sur un territoire donné. D'autre part, en application des dispositions de l'article L. 132-4 du code de sécurité intérieure, dans leur version alors applicable, le maire ou son représentant préside un conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD) dans les communes de plus de 10 000 habitants et dans les communes comprenant un quartier prioritaire de la politique de la ville. Enfin, aux termes de l'article D. 132-7 de ce même code : " Le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance constitue le cadre de concertation sur les priorités de la lutte contre l'insécurité et de la prévention de la délinquance dans la commune. / (...) / Il assure l'animation et le suivi du contrat local de sécurité lorsque le maire et le préfet de département, après consultation du procureur de la République et avis du conseil, ont estimé que l'intensité des problèmes de délinquance sur le territoire de la commune justifiait sa conclusion. ".
5. La circonstance que les contrats locaux de sécurité sont conclus en priorité dans des quartiers prioritaires de la politique de la ville et sont animés, lorsqu'ils existent, par le CLSPD, n'a ni pour objet ni pour effet que tout quartier prioritaire politique de la ville soit couvert par un contrat local de sécurité. Pour bénéficier de la nouvelle bonification indiciaire prévue par l'article 1er du décret du 14 novembre 2001 précité, les fonctionnaires titulaires du ministère de la justice figurant en annexe à ce décret entendant se prévaloir de la condition prévue au point 3 de cette annexe doivent apporter la preuve, par tout moyen, qu'ils accomplissent la majeure partie de leur activité dans le ressort territorial d'un ou plusieurs contrats locaux de sécurité, quel que soit, par ailleurs, leur lieu d'affectation.
6. Il résulte de ce qui a été exposé au point précédent que si la commune de Nice dispose d'un CLSPD, une telle circonstance n'implique pas nécessairement, par elle-même, l'existence d'un contrat local de sécurité. Au demeurant, contrairement à ce que soutient l'appelante, si le projet territorial de la protection judiciaire de la jeunesse des Alpes-Maritimes 2015-2017 évoque le partenariat mis en place avec la mairie de Nice et la métropole Nice
Côte d'Azur notamment dans le cadre du CLSPD, ce document ne permet pas non plus d'établir l'existence d'un contrat local de sécurité sur le territoire communal. Dans ces conditions, Mme B... n'établit pas que l'ensemble de la ville de Nice, pas plus que les quartiers dans lesquels elle soutient exercer ses missions, se situerait dans le ressort d'un contrat local de sécurité.
7. En deuxième lieu, Mme B... soutient qu'elle pouvait bénéficier de la nouvelle bonification indiciaire dès lors qu'elle exerce ses missions dans un quartier prioritaire de la politique de la ville. Toutefois, si les différentes UEMO peuvent être assimilées à des centres d'action éducative, la condition pour prétendre au bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire, prévue par l'annexe du décret du 14 novembre 2001, tenant à l'exercice des fonctions d'éducateur de la protection judiciaire de la jeunesse en centre d'action éducative situé, jusqu'au 1er janvier 2015, en zone urbaine sensible, et, après cette date, en quartier prioritaire de la politique de la ville, est d'application stricte. Alors que le garde des sceaux, ministre de la justice a fait valoir, en première instance, que l'UEMO d'affectation de Mme B... n'est pas située dans un quartier prioritaire de la politique de la ville et qu'il a produit, au soutien de cette affirmation, une capture d'écran du système d'information géographique de la politique de la ville, Mme B... ne produit en cause d'appel aucun élément de nature à contredire une telle affirmation. Dans ces conditions qui ne mettent donc pas au jour l'implantation, dans un tel quartier, du centre d'affectation de l'intéressée, celle-ci n'est pas fondée à soutenir qu'elle doit bénéficier de la nouvelle bonification indiciaire.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande d'annulation de la décision implicite portant rejet de sa demande du 15 mai 2019 tendant au bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire. Par suite, sa requête d'appel doit être rejetée, y compris ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre des frais d'instance.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 19 décembre 2023, où siégeaient :
- M. Revert, président,
- M. Martin, premier conseiller,
- M. Lombart, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition du greffe, le 9 janvier 2024.
N° 23MA01203 2