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29/12/2023 | FRANCE | N°22TL22268

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 29 décembre 2023, 22TL22268


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... a demandé au tribunal administratif de Toulouse l'annulation de l'arrêté du 21 décembre 2021 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande d'admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé la destination de la mesure d'éloignement.



Par un jugement n° 2200157 du 21 mars 2022, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a rejeté

sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 18 novembr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... a demandé au tribunal administratif de Toulouse l'annulation de l'arrêté du 21 décembre 2021 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande d'admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé la destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2200157 du 21 mars 2022, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 novembre 2022, et un mémoire du 14 avril 2023, M. A..., représenté par Me Bachelet, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 21 mars 2022 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2021 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande d'admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé la destination de la mesure d'éloignement ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer le titre de séjour temporaire sollicité dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou à tout le moins, de procéder au réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'État, au bénéfice de son conseil, une somme de 2000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision portant refus de séjour est entachée d'un défaut de motivation ; une telle insuffisance de motivation révèle un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur de droit au regard de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle créée en ce qui concerne les avis rendus par le collège de médecins, un régime dérogatoire de charge de la preuve, au détriment des ressortissant étrangers ;

- il justifie de l'impossibilité de bénéficier de soins en Angola alors que son état de santé nécessite un suivi cardiologique et neurologique et un traitement quotidien à vie ; il ne pourrait bénéficier de ces soins en cas de retour en Angola, son pronostic vital risquant dès lors d'être engagé ; la décision de refus de séjour est donc entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'un défaut de base légale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour ; elle est entachée d'une erreur de droit au regard du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile compte tenu des conséquences d'une exceptionnelle gravité en cas de retour en Angola et de l'absence d'accès effectif aux soins ; l'obligation de quitter le territoire est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision portant fixation du pays de destination de la mesure d'éloignement est entachée d'un défaut de base légale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 mars 2023, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par une décision du 21 octobre 2022, le bureau d'aide juridictionnelle auprès du tribunal judiciaire de Toulouse a accordé à M. A... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bentolila,

- et les observations de Me Bachelet, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant angolais, né le 10 décembre 1980, est entré en France irrégulièrement, à une date qu'il indique être le 26 octobre 2019 et a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile. L'intéressé a aussi sollicité, le 7 janvier 2020, son admission au séjour en qualité d'étranger malade. La Cour nationale du droit d'asile a rejeté de façon définitive sa demande d'asile le 14 décembre 2021. Par un arrêté du 21 décembre 2021, le préfet de la Haute-Garonne a rejeté la demande d'admission au séjour présentée par M. A... que ce soit au titre de l'asile ou en qualité d'étranger malade, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

2. Par la présente requête, M. A... relève appel du jugement du 21 mars 2022, par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / À cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Et aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

4. Il ressort, ainsi que l'a relevé à bon droit le premier juge, des termes de l'arrêté attaqué, que le préfet de la Haute-Garonne a visé les articles des textes dont il a entendu faire application pour rejeter la demande de titre de séjour, à savoir en particulier l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Cet arrêté mentionne par ailleurs les conditions d'entrée en France de l'intéressé, le rejet définitif de sa demande d'asile par la Cour nationale du droit d'asile le 14 décembre 2021 et sa demande d'admission au séjour en qualité d'étranger malade, le 7 janvier 2021. Il mentionne, de plus, l'avis rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le 23 mars 2021 et considère que M. A... ne justifie pas être dans l'impossibilité d'accéder aux soins dans son pays d'origine. Le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation de l'arrêté litigieux doit donc être écarté. Pour les mêmes raisons, le refus de séjour ne peut être regardé comme entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. (...). / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. / Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. / Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée (...) ".

6. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. Pour déterminer si un étranger peut bénéficier effectivement dans le pays dont il est originaire d'un traitement médical approprié, au sens de ces dispositions, il convient de s'assurer, eu égard à la pathologie de l'intéressé, de l'existence d'un traitement approprié et de sa disponibilité dans des conditions permettant d'y avoir accès.

7. En l'espèce, dans son avis rendu le 23 mars 2021, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais que l'intéressé peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine et qu'il peut, au vu de son état de santé, voyager sans risque vers ce pays.

8. Dans ces conditions, contrairement à ce que persiste à soutenir M. A... en appel, et sans que le premier juge ait à cet égard commis une erreur de droit, il lui appartient d'établir qu'il ne pourrait pas avoir accès de façon effective au traitement nécessité par son état de santé, en cas de retour en Angola. À cet égard, ainsi que l'a considéré à bon droit le premier juge, si les affections dont souffre l'intéressé nécessitent un traitement composé de Coveram et de Fludex, il ne ressort des pièces du dossier ni que ces médicaments seraient indisponibles en Angola, ni qu'il ne pourrait pas avoir un accès effectif à ces médicaments. Par suite, il ne renverse pas la présomption posée par l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 23 mars 2021. Il en résulte que le préfet de la Haute-Garonne n'a commis ni erreur de droit, ni erreur d'appréciation au regard de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire :

9. En premier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4 du présent arrêt, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire doit être écarté.

10. En deuxième lieu, compte tenu du rejet des conclusions dirigées contre le refus de séjour, le moyen invoqué à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire par voie d'exception d'illégalité de l'obligation du refus de séjour, doit être écarté.

11. En troisième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) / 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ". Pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 8 du présent arrêt, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas méconnu les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

En ce qui concerne la décision portant fixation du pays de destination de la mesure d'éloignement :

12. En premier lieu, faute pour M. A... d'avoir fait valoir devant le préfet, pas plus qu'il ne le fait valoir au contentieux, l'existence de risques en cas de retour en Angola, en indiquant que l'intéressé n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine, le préfet de la Haute-Garonne a suffisamment motivé la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement.

13. En second lieu, compte tenu du rejet des conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire, le moyen invoqué à l'encontre de la décision portant fixation du pays de destination de la mesure d'éloignement par voie d'exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire, doit être écarté.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 19 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme Beltrami, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 décembre 2023.

Le rapporteur,

P. Bentolila

Le président,

É. Rey-Bèthbéder

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22TL22268

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL22268
Date de la décision : 29/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BÈTHBÉDER
Rapporteur ?: M. Pierre BENTOLILA
Rapporteur public ?: Mme PERRIN
Avocat(s) : BACHELET

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-29;22tl22268 ?
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