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27/12/2023 | FRANCE | N°23NC00730

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 27 décembre 2023, 23NC00730


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 7 juin 2022 par lequel le préfet de la Marne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2201556 du 2 février 2023, le tribunal administratif de

Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :

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Par une requête, enregistrée le 3 mars 2023, Mme B..., représentée par Me Gervais, demande à la cour :



1°) d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 7 juin 2022 par lequel le préfet de la Marne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2201556 du 2 février 2023, le tribunal administratif de

Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 mars 2023, Mme B..., représentée par Me Gervais, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 2 février 2023 du tribunal administratif de

Châlons-en-Champagne ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 juin 2022 par lequel le préfet de la Marne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Marne de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou, à défaut, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- il méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Le préfet de la Marne n'a pas produit.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 15 juin 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Bauer a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante arménienne née le 5 février 1955, déclare être entrée en France en novembre 2011 pour solliciter l'octroi du statut de réfugié. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 29 juin 2012, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 14 février 2013. Elle a alors sollicité son admission exceptionnelle au séjour, qui lui a été refusée par un arrêté du préfet de la Marne du 5 décembre 2013, par lequel elle a, en outre, été obligée de quitter le territoire français. Le 30 mars 2015, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour au regard de son état de santé et s'est vu délivrer un titre de séjour à cet effet, régulièrement renouvelé jusqu'en décembre 2021. Par un arrêté du 7 juin 2022, le préfet de la Marne a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. L'intéressée a demandé l'annulation de cet arrêté. Par un jugement du 2 février 2023, dont Mme B... relève appel, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés :

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. ".

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... est entrée en France en 2011 et y séjourne depuis 2015 en situation régulière sous couvert de titres de séjour pour raisons médicales en raison de différentes pathologies, dont une insuffisance respiratoire nécessitant une assistance respiratoire à domicile dans un contexte d'obésité, une hypertension artérielle, une hypothyroïdie et un syndrome de stress post-traumatique associé à une dépression chronique, nécessitant un suivi constant et des traitements médicamenteux. Elle réside par ailleurs avec son fils handicapé de 36 ans, en situation régulière, lequel souffre d'importants troubles visuels et de troubles psychiatriques nécessitant un suivi constant. Il n'est pas contesté qu'ils s'apportent mutuellement assistance dans la vie quotidienne, et qu'aucune personne tierce ne peut remplir ce rôle, de sorte qu'elle doit demeurer à ses côtés. Dès lors, dans les circonstances particulières de l'espèce, la requérante est fondée à soutenir que l'arrêté attaqué a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et a ainsi méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il doit par suite être annulé.

4. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 2 février 2023, le tribunal administratif de

Châlons-en-Champagne a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté attaqué.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Au regard des motifs du présent arrêt, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Marne de délivrer à Mme B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de sa notification.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

6. Il résulte des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative que l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait pas eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

7. Il y a lieu, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à Me Gervais, avocat de Mme B..., sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

D E C I D E :

Article 1 : Le jugement n° 2201556 du 2 février 2023 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est annulé.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Marne de délivrer à Mme B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Gervais, avocat de Mme B..., une somme de 1 000 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., à Me Gervais et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Marne.

Délibéré après l'audience du 5 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Wurtz, président,

- Mme Bauer, présidente-assesseure,

- M. Meisse, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 décembre 2023.

La rapporteure,

Signé : S. BAUER Le président,

Signé : Ch. WURTZ

Le greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

F. LORRAIN

2

N° 23NC00730


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC00730
Date de la décision : 27/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: Mme Sandra BAUER
Rapporteur public ?: M. MARCHAL
Avocat(s) : GERVAIS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-27;23nc00730 ?
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