Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2022 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 2210860 du 28 mars 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 8 août 2023, M. A..., représenté par Me Chartier, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 28 mars 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2022 du préfet des Bouches-du-Rhône ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) subsidiairement, d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de réexaminer sa situation après saisine de la commission du titre de séjour, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;
- il est entaché d'un vice de procédure en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;
- il méconnaît les dispositions des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire.
La demande d'aide juridictionnelle de M. A... a été rejetée par décision du 30 juin 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Rigaud a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., ressortissant turc né le 1er janvier 1971, relève appel du jugement du 28 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 novembre 2022 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande d'admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement.
2. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 de ce même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
3. Il ressort des termes de l'arrêté du 22 novembre 2022 qu'il comporte l'ensemble des considérations de droit et de fait qui le fonde. Le préfet des Bouches-du-Rhône indique le parcours de M. A..., rappelle que ce dernier déclare être entré en France le 25 mars 2009 et s'y être maintenu continuellement depuis, malgré l'édiction à son encontre de trois précédentes obligations de quitter le territoire le 30 août 2012, le 2 avril 2015 et le 30 septembre 2020, dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Marseille du 15 février 2021, indique que l'intéressé ne justifie pas l'ancienneté et la stabilité des liens personnels et familiaux dont il pourrait se prévaloir au sens de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'il ne démontre pas d'insertion sociale ou professionnelle significative sur le territoire français, qu'il ne fait valoir aucun motif exceptionnel ou considérations humanitaires qui justifieraient son admission au séjour dans le cadre des dispositions de l'article L. 435-1 du même code, précise que sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 18 novembre 2009, décision confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 28 février 2011. L'autorité préfectorale relève, en outre, la situation familiale de M. A..., dont les cinq enfants résident en Turquie. Le préfet des Bouches-du-Rhône, qui n'était tenu ni de faire état de l'ensemble des éléments caractérisant la situation personnelle de l'intéressé ni de préciser son analyse des pièces produites par celui-ci dans le cadre de sa demande d'admission au séjour, a dès lors suffisamment motivé sa décision. Par suite, le moyen tiré de ce que cette décision serait insuffisamment motivée doit être écarté.
4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".
5. En l'espèce, si M. A... déclare être entré pour la dernière fois en France le 25 mars 2009 et s'y être maintenu continuellement depuis, les pièces qu'il produit sont insuffisantes, eu égard à leur nature, pour démontrer une présence habituelle en France depuis cette date et notamment pour les années 2013, 2015, 2016 et 2021. En outre, M. A..., âgé de 51 ans à la date de l'arrêté en litige, demeure célibataire et sans charge de famille en France, tandis qu'il ressort des pièces du dossier que ses enfants résident en Turquie et qu'il subvient aux besoins des membres de sa famille résidant dans son pays d'origine en leur adressant de nombreux versements d'argent depuis 2016, révélant ainsi, contrairement à ce qu'il soutient, qu'il n'a pas rompu tout lien avec ces derniers. Dans ces conditions, et alors qu'il ne justifie d'aucune insertion socioprofessionnelle particulière, M. A..., qui s'est maintenu sur le territoire français malgré l'édiction à son encontre d'un arrêté du 30 août 2012 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français, dont la légalité a été confirmée en dernier lieu par un arrêt de la cour du 4 novembre 2014, d'un arrêté du 2 avril 2015 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français, dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Marseille du 1er décembre 2015, et d'un arrêté du 30 septembre 2020 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français, dont la légalité a été confirmée un jugement du tribunal administratif de Marseille du 15 février 2021, ne peut être regardé comme ayant établi en France le centre de ses intérêts privés et familiaux. Le requérant n'est donc pas fondé à soutenir que l'arrêté contesté aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et aux dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
6. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ".
7. En l'espèce, ainsi qu'il a été exposé au point 5 du présent arrêt, M. A... ne justifie pas de la réalité de sa présence continue sur le territoire, comme il l'allègue, ou même habituelle sur toute la période depuis le 25 mars 2009, et ne démontre pas y avoir transféré le centre de ses intérêts privés et familiaux. Par ailleurs, il ne fait pas état de motifs exceptionnels ou de considérations humanitaires, ni même d'autres éléments qui seraient de nature à l'admettre exceptionnellement au séjour. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet des Bouches-du-Rhône aurait méconnu les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou qu'il aurait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions doit être écarté.
8. Aux termes de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour qui est saisie pour avis par l'autorité administrative : 1° Lorsqu'elle envisage de refuser de délivrer ou de renouveler la carte de séjour temporaire prévue aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-13, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21, L. 423-22, L. 423-23, L. 425-9 ou L. 426-5 à un étranger qui en remplit effectivement les conditions de délivrance ; (...) 4° Dans le cas prévu à l'article L. 435-1. ".
9. Il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues par les articles précités auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions.
10. Il résulte de ce qui précède que le requérant ne remplit pas les conditions de délivrance du titre de séjour qu'il sollicitait sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et qu'il ne justifie pas résider en France habituellement depuis plus de dix ans. Le préfet des Bouches-du-Rhône n'était donc pas tenu, avant de rejeter la demande de titre de séjour présentée par M. A..., de saisir la commission du titre de séjour.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué du 28 mars 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête. Ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Chartier et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 7 décembre 2023, à laquelle siégeaient :
- Mme Cécile Fedi, présidente de chambre,
- Mme Lison Rigaud, présidente-assesseure,
- M. Jérôme Mahmouti, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 décembre 2023.
N° 23MA02078 2