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22/12/2023 | FRANCE | N°22MA01633

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 22 décembre 2023, 22MA01633


Vu les autres pièces du dossier.





Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.



Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.



Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Danveau,

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,

- les observations de Me Gaudin, représentant M. et Mme E....





Considérant

ce qui suit :



1. M. et Mme E... ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle au titre des années 2013 ...

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Danveau,

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,

- les observations de Me Gaudin, représentant M. et Mme E....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme E... ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle au titre des années 2013 à 2015, à l'issue duquel une proposition de rectification du 5 décembre 2016, portant sur l'année 2013, et du 8 juin 2017, portant sur les années 2014 et 2015, leur ont été notifiées. Par ailleurs, la société anonyme à responsabilité limitée (SARL) B Plus et la société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU) E... Expertise ont respectivement fait l'objet d'une vérification de comptabilité et ont donné lieu à des rehaussements ayant eu une incidence sur l'imposition personnelle de M. et Mme E.... Les conséquences du contrôle de la SARL B Plus ont été notifiées à M. et Mme E... par une proposition de rectification du 9 décembre 2016, annulée et remplacée par une proposition de rectification du 24 mai 2017. Les conséquences sur les impositions personnelles de M. et Mme E... de la vérification de comptabilité ayant concerné la SASU E... Expertise ont fait l'objet d'une proposition de rectification datée du 12 décembre 2016. M. et Mme E... relèvent appel du jugement du 11 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande tendant à obtenir la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 à 2015 et de la taxe sur les plus-values immobilières mise à leur charge au titre de l'année 2015.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " (...) / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes (...). / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux. ".

3. Il ressort des pièces de la procédure suivie devant le tribunal administratif que M. et Mme E... ont produit, le 23 juillet 2021, soit avant la clôture de l'instruction, un mémoire en réplique, qui n'a pas été communiqué. Toutefois, ce second mémoire ne contenait aucun élément nouveau par rapport aux éléments déjà produits dans le cadre de la requête introductive d'instance enregistrée le 25 octobre 2019. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'absence de communication de ce nouveau mémoire a entaché d'irrégularité la procédure suivie devant les premiers juges, lesquels, au demeurant, se sont fondés expressément sur l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

4. Par ailleurs, M. et Mme E... ne peuvent utilement se prévaloir de ce que le principe du caractère contradictoire de la procédure s'en serait trouvé méconnu, dès lors qu'un défaut de communication de leurs propres écritures à la partie adverse ne saurait avoir préjudicié à leurs droits.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne les sommes inscrites au compte courant d'associé de la société BTCE :

5. Aux termes de l'article 109-1 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. ". Il résulte de ces dispositions que les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés ont, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, le caractère de revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

6. Les requérants soutiennent que Mme E..., en sa qualité d'associée de la société BTCE, n'a pas eu la disposition des sommes de 88 493 euros au titre de l'année 2013 et de 28 803,92 euros au titre de l'année 2014 en raison de la situation de trésorerie de cette société en cessation de paiement, qui l'a conduite à s'abstenir de retirer lesdites sommes de son compte, puis à consentir l'abandon des créances qu'elle détenait sur celle-ci. Toutefois, s'il résulte de l'instruction que le compte bancaire de la société présentait un solde débiteur de 50 937,46 euros au 31 décembre 2013, puis de 28 803,92 euros au 28 février 2014, le solde est devenu créditeur, à hauteur de 57,35 euros, à la date du 31 mars 2014. Le ministre fait valoir, sans être contredit sur ce point, que la société BTCE disposait d'une créance auprès du Trésor public d'un montant de 21 586 euros et a vendu des actifs immobilisés à hauteur de 24 396 euros en mars 2014. Dans ces conditions, les requérants ne démontrent pas, en produisant le seul extrait du grand libre général de la société BTCE arrêté au 18 décembre 2013 et deux relevés bancaires de janvier et février 2014, que la situation de la trésorerie de la société aurait empêché Mme E... de prélever intégralement la somme correspondant à sa créance. Il ne résulte pas davantage de l'instruction que l'associée aurait été empêchée d'opérer en droit tout prélèvement, le ministre précisant à cet égard qu'il n'existait aucune clause d'indisponibilité ou de blocage du compte courant d'associé faisant obstacle à la libre disposition des sommes en cause. Il n'est pas non plus établi que des lignes de crédit n'auraient pas été ouvertes dans un établissement bancaire ou que la société BTCE ne disposait pas d'autres comptes bancaires, permettant à Mme E... d'obtenir le paiement des créances qu'elle détenait sur la société. Enfin, il n'est pas contesté que la société BTCE n'a pas été contrainte de cesser son activité par l'effet d'une procédure collective mais que cette cessation d'activité résulte d'un accord amiable entre ses deux associés. Par suite et pour l'ensemble de ces motifs, le moyen tiré de ce que Mme E... n'aurait pas disposé des sommes litigieuses doit être écarté.

7. M. et Mme E... ne sont pas fondés à se prévaloir de la réponse ministérielle n° 22043 faite à M. B... du 10 juin 2021, qui ne fait pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle dont il est fait application.

En ce qui concerne les revenus issus de la SARL B Plus :

8. M. et Mme E... invoquent l'irrégularité de la notification des actes de la procédure d'imposition adressés à la SARL B Plus et l'atteinte au débat oral et contradictoire de la procédure d'imposition, en soutenant que l'administration n'a pas demandé et obtenu la désignation d'un mandataire habilité à représenter la société dissoute. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 4 du jugement attaqué, d'écarter ces moyens que les requérants reprennent en appel sans apporter d'éléments nouveaux.

9. M. et Mme E... reprennent en appel les moyens tirés de ce que les redressements concernant les remboursements de frais de la SARL B Plus d'un montant de 56 158,44 euros, les dépenses de réparation d'un véhicule " Volkswagen Golf " exposées par la même société d'un montant de 3 616 euros, et le paiement d'une dette de 55 000 euros au profit de M. E... sont infondés et ne constituent pas des revenus distribués. Toutefois, ils n'apportent aucun élément de fait ou de droit nouveau de nature à remettre en cause l'appréciation portée sur ces moyens par les premiers juges. Par suite, il y a lieu de les écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal aux points 6 à 8 du jugement attaqué.

10. Il résulte de l'instruction que si la SARL B Plus a pour gérante de droit Mme D..., M. E... exerce, au sein de l'entreprise dont son épouse est associée, des pouvoirs excédant ceux d'un architecte d'espace, emploi pour lequel il a été recruté à temps partiel à compter du 2 janvier 2015. A cet égard, il n'est pas contesté que la gérante, qui vit en Pologne, n'a jamais été résidente fiscale française, et n'a jamais été rémunérée en sa qualité de gérante. Une partie importante des dépenses de la société, qui exerce une activité de maçonnerie et a un chiffre d'affaires annuel de 400 000 euros, est réglée non à partir d'un compte bancaire professionnel mais d'un compte personnel ouvert au seul nom de M. E.... Par ailleurs, si la signature du compte bancaire professionnel est détenue par Mme D..., M. E... s'est constitué caution personnelle sur ce compte bancaire et a signé des chèques établis sur le compte bancaire de la société. Il a lui-même signé le procès-verbal de l'assemblée générale du 28 juillet 2015 produit initialement par la société contrôlée dans le cadre de la vérification de comptabilité et son nom apparaît associé à des factures émises et à des contrats conclus en 2014 et 2015. Dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme ayant ainsi réuni des indices précis et concordants, non utilement contestés par les requérants, tirés du fonctionnement même de la société, suffisants pour établir que M. E... se comportait comme un gérant de fait de la SARL B Plus. Par suite, le moyen tiré de ce que M. E... n'était pas co-gérant de fait de la SARL B Plus doit en tout état de cause être écarté.

En ce qui concerne les revenus issus de la SASU E... Expertise :

11. M. et Mme E... reprennent en appel le moyen invoqué en première instance, tiré de ce que la procédure d'imposition suivie à l'égard de la SASU E... Expertise est irrégulière dès lors que les actes de cette procédure auraient dû être notifiés à un mandataire désigné par décision judiciaire. Par un jugement précisément motivé, le tribunal a écarté l'argumentation développée par M. et Mme E... à l'appui de ce moyen. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'écarter le moyen ainsi renouvelé devant la cour par les requérants, qui ne présentent aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation qu'ils avaient développée devant le tribunal.

12. D'une part, aux termes de l'article L. 53 du même livre : " En ce qui concerne les sociétés dont les associés sont personnellement soumis à l'impôt pour la part des bénéfices correspondant à leurs droits dans la société, la procédure de vérification des déclarations déposées par la société est suivie entre l'administration des impôts et la société elle-même. ". D'autre part, aux termes de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient lorsque le désaccord porte : / 1° Sur le montant du résultat industriel et commercial, non commercial, agricole ou du chiffre d'affaires, déterminé selon un mode réel d'imposition ; / 2° Sur les conditions d'application des régimes d'exonération ou d'allégements fiscaux en faveur des entreprises nouvelles (...) ; / 3° Sur l'application du 1° du 1 de l'article 39 et du d de l'article 111 du même code (...) ou du 5 de l'article 39 du même code (...) ; / 4° Sur la valeur vénale des immeubles, des fonds de commerce, des parts d'intérêts, des actions ou des parts de sociétés immobilières servant de base à la taxe sur la valeur ajoutée, en application du 6° et du 1 du 7° de l'article 257 du même code. / (...) Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, la commission peut se prononcer sur le caractère anormal d'un acte de gestion, sur le principe et le montant des amortissements et des provisions ainsi que sur le caractère de charges déductibles des travaux immobiliers. ".

13. Il résulte de l'instruction que, par une assemblée générale extraordinaire qui s'est tenue le 30 juin 2016, la SASU E... Expertise a décidé de sa dissolution à compter du 31 décembre 2016 et que sa radiation est intervenue le 21 mars 2017 suite à la clôture des opérations de liquidation le 31 janvier 2017. Si les requérants soutiennent que la SASU E... Expertise a, par l'intermédiaire de son conseil, sollicité la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, il résulte de l'instruction que cette demande n'est intervenue que le 3 avril 2017, soit après la radiation de la société. Dans ces conditions, la SASU E... Expertise n'ayant plus, à la date du 3 avril 2017, d'existence juridique, c'est à bon droit que l'administration a estimé que sa demande de saisine de la commission n'était pas recevable.

14. Il résulte de l'instruction que la SASU E... a opté pour être imposée à l'impôt sur le revenu et est dès lors régi par les dispositions de l'article 8 du code général des impôts, selon lesquelles les associés sont personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société. En vertu de l'article L. 53 du livre des procédures fiscales, la procédure de vérification des déclarations déposées par la société relevant des dispositions précitées de l'article 8 du code général des impôts est suivie entre l'administration et la société elles-mêmes. Il suit de là que M. et Mme E... ne pouvaient soumettre à la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires le désaccord persistant sur les redressements notifiés à la SASU E.... Par ailleurs, le différend opposant les contribuables à l'administration fiscale portant sur les revenus distribués par la SASU E... expertise ne figure pas au nombre des matières relevant de la commission en application de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales. Par suite, le refus de l'administration fiscale de saisir la commission à la demande de M. et Mme E... n'a pas entaché d'irrégularité la procédure d'imposition.

15. Aux termes de l'article 44 octies A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " I.-Les contribuables qui, entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre (...), créent des activités dans les zones franches urbaines (...) définies au B du 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, ainsi que ceux qui, entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2011, exercent des activités dans les zones franches urbaines (...) définies au deuxième alinéa du B du 3 de l'article 42 de la même loi sont exonérés d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices provenant des activités implantées dans la zone jusqu'au 31 décembre 2010 pour les contribuables qui y exercent déjà une activité au 1er janvier 2006 ou, dans le cas contraire, jusqu'au terme du cinquante-neuvième mois suivant celui du début de leur activité dans l'une de ces zones. (...). / Lorsque l'activité non sédentaire d'un contribuable est implantée dans une zone franche urbaine (...) mais est exercée en tout ou partie en dehors d'une telle zone, l'exonération s'applique si ce contribuable emploie au moins un salarié sédentaire à temps plein ou équivalent, exerçant ses fonctions dans les locaux affectés à l'activité, ou si ce contribuable réalise au moins 25 % de son chiffre d'affaires auprès de clients situés dans les zones franches urbaines (...) ".

16. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ de l'assujettissement à l'impôt contesté ou, le cas échéant, s'il remplit les conditions légales d'une exonération. L'implantation d'une activité en zone franche urbaine s'apprécie, pour le bénéfice de l'exonération prévue par l'article 44 octies A du code général des impôts, au regard de tous éléments pertinents, notamment de la situation des locaux et des moyens d'exploitation utiles à cette activité et de son lieu d'exercice effectif.

17. Il résulte de l'instruction que la SASU E... Expertise, dont M. E... est à la fois président et associé unique, dispose d'un local meublé d'une surface de 7 mètres carrés située dans le périmètre de la zone franche urbaine de la Seyne-sur-Mer. Elle a eu comme clientes, en 2014, la SARL Société Nouvelle Saint-Eutrope, pour laquelle elle a effectué une évaluation de biens immobiliers situés à Aix-Les Milles et la SARL B Plus, qui exerce une activité de travaux de maçonnerie générale et de gros œuvre de bâtiment. En 2015, sa seule cliente était la SARL B Plus. Si les requérants soutiennent que la SASU E... Expertise réalise, conformément à ses statuts, une activité d'expertise immobilière et en assurances qui est par nature sédentaire, il résulte de l'instruction que la société a effectué majoritairement, pour le compte de la société B Plus, des prestations de service en dehors de son site d'implantation, consistant en une activité de suivi d'exécution de chantiers et de réception de travaux, ainsi qu'en atteste le contrat conclu entre elles et les factures d'honoraires portant sur des interventions en dehors de la zone franche concernée. Cette activité a nécessité, ainsi que le fait valoir le ministre en défense sans être contredit sur ce point, des déplacements fréquents sur les lieux des chantiers, le gérant ayant effectué plus de 20 000 kilomètres tant en 2014 qu'en 2015. Les requérants se bornent à produire le contrat et les factures précitées, qui confirment les missions confiées à la société, lesquelles impliquaient des visites sur de nombreux sites de travaux situés à Sanary-sur-Mer, Bandol, Cassis, Aix-Les Milles ou Ajaccio. Ils n'apportent pas davantage en appel qu'en première instance d'éléments de nature à justifier que l'activité de la SASU E... Expertise était de nature sédentaire. Aucun contrat ni aucun autre document de nature à démontrer l'exercice effectif d'une activité dans le local en cause ne sont notamment produits. Par suite, la SASU E... Expertise doit être regardée, au titre des deux années d'imposition en litige, comme exerçant une activité non sédentaire qui n'est pas éligible au régime de faveur réservé aux entreprises implantées en zone franche urbaine. Il convient dès lors d'examiner si elle satisfait à au moins un des deux critères énumérés au I de l'article 44 octies A ci-dessus rappelé.

18. D'une part, il résulte de l'instruction, et il n'est pas contesté, que pour les années concernées, la société n'a pas employé de salarié à temps plein, sédentaire dans le local de l'entreprise à la Seyne-sur-Mer. D'autre part, il résulte des éléments exposés au point précédent, et en l'absence de toute contradiction utile des requérants sur ce point, que la SASU E... Expertise réalise tout ou partie de son chiffre d'affaires en dehors de la zone franche urbaine. La circonstance que la SARL B Plus dispose elle-même de son siège social en zone franche urbaine est à cet égard sans incidence, dès lors que le contribuable doit, au sens de l'article 44 octies A du code général des impôts, être regardé comme réalisant son chiffre d'affaires auprès d'un client situé dans une zone franche urbaine lorsque le lieu de réalisation de l'acte, de la prestation ou de la vente est situé dans une zone franche urbaine, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Dès lors, la SASU E... Expertise ne peut être regardée comme ayant implanté son activité professionnelle en zone franche urbaine pour les années 2014 et 2015 au sens des dispositions de l'article 44 octies A du code général des impôts. Par suite, c'est à bon droit que l'administration fiscale a remis en cause le bénéfice de l'exonération prévue par ces dispositions.

En ce qui concerne la plus-value réalisée à l'occasion de la cession de parts d'une SCI :

19. Aux termes de l'article 150 U du code général des impôts : " I.-Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices agricoles et aux bénéfices non commerciaux, les plus-values réalisées par les personnes physiques ou les sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 ter, lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou de droits relatifs à ces biens, sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH. (...) ". Aux termes de l'article 150 VB du même code : " I.-Le prix d'acquisition est le prix effectivement acquitté par le cédant, tel qu'il est stipulé dans l'acte (...). II.-Le prix d'acquisition est, sur justificatifs, majoré : (...) 3° Des frais afférents à l'acquisition à titre onéreux définis par décret, que le cédant peut fixer forfaitairement à 7, 5 % du prix d'acquisition dans le cas des immeubles à l'exception de ceux détenus directement ou indirectement par un fonds de placement immobilier mentionné à l'article 239 nonies ; (...) ". Aux termes de l'article 41 duovicies I de l'annexe III du code général des impôts : " I. - Pour l'application du II de l'article 150 VB du code général des impôts, les frais supportés par le vendeur à l'occasion de l'acquisition du bien cédé ne peuvent être admis en majoration du prix d'acquisition que si leur montant est justifié. Ils s'entendent exclusivement : (...) 2° Lorsque le bien ou le droit cédé a été acquis à titre onéreux, des frais et coûts du contrat tels qu'ils sont prévus à l'article 1699 du code civil et des droits d'enregistrement ou de la TVA supportés effectivement par le contribuable. (...) ".

20. Il résulte de l'instruction que M. E... a cédé, par acte du 31 mars 2015, 15 parts de la société civile immobilière (SCI) Cap Patrimoine, pour un montant de 424 624,50 euros, et 15 parts de la SCI Cap Liberté, pour un montant de 17 512 euros. Ces opérations n'ont donné lieu à aucune déclaration de plus-value au titre de l'année 2015, lesquelles ont été finalement été déposées le 11 janvier 2017 dans le cadre de la procédure d'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle des requérants. Ces déclarations faisaient état de deux moins-values de 160 021 euros concernant la SCI Cap Patrimoine et de 100 483 euros s'agissant de la SCI Cap Liberté. Les contribuables ont admis ensuite, suite à une demande d'éclaircissements et de justifications de l'administration fiscale, que ces déclarations portaient sur des montants erronés mais n'ont pas déposé de déclaration rectificative, ce qui a conduit le service, par sa proposition de rectification du 8 juin 2017, à déterminer une moins-value de 57 542 euros pour les parts de la SCI Cap Liberté et une plus-value brute de 399 998 euros pour les parts de la SCI Cap Patrimoine, soit une plus-value nette imposable à l'impôt sur le revenu de 255 999 euros. Les requérants demandent uniquement que des droits d'enregistrement d'un montant de 21 045 euros viennent majorer le prix d'acquisition des parts sociales de la SCI Cap Patrimoine pour la détermination de la plus-value faite par le service. Il résulte toutefois des dispositions précitées du code général des impôts que si des frais d'acquisition peuvent majorer le prix d'acquisition, ces frais, qui doivent être justifiés et être pris en compte pour leur montant réel ou pour un montant forfaitaire de 7,5 % du prix d'acquisition, doivent avoir été effectivement supportés par le contribuable. En l'espèce, ces droits d'enregistrement ne peuvent être regardés comme ayant majoré le prix d'acquisition des parts sociales acquitté par le cédant dès lors qu'ils ont été pris en charge par la SCI Cap Patrimoine lors de l'acquisition des biens immobiliers et non par le cédant. Par suite, et sans qu'ait d'influence la circonstance invoquée que la SCI Cap du Patrimoine est une société de personnes dont les bénéfices sont soumis à l'impôt sur le revenu entre les mains des associés, M. et Mme E... ne sont pas fondés à solliciter que les droits d'enregistrement précités doivent venir en majoration des parts sociales de la SCI.

En ce qui concerne les pénalités :

21. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration. "

22. L'administration fiscale fait valoir que M. et Mme E... n'ont déposé aucune déclaration de plus-value immobilière en 2015, résultant de la cession des parts des SCI Cap Liberté et Cap du Patrimoine par acte du 31 mars 2015. Ce n'est que dans le cadre de la procédure d'examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle que des déclarations ont été déposées le 11 janvier 2017, lesquelles se sont avérées erronées, ainsi que le reconnaissent les contribuables qui n'ont cependant déposé aucune déclaration rectificative en dépit des demandes du service. Par ailleurs, les contribuables ne pouvaient ignorer, au vu des propres termes de l'acte de cession des parts, l'obligation de déclarer la plus-value imposable résultant de ces cessions, sauf à faire valoir un cas d'exonération. Les requérants, qui ne peuvent utilement invoquer une erreur de leur comptable, ne sauraient sérieusement justifier leur absence de déclaration jusqu'en 2017 en se bornant à soutenir qu'ils étaient convaincus d'avoir réalisé une moins-value dont ils ont reconnu en tout état de cause le caractère erroné. Par suite, et eu égard par ailleurs à l'importance de la plus-value nette imposable qui s'élève à 255 999 euros, l'administration fiscale apporte la preuve, qui lui incombe en application de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales, de la volonté délibérée de M. et Mme E... d'éluder l'impôt, et par conséquent, du bien-fondé de la pénalité de 40 % qu'elle leur a appliquée sur le fondement des dispositions précitées.

23. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans le cadre de la présente instance, la somme demandée par M. et Mme E... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... et A... E..., au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et au ministre délégué chargé des comptes publics.

Copie en sera adressée au directeur de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré après l'audience du 7 décembre 2023, où siégeaient :

- Mme Fedi, présidente de chambre,

- Mme Rigaud, présidente assesseure,

- M. Danveau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 décembre 2023.

2

N° 22MA01633


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA01633
Date de la décision : 22/12/2023
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-08 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Plus-values des particuliers.


Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: M. Nicolas DANVEAU
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS FIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-22;22ma01633 ?
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