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22/12/2023 | FRANCE | N°22MA00832

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 22 décembre 2023, 22MA00832


Vu les autres pièces du dossier.





Vu :

- le code général des impôts ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.





Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.





Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mahmouti,

- et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.







Considérant ce qui suit :



1. M. B... exerce une activité de marchand de biens et de location de locaux. Estimant qu'il avait indûment acquitté la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge à raison d'opé...

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mahmouti,

- et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... exerce une activité de marchand de biens et de location de locaux. Estimant qu'il avait indûment acquitté la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge à raison d'opérations d'achat-revente d'immeubles anciens ayant fait l'objet de déclarations déposées du 4ème trimestre 2007 à la fin de l'année 2009, il en a, par une réclamation du 21 décembre 2010, réceptionnée le 31 décembre par l'administration, demandé la restitution. Le 15 mai 2014, il a ramené sa demande, qui portait initialement sur une somme de 98 139 euros, à celle de 68 057 euros. Si l'administration a admis, par décision du 10 juin 2016 rejetant sa réclamation, que la taxe sur la valeur ajoutée acquittée à raison de cette activité d'achat-revente était bien restituable à hauteur d'une somme de 71 192 euros, elle a néanmoins refusé de faire droit à la demande du requérant dès lors qu'elle a, sur le fondement de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales, procédé à une compensation de cette créance avec des insuffisances de taxe sur la valeur ajoutée collectée à raison de son activité de location de locaux. M. A... B... a alors demandé au tribunal administratif de Nîmes de prononcer la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée, majorée des intérêts moratoires, qu'il avait acquittée à raison de son activité de marchand de biens au titre des années 2007, 2008 et 2009. Par un jugement n° 1602646 du 19 juillet 2018, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à concurrence d'une somme de 4 615 euros, ce tribunal a rejeté le surplus de sa demande. Par un arrêt n° 18MA04313 du 18 juin 2020, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par M. B... contre ce jugement. Par une décision n° 442722 du 2 mars 2022, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a, sur le pourvoi de M. B..., annulé l'arrêt du 18 juin 2020 de la cour administrative de Marseille et renvoyé l'affaire devant la même cour, où elle a été de nouveau enregistrée le même jour sous le n° 22MA00832.

2.

Sur les conclusions à fin de restitution de la taxe sur la valeur ajoutée demeurant en litige :

En ce qui concerne le moyen tiré de ce que l'administration fiscale aurait effectué au cours de l'instruction de la réclamation contentieuse une vérification de comptabilité sans respecter les garanties du contribuable vérifié :

3. Aux termes de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales : " Lorsqu'un contribuable demande la décharge ou la réduction d'une imposition quelconque, l'administration peut, à tout moment de la procédure et malgré l'expiration des délais de prescription, effectuer ou demander la compensation dans la limite de l'imposition contestée, entre les dégrèvements reconnus justifiés et les insuffisances ou omissions de toute nature constatées dans l'assiette ou le calcul de l'imposition au cours de l'instruction de la demande. "

4. Il résulte de ces dispositions que l'administration est fondée à invoquer des insuffisances ou omissions de toute nature pendant l'instruction de la demande, laquelle doit s'entendre comme prenant effet au plus tôt à compter de l'examen de la réclamation du contribuable par l'administration et se poursuivant pendant toute la durée du contentieux devant le juge administratif statuant au fond sur le litige. L'administration peut prendre en compte l'ensemble des éléments à sa disposition au cours de cette période qui révèleraient une omission ou une insuffisance dans l'assiette ou le calcul de l'imposition, y compris ceux qu'elle aurait recueillis à l'occasion d'une procédure de contrôle diligentée après la réception de la réclamation.

5. Lorsque les investigations menées au cours de l'instruction de la demande du contribuable présentent le caractère d'une vérification de comptabilité, l'administration peut effectuer ou demander au juge la compensation sans mener au préalable une procédure de rectification ou de taxation d'office, et notamment sans adresser la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ou la notification mentionnée à l'article L. 76 du même livre, mais elle est tenue de respecter les garanties prévues en matière d'engagement et de conduite d'un tel contrôle en faveur du contribuable vérifié.

6. Aux termes du I de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables ". Aux termes de l'article L. 47 du même livre : " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu, une vérification de comptabilité ou un examen de comptabilité ne peut être engagé sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification ou par l'envoi d'un avis d'examen de comptabilité. / Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix (...) ". L'administration procède à la vérification de comptabilité d'une entreprise ou d'un membre d'une profession non commerciale lorsqu'en vue d'assurer l'établissement d'impôts ou de taxes totalement ou partiellement éludés par les intéressés, elle contrôle sur place la sincérité des déclarations fiscales souscrites par cette entreprise ou ce contribuable en les comparant avec les écritures comptables ou les pièces justificatives dont elle prend alors connaissance et dont, le cas échéant, elle peut remettre en cause l'exactitude. L'exercice régulier du droit de vérification de comptabilité suppose le respect des garanties légales prévues en faveur du contribuable vérifié, au nombre desquelles figure notamment l'envoi ou la remise de l'avis de vérification auquel se réfère l'article L. 47 du même livre.

7. M. B... soutient, comme en première instance, que l'administration s'est attachée à réaliser un examen poussé des bilans et des comptes de résultats mis en perspective avec les déclarations CA3 déposées au titre des années 2007, 2008 et 2009, aboutissant à retenir, d'une part, un montant de taxe sur la valeur ajoutée sur la marge plus faible et, d'autre part, un montant de taxe sur la valeur ajoutée sur l'activité de location plus important que ceux calculés par ses soins. Il ajoute que le délai pris pour statuer sur la réclamation a été particulièrement long et que son instruction a requis la communication d'un grand nombre de documents comptables, les demandes formulées par l'administration dépassant les seuls éléments relatifs aux opérations d'achat et de revente concernées par la réclamation ou à son activité de location de locaux. Il en déduit que cet examen, caractéristique d'une vérification de comptabilité, a conduit l'administration à opérer irrégulièrement une compensation en application de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales.

8. Il résulte cependant de l'instruction, et notamment de la décision du 10 juin 2016, que, pour rejeter la réclamation de l'intéressé, l'administration a calculé la taxe sur la valeur ajoutée acquittée par M. B... à raison de son activité d'achat-revente et celle collectée à raison de son activité de location de locaux en procédant à la reconstitution des encaissements portant sur la seule activité de location de salles à partir de la variation des comptes clients en début et en fin d'exercice tels qu'inscrits sur les bilans des exercices 2008 et 2009, puis a rapproché les chiffres d'affaires ainsi reconstitués de ceux déclarés sur les déclarations faites sur CA3 au titre de 2008 et de 2009 sans procéder à un quelconque examen critique des pièces comptables de la société ni se déplacer sur place et en se bornant à procéder à des calculs que le requérant ne conteste d'ailleurs pas. En outre, la durée de l'examen de sa réclamation du 31 décembre 2010 n'est pas de nature à révéler, à elle seule, que l'administration aurait procédé à une vérification de comptabilité alors qu'en tout état de cause, il résulte de l'instruction que c'est par son courrier du 15 mai 2014 que l'intéressé a informé l'administration n'avoir pas suffisamment collecté la TVA. Enfin, si l'administration a demandé à l'intéressé, par un mail du 12 mai 2015, de lui communiquer la copie de l'intégralité des grands livres couvrant les exercices 2007, 2008 et 2009, la copie des journaux d'opérations diverses portant sur chacun de ces mêmes exercices et la déclaration de TVA couvrant la période du 1er janvier 2008 au 31 mars 2008, il est constant que ces documents, qui n'ont pas été critiqués par l'administration, concernent les mouvements de TVA enregistrés par la société et étaient donc en rapport uniquement avec l'instruction de la demande de restitution de TVA dont l'intéressé l'avait saisie.

9. Il s'ensuit que M. B... n'est pas fondé à soutenir que ce contrôle constitue en réalité une vérification de comptabilité et qu'il a ainsi été privé des garanties énoncées par l'article L. 47 du livre des procédures fiscales. Par suite, il n'est pas non plus fondé à soutenir que l'administration était tenue de respecter les garanties prévues en sa faveur en matière d'engagement et de conduite d'une vérification de comptabilité.

En ce qui concerne le moyen tiré de ce que l'administration fiscale ne pouvait procéder au réexamen de la taxe sur la valeur ajoutée afférente au 2ème trimestre de l'année 2008 qu'elle avait déjà examinée lors d'un précédent contrôle :

10. Les dispositions précitées au point 2 de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales limite la compensation aux insuffisances ou omissions constatées au cours de l'instruction, c'est-à-dire au plus tôt à compter de l'examen de la réclamation. Si l'administration a déjà constaté l'insuffisance ou l'omission avant l'instruction de la réclamation, et qu'elle n'y a pas remédié volontairement, elle n'est dès lors pas fondée à demander la compensation.

11. Si le requérant soutient que l'administration avait déjà effectué un contrôle de ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée afférentes au 2ème trimestre de l'année 2008, il se réfère en réalité, ainsi que l'ont retenu les premiers juges, à une demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée qu'il avait effectuée le 16 juillet 2008, à la suite de laquelle il lui avait seulement été demandé communication des factures ouvrant droit à déduction. Il ne saurait dès lors faire valoir que les éléments dont l'administration avait ainsi à disposition à la suite de cette demande lui auraient permis d'établir, au titre de cette période, les rappels de taxe collectée en litige. L'administration ne peut donc être regardée comme ayant exprimé, antérieurement à sa réclamation, la volonté délibérée de ne pas imposer les opérations effectuées durant cette période. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que l'administration ne pouvait dès lors faire application des dispositions de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales.

En ce qui concerne le moyen tiré de ce que à titre subsidiaire, les minorations de taxe sur la valeur ajoutée collectée sur les activités de location n'ayant été relevées que pour les années 2008 et 2009, elles ne peuvent s'imputer sur la taxe sur la valeur ajoutée restituable au titre d'une autre période, en l'espèce le 4ème trimestre 2007 :

12. M. B... fait valoir, à titre subsidiaire, que les minorations de taxe sur la valeur ajoutée collectée sur les activités de location n'ayant été relevées que pour les années 2008 et 2009, elles ne pouvaient être imputées sur la taxe sur la valeur ajoutée restituable au titre d'une autre période, en l'espèce, le 4ème trimestre 2007. Cependant, en ce qui concerne les taxes sur le chiffre d'affaires, la compensation entre les droits formant surtaxe et ceux résultant d'omissions ou d'insuffisances d'imposition doit s'opérer globalement pour l'ensemble de la période en litige et non année par année. Dans la mesure où la réclamation de l'appelant portait sur la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge acquittée au titre de déclarations déposées du 4ème trimestre 2007 jusqu'à la fin de l'année 2009, il ne saurait valablement soutenir que l'administration ne pouvait compenser la taxe restituable au titre du 4ème trimestre 2007 avec la minoration de taxe collectée constatée au titre des années 2008 et 2009.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 19 juillet 2018, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté le surplus de sa demande.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui, dans la présente instance, n'est pas partie perdante, une somme au titre des frais exposés par les requérants non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction du contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré après l'audience du 7 décembre 2023 où siégeaient :

- Mme Fedi, présidente de chambre,

- Mme Rigaud, présidente-assesseure,

- M. Mahmouti, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 décembre 2023.

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N° 22MA00832

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA00832
Date de la décision : 22/12/2023
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-03-05 Contributions et taxes. - Généralités. - Règles générales d'établissement de l'impôt. - Compensation.


Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: M. Jérôme MAHMOUTI
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : ALERION SOCIETE D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-22;22ma00832 ?
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