Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par deux requêtes distinctes, M. D... G... et Mme A... H... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg, à titre principal, d'annuler les arrêtés du 12 octobre 2022, par lesquels la préfète du Bas-Rhin a refusé de renouveler leurs attestations de demande d'asile, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et, subsidiairement, de suspendre l'exécution de ces mesures d'éloignement jusqu'aux décisions de la Cour nationale du droit d'asile.
Par un jugement nos2207414 et 2207415 du 11 janvier 2023, la vice-présidente désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête enregistrée le 17 février 2023 sous le n° 23NC00532, M. G..., représenté par Me Snoeckx, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant que celui-ci a rejeté sa demande ;
2°) d'annuler l'arrêté de la préfète du Bas-Rhin du 12 octobre 2022 ;
3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;
4°) subsidiairement, de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement jusqu'à la date de lecture en audience publique ou, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de notification de la décision de la cour nationale du droit d'asile ;
5°) subsidiairement, d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer une attestation de demande d'asile dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à défaut, de réexaminer sa situation ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de l'acte et de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme invoqués à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français sont maintenus ;
- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle dès lors qu'il justifie avoir déposé le 26 avril 2022 une demande de titre de séjour pour motif de santé avant l'édiction de la décision attaquée ;
- la décision fixant le pays de renvoi a méconnu l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
- c'est à tort que le magistrat désigné a refusé de faire droit à sa demande de suspension de la mesure d'éloignement prise à son encontre, dès lors qu'il a justifié d'éléments sérieux de nature à faire naître un doute sur le bien-fondé de la décision de rejet de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 novembre 2023, la préfète du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. G... ne sont pas fondés.
II. Par une requête enregistrée le 17 février 2023 sous le n° 23NC00533, M. G... demande à la cour, sur le fondement des dispositions de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, de prononcer le sursis à exécution du jugement nos 2207414 et 2207415 du 11 janvier 2023 de la vice-présidente désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
III. Par une requête enregistrée le 17 février 2023 sous le n° 23NC00534, Mme H..., représentée par Me Snoeckx, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant que celui-ci a rejeté sa demande ;
2°) d'annuler l'arrêté de la préfète du Bas-Rhin du 12 octobre 2022 ;
3°) subsidiairement, de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement jusqu'à la date de lecture en audience publique ou, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de notification de la décision de la cour nationale du droit d'asile ;
4°) subsidiairement, d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer une attestation de demande d'asile dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à défaut, de réexaminer sa situation ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de l'acte et de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme invoqués à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français sont maintenus ;
- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité dès lors qu'elle justifie que son époux a déposé le 26 avril 2022 une demande de titre de séjour pour motif de santé avant l'édiction des décisions prises à leur encontre ;
- la décision fixant le pays de renvoi a méconnu l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
- c'est à tort que le magistrat désigné a refusé de faire droit à sa demande de suspension de la mesure d'éloignement prise à son encontre, dès lors qu'elle a justifié d'éléments sérieux de nature à faire naître un doute sur le bien-fondé de la décision de rejet de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 novembre 2023, la préfète du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme H... ne sont pas fondés.
IV. Par une requête enregistrée le 17 février 2023 sous le n° 23NC00535, Mme H... demande à la cour, sur le fondement des dispositions de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, de prononcer le sursis à exécution du jugement nos 2207414 et 2207415 du 11 janvier 2023 de la vice-présidente désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
M. G... et Mme H... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions du 17 mars 2023.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience publique.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Bourguet-Chassagnon a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. G... et Mme H..., ressortissants géorgiens, nés respectivement le 4 février 1990 et le 9 avril 1991, entrés sur le territoire français le 1er février 2022 en compagnie de leurs deux enfants mineurs, ont présenté le 7 février 2022 des demandes d'asile qui ont été rejetées par deux décisions en date du 23 mai 2022 du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, statuant selon la procédure accélérée en application du 1° de l'article L. 531-24 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Les intéressés ont déposé un recours auprès de la Cour nationale du droit d'asile le 5 août 2022. Par deux arrêtés du 12 octobre 2022, la préfète du Bas-Rhin a refusé de renouveler leurs attestations de demande d'asile sur le fondement du d du 1° de l'article L. 542-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les a obligés à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être reconduits d'office. M. G... et Mme H... font appel du jugement du 11 janvier 2023, par lequel la vice-présidente désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés et demandent le sursis à exécution de ce jugement.
Les requêtes nos23NC00532, 23NC00533, 23NC00534 et 23NC00535 sont relatives à la situation d'un couple de ressortissants étrangers et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un même arrêt.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, par un arrêté du 4 octobre 2022 publié au recueil des actes administratifs de la préfecture n° 40 du 7 octobre suivant, accessible au public, la préfète du Bas-Rhin a donné à M. B... F..., directeur des migrations et de l'intégration, et, en cas d'absence ou d'empêchement de ce dernier, à M. C... E..., chef du bureau de l'asile et de la lutte contre l'immigration irrégulière, délégation à l'effet de signer les décisions de la nature de celles contenues dans les arrêtés en litige. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. F... n'aurait pas été absent ou empêché à la date de la signature des arrêtés en litige par M. E.... Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions contestées manque en fait et doit être écarté.
3. En deuxième lieu, d'une part, aux termes des dispositions de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542 2, à moins qu'il ne soit titulaire de l'un des documents mentionnés au 3° (...) ". D'autre part, aux termes des dispositions de l'article L. 611-3 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ".
4. Le seul dépôt d'une demande de titre de séjour ne saurait faire obstacle à ce que l'autorité administrative décide de prendre une obligation de quitter le territoire français à l'encontre d'un étranger qui se trouve dans le cas mentionné au 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ne saurait en aller autrement que lorsque la loi prescrit l'attribution de plein droit d'un titre de séjour à l'intéressé, cette circonstance faisant alors obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une obligation de quitter le territoire français.
5. D'abord, il ressort des motifs des décisions contestées que la préfète du Bas-Rhin a examiné de manière détaillée et personnalisée la situation administrative et familiale des intéressés. La seule circonstance que la préfète n'ait pas mentionné l'existence d'une demande de titre de séjour présentée le 26 avril 2022 par M. G... sur le fondement des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne saurait révéler, par elle-même, un défaut d'examen particulier de la situation personnelle de l'intéressé et, par voie de conséquence, de celle de son épouse.
6. Ensuite, les requérants se bornent à se prévaloir de la demande de délivrance d'un titre de séjour en raison de son état de santé que M. G... a présentée à la préfète du Bas-Rhin le 26 avril 2022 sans soutenir ni démontrer que ce dernier remplirait les conditions pour obtenir un titre de séjour de plein droit en application des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors que cette demande a fait l'objet d'un avis du collège des médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration du 2 août 2022, aux termes duquel le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'état de santé de l'intéressé pouvant lui permettre de voyager sans risque vers son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit dont seraient entachées les décisions contestées, à le supposer invoqué, ne peut qu'être écarté.
7. En troisième lieu, les requérants reprennent en appel les moyens qu'ils avaient invoqués tirés de la méconnaissance des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme sans apporter d'élément nouveau ni critiquer utilement les motifs de rejet qui leur ont été opposés par le premier juge. Il y a lieu, en conséquence, d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par la vice-présidente désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg.
8. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation des arrêtés de la préfète du Bas-Rhin du 12 octobre 2022, ni à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la vice-présidente désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.
Sur les conclusions à fin de suspension des mesures d'éloignement :
9. Aux termes de l'article L. 752-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont le droit au maintien sur le territoire a pris fin en application des b ou d du 1° de l'article L. 542-2 et qui fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français peut, dans les conditions prévues à la présente section, demander au tribunal administratif la suspension de l'exécution de cette décision jusqu'à l'expiration du délai de recours devant la Cour nationale du droit d'asile ou, si celle-ci est saisie, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la cour, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci ".
10. Au soutien de leurs conclusions à fin de suspension des mesures d'éloignement prises à leur encontre, les requérants produisent les décisions, par lesquelles le directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté le 23 mai 2022 leurs demandes d'asile ainsi que le mémoire complémentaire au recours introduit devant la cour nationale du droit d'asile. Ces documents ne faisant que relater, ainsi qu'ils l'avaient exposé devant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, les persécutions familiales dont ils feraient l'objet en raison de la responsabilité de M. G... dans la survenance d'un accident de la circulation ayant entraîné le décès de son cousin, passager du véhicule, les requérants ne peuvent être regardés comme présentant des éléments sérieux au sens des dispositions précitées de l'article L. 752-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile de nature à justifier leur maintien sur le territoire français pendant l'examen de leurs recours par la Cour nationale du droit d'asile.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
11. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation des arrêtés de la préfète du Bas-Rhin du 12 octobre 2022, n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. G... et Mme H... ne peuvent qu'être rejetées.
Sur le sursis à l'exécution du jugement :
12. La cour statuant par le présent arrêt sur les requêtes tendant à l'annulation du jugement nos2207414 et 2207415 du 11 janvier 2023 de la vice-présidente désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg, les conclusions des requérants tendant au sursis à l'exécution de ce jugement ont perdu leur objet. Par suite, il n'y a pas lieu d'y statuer.
Sur les frais de justice :
13. Les dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 s'opposent à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans les présentes instances, les sommes réclamées par M. G... et Mme H... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Par suite, les conclusions présentées par les intéressés sur le fondement de ces dispositions ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les requêtes nos 23NC00533 et 23NC00535 tendant au sursis à exécution du jugement susvisé du 11 janvier 2023 du tribunal administratif de Strasbourg.
Article 2 : Les requêtes nos 23NC00532 et 23NC00534 sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... G..., à Mme A... H..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Snoeckx.
Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.
Délibéré après l'audience du 30 novembre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Martinez, président de chambre,
M. Agnel, président-assesseur,
Mme Bourguet-Chassagnon, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 décembre 2023.
La rapporteure,
Signé : M. Bourguet-ChassagnonLe président,
Signé : J. Martinez
La greffière,
Signé : C. Schramm
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
C. Schramm
2
Nos 23NC00532,23NC00533,23NC00534,23NC00535