Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner la commune de Roye, à titre principal, à lui verser la somme de 24 360 euros en réparation du préjudice subi à raison du non-renouvellement de son contrat, à titre subsidiaire, la somme de 12 180 euros au titre de la perte de chance de percevoir ses salaires et la rémunération de ses heures supplémentaires pendant un an, en tout état de cause, à lui verser la somme de 5 000 euros pour le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence subis et de mettre à la charge de la commune de Roye la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Par un jugement n° 2000638 du 5 janvier 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 2 mars 2022 et le 14 juin 2023, M. B... représenté par Me Quennehen, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) à titre principal, de condamner la commune de Roye à lui verser les sommes de 16 800 euros au titre de la perte de salaire, 7 560 euros au titre de la perte de revenus des heures supplémentaires ;
3°) à titre subsidiaire, de condamner la commune de Roye à lui verser les sommes de 8 400 euros au titre de la perte de chance de recevoir ses salaires pendant un an, et 3 780 euros au titre de la perte de chance de recevoir des revenus de ses heures supplémentaires ;
4°) en tout état de cause, de condamner la commune de Roye à lui verser une somme de 5 000 euros au titre du préjudice moral et du trouble dans ses conditions d'existence ;
5°) de mettre à la charge de la commune de Roye la somme de 1 500 euros à verser à son conseil, au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique sous réserve que ce dernier renonce à percevoir le bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- le tribunal administratif d'Amiens a commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant que la décision de non-renouvellement du contrat de M. B... n'avait pas le caractère d'une sanction déguisée ;
- la commune en ne renouvelant pas son contrat de travail a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;
- la décision de non-renouvellement de son contrat de travail revêt un caractère disciplinaire ;
- cette décision n'est motivée ni en droit ni en fait, elle se borne à l'informer de la date d'échéance de son contrat ;
- elle est entachée d'un vice de procédure tiré du défaut d'information quant à la possibilité de prendre connaissance de son dossier administratif ;
- elle a été prise pour des motifs étrangers à l'intérêt du service ;
- en considérant que la décision de non-renouvellement du contrat de travail de M. B... a été prise dans l'intérêt du service, la commune de Roye a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
- cette décision qui est entachée d'un détournement de pouvoir, a été prise à la suite d'une agression verbale commise par le directeur des services techniques ;
- cette décision, qui est constitutive d'une faute de l'administration, justifie l'indemnisation de son préjudice.
Par un mémoire en défense enregistré le 13 juin 2023, la commune de Roye, représentée par Me Béguin, conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que :
- la décision de non-renouvellement de contrat en litige est justifiée par l'intérêt du service ;
- la commune, qui a constaté l'inutilité du poste de gardien à la suite des contestations régulières de l'entretien du cimetière par les administrés, n'a à ce jour organisé aucun recrutement pour remplacer l'appelant ;
- la décision de non-renouvellement qui ne revêt aucun caractère disciplinaire rend inopérant le moyen tiré de l'absence de motivation.
- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 13 juin 2023, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 3 juillet 2023 à 12 heures.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 mai 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Viard, présidente de chambre,
- les conclusions de M. Carpentier-Daubresse, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a été recruté dans le cadre d'un contrat unique d'insertion par le centre communal d'action sociale de Roye à compter du 1er octobre 2014. Il a ensuite été recruté par la commune de Roye par des contrats à durée déterminée successifs pour occuper le poste de gardien de cimetière. Le 22 octobre 2018, le maire de la commune de Roye a informé M. B... du non-renouvellement de son contrat de travail. Ce dernier a demandé le 7 octobre 2019 à être indemnisé des conséquences de cette décision. La commune de Roye, par un courrier du 28 novembre 2019, a refusé de faire droit à sa demande. M. B... a saisi le tribunal administratif d'Amiens d'une demande tendant à la réparation de ses préjudices. Par un jugement du 5 janvier 2022 le tribunal administratif d'Amiens a rejeté les demandes indemnitaires de M. B.... Le requérant relève appel de ce jugement.
2. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; 2° Infligent une sanction ; 3° Subordonnent l'octroi d'une autorisation à des conditions restrictives ou imposent des sujétions ; 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; 5° Opposent une prescription, une forclusion ou une déchéance ; 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; 7° Refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions du a au f du 2° de l'article L. 311-5 ; 8° Rejettent un recours administratif dont la présentation est obligatoire préalablement à tout recours contentieux en application d'une disposition législative ou réglementaire ".
3. Aux termes de l'article 37 du décret du 15 février 1988 visé ci-dessus : " Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité territoriale ayant le pouvoir de procéder au recrutement. L'agent contractuel à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes et à l'assistance de défenseurs de son choix. L'autorité territoriale doit informer l'intéressé de son droit à communication du dossier ".
4. Un agent dont le contrat est arrivé à échéance n'a aucun droit au renouvellement de celui-ci. Ainsi, alors même que la décision de ne pas renouveler ce contrat est fondée sur l'appréciation portée par l'autorité compétente sur l'aptitude professionnelle de l'agent et, de manière générale, sur sa manière de servir et se trouve ainsi prise en considération de la personne, elle n'est - sauf à revêtir le caractère d'une mesure disciplinaire - pas au nombre des mesures qui doivent être motivées en application des dispositions de de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration.
5. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la décision de ne pas renouveler le contrat dont bénéficiait M. B... a été prise notamment au regard de sa manière de servir qui ne donnait pas satisfaction. Toutefois, la seule circonstance invoquée par le requérant tirée de ce que la décision contestée a été prise alors qu'il avait été victime, selon ses dires, d'une agression verbale de la part du directeur des services techniques n'est pas de nature à établir qu'il aurait fait l'objet d'une sanction disciplinaire déguisée. Par suite, ne revêtant pas un caractère disciplinaire, la décision contestée n'avait ni à être motivée ni à être précédée de la communication du dossier.
6. En deuxième lieu, la décision contestée a également été prise au motif que la nécessité du poste de gardien de cimetière que l'intéressé occupait était remise en cause. La commune atteste d'ailleurs, sans être contredite, qu'à la suite du départ de M. B..., le poste n'a pas été pourvu et que les missions précédemment exercées par l'intéressé ont été réparties entre trois agents de la commune. Ce second motif, qui est établi par les pièces du dossier, suffit à lui seul à établir que la décision de ne pas renouveler le contrat de M. B... a été prise dans l'intérêt du service.
7. En troisième lieu, M. B... reprend en appel, sans apporter de précisions ou de pièces nouvelles, son moyen de première instance tiré de ce que la décision attaquée est entachée d'un détournement de pouvoir dans la mesure où elle aurait pour origine l'agression verbale dont il aurait été victime de la part du directeur des services techniques. Toutefois, et à supposer même que cette altercation, qualifiée d'agression par le requérant, ait eu lieu, il ne résulte pas de l'instruction et notamment de ce qui a été dit au point 6 que la décision contestée aurait été prise pour des motifs étrangers à l'intérêt du service. Par suite, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.
8. Il résulte de tout ce qui vient d'être dit que la décision contestée a été prise dans l'intérêt du service et n'est entachée d'aucune illégalité fautive. M. B... n'apportant par ailleurs aucun élément de nature à justifier du non-paiement des heures supplémentaires dont il se prévaut, l'ensemble des conclusions à fin d'indemnisation qu'il a présentées ne peuvent qu'être rejetées.
9. Il résulte de tout ce qui précède que, M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Roye, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, le versement de quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la commune de Roye et à Me Quennehen.
Délibéré après l'audience publique du 5 décembre 2023 à laquelle siégeaient :
- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,
- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur,
- M. Frédéric Malfoy, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 décembre 2023.
Le président-assesseur,
Signé: J.-M. Guérin-Lebacq
La présidente de chambre,
présidente-rapporteure,
Signé: M.-P. Viard
La greffière,
Signé: N. Roméro
La République mande et ordonne au préfet de la Somme en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
La greffière,
N. Roméro
N°22DA00525 2