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21/12/2023 | FRANCE | N°21NC00744

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 21 décembre 2023, 21NC00744


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Le centre hospitalier de Chaumont a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la restitution de la taxe sur les salaires qu'il a acquittée à raison des activités de formation des étudiants en médecine à concurrence de 554 358 euros en 2015, de 611 530 euros en 2016 et de 949 434 euros en 2017.



Par un jugement no 1901512 du 8 janvier 2021, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 12 mars 2021, le centre hospitalie...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le centre hospitalier de Chaumont a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la restitution de la taxe sur les salaires qu'il a acquittée à raison des activités de formation des étudiants en médecine à concurrence de 554 358 euros en 2015, de 611 530 euros en 2016 et de 949 434 euros en 2017.

Par un jugement no 1901512 du 8 janvier 2021, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 mars 2021, le centre hospitalier de Chaumont, représentée par la Selarl Leyton Legal, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 8 janvier 2021 ;

2°) de prononcer la restitution de la taxe sur les salaires ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué retient à tort, en méconnaissance des articles L. 713-4 et L. 713-5 du code de l'éducation, que l'organisation des enseignements relève des seuls centres hospitaliers universitaires alors que les centres hospitaliers peuvent être associés pour tout ou partie aux conventions formant lesdits centres hospitaliers universitaires ;

- partenaire d'un CHU, il peut prétendre à l'exonération de taxe sur les salaires applicable aux établissements d'enseignement supérieur, telle que prévue à l'article 231, 1. du code général des impôts, dès lors qu'il organise et dispense la formation pratique des étudiants en médecine.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 août 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le centre hospitalier de Chaumont ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de l'éducation ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Brodier,

- les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Le centre hospitalier de Chaumont exerce une activité de délivrance de soins à titre principal. Il s'est acquitté de la taxe sur les salaires pour les années 2015, 2016 et 2017 pour des montants respectifs de 2 850 937 euros, 2 921 187 euros et de 3 016 190 euros. Estimant pouvoir prétendre à l'exonération prévue au 1 de l'article 231 du code général des impôts applicable aux établissements d'enseignement supérieur, il a, par une réclamation du 27 décembre 2018, sollicité la restitution partielle de la taxe acquittée à concurrence de 554 358 euros en 2015, de 611 530 euros en 2016 et de 949 434 euros en 2017. Par une décision du 24 avril 2019, l'administration fiscale a rejeté cette demande. Le centre hospitalier de Chaumont relève appel du jugement du 8 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la restitution partielle de la taxe sur les salaires.

2. D'une part, aux termes de l'article 231 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " 1. Les sommes payées à titre de rémunérations aux salariés, à l'exception de celles correspondant aux prestations de sécurité sociale versées par l'entremise de l'employeur, sont soumises à une taxe égale à 4,25 % de leur montant évalué selon les règles prévues à l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale, sans qu'il soit toutefois fait application du deuxième alinéa du I et du 6° du II du même article. Cette taxe est à la charge des entreprises et organismes qui emploient ces salariés, à l'exception (...) des établissements d'enseignement supérieur visés au livre VII du code de l'éducation qui organisent des formations conduisant à la délivrance au nom de l'Etat d'un diplôme sanctionnant cinq années d'études après le baccalauréat, qui paient ces rémunérations lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations. (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que l'exonération qu'elles prévoient au profit des établissements d'enseignement supérieur porte sur l'ensemble des rémunérations versées à leur personnel salarié, quelle que soit la fonction exercée, à la condition que ces établissements relèvent du livre VII du code de l'éducation et qu'ils organisent au moins une formation conduisant à la délivrance au nom de l'Etat d'un diplôme sanctionnant cinq années d'études après le baccalauréat. Par ailleurs, si le bénéfice de l'exonération n'est pas réservé aux seuls établissements délivrant au nom de l'Etat les diplômes sanctionnant cinq années d'études après le baccalauréat, elle reste subordonnée à la condition que l'établissement d'enseignement supérieur qui s'en prévaut organise la formation en cause.

4. D'autre part, aux termes de l'article L. 6141-1 du code de la santé publique : " Les établissements publics de santé sont des personnes morales de droit public dotées de l'autonomie administrative et financière. (...) ". Aux termes de l'article L. 6141-2 du même code : " Les centres hospitaliers qui ont une vocation régionale liée à leur haute spécialisation et qui figurent sur une liste établie par décret sont dénommés centres hospitaliers régionaux ; ils assurent en outre les soins courants à la population proche. / Les centres hospitaliers régionaux ayant passé une convention au titre du chapitre II du présent titre avec une université comportant une ou plusieurs unités de formation et de recherche médicales, pharmaceutiques ou odontologiques sont dénommés centres hospitaliers universitaires ". Aux termes de l'article L. 6142-1 du même code : " Les centres hospitaliers et universitaires sont des centres de soins où, dans le respect des malades, sont organisés les enseignements publics médical et pharmaceutique et post-universitaire, ainsi que, sans préjudice des attributions des autres établissements de recherche et d'enseignement, la recherche médicale et pharmaceutique et les enseignements para-médicaux ". Aux termes de l'article L. 6142-3 : " Dans les villes sièges d'unités de formation et de recherche de médecine et de pharmacie, les universités, pour ce qui concerne ces unités, et les centres hospitaliers régionaux organisent conjointement l'ensemble de leurs services en centres hospitaliers et universitaires. / Les universités et les centres hospitaliers régionaux conservent leur personnalité juridique et leurs organes d'administration respectifs ; ils sont tenus de conclure des conventions pour préciser les axes stratégiques et les modalités de mise en œuvre de la politique hospitalo-universitaire entre l'université et le centre hospitalier régional. (...) / Des établissements de santé ainsi que des établissements publics à caractère scientifique et technologique ou autres organismes de recherche peuvent être associés à ces conventions pour tout ou partie de leurs clauses. (...) ". Aux termes de l'article L. 6142-5 : " Des conventions peuvent être conclues par les universités et par les centres hospitaliers régionaux, agissant conjointement, avec d'autres établissements de santé ou organismes publics ou privés susceptibles d'être associés aux diverses missions définies à l'article L. 6142-1 ".

5. Enfin, aux termes de l'article L. 632-1 du code de l'éducation, dans sa rédaction applicable au litige : " Les études médicales théoriques et pratiques sont organisées par les unités de formation et de recherche de médecine. Elles doivent permettre aux étudiants de participer effectivement à l'activité hospitalière. (...) ". Aux termes de l'article L. 713-4 du même code : " I.-Par dérogation aux articles L. 712-2, L. 712-3 et L. 712-6-1, les unités de formation et de recherche de médecine, de pharmacie, d'odontologie et de maïeutique ou, à défaut, les composantes qui assurent ces formations concluent, conjointement avec les centres hospitaliers régionaux, conformément aux articles L. 713-5 et L. 713-6, et, le cas échéant, avec les centres de lutte contre le cancer et les établissements de santé privés à but non lucratif, conformément à l'article L. 6142-5 du code de la santé publique, les conventions qui ont pour objet de déterminer la structure et les modalités de fonctionnement du centre hospitalier et universitaire. Elles respectent les orientations stratégiques de l'université définies dans le contrat pluriannuel d'établissement, notamment dans le domaine de la recherche impliquant la personne humaine. / (...) / II. Par dérogation aux articles L. 613-1, L. 712-3 et L. 712-6, l'organisation des enseignements et du contrôle des connaissances est définie par les unités de formation et de recherche de médecine, d'odontologie ou de pharmacie, suivant le cas, puis approuvée par le président de l'université, pour les formations suivantes : 1° Deuxième cycle des études médicales ; 2° Deuxième cycle des études odontologiques ; 3° Formation de pharmacie générale du troisième cycle des études pharmaceutiques. III. La même procédure comportant une proposition commune des unités de formation et de recherche situées, selon le cas, dans la région sanitaire ou dans l'interrégion instituée en application de l'article L. 632-7, est applicable aux formations suivantes : 1° Troisièmes cycles de médecine générale, de médecine spécialisée et de santé publique ; 2° Formations de pharmacie hospitalière, de pharmacie et santé publique et de biologie médicale du troisième cycle des études pharmaceutiques. ". Il résulte de ces dispositions que l'organisation des études médicales, tant théoriques que pratiques, est assurée par les seules unités de formation et de recherche de l'université, qui se chargent tant de la définition des enseignements que du contrôle des connaissances.

6. Le centre hospitalier de Chaumont est un établissement public de santé, régi par les dispositions des articles L. 6141-1 et suivants du code de la santé publique. A supposer même, comme le prétend le requérant, que les centres hospitaliers universitaires soient eux-mêmes des établissements d'enseignement supérieur visés au livre VII du code de l'éducation, il ne ressort pas des dispositions précitées du code de l'éducation et du code de la santé publique que la circonstance que le centre hospitalier de Chaumont est associé, par une convention avec le centre hospitalier universitaire de Reims et en vertu d'agréments accordés par l'ARS du Grand Est, à l'accueil et à la formation pratique des internes en médecine, serait de nature à le faire regarder comme étant un tel établissement d'enseignement supérieur au sens et pour l'application de l'article 231 du code général des impôts. Au demeurant, s'il participe à la formation pratique des étudiants en médecine qu'il accueille en vertu de cette même convention, il n'est pas en charge de l'organisation de cette formation qui incombe aux unités de formation et de recherche de l'université conformément aux dispositions précitées des articles L. 632-1 et L. 713-4 du code de l'éducation. Par suite, le centre hospitalier de Chaumont n'est pas fondé à soutenir qu'il remplit les conditions de l'exonération de taxe sur les salaires prévues par les dispositions du 1. de l'article 231 du code général des impôts en faveur des établissements d'enseignement supérieur.

7. Il résulte de tout ce qui précède que le centre hospitalier de Chaumont n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête du centre hospitalier de Chaumont est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier de Chaumont et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 30 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président,

M. Agnel, président-assesseur,

Mme Brodier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 décembre 2023.

La rapporteure,

Signé : H. Brodier Le président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

2

No 21NC00744


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC00744
Date de la décision : 21/12/2023
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Hélène BRODIER
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : BUREL AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-21;21nc00744 ?
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