Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris l'annulation de l'arrêté du 2 février 2023 par lequel le préfet de police a décidé son transfert aux autorités autrichiennes.
Par un jugement n° 2303295 du 24 mars 2023, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté attaqué, enjoint au préfet de police de procéder à un nouvel examen de la situation de M. A... en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement et mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 21 avril 2023, le préfet de police demande à la Cour d'annuler les articles 2, 3 et 4 du jugement n° 2303295 du 24 mars 2023 du tribunal administratif de Paris et de rejeter la demande de M. A....
Il soutient que :
- le motif d'annulation retenu par la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris est infondé ;
- aucun des moyens soulevés par M. A... dans ses écritures de première instance n'est fondé.
Par courrier du 15 novembre 2023, les parties ont été informées, sur le fondement de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la Cour est susceptible de se fonder sur le moyen soulevé d'office tiré du non-lieu à statuer, l'arrêté étant devenu caduc à l'expiration du délai de six mois prévu pour le transfert de M. A... aux autorités autrichiennes.
Par un mémoire présenté pour M. A... par Me Singh, enregistré le 4 décembre 2023, M. A... a présenté ses observations sur le moyen d'ordre public. Pour le reste, ce mémoire a été présenté après la clôture automatique d'instruction.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 17 mai 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 modifiant le règlement (CE) n° 1560/2003 portant modalités d'application du règlement n° 343/2003 ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Perroy a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 2 février 2023, le préfet de police a décidé du transfert de M. A..., ressortissant afghan né le 8 septembre 1997, aux autorités autrichiennes en vue de l'examen de sa demande d'asile. Par un jugement n° 2303295 du 24 mars 2023, le tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté. Le préfet de police demande à la Cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris et de rejeter la demande de M. A... tendant à l'annulation de l'arrêté de transfert du 2 février 2023.
2. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 29 du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, le transfert du demandeur vers l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande d'asile doit s'effectuer " dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de la prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3 ". Aux termes du paragraphe 2 du même article : " Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'État membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'État membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite ".
3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile repris à l'article L. 572-1 de ce code : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen ". Aux termes du I de l'article L. 742-4 du même code dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 572-5 de ce code : " L'étranger qui a fait l'objet d'une décision de transfert mentionnée à l'article L. 742-3 peut, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de cette décision, en demander l'annulation au président du tribunal administratif. / Le président ou le magistrat qu'il désigne à cette fin (...) statue dans un délai de quinze jours à compter de sa saisine (...) ". Aux termes du second alinéa de l'article
L. 742-5 du même code dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 751-13 de ce code : " La décision de transfert ne peut faire l'objet d'une exécution d'office ni avant l'expiration d'un délai de quinze jours ou, si une décision de placement en rétention prise en application de l'article L. 551-1 ou d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 a été notifiée avec la décision de transfert, avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures, ni avant que le tribunal administratif ait statué, s'il a été saisi ". L'article
L. 742-6 du même code dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 572-7 de ce code prévoit que : " Si la décision de transfert est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au livre V. L'autorité administrative statue à nouveau sur le cas de l'intéressé ".
4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date à laquelle le jugement du tribunal administratif statuant au principal sur cette demande, a été notifié à l'administration, quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel ni le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement précité, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale.
5. En l'espèce, le délai de six mois imparti à l'administration pour procéder au transfert de M. A... à compter de l'acceptation, le 23 novembre 2022, par les autorités autrichiennes de la demande de reprise en charge de l'intéressé a été interrompu par la présentation devant le tribunal administratif de Paris, le 15 février 2023, de la demande de M. A... tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 2 février 2023 ordonnant son transfert aux autorités autrichiennes. Ce délai de six mois a recommencé à courir à compter de la notification à l'administration, le 27 mars 2023, du jugement du 24 mars 2023 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté. Dans ces conditions, et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé aurait été déclaré en fuite de sorte que le délai d'exécution de la mesure de transfert aurait été porté à dix-huit mois à compter de la notification du jugement du tribunal administratif, la décision de transfert est devenue caduque et a pour effet de priver d'objet les conclusions de la requête du préfet de police. Dès lors, il n'y a plus lieu d'y statuer.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête du préfet de police.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 7 décembre 2023, à laquelle siégeaient :
- Mme Vinot, présidente assesseure,
- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,
- M. Perroy, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 décembre 2023.
Le rapporteur,
G. PERROYLa présidente,
H. VINOT
La greffière,
E. VERGNOL
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23PA01700 2