Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La Caisse centrale d'activités sociales du personnel des industries électriques et gazières a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer le dégrèvement de la somme de 751 380 euros correspondant aux droits en principal, majorations et intérêts de retard mis à sa charge, au titre des années 2009 et 2010, dont en 2009, au titre de l'impôt sur les sociétés, 252 629 euros en droits, 32 336 euros d'intérêts de retard et 6 672 euros de majorations, au titre de la taxe sur la valeur ajoutée, 342 030 euros en droits et 51 138 euros d'intérêts de retard, ainsi que 8 910 euros au titre de l'amende sur le fondement de l'article 1736 III du code général des impôts, en 2010, au titre de l'impôt sur les sociétés, 35 455 euros en droits, 3 829 euros d'intérêts de retard, au titre de la cotisation sur la valeur ajoutée, 14 311 euros en droits et 1 525 euros d'intérêts de retard, et 2 545 euros au titre de l'amende sur le fondement de l'article 1736 III du code général des impôts, ainsi que la réintégration des droits issus du crédit d'impôt permanent de taxe sur la valeur ajoutée dont elle disposait à la clôture des exercices 2009 et 2010, à savoir 557 736 euros au titre de l'année 2009 et 1 319 445 euros au titre de l'année 2010.
Par un jugement n° 2000439 du 2 décembre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a, en premier lieu, déchargé la Caisse centrale d'activités sociales du personnel des industries électriques et gazières de la somme de 724 089 euros au titre des années 2009 et 2010, dont, pour l'année 2009, au titre de l'impôt sur les sociétés, les sommes de 252 629 euros en droits, 32 336 euros d'intérêts de retard et 6 672 euros de majorations, au titre de la taxe sur la valeur ajoutée, 342 030 euros en droits et 51 138 euros d'intérêts de retard, et, pour l'année 2010, au titre de l'impôt sur les sociétés, les sommes de 35 455 euros en droits et 3 829 euros d'intérêts de retard, en deuxième lieu, mis à la charge de l'Etat le versement à la Caisse centrale d'activités sociales du personnel des industries électriques et gazières de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, en troisième lieu, rejeté le surplus des conclusions de la demande.
Procédure devant la Cour :
I. Par une requête enregistrée les 2 février 2022 sous le n° 22PA00473, et un mémoire en réplique enregistré le 16 décembre 2022, la Caisse centrale d'activités sociales du personnel des industries électriques et gazières, représentée par Me Gabizon, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2000439 du 2 décembre 2021 du tribunal administratif de Montreuil en tant que celui-ci a rejeté le surplus de sa demande ;
2°) d'ordonner le dégrèvement de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises mise à sa charge au titre de l'année 2010 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que c'est à tort que le tribunal a considéré que même si son activité est exercée sans but lucratif, elle ne peut pas prétendre à être exonérée de cette cotisation car elle ne relèverait pas de la liste limitative des organismes exonérés de cette contribution en vertu du II de l'article 1447 du code général des impôts et du 1 bis de l'article 206 de ce même code.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 mai 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient, à titre principal, que l'activité de la Caisse centrale d'activités sociales du personnel des industries électriques et gazières afférente à la gestion administrative des contrats A... présente un caractère lucratif, et qu'elle doit par conséquent être assujettie à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises en application des articles 1586 ter et 1447 du code général des impôts et, à titre subsidiaire, que la Caisse n'est pas éligible à l'exonération prévue à l'article 2061 bis du code général des impôts et, partant, à celle prévue au II de l'article 1447 du même code
II. Par une requête enregistrée le 8 avril 2022, sous le n° 22PA01607, et des mémoires enregistrés le 22 novembre 2022 et le 27 février 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2000439 du 2 décembre 2021 du tribunal administratif de Montreuil en tant qu'il fait partiellement droit à la demande de la Caisse centrale d'activités sociales du personnel des industries électriques et gazières ;
2°) de remettre à la charge de la Caisse centrale d'activités sociales du personnel des industries électriques et gazières la somme de 724 089 euros au titre des années 2009 et 2010.
Il soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que les prestations litigieuses pouvaient être exonérées de TVA sur le fondement du a du 1° du 7 de l'article 261 du code général des impôts et de l'impôt sur les sociétés sur le fondement du 5° bis de l'article 207 du même code ;
- les prestations litigieuses ne peuvent pas non plus être exonérées de TVA sur le fondement du b du 1° du 7 de l'article 261 du code général des impôts ;
- elle ne peuvent pas davantage bénéficier de l'exonération de TVA prévue en faveur des activités d'assurance au 2° de l'article 261 C du même code.
Par des mémoires en défense enregistrés les 7 octobre 2022 et 26 janvier 2023, la Caisse centrale d'activités sociales du personnel des industries électriques et gazières, représentée par Me Gabizon, demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) par la voie de l'appel incident, d'ordonner le dégrèvement de l'intégralité des rappels d'impôts en droits, pénalités et intérêts de retard le cas échéant ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 8 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le moyen soulevé par le ministre n'est pas fondé ;
- à titre subsidiaire, elle est fondée à bénéficier de l'exonération de TVA sur le fondement des dispositions du b. du 1° du 7 de l'article 261 du code général des impôts, ou à tout le moins des dispositions du 2° du C de l'article 261 C du même code.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 ;
- le décret 46-1541 du 22 juin 1946 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- les conclusions de Mme Lescaut, rapporteure publique,
- et les observations de Me Gabizon, pour la Caisse centrale d'activités sociales du personnel des industries électriques et gazières.
Considérant ce qui suit :
1. La Caisse centrale d'activités sociales du personnel des industries électriques et gazières (ci-après la " CCAS IEG ") a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a porté sur la période du 1er avril 2008 au 31 décembre 2010. A la suite de celle-ci, des rectifications ont été notifiées par trois propositions de rectification du 21 décembre 2011, du 18 décembre 2012 et du 26 juillet 2013, qui ont par la suite été partiellement maintenues par une réponse aux observations du contribuable. Les impositions en litige ont été mises en recouvrement le 17 décembre 2015 et le 31 décembre 2015. La CCAS a formulé une réclamation contentieuse le 19 janvier 2016 qui a été rejetée par décision du 13 novembre 2019. La CCAS IEG a saisi le tribunal administratif de Montreuil d'une demande de décharge, pour un montant total de 751 380 euros. Par un jugement du 2 décembre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a partiellement fait droit à sa demande, en la déchargeant, pour l'année 2009, au titre de l'impôt sur les sociétés, des sommes de 252 629 euros en droits, 32 336 euros d'intérêts de retard et 6 672 euros de majorations, au titre de la taxe sur la valeur ajoutée, des sommes de 342 030 euros en droits et 51 138 euros d'intérêts de retard et, pour l'année 2010, au titre de l'impôt sur les sociétés, des sommes de 35 455 euros en droits et de 3 829 euros d'intérêts de retard, pour un montant total de 724 089 euros. Il a en revanche rejeté les conclusions aux fins de décharge, pour les années 2009 et 2010, des amendes qui ont été infligées à la CCAS IEG sur le fondement de l'article 1736 III du code général des impôts, pour des montants respectifs de 8 910 et 2 545 euros et, pour la seule année 2010, de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, pour un montant de 14 311 euros en droits et de 1 525 euros en intérêts de retard, ainsi que les conclusions aux fins de réintégration des droits issus du crédit d'impôt permanent de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) dont la CCAS IEG disposait à la clôture des exercices 2009 et 2010. Par une requête enregistrée sous le n° 22PA00473, la CCAS IEG relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande aux fins de décharge. Par une requête enregistrée sous le n° 22PA01607, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique relève appel de ce même jugement en tant qu'il a, en son article 1er, partiellement fait droit à la demande de décharge de la CCAS IEG.
Sur la jonction :
2. Les requêtes visées ci-dessus sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur les conclusions du ministre tendant à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a partiellement fait droit à la demande de décharge de la CCAS IEG :
3. Aux termes de l'article 47 de la loi du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz " (...) Le statut national prévoira un budget des activités sociales du personnel des industries électriques et gazières qui sera consacré à l'amélioration des institutions sociales existantes et à la création d'institutions sociales nouvelles. Les ressources affectées à ce budget seront réparties entre des caisses mutuelles complémentaires et d'action sociale des industries électriques et gazières (dites C.A.S.) en considération du nombre de leurs membres et compte tenu des sommes nécessaires à la couverture des dépenses de la caisse centrale d'activités sociales du personnel des industries électriques et gazières (dite C.C.A.S.) chargée de gérer les activités sociales dont le caractère général ou l'importance exigent qu'elles soient gérées sur le plan national. (...)". Aux termes de l'article 25 de l'annexe au décret du 22 juin 1946 approuvant le statut national du personnel des industries électriques et gazières : " La caisse centrale d'activités sociales, dotée de la personnalité morale, est chargée de gérer les activités sociales dont le caractère général ou l'importance exigent qu'elles soient gérées sur le plan national ainsi que les systèmes de compensation qu'il apparaîtrait nécessaire d'établir entre les caisses mutuelles complémentaires et d'action sociale pour faciliter la gestion, par celles-ci, d'activités sociales d'intérêt général mais dont les charges ne seraient pas normalement réparties sur l'ensemble des caisses. (...) Les activités sociales instituées en faveur du personnel soumis au statut, et définies par ce dernier, sont gérées par les caisses mutuelles complémentaires et d'action sociale à l'exception de celles dont le caractère général ou l'importance exige qu'elles soient gérées sur le plan national. Ces dernières relèvent de la caisse centrale d'activités sociales. Les dépenses y afférentes sont imputées au budget d'activités sociales administré par celles-ci. Ce sont notamment (...) Les assurances privées pour le compte du personnel ; (...) ".
4. Par ailleurs, aux termes de l'article 261 du code général des impôts, sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : " 7. (Organismes d'utilité générale) : 1° a. les services de caractère social, éducatif, culturel ou sportif rendus à leurs membres par les organismes légalement constitués agissant sans but lucratif, et dont la gestion est désintéressée. / b. les opérations faites au bénéfice de toutes personnes par des œuvres sans but lucratif qui présentent un caractère social ou philanthropique et dont la gestion est désintéressée, lorsque les prix pratiqués ont été homologués par l'autorité publique ou que des opérations analogues ne sont pas couramment réalisées à des prix comparables par des entreprises commerciales, en raison notamment du concours désintéressé des membres de ces organismes ou des contributions publiques ou privées dont ils bénéficient. "
5. Il résulte de ces dispositions que les organismes légalement constitués agissant sans but lucratif ou qui poursuivent un objet social ou philanthropique, sont exonérés de taxe sur la valeur ajoutée sur les sociétés dès lors, d'une part, que leur gestion présente un caractère désintéressé, et, d'autre part, que les services qu'ils rendent ne sont pas offerts en concurrence dans la même zone géographique d'attraction avec ceux proposés au même public par des entreprises commerciales exerçant une activité identique. Toutefois, même dans le cas où l'association intervient dans un domaine d'activité et dans un secteur géographique où existent des entreprises commerciales, l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée lui est acquise si elle exerce son activité dans des conditions différentes de celles des entreprises commerciales, soit en répondant à certains besoins insuffisamment satisfaits par le marché, soit en s'adressant à un public qui ne peut normalement accéder aux services offerts par les entreprises commerciales, notamment en pratiquant des prix inférieurs à ceux du secteur concurrentiel et, à tout le moins, des tarifs modulés en fonction de la situation des bénéficiaires, sous réserve de ne pas recourir à des méthodes commerciales excédant les besoins de l'information du public sur les services qu'elle offre.
6. Enfin, aux termes de l'article 207 du code général des impôts : " 1. Sont exonérés de l'impôt sur les sociétés : 5° bis. Les organismes sans but lucratif mentionnés au 1° du 7 de l'article 261, pour les opérations à raison desquelles ils sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée (...) ".
7. Il résulte de l'instruction que, le 19 décembre 2009, la CCAS IEG a souscrit auprès des sociétés Gan Eurocourtage Vie et Axa France Vie un contrat d'assurance de groupe à adhésion facultative au profit des agents des industries électriques et gazière et des membres de leur famille. Ces derniers peuvent ainsi souscrire des contrats d'assurance dits A... (invalidité, décès, complément de prestations), dans les conditions définies au contrat d'assurance de groupe. Le 29 octobre 2010, la CCAS IEG et la société Gan Eurocourtage ont signé un mandat de gestion aux termes duquel l'assureur délègue à la CCAS IEG certaines des tâches de gestion qui lui incombent pour l'exécution du contrat d'assurance de groupe, à savoir le recueil des affiliations, des modifications et leur agrément, l'encaissement des cotisations, la transmission des bulletins d'affiliation ou de modification agréés aux adhérents, la notification des refus et la transmission des bulletins d'affiliation ou de modification agréés aux adhérents, la notification des refus et la gestion des dossiers " sinistre " déclarés au titre des garanties au contrat de groupe et leur règlement. La CCAS IEG perçoit à ce titre une rémunération fixée à 12% des cotisations versées par les assurés. L'administration soutient que la CCAS IEG exerce ainsi, au profit de l'assureur, une activité de " third-party administratror ", pour laquelle elle se trouve en concurrence avec des entreprises commerciales offrant le même type de service, et que dès lors que la CCAS IEG n'établit pas que cette activité serait exercée dans des conditions différentes de celles des entreprises commerciales, elle doit être assujettie, au titre de cette activité, à la taxe sur la valeur ajoutée et à l'impôt sur les sociétés.
8. Toutefois, il résulte de l'instruction que la CCAS IEG n'exerce l'activité litigieuse que dans le cadre et pour l'exécution du contrat d'assurance de groupe souscrit le 19 décembre 2009, et selon les termes qui ont été négociés entre l'assureur et elle. Il est constant que la CCAS IEG n'exerce pas par ailleurs d'activité de gestion déléguée se rapportant à d'autres contrats d'assurances, auxquels elle n'est pas partie, et pour lesquels l'assureur serait demandeur d'une telle externalisation. Par ailleurs, la CCAS IEG soutient que la rémunération qui lui est versée par l'assureur pour l'exécution des prestations de gestion est soit reversée aux assurés, soit utilisée pour financer ses autres activités sociales. Elle a ainsi fait valoir, dans ses observations du 20 février 2012 sur la proposition de rectification du 21 décembre 2011, qui concerne l'exercice clos au 31 décembre 2008, que pour cet exercice, le montant total des restitutions de cotisations s'élevait à près de 4,7 millions d'euros, selon des décomptes qu'elle a joints en annexe à sa réponse, pour la période du 1er avril 2006 au 31 décembre 2008. Par ailleurs, dans sa réponse du 22 octobre 2014, qui fait suite aux observations du contribuable pour les trois propositions de rectifications, dont celles du 18 décembre 2012, qui concerne l'exercice clos au 31 décembre 2009, et celle du 26 juillet 2013, qui porte sur l'exercice clos au 31 décembre 2010, l'administration ne conteste pas les allégations de la CCAS IEG, qu'elle résume en page 9 de la dite réponse, selon lesquelles " comme le Service a pu le constater au cours de ses investigations, les excédents dégagés par la CCAS au titre de la gestion des contrats d'assurance groupe A... sont systématiquement réaffectés au financement de son objet non lucratif ", estimant ne pas avoir à se prononcer sur cette affirmation. Celle-ci n'est par ailleurs pas sérieusement contestée en défense. Dans ces conditions, et à défaut de tout élément apporté par le ministre en sens inverse, dans le cadre du régime de preuve objective qui s'applique s'agissant de la détermination du caractère lucratif ou non d'une activité, d'une part, la gestion de la CCAS IEG doit être considérée comme présentant un caractère désintéressé au sens des dispositions précitées du 1° du 7 de l'article 261 du code général des impôts, d'autre part, la CCAS IEG ne peut pas être regardée comme offrant un service de " third-party administrator " qui serait en concurrence avec ceux proposés aux assureurs par des entreprises commerciales offrant le même type de service. Par suite, elle remplissait les conditions pour bénéficier des exonérations de taxe sur la valeur ajoutée et, en conséquence, d'impôt sur les sociétés dans les conditions prévues, respectivement, aux articles 261 et 207 du code général des impôts.
9. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a prononcé la décharge partielle des sommes mises à la charge de la CCAS IEG, dans les conditions fixées à l'article 1er de ce jugement.
Sur les conclusions de la CCAS IEG tendant à la décharge de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises au titre de l'année 2010 :
10. Aux termes du 1 de l'article 1586 ter du code général des impôts : " Les personnes physiques ou morales ainsi que les sociétés non dotées de la personnalité morale et les fiduciaires pour leur activité exercée en vertu d'un contrat de fiducie qui exercent une activité dans les conditions fixées aux articles 1447 et 1447 bis et dont le chiffre d'affaires est supérieur à 152 500 € sont soumises à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises ". En vertu des dispositions de l'article 1447 du même code : " I -La cotisation foncière des entreprises est due chaque année par les personnes physiques ou morales, les sociétés non dotées de la personnalité morale ou les fiduciaires pour leur activité exercée en vertu d'un contrat de fiducie qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée. (...) II -La cotisation foncière des entreprises n'est pas due par les organismes mentionnés au premier alinéa du 1 bis de l'article 206 qui remplissent les trois conditions fixées par ce même alinéa (...) ".
11. Il résulte des dispositions précitées de l'article 1586 ter du code général des impôts, éclairées par leurs travaux préparatoires que, pour définir les redevables de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, le législateur a entendu renvoyer à la définition des redevables de la cotisation foncière des entreprises telle qu'elle résulte de 1'ensemble des dispositions de l'article 1447 du code général des impôts. Sont redevables de la cotisation foncière des entreprises, et par conséquent de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, les personnes physiques ou morales qui ne poursuivent pas leur activité dans les conditions habituelles de la profession concernée et se bornent à une exploitation ou à des opérations de caractère non lucratif. Le II de l'article 1586 ter du code général des impôts prévoit en outre que certains organismes qui, à raison du caractère lucratif de certaines de leurs activités, entrent dans le champ de la cotisation foncière des entreprises et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, peuvent en être exonérés, sous certaines conditions, dès lors que leur gestion présente un caractère désintéressé et que la part de leurs activités non lucratives est prépondérante.
12. Il résulte de ce qui a été dit au point 8 que l'activité de gestion administrative des contrats d'assurance individuels conclus dans le cadre du contrat de groupe du 19 décembre 2009, en application du mandat de gestion du 29 octobre 2010, constitue une activité sans but lucratif placée hors champ d'application des dispositions précitées de l'article 1447 du code général des impôts. La CCAS IEG est donc fondée à soutenir qu'elle n'était pas redevable de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises à raison de cette activité. La circonstance que, si cette activité avait poursuivi un but lucratif, elle n'aurait pas pu bénéficier de l'exonération prévue au II de l'article 1585 ter, est sans incidence à cet égard.
13. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Montreuil en tant qu'il fait partiellement droit à la demande de la Caisse centrale d'activités sociales du personnel des industries électriques et gazières, et que cette dernière est fondée à demander la décharge de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises mise à sa charge au titre de l'année 2010.
Sur les frais liés à l'instance :
14. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la CCAS IEG de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La CCAS IEG est déchargée de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises mise à sa charge au titre de l'année 2010, pour des montants de 14 311 euros de droits et de 1 525 euros d'intérêts de retard.
Article 2 : Le jugement n° 2000439 du 2 décembre 2021 du tribunal administratif de Montreuil est reformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : La requête n° 22PA01607 présentée par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est rejetée.
Article 4 : L'Etat versa à la CCAS IEG la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la Caisse centrale d'activités sociales du personnel des industries électriques et gazières et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction des vérifications nationales et internationales.
Délibéré après l'audience du 7 décembre 2023, à laquelle siégeaient :
- Mme Vinot, présidente de chambre,
- Mme Cécile Vrignon-Villalba, présidente assesseure,
- M. Perroy, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 décembre 2023.
La rapporteure,
C. B...La présidente,
H. VINOT
La greffière,
E. VERGNOL
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Nos 22PA00473, 22PA01607 2