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19/12/2023 | FRANCE | N°21NC00733

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 19 décembre 2023, 21NC00733


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



L'Etablissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA) a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner la commune de Behren-lès-Forbach à lui verser une somme de 247 420,26 euros TTC.



Par un jugement n° 1804455 du 22 janvier 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné la commune de Behren-lès-Forbach à verser à l'EPARECA une somme de

177 958,96 euros ainsi que

les intérêts au taux légal à compter du 21 décembre 2016 et la capitalisation de ces intérêts à comp...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Etablissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA) a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner la commune de Behren-lès-Forbach à lui verser une somme de 247 420,26 euros TTC.

Par un jugement n° 1804455 du 22 janvier 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné la commune de Behren-lès-Forbach à verser à l'EPARECA une somme de

177 958,96 euros ainsi que les intérêts au taux légal à compter du 21 décembre 2016 et la capitalisation de ces intérêts à compter du 21 décembre 2017 et mis à sa charge une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 9 mars 2021 et 16 novembre 2022, la commune de Behren-lès-Forbach, représentée par Me Coulon de l'AARPI Gartner et Associés, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1804455 du 22 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg l'a condamnée à verser à l'EPARECA une somme de 177 958, 96 euros ainsi que les intérêts au taux légal à compter du 21 décembre 2016 et la capitalisation de ces intérêts à compter du 21 décembre 2017 ;

2°) de rejeter la demande présentée par l'EPARECA devant le tribunal administratif de Strasbourg ;

3°) de mettre à la charge de l'EPARECA, devenu l'Agence nationale de la cohésion des territoires, la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa requête d'appel est recevable dans la mesure où son maire dispose d'une délégation pour agir en justice, quel que soit le degré de juridiction ;

- en raison de l'existence d'une relation contractuelle, l'EPARECA ne peut demander l'indemnisation de préjudices sur le fondement de la responsabilité quasi-contractuelle ; il n'existe pas d'ensemble contractuel ;

- pour certaines dépenses, ainsi que l'ont jugé à juste titre les premiers juges, l'EPARECA ne peut demander le paiement de ses préjudices sur le fondement de la responsabilité contractuelle dans la mesure où les conventions de co-financement de 2006 et 2009 ont été régulièrement formées et correctement exécutées ;

- les conditions de l'engagement de la responsabilité quasi-contractuelle ne sont pas réunies dans la mesure où, d'une part, elle n'a jamais consenti aux dépenses engagées par l'EPARECA, et d'autre part, les dépenses n'ont pas présenté un caractère utile ; les premiers juges ont inversé la charge de la preuve relative à l'utilité de la dépense ;

- les dépenses ne sont établies, par rapprochement des mandatements avec les études produites, qu'à hauteur de 50 447,40 euros TTC ;

- le montant mis à sa charge ne peut qu'être un montant hors taxe ;

- deux études ont déjà été financées en 2006 et 2009 et le tableau justificatif produit par l'EPARECA constitue une preuve faite à soi-même ;

Par des mémoires en défense, enregistrés les 6 juillet 2022 et 6 avril 2023, l'Agence nationale de la cohésion des territoires, venant aux droits de l'EPARECA, représentée par Me Vamour, conclut :

1°)au rejet de la requête ;

2°) par la voie de l'appel incident :

- à la réformation du jugement par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a limité à la somme de 177 958,96 euros l'indemnité au versement de laquelle il a condamné la commune de Behren-lès-Forbach en réparation du préjudice qu'elle a subi ;

- à ce que l'indemnité due soit portée à la somme de 247 420,26 euros, augmentée des intérêts à compter du 3 octobre 2016 et la capitalisation de ces intérêts à compter du 3 octobre 2017 ;

3°) à ce que soit mis à la charge de la commune de Behren-lès-Forbach le versement d'une somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable dans la mesure où le maire ne justifie pas d'une délégation pour ester en justice ;

- ainsi que l'ont jugé à juste titre les premiers juges, la commune a consenti aux dépenses qui ont présenté un caractère utile ; elle est fondée à engager la responsabilité de la commune sur le fondement de l'enrichissement sans cause ;

- si la cour devait écarter la responsabilité au titre de l'enrichissement sans cause, la responsabilité contractuelle de la commune pourrait être alternativement retenue dans la mesure où il existait un ensemble contractuel qui établissait les différents engagements financiers de la commune ; cet ensemble contractuel, ainsi que les différents contrats qui le composent, ont été résiliés pour un motif d'intérêt général de nature à ouvrir droit à indemnisation ;

- elle ne sollicite pas l'indemnisation du gain manqué ;

- par la voie de l'appel incident, dans la mesure où le tribunal administratif a commis une double erreur de fait en écartant certaines dépenses non réclamées au contentieux et une erreur de droit en estimant que certaines dépenses se rattachaient aux conventions de cofinancement de 2006 et 2009, le montant que la commune doit être condamnée à payer doit être porté à la somme de 247 420,46 euros.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Denizot, premier conseiller,

- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,

- et les observations de Me Coulon pour la commune de Behren-lès-Forbach ainsi que celles de Me Thoor pour l'Agence nationale de la cohésion des territoires.

Considérant ce qui suit :

1. Le 8 juin 2011, l'Agence nationale pour la Rénovation Urbaine (ANRU) et la commune de Behren-lès-Forbach ont signé une convention intitulée " projet de rénovation de la cité de Behren-lès-Forbach ", à laquelle s'est associé l'Etablissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA), aux droits et obligations duquel est venue, à compter du 1er janvier 2020, l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) afin d'assurer la maîtrise d'ouvrage d'un projet de création d'un pôle commercial sur le territoire de la commune. Par un courrier du 14 janvier 2016, le maire de la commune de Behren-lès-Forbach a informé le directeur de l'EPARECA qu'il allait " annuler la coopération avec l'EPARECA ". Le 11 octobre 2017, le maire de la commune de Behren-lès-Forbach a refusé de faire droit à la demande de l'EPARECA tendant à l'indemnisation des dépenses exposées dans le cadre du projet d'aménagement commercial. La décision du 11 octobre 2017 par laquelle le maire de la commune de Behren-lès-Forbach a refusé de faire droit a eu pour seul effet de lier le contentieux à l'égard de l'objet de la demande de l'ANCT qui, en formulant des conclusions tendant à engager la responsabilité de la commune de Behren-lès-Forbach, a donné à l'ensemble de sa demande de première instance le caractère d'un recours de plein contentieux. Par un jugement du 22 janvier 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné la commune de Behren-lès-Forbach à verser à l'EPARECA une somme de 177 958,96 euros ainsi que les intérêts au taux légal à compter du 21 décembre 2016 et la capitalisation de ces intérêts à compter du 21 décembre 2017 et mis à sa charge une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2. La commune de Behren-lès-Forbach relève appel de ce jugement. Par la voie de l'appel incident, l'ANCT demande la réformation du jugement en tant qu'il a limité la condamnation de la commune à payer une somme de 177 958,96 euros et demande à ce que cette somme soit portée à 247 420,26 euros TTC sur le fondement de la responsabilité quasi-contractuelle ou subsidiairement sur le fondement de la responsabilité contractuelle.

Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel :

3. Il résulte des dispositions des articles L. 2132-1 et L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales, que le conseil municipal peut légalement donner au maire une délégation générale pour ester en justice au nom de la commune pendant la durée de son mandat. Il résulte de l'instruction que, en application du 16° de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales, le conseil municipal de Behren-lès-Forbach a consenti à son maire une délégation pour intenter, au nom de la commune, tant en demande qu'en défense, pour toute action en justice, quel que soit le degré de juridiction, toute les actions destinées à préserver ou garantir les intérêts de la commune. L'ANCT ne peut pas sérieusement soutenir que l'appel interjeté par la commune de Berhren-lès-Forbach d'un jugement prononçant sa condamnation à payer la somme de

177 958,96 euros ne serait pas formé pour garantir ses intérêts. Par suite, la fin de non-recevoir tirée de l'absence de qualité du maire à agir au nom de la commune de Behren-lès-Forbach doit être écartée.

Sur l'enrichissement sans cause de la commune de Behren-lès-Forbach :

En ce qui concerne le caractère utile de certaines dépenses engagées :

4. Il incombe à celui qui prétend, sur un terrain quasi-contractuel, au remboursement de celles de ses dépenses qui ont été utiles à la collectivité envers laquelle il s'était engagé d'en établir l'utilité.

5. Si la consistance des prestations fournies s'évalue au moment où elles ont été exécutées, leur utilité pour l'administration doit être appréciée par le juge administratif à la date à laquelle il statue en tenant compte éventuellement de l'évolution des travaux ou du projet depuis leur exécution. Par suite, l'abandon du projet faisant directement l'objet des études fournies est de nature à priver les dépenses engagées par le cocontractant de toute utilité pour l'administration, à l'exception du cas où cet abandon est justifié par des difficultés révélées par ces études. La circonstance que cet abandon serait motivé par des considérations étrangères à l'intérêt général, si elle est susceptible le cas échéant d'engager la responsabilité de la collectivité sur le terrain de la faute, est sans incidence sur l'absence de droit à indemnité du cocontractant au titre de l'enrichissement sans cause.

6. Il résulte de l'instruction, et plus particulièrement de la convention multipartite du 8 juin 2011 concernant le projet de rénovation urbaine de la cité de Behren-lès-Forbach et à laquelle l'ANRU était également partie, que, pour l'aménagement commercial, l'intervention de l'EPARECA a été sollicitée pour créer un nouveau centre commercial de 800 m2, permettant la réunion des fonctions commerciales et de services au cœur de ville. Au cours de l'année 2013, le projet initial conduit par l'EPARECA a été modifié afin d'utiliser une friche commerciale de 1 000 m2 laissée vacante par la fermeture de la moyenne surface exploitée sous l'enseigne " LIDL ", et d'y implanter, après réhabilitation du local, un centre commercial. Au cours du mois d'octobre 2015, l'EPARECA a modifié son projet et a estimé plus opportun de procéder, plutôt qu'à une réhabilitation, à une démolition puis à une reconstruction de cette surface.

7. Par un courrier du 11 janvier 2016 adressé à l'EPARECA, dont les termes ont été confirmés par un courrier du 8 février 2016 adressé au préfet de la Moselle, le maire de la commune de Behren-lès-Forbach a expressément indiqué, notamment en raison de l'évolution du projet présenté, annuler sa coopération avec l'EPARECA. Le maire de la commune de Behren-lès-Forbach a ainsi entendu confier à un commerçant, disposant déjà d'une enseigne, d'acheter les anciens locaux occupés par l'enseigne " LIDL ", pour une entité alimentaire de 300 m2. Ce nouveau commerçant qui devait réaliser des travaux sur les façades avait pour projet de créer un minimum de trois cellules commerciales. Le maire a précisé également que la commune de Behren-lès-Forbach a décidé de ne pas implanter de commerces de bouche afin de favoriser le fonctionnement de cette future supérette.

8. En premier lieu, il résulte de l'instruction que les études du potentiel commercial du 2 novembre 2012, de faisabilité des 9 septembre et 11 octobre 2013, les expertises juridiques et foncières des 24 et 26 mars 2015, l'établissement d'un plan topographique et parcellaire de décembre 2011 et juillet 2015, l'étude géotechnique et de plan d'implantation des sondages ainsi que le rapport de mission de repérage des matériaux et produits contenant de l'amiante ont été réalisés dans le but de permettre le projet d'aménagement commercial porté alors par l'EPARECA. A ce titre, les caractéristiques du projet retenu finalement par la commune de Behren-lès-Forbach, qui a entendu confier l'exploitation d'un nouveau commerce, sur l'emprise de l'ancien, à une entreprise privée, ne correspondent pas aux différentes évolutions du projet de l'EPARECA, qui envisageait, en dernier lieu, une démolition et une reconstruction de l'ancien bâtiment occupé par l'enseigne " LIDL ". Il ne résulte pas davantage de l'instruction que les études précitées aient révélé des difficultés particulières ayant conduit la commune de Behren-lès-Forbach à abandonner le projet d'aménagement commercial conduit par l'EPARECA. Par suite, il ne résulte pas de l'instruction que les dépenses engagées par l'EPARECA pour financer les études et rapports précités aient pu, compte tenu des caractéristiques du projet finalement retenu, présenter un caractère utile pour la commune de Behren-lès-Forbach.

9. En second lieu, les autres dépenses engagées par l'EPARECA, au titre de la période du

22 novembre 2010 au 25 juillet 2017, n'ont fait l'objet d'aucune prestation dont la commune de

Behren-lès-Forbach aurait pu avoir connaissance et correspondent, pour l'essentiel, aux frais de maîtrise d'œuvre du projet conduit par l'EPARECA. De telles dépenses ne sauraient donc présenter un caractère utile pour la commune de Behren-lès-Forbach.

En ce qui concerne les autres dépenses :

10. L'existence d'un contrat fait obstacle à ce que la responsabilité d'un des cocontractants puisse être recherchée sur le fondement de l'enrichissement sans cause.

11. En premier lieu, il résulte de l'instruction que l'article 1er de la convention de cofinancement signée le 7 juin 2006 prévoyait de confier au cabinet SM Conseils une étude des potentialités du commerce et de son armature. L'article 2 de cette convention prévoyait que ce financement serait partagé entre la commune de Behren-lès-Forbach, la Caisse des dépôts et consignations et l'EPARECA, pour un montant total de 21 946,60 euros TTC. Par suite, alors même que cette dépense a pu présenter un caractère utile, l'ANCT ne pouvait, sur le fondement de l'enrichissement sans cause, demander l'indemnisation de cette somme, correspondant aux mandats n° 223, 415 et 416, payée en application de la convention du 7 juin 2006.

12. En second lieu, la convention signée le 5 octobre 2009 prévoyait de confier au groupement Segat/SCET la réalisation d'une mission d'étude et d'expertise juridique et foncière, pour un montant total de 40 099,49 euros TTC. L'article 2 de la convention prévoyait un financement de la commune à hauteur de deux tiers du prix de l'étude, soit 22 352 euros HT. Par suite, alors même que cette dépense a pu présenter un caractère utile, l'ANCT sur le fondement de l'enrichissement sans cause, ne pouvait demander l'indemnisation de cette somme, correspondant aux mandats n° 299 et

n° 1705 payée en application de la convention du 5 octobre 2009.

13. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner si la convention du

8 juin 2011 et la charte partenariale de novembre 2014 faisaient également obstacle à une action en responsabilité quasi contractuelle, que la commune de Behren-lès-Forbach est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a fait droit aux conclusions de l'ANCT sur le fondement de l'enrichissement sans cause.

Sur l'indemnisation de l'ANCT sur un fondement contractuel :

14. En vertu des règles générales applicables aux contrats administratifs, la personne publique cocontractante peut toujours, pour un motif d'intérêt général, résilier unilatéralement un tel contrat, sous réserve des droits à indemnité de son cocontractant.

15. En premier lieu, la convention du 8 juin 2011 relative au projet de rénovation urbaine de la cité de Behren-lès-Forbach prévoyait que " la ville souhaite créer un nouveau centre-ville réunissant les fonctions commerciales et de services au cœur de ville à travers " notamment " l'intervention de l'EPARECA " avec la création d'un centre commercial de 800 m2. L'article 4.3 de cette convention stipulait que " une convention entre la ville et l'EPARECA permettra de contractualiser les engagements de chaque partie ". Il résulte donc clairement de cette stipulation que la convention du

8 juin 2011 ne fixait aucun engagement réciproque entre la commune de de Behren-lès-Forbach et l'EPARECA. Par suite, l'ANCT n'est pas fondée à soutenir que la résiliation de cette convention serait de nature à lui ouvrir un droit à indemnisation.

16. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que, par un courrier du 8 juin 2011, le maire de la commune de Behren-lès-Forbach a indiqué approuver le contenu d'une convention partenariale entre la commune et l'EPARECA ayant pour objet d'organiser leurs relations en vue de la réalisation de la restructuration commerciale du quartier de la Cité, dans le cadre de la mise en œuvre de la convention de renouvellement urbain. Cette convention prévoyait notamment, en son article 2.1, que la commune de Behren-lès-Forbach s'engageait financièrement à participer au déficit de l'opération conformément au plan de financement joint. A hauteur d'appel, l'ANCT justifie que, par une délibération du 17 juin 2011, le conseil municipal de Behren-lès-Forbach a, après avoir approuvé les termes de cette convention, autorisé son maire à signer cette convention et " toutes les pièces à venir ". Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que cette convention partenariale du

8 juin 2011, pas plus que le plan de financement auquel elle faisait référence, aient été effectivement signés par les deux parties. En outre, il ressort du point n° 3 du compte-rendu de pilotage du

6 décembre 2013, que l'EPARECA avait rappelé l'importance que la convention Ville/Epareca soit formalisée et que la charte partenariale soit signée. Dans un autre compte-rendu d'un comité de coordination du 7 octobre 2014, il était indiqué que " la formalisation de l'engagement de la ville sur le projet commercial est attendue par l'EPARECA : un courrier est en cours de rédaction par la ville pour assurer son engagement auprès de l'EPARECA (...) la signature d'une convention bilatérale est évoquée afin de préciser les engagements respectifs de la ville et de l'EPARECA, la convention ville/EPARECA n'ayant pas été signée (projet de convention à valider) (...) ". Par suite, ces différents comptes-rendus révèlent que, malgré l'autorisation du conseil municipal, la commune de

Behren-lès-Forbach n'était pas liée avec l'EPARECA, dans le cadre de la convention partenariale du 8 juin 2011 qui n'a pas été signée. Par suite, l'ANCT n'est pas fondée à soutenir que cette convention aurait été résiliée.

17. En troisième lieu, une charte partenariale a été signée en novembre 2014 pour la redynamisation commerciale du secteur sud de la cité entre différents acteurs du projet, dont la commune et l'EPARECA, ayant pour objet de formaliser les engagements et modalités d'intervention des différents partenaires. Cette convention prévoyait que la commune avait en charge, en ce qui concerne la stratégie commerciale, d'étudier la possibilité de lancer deux études foncières et architecturales assorties d'un chiffrage des coûts portant restructuration des centres commerciaux 2 et 4 et d'identifier les partenaires susceptibles de cofinancer ces études. Toutefois, cette convention présentait un objet insuffisamment précis sur les différents engagements financiers des parties dont la commune à l'égard de l'EPARECA. Par suite, l'ANCT n'est pas fondée à soutenir que la résiliation de cette convention serait de nature à lui ouvrir un droit à indemnisation.

18. En quatrième lieu, un avenant à la convention pluriannuelle du projet de rénovation urbaine a été signé le 7 octobre 2015 avec notamment l'ANRU, la commune de Behren-lès-Forbach et l'ANCT. Si cet avenant comportait des engagements généraux entre les parties et prévoyait spécifiquement que " les parties ont convenu de missionner une expertise pour actualiser les données juridiques et foncières du RDC commercial du CC2 et l'ensemble immobilier CC4 ". Cet avenant prévoyait que les deux études chiffrées par l'EPARECA s'élevaient à des montants de 17 037 euros et 8 262 euros. Compte tenu de la précision et de la nature de cette stipulation, l'EPARECA a dû prendre en charge les frais de ces deux études. Toutefois, ces études ont été rendues les 24 et

26 mars 2015 et ont fait l'objet des mandats n° 2782 et n° 2783 pour le paiement, le 5 octobre 2015, des sommes de 17 037 et 8 262 euros TTC au prestataire. A la date à laquelle la commune de

Behren-lès-Forbach a mis fin au projet d'aménagement commercial présenté par l'EPARECA, l'engagement contractuel du 7 octobre 2015 avait été entièrement exécuté et ne pouvait donc être regardé comme ayant fait l'objet d'une résiliation. Par suite, l'ANCT n'est pas fondée à soutenir que cet avenant aurait été résilié.

19. En dernier lieu, ainsi qu'il vient d'être dit, il résulte de l'instruction, et notamment des comptes-rendus de pilotage des 14 décembre 2012, 6 décembre 2013 et 7 octobre 2014, que la commune de Behren-lès-Forbach n'a jamais souhaité formaliser ses engagements avec l'EPARECA. A ce titre, la commune de Behren-lès-Forbach a indiqué, comme le révèle le courrier du 8 février 2016, que l'éventuel engagement de la commune était toujours soumis à une rétractation. Par suite, compte tenu de la circonstance que les différentes conventions précitées comportaient un objet trop imprécis pour fonder des obligations de nature financière et de la circonstance que le comportement de la commune de Berhren-lès-Forbach n'a jamais révélé, sans ambiguïté, une volonté de nouer des relations contractuelles avec l'EPARECA, l'ANCT n'est pas fondée à soutenir que l'ensemble des conventions précitées révéleraient l'existence d'un ensemble contractuel tacitement consenti par la commune de Behren-lès-Forbach que cette dernière aurait résilié.

20. Dès lors, par la voie de l'appel incident, l'ANCT n'est pas fondée à soutenir que, à titre subsidiaire, sur le fondement des droits du cocontractant de l'administration à être indemnisé des contrats résiliés pour un motif d'intérêt général, elle serait fondée à demander l'indemnisation des pertes qu'elle a subies.

21. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Behren-lès-Forbach est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg l'a condamnée à verser à l'ANCT une somme de 177 958,96 euros TTC.

Sur les frais liés à l'instance :

22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Behren-lès-Forbach, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que l'ANCT demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances particulière de l'espèce, de mettre à la charge de l'ANCT le versement de la somme que la commune de Behren-lès-Forbach demande sur le fondement des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1804455 du 22 janvier 2021 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé.

Article 2 : La demande présentée par l'EPARECA devant le tribunal administratif de Strasbourg est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Behren-lès-Forbach et à l'Agence nationale de la cohésion des territoires.

Délibéré après l'audience du 28 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente,

- Mme Roussaux, première conseillère,

- M. Denizot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 décembre 2023.

Le rapporteur,

Signé : A. DenizotLa présidente,

Signé : V. Ghisu-Deparis

La greffière,

Signé : M. A...

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

M. A...

2

N° 21NC00733


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC00733
Date de la décision : 19/12/2023
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: M. Arthur DENIZOT
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : BIGNON LEBRAY

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-19;21nc00733 ?
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