Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 23 février 2022 par lequel le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français avant le 15 juillet 2022 et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.
Par un jugement n° 2202284 du 8 juillet 2022, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 4 aout 2022, M. B..., représenté par Me Bescou, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 8 juillet 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 23 février 2022 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard :
- à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire d'une durée d'un an portant la mention " vie privée et familiale " ou " étudiant " ;
- à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le préfet n'a pas procédé à un examen préalable et sérieux de sa situation ;
- le refus de titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que dans la mise en œuvre du pouvoir général de régularisation du préfet ;
- le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par exception d'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- les décisions fixant le délai de départ volontaire et le pays de destination sont illégales par exception d'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.
La requête a été communiquée au préfet du Rhône, qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant tunisien né le 5 juin 2001, relève appel du jugement du 8 juillet 2022 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 février 2022 par lequel le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français avant le 15 juillet 2022 et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.
Sur la légalité de l'arrêté du 23 février 2022 :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, la circonstance que le préfet du Rhône, qui n'a pas l'obligation de faire état de l'ensemble des éléments propres à la situation de M. B..., n'ait pas fait mention de la circonstance qu'il a été pris en charge par son frère Mohamed, n'est pas de nature à révéler un défaut d'examen de sa situation.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants tunisiens en vertu de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1./ Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. ".
4. M. B... déclare être entré en France, deux semaines après son frère jumeau, le 16 juillet 2018, à l'âge de 17 ans, muni d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour. Il indique qu'ils ont été pris en charge, dans le cadre d'une délégation d'autorité parentale recueillie par notaire le 30 octobre 2018, par leur frère Mohamed, qui réside en France sous couvert d'un certificat de résidence de dix ans. Si son sérieux lui a permis d'obtenir un CAP d'installateur en froid et conditionnement, et s'il poursuit des études étant inscrit au titre de l'année 2021-2022 en 1ère année professionnelle de technicien en froid et conditionnement d'air, en apprentissage, le requérant, eu égard au caractère récent de son arrivée en France, ne peut être regardé comme y ayant établi le centre de ses intérêts personnels et familiaux. Il dispose de fortes attaches en Tunisie où résident ses parents et son frère jumeau a également fait l'objet d'un arrêté préfectoral portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français. Dans ces conditions, le moyen tiré de la violation des stipulations et dispositions précitées doit être écarté.
5. En troisième lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point précédent, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Rhône, en refusant la régularisation de sa situation par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", aurait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. En quatrième lieu, si M. B... a sollicité à titre subsidiaire la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étudiant, il résulte de ses propres écritures qu'il ne remplit pas la condition de visa de long séjour exigée par l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, comme le lui a opposé le préfet du Rhône. Le requérant n'établit pas qu'il ne pourrait poursuivre ses études en Tunisie, de sorte qu'il n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Rhône aurait commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'exercice de son pouvoir de régularisation.
7. En cinquième lieu, M. B... ne saurait utilement invoquer la méconnaissance des énonciations de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012, dépourvue de caractère réglementaire.
8. En sixième lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés précédemment, la décision portant refus de séjour n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B....
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
9. M. B... reprend en appel ses moyens de première instance selon lesquels l'obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour, méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs circonstanciés retenus à bon droit par les premiers juges.
En ce qui concerne les décisions fixant le délai de départ volontaire et le pays de destination :
10. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que ces décisions devraient être annulées en conséquence de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
12. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.
Délibéré après l'audience du 28 novembre 2023 à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président,
Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure,
Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 décembre 2023.
La rapporteure,
Bénédicte LordonnéLe président,
Jean-Yves Tallec
La greffière,
Sandra Bertrand
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 22LY02461