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13/12/2023 | FRANCE | N°21PA04643

France | France, Cour administrative d'appel, 7ème chambre, 13 décembre 2023, 21PA04643


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme C... B... épouse A... a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de condamner la commune de Kaala-Gomen à lui verser une indemnité de 5 329 660 francs CFP en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait d'agissements fautifs de cette collectivité et de mettre à la charge de la commune de Kaala-Gomen une somme de 300 000 francs CFP en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Par un jugement n° 20

00342 du 17 mai 2021, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a condamné la commune de K...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... épouse A... a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de condamner la commune de Kaala-Gomen à lui verser une indemnité de 5 329 660 francs CFP en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait d'agissements fautifs de cette collectivité et de mettre à la charge de la commune de Kaala-Gomen une somme de 300 000 francs CFP en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2000342 du 17 mai 2021, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a condamné la commune de Kaala-Gomen à verser à Mme B... épouse A... une indemnité de 150 000 francs CFP, a mis à la charge de la commune de Kaala-Gomen une somme de 150 000 francs CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et a rejeté le surplus des conclusions de la demande de Mme B... épouse A....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 août 2021 et 27 janvier 2022, Mme B... épouse A..., représentée par Me Calmet, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 3 de ce jugement du 17 mai 2021 ;

2°) de condamner la commune de Kaala-Gomen à lui verser une indemnité de 5 329 660 francs CFP en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait d'agissements fautifs de cette collectivité ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Kaala-Gomen une somme de 400 000 francs CFP en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a fait l'objet de discrimination et de harcèlement moral de la part de la commune de Kaala-Gomen, en raison notamment de ses liens de parenté avec l'ancien maire, qui sont constitutifs d'une faute de nature à engager la responsabilité de la commune ;

- la commune de Kaala-Gomen a également commis une faute en ne lui octroyant pas la protection fonctionnelle ;

- enfin, le retard pris par la commune pour adopter les arrêtés d'avancement la concernant est en lui-même fautif, et ce, indépendamment de toute discrimination ou harcèlement ;

- l'ensemble de ces fautes a engendré un préjudice moral de 5 000 000 francs CFP, et a nécessité l'engagement de frais d'avocat à hauteur de 329 660 francs CFP lors de la procédure précontentieuse, qu'il conviendra de rembourser.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 décembre 2021, la commune de Kaala-Gomen, représentée par la SELARL Tehio, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme B... épouse A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 ;

- la loi du pays n° 2014-9 du 18 février 2014 ;

- la délibération n° 486 du 10 août 1994 ;

- la délibération n° 231 du 13 décembre 2006 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Desvigne-Repusseau,

- et les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Titulaire du grade d'attaché normal du cadre d'emplois des attachés d'administration générale de la filière administrative des communes de Nouvelle-Calédonie et de leurs établissements publics, Mme B... épouse A..., qui exerçait alors les fonctions de secrétaire générale des services de la commune de Kaala-Gomen (Nouvelle-Calédonie), a été affectée, par un arrêté du maire de cette commune en date du 29 décembre 2014, au Syndicat intercommunal à vocation multiple du Nord (SIVM Nord) afin d'y assurer, à compter du 1er janvier 2015, la gestion administrative et financière, puis, par un arrêté du président du SIVM Nord en date du 7 avril 2015, ce dernier a recruté l'intéressée pour qu'elle occupe le poste de responsable administrative et financière à compter du 1er mai 2015. Par ailleurs, par deux arrêtés distincts du maire de la commune de Kaala-Gomen, signés respectivement les 9 octobre 2018 et 17 avril 2019, Mme B... épouse A... a bénéficié d'un avancement au 5ème échelon de son grade à compter du 14 août 2016, puis d'un avancement à l'échelon suivant à compter du 14 août 2018. La commune de Kaala-Gomen a implicitement rejeté la demande de Mme B... épouse A..., reçue le 12 août 2020, tendant à ce qu'elle fût indemnisée, à hauteur de 5 000 000 francs CFP, du préjudice moral qu'elle estime avoir subi en raison des faits de discrimination et de harcèlement moral dont elle a fait l'objet, du fait de ne pas avoir bénéficié de la protection fonctionnelle et, enfin, du retard mis par le maire de la commune de Kaala-Gomen pour signer les arrêtés relatifs à son avancement au titre des années 2016 et 2018, et à ce qu'elle fût également indemnisée, à hauteur de 329 660 francs CFP, des frais d'avocat qu'elle a exposés en amont de la procédure contentieuse. Mme B... épouse A... fait appel du jugement du 17 mai 2021 en tant que le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie n'a pas fait entièrement droit à sa demande indemnitaire.

Sur les faits allégués de discrimination et de harcèlement moral :

2. D'une part, aux termes de l'article 6 de la délibération n° 486 du 10 août 1994 portant création du statut général des fonctionnaires des communes de Nouvelle-Calédonie : " 1. Aucune distinction ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leurs opinions politiques, syndicales, philosophiques ou religieuses, de leur sexe, de leur état de santé, de leur handicap, ou de leur appartenance ethnique / (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 8 de la loi du pays n° 2014-9 du 18 février 2014 relative aux relations de travail et à l'interdiction du harcèlement moral et sexuel dans le secteur public : " Sont constitutifs de harcèlement moral et interdits les agissements répétés à l'encontre d'une personne ayant pour objet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ". Aux termes de l'article 9 de cette loi : " L'employeur prend toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir et, le cas échant, de faire cesser les agissements de harcèlement moral dans son service ". Aux termes de l'article 11 de la même loi : " Aucun agent (...) ne peut être sanctionné, suspendu ou révoqué ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de recrutement, de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral, pour avoir témoigné sur de tels actes les avoir relatés, ou pour avoir formé un recours hiérarchique ou juridictionnel visant à les faire cesser ". Aux termes de l'article 14 de la même loi : " En cas de litige sur l'application des articles 8 à 13, le juge, à qui il appartient d'apprécier l'existence d'un harcèlement moral, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties ". Aux termes de l'article 15 de la même loi : " Les agissements de harcèlement moral ouvrent droit pour la victime à des dommages et intérêts ".

4. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'administration auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. Pour être qualifiés de harcèlement moral, ces agissements doivent être répétés et excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique.

5. Enfin, aux termes de l'article L. 163-1 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie : " Le syndicat de communes est un établissement public / (...) ". Aux termes de l'article L. 163-3 de ce code : " Le syndicat est administré par un comité / (...) ". Aux termes de l'article L. 163-4 du même code : " Les membres du comité du syndicat sont élus par les conseils municipaux des communes intéressées / Chaque commune est représentée dans le comité par deux délégués / Le choix du conseil municipal peut porter sur tout citoyen réunissant les conditions requises pour faire partie d'un conseil municipal ". Aux termes de l'article L. 163-13 du même code : " Le président est l'organe exécutif du syndicat / (...) / Il est seul chargé de l'administration, mais il peut déléguer par arrêté, sous sa surveillance et sa responsabilité, l'exercice d'une partie de ses fonctions aux vice-présidents et, en l'absence ou en cas d'empêchement de ces derniers ou dès lors que ceux-ci sont tous titulaires d'une délégation, à d'autres membres du bureau. Il peut également donner, sous sa surveillance et sa responsabilité, par arrêté, délégation de signature au directeur et au directeur adjoint dans les syndicats dont les compétences, l'importance du budget, le nombre et la qualification des agents à encadrer permettent de les assimiler à des communes de plus de 20 000 habitants / (...) / Il est le chef des services que le syndicat crée / (...) ". Par l'arrêté n° 2096 du 19 octobre 2000, le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie a autorisé la création, entre les communes de Koumac et de Kaala-Gomen, du SIVM Nord qui est soumis aux dispositions précitées du code des communes de la Nouvelle-Calédonie.

6. Mme B... épouse A... fait valoir tout d'abord que, lorsqu'elle exerçait ses fonctions au sein des services de la commune de Kaala-Gomen, et en raison de ses liens de parenté avec l'ancien maire de la commune, elle a fait l'objet d'une mise à l'écart de la part de sa hiérarchie en 2014, à la suite des élections municipales d'avril 2014 et du changement de majorité politique qui s'en est suivi. Elle se prévaut également du retard pris par la commune pour prendre à son égard des arrêtés d'avancement au titre des années 2016 et 2018, de la campagne de dénigrement dont elle a fait l'objet, de la circonstance qu'une sanction disciplinaire dénuée de tout fondement a été envisagée à son encontre en 2019, et des coupures d'eau qui, ne visant que son domicile, ont été sciemment organisées par les services municipaux. Si le maire de la commune de Kaala-Gomen a pu faire état du lien de parenté de Mme B... épouse A... avec l'ancien maire s'agissant notamment d'un éventuel retour de l'intéressée dans les effectifs communaux, une telle circonstance, qui n'est pas au demeurant la seule invoquée par le maire, ne constitue pas par elle-même un agissement constitutif d'une discrimination ou d'un harcèlement moral dès lors qu'il résulte de l'instruction que cette préoccupation du maire était inspirée par le souci de la bonne marche de l'administration communale, la requérante ayant été nommée au poste de secrétaire générale des services de la commune par l'ancien maire, devenu membre de l'opposition municipale entre 2014 et 2020, et alors même qu'elle a fait l'objet d'excellentes appréciations sur sa manière de servir depuis qu'elle a rejoint le SIVM Nord le 1er janvier 2015. Si la requérante indique qu'après les élections municipales de 2014, elle a été " mise au placard " et installée, de manière vexatoire, dans le bureau du conducteur de travaux puis dans une salle d'école publique désaffectée, le seul témoignage sur lequel elle s'appuie fait apparaître qu'elle n'a pas cessé d'exercer ses fonctions de secrétaire générale de la commune après l'élection du nouveau maire. Si Mme B... épouse A... fait également valoir qu'elle n'a pas obtenu, malgré sa demande en 2018, le recrutement d'un secrétaire comptable afin de l'assister, elle ne justifie d'aucun agissement fautif de la part de la commune de Kaala-Gomen, alors qu'il résulte de l'instruction que, par une délibération du 11 décembre 2019, le comité syndical du SIVM Nord a décidé à l'unanimité d'ouvrir un poste de secrétaire comptable, qu'il a confié à son président, qui ne fait pas partie du conseil municipal de la commune de Kaala-Gomen, le soin de recruter cet agent, et qu'un agent a été embauché à compter du 1er juin 2020. Enfin, si la requérante fait valoir qu'elle subit des coupures d'eau régulières à son domicile depuis 2015, elle ne justifie pas de la réalité de ces coupures ni, en tout état de cause, que celles-ci seraient le fait d'agissements des services municipaux en s'appuyant sur le seul témoignage de l'ancien maire qui se borne à indiquer sans autre précision qu'il a constaté à plusieurs reprises l'absence d'eau au domicile de Mme B... épouse A.... En revanche, si la requérante établit que le maire de la commune de Kaala-Gomen a tardé, de manière injustifiée, à signer les arrêtés d'avancement la concernant au titre des années 2016 et 2018, que le bulletin municipal de juin 2019 comporte une mention relative au " dossier de l'ancienne secrétaire générale " susceptible de faire publiquement planer un doute sur son parcours professionnel passé, et qu'enfin, une sanction disciplinaire a été effectivement envisagée à son encontre, ces faits, aussi inappropriés soient-ils, ne présentent pas, au cas présent, un degré de gravité suffisant pour caractériser l'existence d'une discrimination ou d'un harcèlement moral de la part de la commune de Kaala-Gomen vis-à-vis de la requérante, dès lors qu'il résulte de l'instruction que le maire a fini par signer les arrêtés d'avancement de Mme B... épouse A... en 2018 et 2019 et que l'éventualité d'engager des poursuites disciplinaires a été immédiatement abandonnée par le maire dès que la direction des ressources humaines et de la fonction publique de la Nouvelle-Calédonie lui a indiqué, par un courrier du 21 février 2020, qu'elles n'étaient pas justifiées. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à solliciter l'engagement de la responsabilité de la commune de Kaala-Gomen pour des faits de discrimination et de harcèlement moral.

Sur le manquement allégué à l'obligation de protection fonctionnelle :

7. D'une part, aux termes de l'article 10 de la délibération n° 486 du 10 août 1994 portant création du statut général des fonctionnaires des communes de Nouvelle-Calédonie : " 1. Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions, d'une protection organisée par la collectivité dont ils dépendent (...) / (...) / 3. La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté / (...) ".

8. D'autre part, aux termes de l'article 26 de la loi du pays n° 2014-9 du 18 février 2014 relative aux relations de travail et à l'interdiction du harcèlement moral et sexuel dans le secteur public : " Les fonctionnaires ou agents bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions, d'une protection organisée par la collectivité dont ils dépendent (...) / (...) / La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires ou les agents contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté / (...) ". En vertu des dispositions de l'article 7 de cette loi, la protection fonctionnelle est susceptible d'être accordée à tout agent public qui s'estime victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral.

9. S'il résulte de l'instruction qu'entre 2018 et 2019, le secrétariat général du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et un syndicat de fonctionnaires ont attiré l'attention de la commune de Kaala-Gomen sur la situation de Mme B... épouse A... s'agissant du refus persistant du maire de signer des arrêtés d'avancement la concernant, et alors même que l'intéressée n'a pas expressément sollicité le bénéfice de la protection fonctionnelle lorsqu'elle a indiqué, dans un courrier du 23 janvier 2020 adressé à deux membres du conseil municipal, qu'elle subit " depuis 2015 maintes attaques de la mairie " tant à titre professionnel qu'au plan personnel, il résulte de ce qui a été dit au point 6 que les agissements reprochés à la commune de Kaala-Gomen, qui ne présentent pas un caractère de gravité suffisant pour caractériser l'existence d'une discrimination ou d'un harcèlement moral à l'égard de la requérante, ne justifiaient pas une mesure de protection fonctionnelle. Par suite, la requérante n'est pas fondée à rechercher la responsabilité de la commune de Kaala-Gomen pour ne pas lui avoir accordé la protection fonctionnelle.

Sur le retard pris pour signer des arrêtés d'avancement :

En ce qui concerne la responsabilité de la commune de Kaala-Gomen :

10. Aux termes de l'article 65-1 de la délibération n° 486 du 10 août 1994 portant création du statut général des fonctionnaires des communes de Nouvelle-Calédonie : " Pour tous les corps soumis au mécanisme de l'avancement différencié, les dispositions suivantes s'appliquent / 1- A l'occasion de l'avancement d'échelon, les agents des communes de Nouvelle-Calédonie et de leurs établissements publics peuvent, en fonction de leur valeur professionnelle et de leur manière de servir avancer soit : / - à la durée minimale / - à la durée moyenne / - à la durée maximale / (...) ". En vertu des dispositions de l'article 10 de la délibération n° 231 du 13 décembre 2006 portant statut particulier des cadres d'emplois des personnels de la filière administrative des communes de Nouvelle-Calédonie et de leurs établissements publics, le cadre d'emploi des attachés d'administration générale est soumis au mécanisme de l'avancement différenciée.

11. Il résulte de l'instruction que, par des courriers des 30 août 2017 et 26 octobre 2018, le secrétariat général du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a soumis à la signature du maire de la commune de Kaala-Gomen des projets d'arrêtés tendant à l'avancement de Mme B... épouse A... à la durée minimale au 5ème échelon de son grade à compter du 14 août 2016, s'agissant du courrier du 30 août 2017, et à la durée moyenne au 6ème échelon à compter du 14 août 2018, s'agissant du courrier du 26 octobre 2018. Dès lors qu'il résulte de l'instruction, notamment des échanges intervenus entre le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et la commune de Kaala-Gomen, que le maire a mis près d'un an et deux mois pour signer l'arrêté du 9 octobre 2018 relatif à l'avancement de la requérante au titre de l'année 2016 et près de six mois pour signer celui du 17 avril 2019 concernant son avancement au titre de l'année 2018, ces délais, qui sont sous-tendus par des motifs étrangers à la manière de servir de Mme B... épouse A..., présentent un caractère excessif et, par suite, sont constitutifs de fautes de nature à engager la responsabilité de la commune de Kaala-Gomen vis-à-vis de la requérante.

En ce qui concerne les préjudices :

12. En premier lieu, Mme B... épouse A... n'établit pas en appel qu'elle aurait subi, du fait des fautes commises par la commune de Kaala-Gomen, un préjudice moral dont la réparation excèderait la somme de 150 000 francs CFP allouée par les premiers juges.

13. En second lieu, si Mme B... épouse A... demande à être indemnisée, à hauteur de 329 660 francs CFP, des frais d'avocat qu'elle a engagés en amont de la procédure contentieuse, elle n'établit pas, par les pièces produites en appel comme en première instance, la réalité des démarches que son avocat aurait effectuées auprès de la commune de Kaala-Gomen ni, en tout état de cause, la réalité de ces frais dès lors que la facture d'honoraires du 17 octobre 2018, produite pour la première fois en appel, indique que l'intéressée a réglé, pour un montant de 170 660 francs CFP, des frais d'avocat pour la seule " procédure devant le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ", qui lui a d'ailleurs alloué, par le jugement attaqué, une somme de 150 000 francs CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... épouse A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a limité à la somme de 150 000 francs CFP le montant de la condamnation prononcée à l'encontre de la commune de Kaala-Gomen.

Sur les frais liés au litige :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Kaala-Gomen, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par Mme B... épouse A... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... épouse A... la somme demandée par la commune de Kaala-Gomen au même titre.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... épouse A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Kaala-Gomen présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... épouse A... et au maire de la commune de Kaala-Gomen.

Délibéré après l'audience du 28 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Auvray, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente-assesseure,

- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 décembre 2023.

Le rapporteur,

M. DESVIGNE-REPUSSEAULe président,

B. AUVRAY

La greffière,

C. BUOT

La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA04643


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA04643
Date de la décision : 13/12/2023
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. AUVRAY
Rapporteur ?: M. Marc DESVIGNE-REPUSSEAU
Rapporteur public ?: Mme JURIN
Avocat(s) : SELARL JEAN-JACQUES DESWARTE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-13;21pa04643 ?
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