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12/12/2023 | FRANCE | N°23NT00546

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 12 décembre 2023, 23NT00546


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 1er février 2021 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office lorsque ce délai sera expiré.



Par un jugement n° 2111451 du 14 octobre 2022 le tribunal administratif

de Nantes a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête enregist...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 1er février 2021 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office lorsque ce délai sera expiré.

Par un jugement n° 2111451 du 14 octobre 2022 le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 février 2023, Mme A..., représentée par Me Bourgeois, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 1er février 2021 du préfet de la Loire-Atlantique ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer un titre de séjour, à titre subsidiaire de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Bourgeois de la somme de

2 000 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal a omis de répondre aux moyens tirés de ce que la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article

L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :

- la commission du titre de séjour n'a pas été saisie ;

- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à son intégration à la société française ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour la prive de base légale ;

- elle sera annulée par les mêmes moyens que ceux exposés contre la décision refusant de lui accorder un titre de séjour ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour la prive de base légale ;

- elle sera annulée par les mêmes moyens que ceux exposés contre la décision refusant de lui accorder un titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français.

La requête a été communiquée au préfet de la Loire-Atlantique qui n'a pas produit d'observations.

Par une décision 28 février 2023 le président du bureau d'aide juridictionnelle a accordé à Mme A... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Penhoat a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante marocaine née le 1er janvier 1972, déclare être entrée en France au cours du mois d'octobre 2010, sous couvert d'un visa de court séjour. Elle a formé une demande de titre de séjour sur le fondement du 7° et du 11° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Sa demande a été rejetée par un arrêté en date du 9 novembre 2016 dont la légalité a été validée par une décision du 26 mai 2016 du tribunal administratif de Nantes elle-même confirmée par la cour administrative d'appel de Nantes par un arrêt en date du 12 avril 2018. Elle a sollicité du préfet de la Loire-Atlantique son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des articles L. 313-14 et L. 313-14-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Sa demande a été rejetée par un arrêté du 1er février 2021 portant en outre obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office lorsque le délai sera expiré. Mme A... relève appel du jugement du 25 janvier 2023 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il résulte des motifs du jugement attaqué que le tribunal administratif de Nantes a expressément répondu au moyen tiré de ce que la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle. Par ailleurs, il résulte des termes de ce même jugement que les premiers juges ont considéré que la décision contestée visait à tort les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'il y avait lieu de lui substituer le pouvoir de régularisation exceptionnelle dont dispose l'autorité préfectorale même en l'absence de texte. Au regard de cette substitution de base légale et quelle que soit sa pertinence, les premiers juges n'étaient pas tenus de répondre au moyen soulevé par Mme A... en première instance tiré de ce que la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le moyen d'irrégularité du jugement tiré de l'omission à répondre à ce moyen doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. ".

4. Mme A... soutient qu'elle a fixé le centre de sa vie privée et familiale en France où elle vit depuis 2010 soit depuis plus de dix ans et qu'elle réside désormais avec son compagnon avec lequel elle s'est mariée postérieurement à l'arrêté contesté. Toutefois, sa résidence habituelle en France n'est pas suffisamment établie au cours de la période alléguée, en particulier pour les années 2010 à 2014. La requérante ne justifie pas d'une vie commune avec son compagnon à la date de la décision contestée. L'intéressée ne démontre pas, en dépit de la conclusion d'un contrat d'activités pour une année avec une association, une intégration professionnelle particulière. Dans ces conditions et malgré la présence en France de sa sœur et de la circonstance qu'elle suit des cours de français, en obligeant Mme A... à quitter le territoire français, le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris sa décision et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le préfet n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences qu'emporte cette décision sur la situation personnelle de l'intéressée.

5. En deuxième lieu, contrairement à ce qu'ont relevé les premiers juges, si les ressortissants marocains ne peuvent pas se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié ", ils peuvent, en revanche, se prévaloir des dispositions de cet article à l'appui d'une demande de titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Toutefois, eu égard à ce qu'il vient d'être dit au point précédent, l'arrêté contesté ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation à ce titre ni d'erreur de droit.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable au litige : " La commission [du titre de séjour] est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 (...) ". Il résulte de ces dispositions que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles visés par ces dispositions auxquels il envisage néanmoins de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui s'en prévalent. Par ailleurs, aux termes du second alinéa de l'article L. 313-14 du même code, alors en vigueur : " L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ".

7. Ainsi qu'il a été dit au point 4, Mme A... n'établit pas résider habituellement sur le territoire français depuis plus de dix ans. Le préfet de la Loire-Atlantique n'était donc pas tenu de saisir la commission du titre de séjour de la demande de la requérante. Par suite, le moyen doit être écarté.

8. Enfin, la décision portant refus de titre de séjour n'étant pas annulée, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination doivent être annulées par voie de conséquence.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 1er février 2021. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 24 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Quillévéré, président de chambre,

- M. Penhoat, premier conseiller,

- M. Viéville, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 décembre 2023.

Le rapporteur

A. PENHOATLe président

G. QUILLÉVÉRÉ

La greffière

H. DAOUD

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23NT005462

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23NT00546
Date de la décision : 12/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. QUILLÉVÉRÉ
Rapporteur ?: M. Anthony PENHOAT
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : BOURGEOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-12;23nt00546 ?
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