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12/12/2023 | FRANCE | N°23BX01741

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 12 décembre 2023, 23BX01741


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 24 octobre 2022 par lequel le préfet de la Vienne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a assorti cette obligation d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans, et d'enjoindre au préfet de la Vienne de lui délivrer un titre de séjour ou à défaut de réexaminer sa situation et de prendre toute mesure propre à mettre fin à son

signalement dans le système d'information Schengen.



Par un jugement n° 2203088...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 24 octobre 2022 par lequel le préfet de la Vienne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a assorti cette obligation d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans, et d'enjoindre au préfet de la Vienne de lui délivrer un titre de séjour ou à défaut de réexaminer sa situation et de prendre toute mesure propre à mettre fin à son signalement dans le système d'information Schengen.

Par un jugement n° 2203088 du 28 mars 2023, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 juin 2023, et des pièces enregistrées le 28 juillet 2023, M. A..., représenté par Me Desroches, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 mars 2023 du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) d'annuler l'arrêté du 24 octobre 2022 par lequel le préfet de la Vienne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et a assorti cette obligation d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Vienne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail, de procéder au réexamen de sa situation et de prendre toute mesure propre à mettre fin à son signalement dans le système d'information Schengen dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, ou à lui-même en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative si l'aide juridictionnelle ne lui était pas accordée.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen personnel et approfondi de sa situation ;

- elle méconnaît son droit à être entendu ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il remplit les conditions de délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français, mais également au regard de la durée de sa présence sur le territoire sur le fondement des stipulations des articles 6-1 et 6-4 de l'accord franco-algérien ;

- la décision attaquée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la décision portant refus de délai de départ volontaire :

- elle est entachée d'un défaut de base légale ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est entachée d'un défaut de base légale ;

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 612-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 octobre 2023, le préfet de la Vienne conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens invoqués par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 25 mai 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Pauline Reynaud.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant algérien né le 6 août 1985, déclare être entré en France en novembre 2010. L'intéressé s'est vu délivrer un certificat de résidence algérien, valable du 2 août 2016 au 1er août 2017, sur le fondement de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La demande de renouvellement de titre de séjour a été rejetée par arrêté du 17 mai 2018 du préfet de la Charente-Maritime. Suite à son interpellation par les services de police, M. A... a fait l'objet le 13 août 2020 d'une deuxième obligation de quitter le territoire français, assortie d'une interdiction de retour de trois ans. Suite à une nouvelle interpellation, il a fait l'objet, le 14 octobre 2021, d'une troisième obligation de quitter le territoire français sans délai, assortie d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans. Le recours formé contre cet arrêté a été rejeté par un jugement du tribunal administratif de Poitiers du 10 mars 2022. Par un arrêté du 24 octobre 2022, le préfet de la Vienne a fait obligation à M. A... de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il était susceptible d'être éloigné et lui a interdit de retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans. M. A... relève appel du jugement du 28 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 octobre 2022.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, à l'appui de ses moyens tirés de l'insuffisante motivation et du d'examen réel et sérieux de sa situation, le requérant ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de droit ou de fait nouveau par rapport à son argumentation devant les premiers juges. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents du jugement attaqué.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " 1. Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. 2. Ce droit comporte notamment : le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ".

4. Il résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne que cet article s'adresse non pas aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union. Il résulte toutefois également de cette jurisprudence que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles le respect de ce droit est assuré. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il implique ainsi que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision.

5. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a été entendu le 11 octobre 2022 par les services de la gendarmerie de Vivonne. D'une part, il ressort des mentions portées sur le document valant notification de la décision portant obligation de quitter le territoire français que le requérant, qui a indiqué qu'il comprenait le français, a été informé oralement de son droit à bénéficier de l'assistance d'un avocat pour contester l'arrêté contesté ainsi que des voies et délais de recours. Si l'intéressé soutient par ailleurs qu'il sait parler en français mais ne sait que très peu le lire et l'écrire, il ressort toutefois du procès-verbal d'audition que M. A... a donné des informations précises tant sur sa situation administrative, familiale que personnelle. Contrairement à ce que soutient le requérant, la circonstance qu'il était alors incarcéré depuis le 15 octobre 2021 et ne disposait donc pas des documents relatifs à sa situation, ne l'empêchait pas de porter à la connaissance du préfet des informations pertinentes avant l'édiction de la décision attaquée qui, si elles avaient pu être communiquées à temps à l'administration, auraient été de nature à faire obstacle à la mesure d'éloignement qui lui est opposée. En toute hypothèse, il n'est pas allégué qu'il aurait sollicité, en vain, un entretien avec les services préfectoraux, ni qu'il aurait été empêché de présenter ses observations avant que soit prise la décision attaquée. Dans ces conditions, le moyen tiré de la violation du principe général du droit de l'Union européenne relatif au droit d'être entendu doit être écarté. Il en va de même, en tout état de cause, du moyen tiré de la violation de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) / 5° Le comportement de l'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois constitue une menace pour l'ordre public (...) ".

7. Ainsi que l'ont retenu les premiers juges, dès lors que la délivrance d'un certificat de résidence algérien du 2 août 2016 au 1er août 2017 à M. A... a eu pour effet de régulariser sa situation quant aux conditions de son entrée en France, le préfet de la Vienne ne pouvait opposer à l'intéressé son entrée irrégulière en France sur le fondement des dispositions du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, ainsi que l'ont également relevé les premiers juges, il résulte des dispositions précitées du 5° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qu'une obligation de quitter le territoire peut être prononcée à l'encontre d'un étranger dont le comportement constitue une menace pour l'ordre public à condition qu'il ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois. Or, en l'espèce, M. A... était en situation irrégulière depuis plus de trois mois à la date de la décision attaquée, de sorte que, contrairement à ce que soutient l'intéressé, les dispositions du 5° de l'article L. 611-1 précité étaient applicables à sa situation. Il ressort des pièces du dossier que le préfet aurait pris la même décision d'éloignement s'il ne s'était fondé que sur ce second motif. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.

8. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) / 5° L'étranger qui est père (...) d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans (...). ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) / 4) au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins. (...) ".

9. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est père d'un enfant français né le 17 décembre 2015. Par ailleurs, si, ainsi que le soutient M. A..., il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... aurait effectivement été déchu de l'autorité parentale exercée sur son enfant mineur B... par un jugement du tribunal de grande instance de Saintes du 14 novembre 2019, l'intéressé ne produit aucun élément permettant d'établir qu'il contribuerait effectivement à l'entretien et à l'éducation de son fils. Il en va de même s'agissant de son enfant née le 8 novembre 2021. Par suite, le moyen tiré de qu'il remplit les conditions pour bénéficier de plein droit d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfants français doit être écarté.

10. En cinquième lieu, en se bornant à soutenir que l'administration n'a jamais remis en cause sa présence régulière en France depuis 2010, M. A... ne peut être regardé comme justifiant sa présence en France depuis plus de dix ans. Par suite, le moyen tiré de ce que M. A... remplissait les conditions prévues au 1) de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et ne pouvait dès lors faire l'objet de la décision attaquée, ne peut qu'être écarté.

11. En sixième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

12. Ainsi qu'il a été dit précédemment, M. A... n'apporte pas d'éléments permettant d'établir sa présence en France depuis près de dix ans, ni son intégration sur le territoire français. Il ressort également des pièces du dossier que M. A... a fait l'objet de trois précédentes mesures d'éloignement et qu'il est incarcéré depuis le 15 octobre 2021 pour des faits d'une part, de violence sans incapacité par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, en récidive, non-respect d'obligation ou interdiction imposée par le juge aux affaires familiales dans une ordonnance de protection d'une victime de violences familiales ou de menace de mariage forcé, en récidive, d'autre part, de recel de bien provenant d'un vol et voyage habituel dans un moyen de transport public de personnes payant sans titre de transport valable. M. A... n'est par ailleurs pas dépourvu de toute attache personnelle ou familiale dans son pays d'origine où il a vécu la majeure partie de sa vie. Dans ces conditions, compte tenu des conditions d'entrée et de séjour de M. A... en France, la décision attaquée n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

13. En septième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " Il résulte de ces stipulations que dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Ces stipulations sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.

14. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 9 et 12.

En ce qui concerne la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :

15. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire devrait être annulée.

16. En second lieu, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : /1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; / 2° L'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était manifestement infondée ou frauduleuse ; /3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. ". En vertu de l'article L. 613-1 du même code, les motifs des décisions relatives au délai de départ volontaire sont indiqués.

17. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a été incarcéré à la maison d'arrêt de Niort, puis au centre pénitentiaire de Poitiers-Vivonne pour des faits de violence sans incapacité par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, en récidive, non-respect d'obligation ou interdiction imposée par le juge aux affaires familiales dans une ordonnance de protection d'une victime de violences familiales ou de menace de mariage forcé, en récidive, recel de bien provenant d'un vol et voyage habituel dans un moyen de transport public de personnes payant sans titre de transport valable. Depuis son incarcération, le tribunal judiciaire de Niort l'a également condamné le 6 octobre 2022, pour des faits de menaces de mort réitérées commises par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, en récidive ainsi que pour des appels téléphoniques malveillants réitérés par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, en récidive. Par ailleurs, il ressort de son extrait de casier judiciaire qu'antérieurement à son incarcération, l'intéressé a déjà été condamné à plusieurs reprises pour des faits de détention non autorisée et usage illicite de stupéfiants, vol par ruse, effraction ou escalade dans un local d'habitation ou un lieu d'entrepôt aggravé par une autre circonstance, circulation avec un véhicule terrestre à moteur sans assurance et conduite d'un véhicule sans permis. Dans ces conditions, le préfet de la Vienne pouvait, sans commettre d'erreur de droit, ni d'erreur d'appréciation, estimer que le comportement de M. A... constituait une menace pour l'ordre public et lui refuser, pour ce motif, un délai de départ volontaire. Dès lors que le préfet de la Vienne aurait pris la même décision s'il ne s'était fondé que sur ce seul motif, le moyen tiré de ce que les autres motifs retenus pour lui refuser un délai de départ volontaire ne seraient pas fondés doit, en tout état de cause, être écarté.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

18. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire, la décision fixant le pays de renvoi devrait être annulée.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

19. En premier lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. ".

20. La décision d'interdiction de retour sur le territoire français, prise au visa de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qui fait état des considérations personnelles et familiales propres à la situation de l'intéressé, et de la menace à l'ordre public que représente M. A..., est suffisamment motivée. Par suite, le moyen doit être écarté. Il ne ressort pas plus des pièces du dossier qu'en prenant la décision attaquée, le préfet de la Vienne n'aurait pas procédé à un examen sérieux de la situation personnelle de M. A....

21. En second lieu, aux termes de l'article L. 612-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut prolonger l'interdiction de retour pour une durée maximale de deux ans dans les cas suivants :/ 1° L'étranger s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français alors qu'il était obligé de le quitter sans délai ;/ 2° L'étranger s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français au-delà du délai de départ volontaire qui lui avait été accordé ;/ 3° L'étranger est revenu sur le territoire français après avoir déféré à l'obligation de quitter le territoire français, alors que l'interdiction de retour poursuivait ses effets. Compte tenu des prolongations éventuellement décidées, la durée totale de l'interdiction de retour ne peut excéder cinq ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, sauf menace grave pour l'ordre public. ".

22. M. A... soutient que le préfet de la Vienne aurait commis une erreur de droit dès lors que les dispositions précitées de l'article L. 612-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoient que la durée totale de l'interdiction de retour ne peut excéder cinq ans et, qu'ayant déjà fait l'objet par une décision du 17 mai 2018, d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an, puis, par une décision du 13 août 2020, d'une interdiction de retour d'une durée de trois ans, puis, enfin, par une décision du 14 octobre 2021, d'une troisième interdiction de retour, toujours d'une durée de trois ans, la décision en litige conduirait à ce que la durée maximale de cinq ans prévue par les dispositions de l'article L. 612-11 soit dépassée. Toutefois, contrairement à ce que soutient le requérant, il ne ressort pas des termes de la décision attaquée, qui ne se fonde pas sur les dispositions précitées de l'article L. 612-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que le préfet de la Vienne aurait entendu prolonger une des précédentes décisions portant interdiction de retour sur le territoire français dont M. A... a fait l'objet, mais s'est simplement borné à assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une nouvelle interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée de trois ans. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 612-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

23. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 octobre 2022. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à ce que l'Etat soit condamné au versement d'une somme d'argent au titre des frais de justice ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Vienne.

Délibéré après l'audience du 21 novembre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Bénédicte Martin, présidente,

M. Michaël Kauffmann, premier conseiller,

Mme Pauline Reynaud, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 décembre 2023.

La rapporteure,

Pauline Reynaud La présidente,

Bénédicte Martin, Le greffier,

Christophe Pelletier La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23BX01741


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX01741
Date de la décision : 12/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MARTIN
Rapporteur ?: Mme Pauline REYNAUD
Rapporteur public ?: Mme GAY
Avocat(s) : DESROCHES

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-12;23bx01741 ?
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