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12/12/2023 | FRANCE | N°23BX01520

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 12 décembre 2023, 23BX01520


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 28 février 2022 par lequel le préfet de Lot-et-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français et d'enjoindre au préfet de Lot-et-Garonne de lui délivrer un titre de séjour ou à défaut de réexaminer sa situation.



Par un jugement n° 2200488 du 22 mars 2023, le tribunal administratif de Pau a rejet

sa demande.

Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 5 juin 2023, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 28 février 2022 par lequel le préfet de Lot-et-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français et d'enjoindre au préfet de Lot-et-Garonne de lui délivrer un titre de séjour ou à défaut de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 2200488 du 22 mars 2023, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 5 juin 2023, et un mémoire enregistré le 9 octobre 2023, M. A..., représenté par Me Dumaz Zamora, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 22 mars 2023 du tribunal administratif de Pau ;

2°) d'annuler l'arrêté du 28 février 2022 par lequel le préfet de Lot-et-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un vice de procédure tiré de la consultation irrégulière du traitement des antécédents judiciaires et de l'absence de saisine du procureur de la République pour complément d'information ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les dispositions des articles L. 412-5 et L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur d'appréciation ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur d'appréciation ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut de base légale ;

- elle méconnaît le 5° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît le 5° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;

En ce qui concerne la décision portant refus de délai de départ volontaire :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut de base légale ;

- elle méconnaît les dispositions des 1°, 2° et 3° de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est entachée d'un défaut de base légale ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'un défaut d'examen sérieux et complet de sa situation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 septembre 2023, le préfet de Lot-et-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'ayant délivré le 28 février 2023 un titre de séjour " vie privée et familiale " à M. A..., il n'y a plus lieu de statuer sur la requête présentée par l'intéressé.

M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 11 mai 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de procédure pénale ;

- le code de la sécurité intérieure ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Pauline Reynaud.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant marocain né le 12 avril 1987, déclare être entré en France le 8 octobre 2016. L'intéressé a sollicité les 23 octobre 2017 et 25 avril 2018 son admission au séjour en qualité de parent d'enfant français, sur le fondement de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ses demandes ont été rejetées par décisions des 13 février 2018 et 1er juillet 2020. M. A... a de nouveau sollicité son admission au séjour le 15 décembre 2021 sur ce même fondement. Par un arrêté du 28 février 2022, le préfet de Lot-et-Garonne a rejeté sa demande, et lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai. M. A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 28 février 2022. L'intéressé relève appel du jugement n° 2200488 du 22 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Sur l'exception de non-lieu à statuer :

2. Le préfet de Lot-et-Garonne fait valoir qu'il n'y a plus lieu de statuer sur la requête de M. A... dans la mesure où le 23 février 2023, il a accordé au requérant un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. Toutefois, dès lors que cette décision est intervenue antérieurement à l'enregistrement le 5 juin 2023 de la requête d'appel et n'emporte pas le retrait de l'arrêté attaqué, les conclusions en annulation dirigées contre l'arrêté du 28 février 2022 par lequel le préfet de Lot-et-Garonne a refusé de délivrer à M. A... un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français n'ont pas perdu leur objet au cours de l'instance. Il y a lieu, dès lors, d'y statuer.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, à l'appui de ses moyens tirés de l'insuffisante motivation et du défaut d'examen réel et sérieux de sa situation, le requérant ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de droit ou de fait nouveau par rapport à son argumentation devant les premiers juges. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents du jugement attaqué.

4. En deuxième lieu, aux termes du I de l'article R. 40-29 du code de procédure pénale : " Dans le cadre des enquêtes prévues à l'article 17-1 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995, (...), les données à caractère personnel figurant dans le traitement qui se rapportent à des procédures judiciaires en cours ou closes, à l'exception des cas où sont intervenues des mesures ou décisions de classement sans suite, de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenues définitives, ainsi que des données relatives aux victimes, peuvent être consultées, sans autorisation du ministère public, par : / (...) 5° Les personnels investis de missions de police administrative individuellement désignés et spécialement habilités par le représentant de l'Etat (...) ". Selon l'article L. 114-1 du code de la sécurité intérieure : " (...) V. Il peut être procédé à des enquêtes administratives dans les conditions prévues au second alinéa du I du présent article pour la délivrance, le renouvellement ou le retrait d'un titre ou d'une autorisation de séjour sur le fondement de l'article L. 234-1, L. 235-1, L. 425-4, L. 425-10, L. 432-1 ou L. 432-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou des stipulations équivalentes des conventions internationales ainsi que pour l'application des articles L. 434-6, L. 511-7, L. 512-2 et L. 512-3 du même code ".

5. Dès lors que les dispositions citées ci-dessus prévoient la possibilité que certains traitements automatisés de données à caractère personnel soient consultés au cours de l'enquête conduite par l'administration dans le cadre de ses pouvoirs de police, préalablement à la décision portant refus de titre de séjour, la circonstance que l'agent ayant procédé à cette consultation n'aurait pas été, en application des dispositions également citées ci-dessus du code de procédure pénale, individuellement désigné et régulièrement habilité à cette fin, si elle est susceptible de donner lieu aux procédures de contrôle de l'accès à ces traitements, n'est pas, par elle-même, de nature à entacher d'irrégularité la décision prise. En tout état de cause, si le préfet n'établit pas que les agents ayant consulté le fichier de traitement d'antécédents judiciaires étaient habilités conformément aux dispositions précitées, il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué que celui-ci a été pris pour un ensemble de motifs, notamment le fait que l'intéressé a fait l'objet d'une condamnation pénale, qu'il ne contribue pas à l'éducation et à l'entretien de sa fille et qu'il n'établit pas que la cellule familiale ne pourrait pas se reconstituer au Maroc.

6. Il ressort des pièces du dossier que le préfet de Lot-et-Garonne s'est notamment fondé, suite à la consultation du traitement des antécédents judiciaires, sur les mises en cause de M. A..., le 30 janvier 2018, pour menace contre les personnes avec ordre de remplir une condition, commise par une personne étant ou ayant été conjoint, et le 14 novembre 2018 pour usage de faux en écriture et altération frauduleuse de la vérité dans un écrit. S'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de Lot-et-Garonne aurait, avant de refuser de délivrer à M. A... le titre de séjour sollicité, saisi les services compétents de la police nationale ou de la gendarmerie nationale pour complément d'information, ou le procureur de la République compétent aux fins de demandes d'information sur les suites judiciaires, conformément aux dispositions précitées de l'article R. 40-29 du code de procédure pénale, il ressort toutefois des termes mêmes de l'arrêté attaqué que pour caractériser l'existence d'une menace à l'ordre public, le préfet de Lot-et-Garonne s'est également fondé sur la condamnation pénale à quatre ans d'emprisonnement prononcée par le tribunal judiciaire de Tarbes le 30 juin 2020 à l'encontre de M. A... pour des faits de transport non autorisé de stupéfiants, détention non autorisée de stupéfiants, offre et cession non autorisée de stupéfiants, acquisition non autorisée de stupéfiants, importation non autorisée de stupéfiants, trafic. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure ne peut qu'être écarté.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 412-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La circonstance que la présence d'un étranger en France constitue une menace pour l'ordre public fait obstacle à la délivrance et au renouvellement de la carte de séjour temporaire, de la carte de séjour pluriannuelle et de l'autorisation provisoire de séjour prévue aux articles L. 425-4 ou L. 425-10 ainsi qu'à la délivrance de la carte de résident et de la carte de résident portant la mention " résident de longue durée-UE ". ". Aux termes de l'article L. 432-1 du même code : " La délivrance d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle ou d'une carte de résident peut, par une décision motivée, être refusée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public. ".

8. Ainsi qu'il a été dit au point 6, il ressort des pièces du dossier que M. A... a fait l'objet d'une condamnation par le tribunal correctionnel de Tarbes le 30 juin 2020 à une peine d'emprisonnement de quatre ans, pour des faits de transport non autorisé de stupéfiants, détention non autorisée de stupéfiants, offre et cession non autorisée de stupéfiants, acquisition non autorisée de stupéfiants, importation non autorisée de stupéfiants, trafic. Compte tenu du caractère récent et de la gravité de ces faits, nonobstant les efforts de réinsertion dont se prévaut M. A..., le préfet de Lot-et-Garonne a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, estimer que la présence de l'intéressé en France constituait une menace à l'ordre public. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées ne peut qu'être écarté.

9. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familial " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. ". Aux termes de l'article L. 423-8 du même code : " Pour la délivrance de la carte de séjour prévue à l'article L. 423-7, lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, doit justifier que celui-ci contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du code civil, ou produire une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. / Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant ". Selon l'article 371-2 du code civil : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. (...) ".

10. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est père d'une enfant française, Kahina Murail, née le 7 décembre 2010. M. A... soutient contribuer à l'éducation et à l'entretien de sa fille, et se prévaut notamment à cet égard de virements effectués entre 2010 et 2020 à la mère de sa fille, de factures d'achats de jouets et vêtements entre 2016 et 2018, et du paiement d'une pension alimentaire jusqu'en janvier 2020. Il ressort toutefois des pièces du dossier, en particulier du jugement rendu le 24 août 2021, qu'aux termes de plusieurs décisions de justice, dont la dernière en date du 23 avril 2019, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Pau a notamment suspendu les droits de visite et d'hébergement de M. A... auprès de sa fille, et supprimé la pension alimentaire mise à sa charge à compter du 11 janvier 2020, compte tenu de son incarcération. Le juge des affaires familiales a par ailleurs indiqué qu'une enquête sociale établie en 2018 révélait le souhait de M. A... de réinvestir son statut paternel et de reprendre des liens avec son enfant. Dans ces conditions, nonobstant la circonstance que par la même décision du 24 août 2021, le juge des affaires familiales du tribunal judiciaire de Pau a rejeté la demande formée par la mère de sa fille d'obtenir l'exercice exclusif de l'autorité parentale, M. A... n'établit pas, à la date de la décision attaquée, contribuer effectivement à l'éducation de sa fille depuis au moins deux ans. Enfin, le requérant ne peut utilement se prévaloir d'un jugement du tribunal judiciaire de Pau du 9 août 2022, postérieur à l'arrêté attaqué, par lequel le juge a fixé le montant de la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant et lui a accordé un droit de visite médiatisé. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

11. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :" Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour qui est saisie pour avis par l'autorité administrative : /1° Lorsqu'elle envisage de refuser de délivrer ou de renouveler la carte de séjour temporaire prévue aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-13, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21, L. 423-22, L. 423-23, L. 425-9 ou L. 426-5 à un étranger qui en remplit effectivement les conditions de délivrance ; (...) ".

12. Il résulte des dispositions de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues par ces textes auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui s'en prévalent.

13. Ainsi qu'il a été dit au point 10, dès lors que M. A... ne justifie pas remplir les conditions pour bénéficier de plein droit d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de Lot-et-Garonne n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour, avant de statuer sur sa demande de titre de séjour. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 423-13 doit être écarté.

14. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

15. Si M. A... se prévaut de sa présence en France depuis cinq ans à la date de la décision attaquée, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé a été incarcéré pendant une période de plus de deux ans. Il résulte par ailleurs de ce qui a été dit au point 10 que M. A... n'établit pas contribuer à l'éducation de sa fille de nationalité française. Ensuite, si le requérant se prévaut de la présence en France de son épouse et de sa deuxième fille scolarisée sur le territoire, il ne ressort pas des pièces du dossier que la cellule familiale ne pourrait pas se reconstruire au Maroc, pays dont son épouse a également la nationalité. Les éléments produits par M. A... ne permettent par ailleurs pas d'établir son intégration sur le territoire français, alors qu'il ressort des pièces du dossier que les autres membres de sa famille résident en Espagne, pays dans lequel il est titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 6 octobre 2023. Dans ces conditions, compte tenu de la durée et des conditions de séjour en France de M. A..., la décision attaquée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. Pour les mêmes motifs, la décision attaquée n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation de la situation de M. A....

16. En septième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", "travailleur temporaire" ou "vie privée et familiale", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. / Les modalités d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'Etat ".

17. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 15.

18. En huitième lieu, aux termes des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. / (...) ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

19. Ainsi qu'il a été dit, M. A... n'établit pas contribuer effectivement à l'éducation de sa fille de nationalité française, ni que la cellule familiale ne pourrait pas se reconstituer avec sa deuxième fille, au Maroc. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

20. En premier lieu, à l'appui de son moyen tiré de l'insuffisante motivation, le requérant ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de droit ou de fait nouveau par rapport à son argumentation devant les premiers juges. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents du jugement attaqué.

21. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'en raison de l'illégalité de la décision portant refus de séjour, la décision portant obligation de quitter le territoire français devrait être annulée.

22. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) / 5° Le comportement de l'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois constitue une menace pour l'ordre public (...) ".

23. Il résulte de ce qui a été dit au point 8 que, dès lors que la présence de l'intéressé en France constitue une menace à l'ordre public, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

24. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) / 5° L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; (...) ".

25. Il résulte de ce qui a été dit au point 10 que, dès lors que M. A... n'établit pas contribuer effectivement à l'éducation de sa fille de nationalité française, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées ne peut qu'être écarté.

26. En cinquième lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, et de l'erreur manifeste d'appréciation sur sa situation, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux développés aux points 15 et 19.

En ce qui concerne la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :

27. En premier lieu, à l'appui de son moyen tiré de l'insuffisante motivation, le requérant ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de droit ou de fait nouveau par rapport à son argumentation devant les premiers juges. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents du jugement attaqué.

28. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire, la décision portant refus de délai de départ volontaire devrait être annulée.

29. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : /1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; / 2° L'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était manifestement infondée ou frauduleuse ; /3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. ". En vertu de l'article L. 613-1 du même code, les motifs de la décision relative au délai de départ volontaire sont indiqués.

30. D'une part, il résulte de ce qui a été dit au point 8 que, dès lors que la présence de M. A... en France constitue une menace à l'ordre public, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du 1° de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

31. D'autre part, contrairement à ce que soutient M. A..., la décision attaquée n'est pas fondée sur les dispositions précitées des 2° et 3° de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation, au regard des 2° et 3° de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

32. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire, la décision fixant le pays de renvoi devrait être annulée.

33. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 février 2022. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à ce que l'Etat soit condamné au versement d'une somme d'argent au titre des frais de justice ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de Lot-et-Garonne.

Délibéré après l'audience du 21 novembre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Bénédicte Martin, présidente,

M. Michaël Kauffmann, premier conseiller,

Mme Pauline Reynaud, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 décembre 2023.

La rapporteure,

Pauline Reynaud La présidente,

Bénédicte Martin, Le greffier,

Christophe Pelletier La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23BX01373


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX01520
Date de la décision : 12/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MARTIN
Rapporteur ?: Mme Pauline REYNAUD
Rapporteur public ?: Mme GAY
Avocat(s) : DUMAZ ZAMORA

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-12;23bx01520 ?
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