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12/12/2023 | FRANCE | N°22BX00617

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 12 décembre 2023, 22BX00617


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



L'Union des syndicats pour le traitement des ordures ménagères du Castillonnais et du Réolais (USTOM) a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler le titre exécutoire du 9 décembre 2019 par lequel la commune de Massugas a mis à sa charge la somme de 13 000 euros au titre de sa " participation forfaitaire annuelle 2019 " et de la décharger de l'obligation de payer cette somme.



Par un jugement n°2000620 du 22 décembre 2021, le tribunal adminis

tratif de Bordeaux a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :



Par une ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Union des syndicats pour le traitement des ordures ménagères du Castillonnais et du Réolais (USTOM) a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler le titre exécutoire du 9 décembre 2019 par lequel la commune de Massugas a mis à sa charge la somme de 13 000 euros au titre de sa " participation forfaitaire annuelle 2019 " et de la décharger de l'obligation de payer cette somme.

Par un jugement n°2000620 du 22 décembre 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 février 2022, l'Union des syndicats pour le traitement des ordures ménagères du Castillonnais et du Réolais (USTOM), représentée par Me Ruffié, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 22 décembre 2021 ;

2°) d'annuler le titre de recette n°171 émis à son encontre le 9 décembre 2019 pour un montant de 13 000 euros et de la décharger de l'obligation de payer cette somme ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Massugas la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le titre exécutoire litigieux ne comporte pas les bases de liquidation ;

- sa délibération du 3 janvier 2013, sur le fondement de laquelle ce titre a été émis, constitue une libéralité ;

- il n'a conclu aucun contrat avec la commune de Massugas et, subsidiairement qu'un hypothétique contrat serait entaché d'un vice justifiant son annulation dès lors qu'il constitue une libéralité et ne comporte pas de terme fixe ;

- le bouleversement de l'économie de ce contrat justifierait que la cour en prononce la résiliation.

Par un mémoire enregistré le 22 février 2023, la commune de Massugas, représentée par Me Krebs, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de l'USTOM au titre des frais exposés pour l'instance.

Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés et que l'USTOM ne peut demander, pour la première fois en appel, la résiliation du contrat les liant.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de Mme Le Bris, rapporteure publique.,

- et les observations de Me Jouanneaux, représentant de l'USTOM, et de Me Krebs, représentant la commune de Massugas.

Considérant ce qui suit :

1. L'Union des syndicats pour le traitement des ordures ménagères (USTOM) du Castillonnais et du Réolais relève appel du jugement du 22 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre exécutoire émis à son encontre par la commune de Massugas le 9 décembre 2019 pour le recouvrement d'une somme de 13 000 euros correspondant à " la participation forfaitaire annuelle 2019 " de l'USTOM aux frais et sujétions entraînés par la présence d'une usine de traitement des déchets et ordures ménagères sur le territoire de la commune.

2. En premier lieu, l'article 24 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 dispose que : " Toute créance liquidée faisant l'objet (...) d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation (...) ". En vertu de ces dispositions, une personne publique ne peut mettre en recouvrement une créance sans indiquer, soit dans le titre lui-même, soit par une référence précise à un document joint à ce titre ou précédemment adressé au débiteur, les bases et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde pour mettre les sommes en cause à la charge de ce débiteur.

3. En l'espèce, le titre exécutoire émis le 9 décembre 2019 à l'encontre de l'USTOM du Castillonais et du Réolais porte la mention " Participation forfaitaire annuelle " et indique le montant de la participation annuelle due, soit 13 000 euros. Si ce titre ne vise pas la délibération du 3 janvier 2013 sur laquelle il se fonde et si cette dernière n'était pas jointe, il est constant que l'USTOM ne pouvait ignorer l'existence de cette délibération dont il est l'auteur. En outre, il a contesté les précédents titres exécutoires du même montant émis pour le même motif au titre des années 2015 à 2018. Enfin et en tout état de cause, le montant de cette participation est forfaitaire de sorte que la base de liquidation de la créance se limite au rappel de son montant, lequel figurait dans le titre exécutoire dont s'agit. Par suite, l'USTOM n'est pas fondé à soutenir que le titre litigieux ne comporte pas les bases de liquidation de la créance en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique.

4. En deuxième lieu, le conseil municipal de Massugas et le conseil syndical du syndicat intercommunal de traitement des ordures ménagères (Sictom) de la région de Castillon ont décidé, par des délibérations concordantes adoptées respectivement les 12 juillet et 17 novembre 1980, de l'implantation d'une usine de traitement des ordures ménagères sur un terrain cédé par la commune au syndicat pour la somme d'un franc symbolique en contrepartie de la gratuité totale du traitement et du ramassage des ordures ménagères effectué tous les quinze jours sur le territoire de la commune pour une durée indéterminée. Ces deux délibérations, échangées entre les deux parties et réciproquement agréées, doivent être regardées comme définissant leurs obligations contractuelles respectives.

5. Par une délibération du 3 février 1984, l'assemblée générale du Sictom a décidé, dans le cadre de l'exécution de ce contrat, de remplacer la gratuité totale du traitement et du ramassage des ordures ménagères par le versement à la commune de Massugas, " en compensation des frais et des sujétions entraînées par la présence de l'usine de traitement sur son territoire ", d'une indemnité annuelle d'un franc par habitant " réellement traité " par le Sictom. Enfin, par une délibération du 3 janvier 2013 répondant à une proposition en ce sens du maire de la commune de Massugas, le comité syndical de l'USTOM a accepté de remplacer le versement de l'indemnité d'un franc par habitant " réellement traité " par un versement forfaitaire annuel d'un montant de 13 000 euros.

6. Eu égard à la volonté ainsi exprimée par la commune de Massugas et par le Sictom devenu l'USTOM de se lier par des obligations réciproques et renouvelées à deux reprises, le litige né du refus de l'USTOM de s'acquitter des sommes mises à sa charge par les titres exécutoires émis par la commune de Massugas le 19 décembre 2016 et le 19 octobre 2017 doit être regardé comme portant sur l'exécution du contrat liant cette commune et ce syndicat.

7. En troisième lieu, lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l'exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat. Toutefois, dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel.

8. D'une part, à supposer même que la commune n'expose aucun frais à raison de la présence d'une usine de traitement des déchets sur son territoire, ce contrat n'est pas pour autant dépourvu de contrepartie dès lors qu'il a également pour objet l'indemnisation due à la commune, d'une part, pour la vente d'un terrain lui appartenant ainsi qu'il ressort encore de la délibération de l'USTOM du 3 janvier 2013, d'autre part, pour l'indemnisation des sujétions que la commune et ses habitants supportent nécessairement à raison de la présence de cette usine sur leur territoire, ainsi qu'il ressort d'ailleurs des motifs de la délibération du Sictom du 3 février 1984 susmentionnée. L'USTOM n'est dès lors pas fondée à soutenir que, faute de contrepartie, le versement d'une contribution forfaitaire à la commune de Massugas présenterait le caractère d'une libéralité.

9. D'autre part, aucune disposition législative ou règlementaire ni aucun principe général du droit ne faisait obstacle à ce que l'USTOM s'engage, par contrat, à indemniser la commune de Massugas de la cession d'un terrain communal ainsi que des frais et sujétions résultant pour elle de l'implantation d'une usine de traitement des ordures ménagères sur son territoire, pour la durée de son fonctionnement.

10. Par suite, l'USTOM n'est pas fondée à soutenir que le contrat le liant à la commune de Massugas serait entaché de vices d'une gravité justifiant qu'il ne soit pas fait application de ce contrat.

11. Ainsi, en l'absence de vices ou d'irrégularités entachant le contrat liant l'USTOM à la commune de Massugas, et à supposer même qu'un déséquilibre soit apparu en cours d'exécution du contrat, l'USTOM n'est pas fondée à demander au juge du contrat de prononcer son annulation ou sa résiliation, laquelle résiliation n'aurait, au demeurant, aucune incidence sur le bien-fondé de la créance de la commune, qui porte sur une période antérieure.

12. Il résulte de tout ce qui précède que l'USTOM n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre exécutoire émis à son encontre le 9 décembre 2019. Par suite, sa requête doit être rejetée.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Massugas, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que l'USTOM demande au titre des frais exposés pour l'instance. Il y a lieu, en revanche, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de l'USTOM une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés pour l'instance par la commune de Massugas.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'USTOM est rejetée.

Article 2 : L'USTOM versera à la commune de Massugas la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'Union des syndicats pour le traitement des ordures ménagères du Castillonais et du Réolais et à la commune de Massugas.

.

Délibéré après l'audience du 21 novembre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente,

Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 décembre 2023.

Le rapporteur,

Manuel A...

La présidente,

Marie-Pierre Beuve DupuyLa greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne à la préfète de la Gironde en ce qui la concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°22BX00617 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX00617
Date de la décision : 12/12/2023
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BEUVE-DUPUY
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : CABINET LEXIA

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-12;22bx00617 ?
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