Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Dans une instance n° 1804092, l'association pour la sauvegarde du pays Fouesnantais a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 6 avril 2018 par laquelle le maire de Fouesnant a délivré un permis de construire à la société Camping de l'Atlantique autorisant diverses constructions et démolitions sur un terrain situé Hent Kerbader au lieu-dit Poul An Corre, ainsi que la décision du 25 juin 2018 portant rejet de son recours gracieux.
Dans une instance n° 1905147, Mme A... B... a demandé l'annulation du même arrêté du 6 avril 2018 ainsi que de l'arrêté du maire de Fouesnant du 7 mai 2019 accordant un permis de construire modificatif à la société Camping de l'Atlantique et la décision implicite rejetant son recours gracieux.
Par un jugement n°s 1804095, 1905147 du 16 juillet 2021, le tribunal administratif de Rennes a admis l'intervention de Mme B... dans l'instance n° 1804092 et a annulé l'arrêté du 6 avril 2018 du maire de Fouesnant accordant ledit permis de construire à la société Camping de l'Atlantique, l'arrêté du 7 mai 2019 dudit maire accordant à la même société un permis de construire modificatif ainsi que les décisions de rejet des recours gracieux formés par l'association pour la sauvegarde du pays Fouesnantais et Mme B..., a condamné la commune de Fouesnant à verser à cette association la somme de 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté les conclusions présentées par les autres parties sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
I - Par une requête et deux mémoires, enregistrés sous le n° 21NT02593 les 16 septembre 2021 et 5 mai 2022, la commune de Fouesnant, représentée par Me Prieur et Me Guil, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 16 juillet 2021 du tribunal administratif de Rennes ;
2°) de rejeter les demandes présentées par l'association pour la sauvegarde du pays fouesnantais et Mme B... devant le tribunal administratif de Rennes ;
3°) de mettre à la charge de l'association pour la sauvegarde du pays fouesnantais et de Mme B... la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme ne sont pas méconnues ; le camping doit être qualifié de village ou agglomération au sens de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme eu égard au nombre et à la densité significatifs de constructions, dont des habitations légères de tourisme, qu'il comprend, ainsi qu'à son emprise foncière ; il n'y a pas extension de l'urbanisation mais réaménagement de l'existant ;
- les autres moyens soulevés devant le tribunal administratif de Rennes et devant la cour ne sont pas fondés pour les motifs exposés en première instance.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 mars 2022, l'association pour la sauvegarde du pays fouesnantais, représentée par Me Varnoux, demande à la cour de rejeter la requête de la commune de Fouesnant et de mettre à la charge respective de celle-ci et de la société Camping de l'Atlantique une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés par la commune de Fouesnant ne sont pas fondés ;
- subsidiairement, l'autorisation accordée est irrégulière pour les motifs suivants et ceux exposés en première instance :
en méconnaissance de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme, la commission départementale de la nature des paysages et des sites n'a pas été consultée ;
le dossier de demande de permis était incomplet au regard de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme, s'agissant du projet architectural ;
les dispositions de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme sont méconnues dès lors que le projet autorisé n'est pas constitutif d'une extension limitée de l'urbanisation ;
les dispositions de l'article Ut 11 du plan local d'urbanisme sont méconnues dès lors que le projet porte atteinte au caractère et à l'intérêt des lieux.
Par un mémoire en défense enregistré le 24 mars 2022, Mme A... B..., représentée par Me Josselin, demande à la cour de rejeter la requête de la commune de Fouesnant et de mettre à la charge respective de celle-ci et de la société Camping de l'Atlantique une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés par la commune de Fouesnant ne sont pas fondés ;
- subsidiairement, l'autorisation accordée est irrégulière pour les motifs exposés en première instance.
II - Par une requête et un mémoire, enregistrés les 16 septembre 2021 et 17 juin 2022 sous le n° 21NT02597, la société Camping de l'Atlantique, représentée par Me Repain, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 16 juillet 2021 du tribunal administratif de Rennes ;
2°) de rejeter les demandes présentées par l'association pour la sauvegarde du pays fouesnantais et Mme B... devant le tribunal administratif de Rennes ;
3°) de mettre à la charge respective de l'association pour la sauvegarde du pays fouesnantais et de Mme B... la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier faute d'être motivé en réponse au moyen tiré de l'absence d'extension de l'urbanisation compte tenu de la consistance du projet ;
- le jugement attaqué fait application d'une version de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme inopposable au projet ;
- les dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme ne sont pas méconnues, le camping existant étant constitutif d'un espace urbanisé et d'un village au sens de cette disposition ; subsidiairement, il peut être qualifié de hameau nouveau intégré à l'environnement ; il n'y a pas extension de l'urbanisation mais réaménagement de l'existant ;
- les autres moyens soulevés devant le tribunal administratif de Rennes et devant la cour ne sont pas fondés, notamment pour les motifs exposés en première instance.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 mars 2022, l'association pour la sauvegarde du pays fouesnantais, représentée par Me Varnoux, demande à la cour de rejeter la requête de la société Camping de l'Atlantique et de mettre à la charge respective de cette dernière et de la commune de Fouesnant une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés par la société Camping de l'Atlantique ne sont pas fondés ;
- subsidiairement, l'autorisation accordée est irrégulière pour les motifs suivants et ceux exposés en première instance :
en méconnaissance de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme la commission départementale de la nature des paysages et des sites n'a pas été consultée ;
le dossier de demande de permis était incomplet au regard de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme s'agissant du projet architectural ;
les dispositions de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme sont méconnues dès lors que le projet autorisé n'est pas constitutif d'une extension limitée de l'urbanisation ;
les dispositions de l'article Ut 11 du plan local d'urbanisme sont méconnues dès lors que le projet porte atteinte au caractère et à l'intérêt des lieux.
Par un mémoire en défense enregistré le 24 mars 2022, Mme A... B..., représentée par Me Josselin, demande à la cour de rejeter la requête de la société Camping de l'Atlantique et de mettre à la charge de cette dernière et de la commune de Fouesnant une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés par la société Camping de l'Atlantique ne sont pas fondés ;
- subsidiairement, l'autorisation accordée est irrégulière pour les motifs exposés en première instance.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rivas,
- les conclusions de M. Frank, rapporteur public,
- et les observations de Me Tremouilles, représentant la commune de Fouesnant.
Considérant ce qui suit :
1. La société Camping de l'Atlantique a déposé à la mairie de Fouesnant (Finistère), le 19 décembre 2017, une demande de permis de construire pour la démolition de son bâtiment " espace forme ", le réaménagement d'un bâtiment d'habitation en nouvel " espace forme ", la construction d'un bâtiment commercial, le réaménagement de l'entrée du camping et des parkings, et la transformation du bar existant en halle d'animation ouverte, sur un terrain situé Hent Kerbader au lieu-dit Poul An Corre. Par un arrêté du 6 avril 2018, le maire de Fouesnant a délivré le permis de construire sollicité. Par un arrêté du 7 mai 2019 ce maire a accordé à la société Camping de l'Atlantique un permis de construire modificatif portant sur l'implantation et l'aménagement interne initialement projeté, la mise en accessibilité de l'ascenseur, l'agrandissement de la terrasse du restaurant du bâtiment commercial et l'abandon de la réalisation de " l'espace forme " dans le bâtiment d'habitation. Par un jugement du 16 juillet 2021, dont la commune de Fouesnant et la société Camping de l'Atlantique relèvent appel, le tribunal administratif de Rennes a annulé, à la demande d'une part de l'association pour la sauvegarde du pays Fouesnantais et d'autre part de Mme A... B..., les arrêtés des 6 avril 2018 et 7 mai 2019 du maire de Fouesnant, ainsi que la décision du 25 juin 2018 de ce maire rejetant le recours gracieux formé par l'association contre l'arrêté du 6 avril 2018 ainsi que les deux décisions rejetant les recours gracieux formés par Mme B... contre les deux arrêtés.
2. Les requêtes susvisées n° 21NT02593 et n° 21NT02597 présentent à juger des questions semblables et sont dirigées contre le même jugement du tribunal administratif de Rennes. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ".
4. En son point 15 le jugement attaqué répond au moyen soulevé par l'association pour la sauvegarde du pays fouesnantais et par Mme B... tiré de la méconnaissance de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme par les autorisations accordées les 6 avril 2018 et 7 mai 2019. Les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments des parties, exposent avec la précision nécessaire les motifs pour lesquels ils jugent que lesdits arrêtés méconnaissent l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, alors même qu'ils ne rappellent pas notamment que le nouveau bâtiment commercial autorisé devrait prendre la place d'une construction dont la démolition est autorisée par l'arrêté de 2018. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement attaqué doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
5. Aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date du permis de construire initial : " L'extension de l'urbanisation se réalise soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. " et aux termes de ce même article dans sa rédaction applicable à la date du permis de construire modificatif : " L'extension de l'urbanisation se réalise en continuité avec les agglomérations et villages existants. (...) ".
6. Il résulte des dispositions précitées que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les agglomérations et villages existants, c'est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions. En revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages. Toutefois, le simple agrandissement d'une construction existante ne peut être regardé comme une extension de l'urbanisation au sens de ces dispositions.
7. D'une part, il ressort des pièces du dossier que l'autorisation accordée par le maire de Fouesnant à la société Camping de l'Atlantique permet le réaménagement partiel de ce camping implanté au lieu-dit Poul an Corre, sur un tènement de 7,4 hectares, comprenant dans son état initial, notamment, un espace aquatique, des locaux commerciaux abritant un bar et un espace forme, pour une superficie de 2 418 m² de surface de plancher, et 432 emplacements dont 362 supportant des habitations légères de loisir. L'autorisation initiale contestée de 2018 autorise la création de 976 m² de surface de plancher, contre 1 141 m² au titre de l'autorisation modificative de 2019, avec notamment la réalisation, sur l'emplacement d'un espace forme de 290 m² dont la démolition est également autorisée, d'un bâtiment d'un étage supportant une terrasse aménagée autour d'un bar. Une telle autorisation modifiée, qui comporte notamment la construction d'un nouveau bâtiment, ne s'analyse pas comme un simple agrandissement d'une construction existante mais bien comme une extension de l'urbanisation au sens et pour l'application de la disposition citée au point 5.
8. D'autre part, le camping de l'Atlantique et l'habitation de Mme B..., isolés au sein d'un espace naturel, ne sont limitrophes d'aucune agglomération ou village existant. Si le terrain de camping préexistant aux autorisations en litige occupe un tènement de 7,4 hectares et comporte quelques bâtiments à destination essentiellement des clients de l'établissement, notamment une piscine couverte, des sanitaires, des espaces de commerce et de réception, pour une surface totale de plancher de 2 418 m², un tel ensemble ne peut être regardé comme une urbanisation existante ou un village au sens de l'article L. 121-8 précité, eu égard au faible nombre de constructions, à leur emprise au sol limitée et à leur dispersion. L'existence de 362 emplacements supportant des habitations légères de loisir ne saurait davantage être qualifiée d'urbanisation existante ou de village au sens de cette même disposition dès lors qu'il s'agit, ainsi que mentionné à l'article R. 111-37 du code de l'urbanisme, de " constructions démontables ou transportables ". Si les appelantes soutiennent également que le site constitue un hameau nouveau intégré à l'environnement au sens de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme applicable à la date de l'autorisation de 2018, un tel moyen ne peut qu'être écarté au regard des caractéristiques urbanistiques précitées. Au surplus, le critère de nouveauté exigé n'est pas rempli en l'espèce dès lors que l'autorisation d'ouverture de ce camping a été accordée en 1982. Par suite, les autorisations accordées les 6 avril 2018 et 7 mai 2019 par le maire de Fouesnant à la société Camping de l'Atlantique sont intervenues en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme.
9. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Fouesnant et la société Camping de l'Atlantique ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé les arrêtés des 6 avril 2018 et 7 mai 2019 du maire de Fouesnant accordant à cette société des autorisations de construire et de démolir.
Sur les frais d'instance :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à l'octroi d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens à la partie perdante. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions présentées à ce titre par la commune de Fouesnant et la société Camping de l'Atlantique. En revanche, il convient, dans les circonstances de l'espèce, au titre des deux instances, de mettre à la charge respective de la commune de Fouesnant et de la société Camping de l'Atlantique, sur le fondement des mêmes dispositions, la somme de 1 000 euros chacune au titre des frais exposés respectivement d'une part par l'association pour la sauvegarde du pays Fouesnantais et de l'autre par Mme B....
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes de la commune de Fouesnant et de la société Camping de l'Atlantique sont rejetées.
Article 2 : La commune de Fouesnant et la société Camping de l'Atlantique verseront chacune à l'association pour la sauvegarde du pays Fouesnantais une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La commune de Fouesnant et la société Camping de l'Atlantique verseront chacune à Mme B... une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Fouesnant, à la société Camping de l'Atlantique, à l'association pour la sauvegarde du pays fouesnantais et à Mme A... B....
Délibéré après l'audience du 23 novembre 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Degommier, président de chambre,
- M. Rivas, président assesseur,
- Mme Ody, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 décembre 2023.
Le rapporteur,
C. RIVAS
Le président,
S. DEGOMMIER
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au préfet du Finistère en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°s 21NT02593,21NT02597