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11/12/2023 | FRANCE | N°22MA02535

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 11 décembre 2023, 22MA02535


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille, à titre principal, d'ordonner avant-dire droit la réalisation d'une expertise, à titre subsidiaire, de condamner l'Assistance Publique - Hôpitaux de Marseille (AP-HM) et l'Office national des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui payer la somme globale de 247 429,02 euros assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation.



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n jugement n° 1706818 du 1er avril 2019, le tribunal administratif de Marseille a condamné l'AP-H...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille, à titre principal, d'ordonner avant-dire droit la réalisation d'une expertise, à titre subsidiaire, de condamner l'Assistance Publique - Hôpitaux de Marseille (AP-HM) et l'Office national des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui payer la somme globale de 247 429,02 euros assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation.

Par un jugement n° 1706818 du 1er avril 2019, le tribunal administratif de Marseille a condamné l'AP-HM à payer à M. A... la somme de 3 890 euros, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation.

Par un arrêt n° 19MA02568 du 31 décembre 2020, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de M. A..., annulé le jugement du tribunal administratif de Marseille du 1er avril 2019 et condamné l'AP-HM à payer à M. A... la somme de 19 838,64 euros, dont 11 538,64 euros à verser à l'intéressé sous déduction, le cas échéant, du montant de la prestation de compensation du handicap éventuellement perçue.

Par une décision n° 450266 du 29 septembre 2022, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par M. A..., a annulé l'arrêt du 31 décembre 2020 de la cour administrative d'appel de Marseille en tant qu'il se prononce sur le préjudice lié à l'aide d'une tierce personne et renvoyé l'affaire devant la cour dans la mesure de la cassation prononcée.

Procédure devant la cour après renvoi du Conseil d'Etat :

Par des mémoires, enregistrés après renvoi les 25 octobre 2022 et 13 décembre 2022, M. A..., représenté par Me Maury, demande à la cour :

1°) de condamner l'AP-HM à lui payer la somme de 15 987,73 euros au titre des besoins en tierce personne et de porter l'indemnité totale allouée par le tribunal à la somme de 24 287,73 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 6 juillet 2017 et de la capitalisation des intérêts à compter du 7 juillet 2018 ;

2°) de mettre à la charge de l'AP-HM les dépens et la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il justifie ne pas bénéficier de la prestation de compensation du handicap ;

- son état de santé nécessite l'aide d'une tierce personne à hauteur de 2,5 heures par semaine et sur la base d'un tarif horaire de 13 euros jusqu'en 2017, de 14 euros de 2018 à 2020, de 15 euros pour l'année 2021 et de 22 euros pour l'année 2022 ;

- le montant total de l'indemnité au titre de l'assistance à tierce personne s'élève, après application du taux de perte de chance de 10 %, à la somme de 15 987,73 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré après renvoi le 22 novembre 2022, l'AP-HM, représentée par la SELARL Le Prado-Gilbert, demande à la cour :

1°) de limiter la somme que le tribunal administratif de Marseille l'a condamnée à payer à M. A... au titre de l'indemnisation du poste d'assistance par tierce personne à la somme de 81 euros ;

2°) de rejeter le surplus des conclusions de la requête de M. A....

Elle soutient que :

- seuls peuvent être indemnisés, pour la période du 11 avril 2013 au 12 septembre 2013, les besoins d'assistance pour un montant total de 81 euros, compte tenu d'un besoin évalué à 2,5 heures par semaine, d'un taux horaire de 13 euros et de l'application d'un taux de perte de chance de 10 % ;

- le requérant ne justifie pas le besoin, non retenu par l'expert, d'une aide humaine postérieure à la consolidation de son état de santé.

Par un mémoire en défense, enregistré après renvoi le 24 novembre 2022, l'ONIAM, représenté par la SELARL De La Grange et Fitoussi avocats, s'en remet à la sagesse de la cour concernant l'indemnisation sollicitée au titre de l'assistance par tierce personne et conclut au rejet de toute autre demande.

La procédure a été communiquée à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme, qui n'a pas produit d'observations.

Par une ordonnance du 14 décembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 16 janvier 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Danveau,

- les conclusions de M. Point, rapporteur public,

- et les observations de Me Maury, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... souffrant d'une ostopongiose, a subi une intervention chirurgicale à l'hôpital Nord de Marseille le 20 mars 2013, consistant à remplacer le dernier osselet par une prothèse en fluoropatic de 4,5 millimètres. Si les suites immédiates de l'intervention ont été simples, le patient a été pris de vertiges et de vomissements le 29 mars 2013. Les examens réalisés entre le 30 mars et le 2 avril 2013 n'ont pas révélé d'anomalie au niveau de la prothèse mais ont néanmoins établi une perte totale d'audition de l'oreille droite. Une nouvelle intervention a été pratiquée le 13 juin 2013 à Béziers, qui n'a pas permis d'amélioration sur le plan auditif. M. A... a saisi la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux de Provence-Alpes-Côte d'Azur laquelle, au vu du rapport de l'expertise médicale réalisée, s'est déclarée incompétente le 5 janvier 2015 au motif que les dommages subis ne présentaient pas le caractère de gravité prévu au II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique. Il a ensuite adressé, par courriers du 4 juillet 2017, des demandes indemnitaires préalables qui ont été rejetées expressément le 2 août 2017 par l'Assistance publique - Hôpitaux de Marseille (AP-HM) et implicitement par l'Office national des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM).

2. Par un jugement du 1er avril 2019, le tribunal administratif de Marseille a condamné l'AP-HM à payer à M. A..., après application d'un taux de perte de chance de 10 %, une indemnité de 3 890 euros en réparation des préjudices subis. Par un arrêt du 31 décembre 2020, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement du tribunal et a condamné l'AP-HM à payer à M. A..., en faisant application d'un taux de perte de chance de 10 %, une somme de 19 838,64 euros, dont 11 538,64 euros versés à l'intéressé sous déduction, le cas échéant, du montant de la prestation de compensation du handicap éventuellement perçue. Par une décision du 29 septembre 2022, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille en tant qu'il se prononce sur le préjudice lié à l'aide d'une tierce personne et renvoyé l'affaire devant la cour dans cette mesure.

Sur l'indemnisation des frais d'assistance par tierce personne :

3. Lorsque le juge administratif indemnise la victime d'un dommage corporel du préjudice résultant pour elle de la nécessité de recourir à l'aide d'une tierce personne dans les actes de la vie quotidienne, il détermine d'abord l'étendue de ces besoins d'aide et les dépenses nécessaires pour y pourvoir. Il fixe, ensuite, le montant de l'indemnité qui doit être allouée par la personne publique responsable du dommage, en tenant compte des prestations dont, le cas échéant, la victime bénéficie par ailleurs et qui ont pour objet la prise en charge de tels frais. A ce titre, il appartient au juge, lorsqu'il résulte de l'instruction que la victime bénéficie de telles prestations, de les déduire d'office de l'indemnité mise à la charge de la personne publique, en faisant, si nécessaire, usage de ses pouvoirs d'instruction pour en déterminer le montant. Lorsque la personne publique n'est tenue de réparer qu'une fraction du dommage corporel, cette déduction ne doit toutefois être opérée que dans la mesure requise pour éviter que le cumul des prestations et de l'indemnité versée excède les dépenses nécessaires aux besoins d'aide par tierce personne, évaluées ainsi qu'il a été dit plus haut.

En ce qui concerne la période allant jusqu'à la date de consolidation de l'état de santé :

4. Il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise, et il n'est pas contesté par l'AP-HM, que M. A..., souffrant de surdité à son oreille droite, d'acouphènes, de vertiges et de douleurs en lien avec son accident médical, a eu besoin de l'assistance par une tierce personne au cours de la période allant jusqu'à la date de consolidation de son état de santé. Ce besoin a été estimé, au vu des conclusions récapitulatives du rapport et de la fiche récapitulative jointe à celui-ci, à hauteur de deux heures et demi par semaine. Il résulte par ailleurs de l'instruction que M. A..., qui a été hospitalisé du 19 mars 2013 au 21 mars 2013, a été autorisé à rentrer à son domicile à compter du 22 mars 2013. Des complications, marquées par des vertiges et des vomissements, sont ensuite survenues le 29 mars 2013, conduisant M. A... à être de nouveau hospitalisé le 30 mars 2013, avant de rejoindre son domicile le 3 avril suivant. Il y a donc lieu de retenir une période d'indemnisation démarrant à compter du 3 avril 2013 et se terminant le 12 septembre 2013, date de consolidation de son état de santé, soit un total de 159 jours, déduction faite de quatre jours d'hospitalisation du 12 au 15 juin 2013. Par ailleurs, M. A... justifie, en produisant deux attestations de la maison départementale des personnes handicapées des Alpes-de-Haute-Provence datées du 11 janvier 2021 et du 23 novembre 2022, ne pas être éligible à la prestation de compensation du handicap " aide humaine " et n'avoir perçu aucune aide à ce titre depuis 2013. Enfin, le requérant justifie n'avoir pas perçu sur la période concernée le crédit d'impôt prévu à l'article 199 sexdecies du code général des impôts. En se fondant sur un taux horaire de 13 euros incluant les charges et correspondant au coût moyen de l'aide non médicalisée que nécessite l'état de santé de M. A... sur une base annuelle de 412 jours, le coût de l'assistance par une tierce personne pour cette période peut ainsi être fixé à la somme de 83,31 euros, compte tenu du taux de perte de chance fixé à 10 %.

En ce qui concerne la période postérieure à la date de consolidation de l'état de santé :

5. Il ressort du rapport d'expertise que si un besoin en assistance par une tierce personne est mentionné au paragraphe " Préjudice permanent après consolidation " du rapport, l'expert a expressément écarté un tel besoin tant dans ses conclusions que dans sa fiche récapitulative de conclusions, et n'a retenu, ainsi que le fait valoir l'AP-HM en défense, qu'un préjudice temporaire jusqu'à la date de consolidation de l'état de santé du requérant. Le rapport d'expertise, qui mentionne seulement que M. A..., du fait de la surdité de son oreille droite, est gêné lorsqu'il conduit son véhicule ou exerce son activité professionnelle de commerçant ambulant, ne comporte aucun élément de nature à justifier un besoin d'assistance pour la période postérieure à la consolidation de son état de santé, le déficit fonctionnel permanent de l'intéressé ayant par ailleurs été évalué à un taux limité de 4 %. Par suite, M. A... n'est, pour cette période, pas fondé à demander l'indemnisation des frais d'assistance par tierce personne.

6. Il résulte de ce qui précède que l'indemnité que l'AP-HM doit être condamnée à verser à M. A... au titre des besoins en assistance par tierce personne doit être fixée à la somme de 83,31 euros.

Sur les droits de M. A... :

7. Par son arrêt du 31 décembre 2020 devenu définitif sur ces points, la cour a évalué à 100 euros la somme que l'AP-HM doit verser à M. A... au titre du déficit fonctionnel temporaire, à 1 000 euros celle due au titre du déficit fonctionnel permanent, à 200 euros celle due au titre des souffrances endurées, 2 000 euros celle due au titre du préjudice d'incidence professionnelle et a fixé à 5 000 euros le montant du préjudice d'impréparation. Par suite, et eu égard au montant de l'indemnité accordée au titre des besoins en assistance par tierce personne fixé au point 6, le montant global de l'indemnité que l'AP-HM doit être condamnée à payer à M. A... doit être fixé à la somme de 8 383,31 euros.

Sur les intérêts et leur capitalisation :

8. M. A... a droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 8 383,31 euros à compter du 6 juillet 2017, date à laquelle sa réclamation du 4 juillet 2017 est parvenue à l'AP-HM, ainsi qu'à la capitalisation des intérêts à compter du 6 juillet 2018, puis à chaque échéance annuelle ultérieure.

Sur la déclaration d'arrêt commun :

9. Il y a lieu de déclarer le présent arrêt commun à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme qui, régulièrement mise en cause dans la présente instance, n'a pas produit de mémoire.

Sur les frais liés au litige :

10. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. A... présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La somme que l'AP-HM a été condamnée à payer à M. A... en réparation de l'ensemble de ses préjudices par l'arrêt de la cour du 31 décembre 2020 est réduite à 8 383,31 euros, dans les conditions énoncées aux points 4 à 7 du présent arrêt.

Article 2 : La somme de 8 383,31 euros portera intérêts au taux légal à compter du 6 juillet 2017. Les intérêts échus à la date du 6 juillet 2018 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure.

Article 3 : Le présent arrêt est déclaré commun à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à l'Assistance publique - Hôpitaux de Marseille, à l'Office national des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme.

Copie en sera adressée au RSI Auvergne.

Délibéré après l'audience du 23 novembre 2023, où siégeaient :

- Mme Fedi, présidente de chambre,

- Mme Rigaud, présidente assesseure,

- M. Danveau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 décembre 2023.

2

N° 22MA02535


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA02535
Date de la décision : 11/12/2023
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-04-03 Responsabilité de la puissance publique. - Réparation. - Évaluation du préjudice.


Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: M. Nicolas DANVEAU
Rapporteur public ?: M. POINT
Avocat(s) : MAURY

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-11;22ma02535 ?
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