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08/12/2023 | FRANCE | N°22PA04097

France | France, Cour administrative d'appel, 5ème chambre, 08 décembre 2023, 22PA04097


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler les décisions implicites du 16 février 2021 par lesquelles, respectivement, le conseil régional d'Ile-de-France et le rectorat de l'académie de Paris ont refusé de faire droit à ses demande de paiement de ses traitements depuis le 1er mars 2017, d'enjoindre à la présidente du conseil régional d'Ile-de-France et au recteur de la région académique de Paris de procéder au paiement de ses traitements, dans un

délai de trois mois à compter de la date de notification du jugement à intervenir et d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler les décisions implicites du 16 février 2021 par lesquelles, respectivement, le conseil régional d'Ile-de-France et le rectorat de l'académie de Paris ont refusé de faire droit à ses demande de paiement de ses traitements depuis le 1er mars 2017, d'enjoindre à la présidente du conseil régional d'Ile-de-France et au recteur de la région académique de Paris de procéder au paiement de ses traitements, dans un délai de trois mois à compter de la date de notification du jugement à intervenir et de condamner la région Ile-de-France et le rectorat de la région académique de Paris à lui verser une somme de 20 000 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis avec les intérêts et la capitalisation des intérêts.

Par un jugement n° 2107852 du 8 juillet 2022, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision implicite par laquelle la région Ile-de France a refusé de verser à Mme A... ses traitements depuis le 1er mars 2017, l'a condamnée à verser à Mme A..., dans un délai de deux mois, la somme correspondant à son demi-traitement du 1er mars 2017 au 8 juillet 2022, minoré des aides sociales perçues par l'intéressée au cours de la même période, ainsi qu'une somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice moral, a mis à la charge de la région Ile-de-France le versement à Mme A... d'une somme de 2 000 euros au titre des frais liés à l'instance, et a rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 6 septembre 2022, le 15 juin 2023 et le 21 septembre 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, Mme A..., représentée par le cabinet d'avocats Athon-Perez, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 8 juillet 2022 en tant, d'une part, qu'il a limité le versement des traitements qui lui sont dus à des demi-traitements, et pour la seule période allant du 1er mars 2017 à la date du jugement et, d'autre part, qu'il a limité à 3 000 euros la somme au versement de laquelle la région a été condamnée en réparation des préjudices qu'elle a subis ;

2°) d'enjoindre à la région Ile-de-France de procéder au versement de son plein traitement depuis le 1er mars 2017 jusqu'à sa réintégration effective dans son administration d'origine, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de 15 jours, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

3°) de condamner la région Ile-de-France à lui verser la somme de 20 000 euros, sauf à parfaire, en réparation des préjudices subis ;

4°) de mettre à la charge de la région Ile-de-France le versement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que la minute du jugement n'est pas signée ;

- elle ne pouvait pas être privée de son plein traitement dès lors qu'elle avait été reconnue apte à travailler par le comité médical et qu'elle ne se trouvait donc pas dans la situation prévue à l'article 27 du décret du 14 mars 1986 mais dans celle prévue à l'article 24 du décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 ;

- la règle du service fait ne pouvait pas lui être opposée dès lors qu'elle se trouvait en attente d'une réintégration dans son administration d'origine ;

- le versement de son traitement est dû jusqu'à ce qu'elle soit réintégrée, à la première vacance de poste, dans son administration d'origine, et rien ne justifie qu'il soit arrêté à la date du jugement du tribunal ;

- elle a subi un préjudice en raison de la grande précarité dans laquelle elle s'est retrouvée et un préjudice moral, qui peuvent être évalués chacun à la somme de 10 000 euros.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 novembre 2022, le rectorat de la région Ile-de-France demande à être mis hors de cause de la présente instance.

Par des mémoires en défense enregistrés les 13 juin et 31 juillet 2023, la Région Ile-de-France demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête de Mme A... ;

2°) par la voie de l'appel incident, d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 8 juillet 2022 en tant que, par ce jugement, le tribunal a annulé la décision implicite de refus de versement à Mme A... de ses traitements depuis le 1er mars 2017 et l'a condamnée à verser à Mme A..., dans un délai de deux mois, la somme correspondant à son demi-traitement du 1er mars 2017 au 8 juillet 2022, minoré des aides sociales perçues par l'intéressée au cours de la même période, ainsi qu'une somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice moral ;

3°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 2 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est sans commettre ni d'erreur de droit, ni d'erreur d'appréciation que les premiers juges ont fixé le montant du préjudice financier de Madame A... en se référant au versement d'un demi-traitement duquel devait être déduit le montant des aides sociales perçues pendant cette même période et auxquelles elle n'aurait pu prétendre si ce demi-traitement avait été versé ;

- la demande de Mme A... devant le tribunal était irrecevable ;

- les fautes commises par le rectorat justifient, à tout le moins, un partage de responsabilité.

Un mémoire aux fins de production de pièce, présenté par le recteur de la région académique d'Ile-de-France, a été enregistré le 16 octobre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- loi n° 2004-809 du 13 août 2004 ;

- le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 ;

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

- le décret n° 2005-1785 du 30 décembre 2005 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vrignon-Villalba,

- les conclusions de Mme Lescaut, rapporteure publique,

- et les observations de Me Athon-Perez, pour Mme A..., et de Me Magnaval, pour la région Ile-de-France.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., adjointe technique des établissements d'enseignement relevant de la région académique d'Ile-de-France, a été détachée à durée illimitée auprès de la région Ile-de-France le 5 mars 2009, sur le fondement de l'article 109 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. Par un arrêté du 19 décembre 2016, la région a décidé de mettre fin au détachement de Mme A... à compter du 1er mars 2017. Un certificat de cessation de paiement du 20 décembre 2016 mentionne que Mme A... cessera d'être rémunérée par la région à compter de cette date. Mme A... n'ayant par la suite été rémunérée ni par la région Ile-de-France, ni par le rectorat de la région académique d'Ile-de-France, elle a, par des courriers du 15 décembre 2020, demandé à ces deux institutions le versement de son salaire depuis le 1er mars 2017 et l'indemnisation des préjudices résultant de cette absence de versement. Elle a déféré au tribunal administratif de Paris les décisions implicites nées du silence gardé par la région Ile-de-France et par le rectorat de la région académique d'Ile-de-France sur ces demandes. Par un jugement du 8 juillet 2022, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision implicite par laquelle la région Ile-de France a refusé de verser à Mme A... ses traitements depuis le 1er mars 2017, l'a condamné à verser à Mme A..., dans un délai de deux mois, la somme correspondant à son demi-traitement du 1er mars 2017 au 8 juillet 2022, minoré des aides sociales perçues par l'intéressée au cours de la même période, ainsi qu'une somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice moral, a mis à la charge de la région Ile-de-France le versement à Mme A... d'une somme de 2 000 euros au titre des frais liés à l'instance et a rejeté le surplus des conclusions de la requête. Mme A... relève partiellement appel de ce jugement.

Sur la demande de mise hors de cause du recteur de la région académique d'Ile-de-France :

2. La région Ile-de-France conteste l'appréciation qui a été faite par les premiers juges, au point 8 du jugement attaqué, selon laquelle le rectorat de la région académique d'Ile-de-France n'a commis aucune faute susceptible d'engager sa responsabilité. Dans ces conditions, quel que soit le bien-fondé de cette critique, il n'y a pas lieu de mettre le rectorat hors de cause.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " (...) la minute est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".

4. Il ressort des pièces du dossier de première instance transmis à la Cour que la minute du jugement attaqué comporte l'ensemble des signatures prévues par les dispositions précitées de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de cet article manque en fait.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

En ce qui concerne la demande de Mme A... tendant au versement de ses traitements :

5. Pour déterminer si le délai permettant d'introduire un recours en annulation contre une décision expresse dont l'objet est purement pécuniaire est expiré, faisant obstacle à ce que soient présentées des conclusions indemnitaires ayant la même portée, il y a lieu, le cas échéant, de faire application de la règle selon laquelle le destinataire d'une décision administrative individuelle qui en a eu connaissance ne peut exercer un recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable.

6. La région Ile-de-France soutient que, par lettre du 20 décembre 2016, elle a notifié à Mme A... l'arrêté portant fin de son détachement à compter du 1er mars 2017, auquel était joint selon elle un certificat de cessation de paiement indiquant sans ambiguïté que la région cesserait de la rémunérer à compter de cette date. Toutefois, ce certificat ne revêt pas, en lui-même, le caractère d'une décision. S'il révèle une décision implicite de la région de ne plus rémunérer Mme A..., susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, la demande de plein contentieux exercée par Mme A... est recevable, en l'absence de toute décision expresse.

En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :

7. Il résulte du principe de sécurité juridique que le destinataire d'une décision administrative individuelle qui a reçu notification de cette décision ou en a eu connaissance dans des conditions telles que le délai de recours contentieux ne lui est pas opposable doit, s'il entend obtenir l'annulation ou la réformation de cette décision, saisir le juge dans un délai raisonnable, qui ne saurait, en règle générale et sauf circonstances particulières, excéder un an.

8. Toutefois, cette règle ne trouve pas à s'appliquer aux recours tendant à la mise en jeu de la responsabilité d'une personne publique qui, s'ils doivent être précédés d'une réclamation auprès de l'administration, ne tendent pas à l'annulation ou à la réformation de la décision rejetant tout ou partie de cette réclamation mais à la condamnation de la personne publique à réparer les préjudices qui lui sont imputés. La prise en compte de la sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause indéfiniment des situations consolidées par l'effet du temps, est alors assurée par les règles de prescription prévues par la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ou, en ce qui concerne la réparation des dommages corporels, par l'article L. 1142-28 du code de la santé publique.

9. Il résulte de ce qui précède que les fins de non-recevoir opposées par la région Ile-de-France doivent être écartées.

Sur les conclusions aux fins d'injonction, tendant au versement des traitements de Mme A... depuis le 1er mars 2017 :

10. Ainsi que le tribunal l'a relevé au point 11 de son jugement, Mme A... a donné à son recours, s'agissant des traitements auxquels elle avait droit, le caractère d'un recours pécuniaire, se bornant à demander au juge d'enjoindre au conseil régional d'Ile-de-France de lui verser son traitement, sans formuler aucune conclusion tendant à l'engagement de la responsabilité de la région et au versement d'une indemnité en réparation du préjudice matériel qu'elle a subi. Elle a en conséquence formulé des conclusions à fins d'annulation de la décision implicite par laquelle la région a refusé de lui verser ses traitements à compter du 1er mars 2017, auxquelles le tribunal a fait droit après avoir écarté la fin de non-recevoir opposée par le conseil régional d'Ile-de-France, ainsi que des conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à la région, sous astreinte, de procéder au versement des dits traitements jusqu'à ce qu'elle soit réintégrée, à la première vacance de poste, dans son administration d'origine.

11. D'une part, aux termes de l'article 109 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales : " III. - Les fonctionnaires de l'Etat ayant opté pour le maintien de leur statut sont placés en position de détachement auprès de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales dont relève désormais leur service. / Par dérogation à la section 2 du chapitre V de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, ces détachements sont sans limitation de durée. L'autorité territoriale exerce le pouvoir disciplinaire sur les fonctionnaires ainsi détachés. Elle informe l'administration gestionnaire de leur corps d'origine des sanctions prononcées. / Lorsque les fonctionnaires détachés sont placés, sur leur demande, dans une position statutaire dont le bénéfice est de droit, le détachement est suspendu ". L'article 3 du décret du 30 décembre 2005 relatif au détachement sans limitation de durée de fonctionnaires de l'Etat en application de l'article 109 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales dispose que " II. - Il peut être mis fin au détachement sans limitation de durée du fonctionnaire dans les conditions prévues aux trois premiers alinéas de l'article 24 du décret du 16 septembre 1985 susvisé pour les détachements de courte et longue durée ". L'article 45 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction alors en vigueur, prévoit que : " (...) / Le fonctionnaire détaché remis à la disposition de son administration d'origine pour une cause autre qu'une faute commise dans l'exercice de ses fonctions, et qui ne peut être réintégré dans son corps d'origine faute d'emploi vacant, continue d'être rémunéré par l'organisme de détachement jusqu'à sa réintégration dans son administration d'origine (...) ". Aux termes de l'article 24 du décret du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'État, à la mise à disposition, à l'intégration et à la cessation définitive des fonctions : " Lorsqu'il est mis fin au détachement à la demande de l'administration ou de l'organisme d'accueil, le fonctionnaire continue, si son administration d'origine ne peut le réintégrer immédiatement, à être rémunéré par l'administration ou l'organisme d'accueil jusqu'à ce qu'il soit réintégré, à la première vacance, dans son administration d'origine ".

12. D'autre part, aux termes de l'article 27 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des conseils médicaux, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires : " Lorsqu'un fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du conseil médical (...) / Le paiement du demi-traitement est maintenu, le cas échéant, jusqu'à la date de la décision de reprise de service, de reclassement, de mise en disponibilité ou d'admission à la retraite ".

13. Pour annuler la décision implicite par laquelle la région Ile-de-France a refusé de verser à Mme A... ses traitements à compter du 1er mars 2017, le tribunal a relevé, au point 8 du jugement attaqué, qu'il appartenait à la région, après avoir mis fin, par arrêté du 16 décembre 2016, au détachement de Mme A..., à compter du 1er mars 2017, de continuer de rémunérer l'intéressée, jusqu'à ce qu'elle soit réintégrée, à la première vacance, dans son administration d'origine, ce qui n'est au demeurant plus contesté par la région d'Ile-de-France.

14. En premier lieu, le recteur de la région académique d'Ile-de-France soutient que depuis le 1er mars 2017, aucun poste d'adjoint technique des établissements d'enseignement n'a été vacant, sur lequel il aurait été possible de réintégrer Mme A.... Il produit en ce sens une attestation datée du 12 octobre 2023, dont les termes ne sont pas sérieusement contestés par la région Ile-de-France.

15. En second lieu s'agissant du montant du traitement qui doit être versé à Mme A..., il résulte de l'instruction que par lettre du 21 mars 2016, la présidente du conseil régional d'Ile-de-France a sollicité du recteur de l'académie régionale d'Ile-de-France qu'il saisisse le comité médical compétent afin qu'il donne un avis, notamment, sur l'aptitude de Mme A... à l'exercice de ses fonctions. Par arrêté du 8 décembre 2016, il a été décidé que Mme A..., dont les droits à congé maladie étaient arrivés à expiration, percevrait son demi-traitement le temps que le comité médical rende son avis. Le 7 mars 2017, le comité a donné un avis favorable à la réintégration de Mme A... dans ses fonctions, à temps plein, à compter du 13 mars 2017. Si la région fait valoir que le même comité médical avait rendu, le 6 septembre 2016, un avis dans lequel il concluait à l'inaptitude définitive à toutes fonctions de Mme A..., elle ne l'établit pas en produisant, à l'appui de ses allégations, un avis mentionnant le nom d'un autre agent. Dans ces conditions, Mme A... était en droit de bénéficier du versement, par la région, d'un demi-traitement, pour la période allant du 1er au 12 mars 2017, en application des dispositions, citées au point 4 du présent arrêt, de l'article 27 du décret du 14 mars 1986, puis, en application des dispositions, citées au point 3 du présent arrêt, de l'article 45 de la loi du 11 janvier 1984 et de l'article 24 du décret du 16 septembre 1985, d'un plein-traitement à compter du 13 mars 2017, date à laquelle la réintégration de Mme A... sur ses fonctions à la région Ile-de-France aurait dû intervenir si la région n'avait pas mis fin à son détachement avant même que le comité médical ne rende son avis. Par ailleurs, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, la règle du service fait édictée par les dispositions de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983, à laquelle les dispositions qui viennent d'être citées dérogent, ne peut pas être opposée à Mme A....

16. Par suite, il y a lieu d'enjoindre à la région Ile-de-France de procéder au versement du traitement de Mme A..., dans les conditions qui viennent d'être exposées au point 15 ci-dessus, jusqu'à ce que celle-ci soit réintégrée, à la première vacance, dans son administration d'origine, et ce dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

Sur les préjudices subis :

17. Il résulte de l'instruction que la décision fautive de l'administration de mettre fin à son détachement et de cesser de lui verser sa rémunération à compter du 1er mars 2017 a causé à Mme A..., placée dans une situation de grande précarité, un préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'évaluer à la somme de 7 000 euros.

18. Il résulte de ce qui précède que Mme A... est fondée à demander que l'indemnité que le tribunal administratif a condamné la région Ile-de-France à lui verser soit portée à la somme de 7 000 euros.

Sur les frais liés à l'instance :

19. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la région Ile-de-France le versement à Mme A... de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

20. Ces mêmes dispositions font obstacle à ce que Mme A..., qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à la région Ile-de-France une somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Les conclusions du rectorat de la région académique d'Ile-de-France tendant à sa mise hors de cause sont rejetées.

Article 2 : Il est enjoint à la région Ile-de-de-France de procéder au versement du traitement de Mme A..., dans les conditions exposées au point 15 du présent arrêt, jusqu'à ce que

celle-ci soit réintégrée, à la première vacance, dans son administration d'origine, et ce dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

Article 3 : La région Île-de-France est condamnée à verser à Mme A... une somme de 7 000 euros en indemnisation de son préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence.

Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 8 juillet 2022 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : La région Ile-de-France versera à Mme A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... est rejeté.

Article 7 : Les conclusions d'appel incident de la région Ile-de-France et celles qu'elle a présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A..., à la région Ile-de-France et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Copie en sera adressée au rectorat de la région académique d'Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 16 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Vrignon-Villalba, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Perroy, premier conseiller,

- M. Dubois, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 décembre 2023.

L'assesseur le plus ancien,

G. PERROYLa présidente rapporteure,

C. VRIGNON-VILLALBA

La greffière,

E. VERGNOL

La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22PA04097 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA04097
Date de la décision : 08/12/2023
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme VRIGNON-VILLALBA
Rapporteur ?: Mme Cécile VRIGNON-VILLALBA
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : CABINET ATHON-PEREZ

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-08;22pa04097 ?
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