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07/12/2023 | FRANCE | N°23PA00071

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 07 décembre 2023, 23PA00071


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... C... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 17 février 2022, par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2210111 du 16 septembre 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :




Par une requête enregistrée le 6 janvier 2023, M. A... C... B..., représenté par Me Seiller, demande à la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 17 février 2022, par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2210111 du 16 septembre 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 janvier 2023, M. A... C... B..., représenté par Me Seiller, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2210111 du 16 septembre 2022 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 février 2022 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre à l'administration de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision de refus de séjour est entachée d'erreur de droit, car le préfet s'est cru en situation de compétence liée au regard de l'avis du collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration ;

- cette décision est insuffisamment motivée et révèle un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- elle a été prise en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;

- la décision fixant le délai de départ volontaire est entachée d'un défaut de motivation, au regard des articles 7 et 12 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil ;

- cette décision est entachée d'erreur de droit, car le préfet s'est cru en situation de compétence liée ;

- la décision d'obligation de quitter le territoire français a été prise en violation des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 avril 2023, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 novembre 2022 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Jasmin-Sverdlin a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant nigérian né le 2 novembre 1966, déclare être entré en France en 2015. Par un arrêté du 17 février 2022, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 16 septembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, l'arrêté litigieux, après avoir visé notamment les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 611-1 (3°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne les éléments de fait de la situation de M. B..., en rappelant notamment que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé du requérant nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il pouvait bénéficier d'un traitement approprié au Nigéria et qu'après un examen approfondi de sa situation, M. B... ne remplissait pas les conditions prévues par l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision attaquée doit être écarté.

3. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police, qui n'était pas tenu de faire état de tous les éléments relatifs à la situation personnelle du requérant, n'aurait pas procédé à un examen individuel de celle-ci. En conséquence, le moyen tiré de l'absence d'examen individuel de la situation du requérant sera écarté.

4. En troisième lieu, il ne ressort ni des termes de la décision contestée, ni d'aucune autre des pièces du dossier que le préfet de police se serait cru lié par l'avis du collège de médecins de l' l'Office français de l'immigration et de l'intégration pour rejeter la demande de titre de séjour de M. B....

5. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. (...) / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. ".

6. Il ressort des pièces du dossier que, par un avis du 3 décembre 2021, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a considéré que l'état de santé de M. B... nécessitait une prise en charge médicale, dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais que, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques de santé dans son pays d'origine, il pouvait y bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé. Il ressort des certificats médicaux et compte-rendu de consultations produits par le requérant qu'il souffre, depuis un accident vasculaire cérébral survenu en avril 2020, de plusieurs pathologies, principalement du diabète, de tension artérielle, de dyslipidémie et de surpoids, nécessitant un suivi médical. Si M. B... soutient que les soins appropriés ne sont pas disponibles dans son pays d'origine, les certificats médicaux qu'il produit ne le mentionnent pas, et les articles de presse, qui font état de considérations générales sur le système de santé et la qualité des soins en Afrique et plus particulièrement au Nigéria, n'apportent aucune indication sur la prétendue indisponibilité du traitement effectivement suivi par le requérant dans son pays d'origine. Dans ces conditions, les éléments apportés par M. B... ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et du préfet. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni qu'il aurait commis une erreur d'appréciation de sa situation.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. Si M. B... soutient qu'il est entré en France en 2015, qu'il y réside depuis lors et qu'il a noué des liens avec l'équipe médicale qui le suit pour ses différentes pathologies, il ressort toutefois des pièces du dossier que le requérant est célibataire et sans charge de famille et qu'il ne justifie d'aucune intégration particulière en France, où il ne produit des pièces justifiant de sa présence qu'à compter de l'année 2017. Par suite, le préfet de police n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de l'intéressé.

Sur la décision d'obligation de quitter le territoire français :

9. Pour les motifs exposés au point 8, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés, les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 3 de ladite convention et des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile étant en outre inopérants à l'encontre de la mesure d'éloignement.

Sur la décision fixant le délai de départ volontaire :

10. En premier lieu, M. B... reprend en appel, avec la même argumentation qu'en première instance, les moyens de l'insuffisante motivation de la décision contestée et du défaut d'examen de sa situation personnelle. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 13 du jugement attaqué.

11. En second lieu, il ne ressort pas des termes de l'arrêté attaqué, ni d'aucune pièce du dossier, que le préfet de police se serait cru en situation de compétence liée pour prendre la décision accordant au requérant un délai de départ volontaire de 30 jours.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : la requête de M. A... C... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... B... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

Délibéré après l'audience du 16 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Diémert, président de la formation de jugement en application des articles L. 234-3 (1er alinéa) et R. 222-6 (1er alinéa) du code de justice administrative,

- Mme Jasmin-Sverdlin, première conseillère,

- M. Gobeill, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 décembre 2023.

La rapporteure,

I. JASMIN-SVERDLINLe président,

S. DIÉMERT

La greffière,

C. POVSE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23PA00071 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23PA00071
Date de la décision : 07/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DIEMERT
Rapporteur ?: Mme Irène JASMIN-SVERDLIN
Rapporteur public ?: M. DORE
Avocat(s) : SEILLER

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-07;23pa00071 ?
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