Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme C... E..., épouse F... et M. D... F... ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les décisions du 27 janvier 2023 par lesquelles le préfet de la Haute-Loire a abrogé leurs attestations de demandeurs d'asile, les a obligés à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination, a prononcé à leur encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de douze mois et les a assignés à résidence dans le département de la Haute-Loire pour une durée de quarante-cinq jours.
Par un jugement n° 2300273, 2300274 du 17 mars 2023, la présidente du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour
I. Par une requête enregistrée le 17 mai 2023, sous le n°23LY01736, M. F..., représenté par Me Demars, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 17 mars 2023 de la présidente du tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;
2°) d'annuler les décisions susmentionnées du 27 janvier 2023 et de suspendre l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Loire de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à tout le moins, une autorisation provisoire de séjour dans un délai de sept jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, dans l'attente, de lui remettre un récépissé dans un délai de 24 heures à compter de la notification cet arrêt, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Loire de supprimer son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen de deuxième génération (SIS-II), dans un délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
5°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Loire de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et, dans l'attente, de lui remettre un récépissé avec autorisation de travail dans un délai de 48 heures, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement attaqué méconnaît le principe du contradictoire ;
- le tribunal aurait dû rouvrir l'instruction, à la suite de la production de sa note en délibéré ;
- le tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré de ce que la décision d'assignation à résidence était entachée d'un défaut d'examen complet de sa situation, dès lors qu'elle ne comportait pas les motifs permettant de conclure que les modalités de l'obligation de pointage étaient compatibles avec sa vie privée et familiale ;
- ce jugement est insuffisamment motivé ;
- le tribunal a statué ultra petita ;
- le préfet qui a entendu ne pas faire usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation à titre exceptionnel a pris à son égard une décision explicite de refus de l'admettre au séjour ;
- le refus d'admission au séjour n'est pas motivé ;
- sa situation justifiait que le préfet de la Haute-Loire use de son pouvoir discrétionnaire de régularisation à titre exceptionnel ; il a ainsi commis une erreur de droit ainsi qu'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant abrogation de son attestation de demande d'asile n'est pas motivée ;
- pour décider de cette abrogation, le préfet s'est estimé, à tort, en situation de compétence liée ;
- cette décision qui mentionne à tort qu'il a déposé une demande d'asile le 12 septembre 2022, alors qu'il l'a fait le 9 septembre, est entachée d'une erreur de fait ou d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de l'abrogation de son attestation de demande d'asile ;
- cette décision a été prise en méconnaissance de son droit d'être entendu ;
- cette décision qui mentionne à tort qu'il a déposé une demande d'asile le 12 septembre 2022, alors qu'il l'a fait le 9 septembre, est entachée d'une erreur de fait ou d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- cette décision méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- le préfet ne s'est pas livré à un examen réel, sérieux et complet de la situation de ses quatre enfants mineurs ;
- le préfet a méconnu le 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- cette décision a été prise en méconnaissance de son droit d'être entendu ;
- cette décision qui mentionne à tort qu'il a déposé une demande d'asile le 12 septembre 2022, alors qu'il l'a fait le 9 septembre, est entachée d'une erreur de fait ou d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- il n'a jamais déclaré ne pas avoir l'intention de se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; le préfet a méconnu les articles L. 612-2 et L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet ne s'est pas livré à un examen réel, sérieux et complet de la situation de ses quatre enfants mineurs ;
- le préfet a méconnu le 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ; de plus cette décision pourra être annulée par des moyens propres ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- cette décision a été prise en méconnaissance de son droit d'être entendu ;
- il justifiait de circonstances humanitaires justifiant qu'une telle interdiction qui est de plus disproportionnée, ne soit pas prononcée ; le préfet a méconnu les articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a méconnu l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet ne s'est pas livré à un examen réel, sérieux et complet de la situation de ses quatre enfants mineurs ;
- le préfet a méconnu le 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la décision d'assignation à résidence est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- elle n'est pas motivée ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen réel, sérieux et complet de sa situation personne et familiale ;
- cette décision a été prise en méconnaissance de son droit d'être entendu ;
- le préfet ne s'est pas livré à un examen réel, sérieux et complet de la situation de ses quatre enfants mineurs ;
- le préfet a méconnu le 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la mesure de contrainte apparaît manifestement disproportionnée tant dans son principe que dans ses modalités ;
- il justifie d'éléments sérieux de nature à justifier, au titre de sa demande d'asile, son maintien sur le territoire français durant l'examen de son recours par la Cour nationale du droit d'asile ; ainsi, l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français doit être suspendue.
II. Par une requête enregistrée le 17 mai 2023, sous le n°23LY01737, Mme E..., épouse F..., représentée par Me Demars, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 17 mars 2023 de la présidente du tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;
2°) d'annuler les décisions susmentionnées du 27 janvier 2023 et de suspendre l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Loire de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à tout le moins, une autorisation provisoire de séjour dans un délai de sept jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, dans l'attente, de lui remettre un récépissé dans un délai de 24 heures à compter de la notification cet arrêt, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Loire de supprimer son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen de deuxième génération (SIS-II), dans un délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
5°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Loire de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et, dans l'attente, de lui remettre un récépissé avec autorisation de travail dans un délai de 48 heures, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué méconnaît le principe du contradictoire ;
- le tribunal aurait dû rouvrir l'instruction, à la suite de la production de sa note en délibéré ;
- le tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré de ce que la décision d'assignation à résidence était entachée d'un défaut d'examen complet de sa situation, dès lors qu'elle ne comportait pas les motifs permettant de conclure que les modalités de l'obligation de pointage étaient compatibles avec sa vie privée et familiale ;
- ce jugement est insuffisamment motivé ;
- le tribunal a statué ultra petita ;
- le préfet qui a entendu ne pas faire usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation à titre exceptionnel a pris à son égard une décision explicite de refus de l'admettre au séjour ;
- le refus d'admission au séjour n'est pas motivé ;
- sa situation justifiait que le préfet de la Haute-Loire use de son pouvoir discrétionnaire de régularisation à titre exceptionnel ; il a ainsi commis une erreur de droit ainsi qu'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant abrogation de son attestation de demande d'asile n'est pas motivée ;
- pour décider de cette abrogation, le préfet s'est estimé, à tort, en situation de compétence liée ;
- cette décision qui mentionne à tort qu'elle a déposé une demande d'asile le 12 septembre 2022, alors qu'elle l'a fait le 9 septembre, est entachée d'une erreur de fait ou d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de l'abrogation de son attestation de demande d'asile ;
- cette décision a été prise en méconnaissance de son droit d'être entendue ;
- cette décision qui mentionne à tort qu'elle a déposé une demande d'asile le 12 septembre 2022, alors qu'elle l'a fait le 9 septembre, est entachée d'une erreur de fait ou d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- cette décision méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- le préfet ne s'est pas livré à un examen réel, sérieux et complet de la situation de ses quatre enfants mineurs ;
- le préfet a méconnu le 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- cette décision a été prise en méconnaissance de son droit d'être entendue ;
- cette décision qui mentionne à tort qu'elle a déposé une demande d'asile le 12 septembre 2022, alors qu'elle l'a fait le 9 septembre, est entachée d'une erreur de fait ou d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- elle n'a jamais déclaré ne pas avoir l'intention de se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; le préfet a méconnu les article L. 612-2 et L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet ne s'est pas livré à un examen réel, sérieux et complet de la situation de ses quatre enfants mineurs ;
- le préfet a méconnu le 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ; de plus cette décision pourra être annulée par des moyens propres ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- cette décision a été prise en méconnaissance de son droit d'être entendue ;
- elle justifiait de circonstances humanitaires justifiant qu'une telle interdiction qui est de plus disproportionnée, ne soit pas prononcée ; le préfet a méconnu les articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a méconnu l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet ne s'est pas livré à un examen réel, sérieux et complet de la situation de ses quatre enfants mineurs ;
- le préfet a méconnu le 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la décision d'assignation à résidence est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- elle n'est pas motivée ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen réel, sérieux et complet de sa situation personne et familiale ;
- cette décision a été prise en méconnaissance de son droit d'être entendue ;
- le préfet ne s'est pas livré à un examen réel, sérieux et complet de la situation de ses quatre enfants mineurs ;
- le préfet a méconnu le 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la mesure de contrainte apparaît manifestement disproportionnée tant dans son principe que dans ses modalités ;
- elle justifie d'éléments sérieux de nature à justifier, au titre de sa demande d'asile, son maintien sur le territoire français durant l'examen de son recours par la Cour nationale du droit d'asile ; ainsi, l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français doit être suspendue.
Par décision du 3 mai 2023, M. et Mme F... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- les arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne C 383/13 du 10 septembre 2013, C-166/13 du 5 novembre 2014 et C-249/13 du 11 décembre 2014 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure ;
Considérant ce qui suit :
1. M. F... et son épouse, de nationalité géorgienne, nés respectivement le 21 juin 1981 et le 21 novembre 1985, sont entrés en France, le 18 août 2022, selon leurs déclarations. Le 9 septembre 2022, ils ont présenté des demandes d'asile qui ont été rejetées par l'office français de protection des réfugiés et apatrides, le 27 décembre 2022. Par décisions du 27 janvier 2023, le préfet de la Haute-Loire a abrogé leurs attestations de demandeurs d'asile, les a obligés à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination, a prononcé à leur encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de douze mois et les a assignés à résidence dans le département de la Haute-Loire pour une durée de quarante-cinq jours. M. et Mme F... relèvent appel du jugement du 17 mars 2023, par lequel la présidente du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces décisions du 27 janvier 2023.
2. Les requêtes n°23LY01736 et 23LY01737 dirigées contre le même jugement, concernent les membres d'une même famille et amènent à juger des mêmes questions. Par suite, il y a lieu de joindre ces deux requêtes pour qu'il soit statué par un seul arrêt.
Sur la régularité du jugement :
3. Aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " (...) La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes (...). / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ".
4. Il résulte de ces dispositions, destinées à garantir le caractère contradictoire de l'instruction, que la méconnaissance de l'obligation de communiquer le premier mémoire d'un défendeur est en principe de nature à entacher la procédure d'irrégularité. Il n'en va autrement que dans le cas où il ressort des pièces du dossier que, dans les circonstances de l'espèce, cette méconnaissance n'a pu préjudicier aux droits des parties.
5. Il ressort des pièces du dossier que le premier mémoire en défense du préfet auquel était joint plusieurs pièces a été enregistré le 14 mars 2023, soit le jour même de l'audience et que ce mémoire et a été remis au conseil des intéressés après le début des débats. Les requérants font valoir sans être contredits que seul le mémoire leur a été remis au cours de l'audience, alors que les pièces annexées leur ont été transmises à l'issue de cette audience. Il ressort par ailleurs du jugement contesté que la présidente du tribunal a tenu compte des éléments contenus dans ces pièces, s'agissant notamment des déclarations des intéressés recueillies le 2 février 2023, à l'occasion de la notification des décisions en litige et a fait droit aux conclusions de ce premier et unique mémoire présenté par le préfet. Par suite, M. et Mme F... sont fondés à soutenir que le premier juge a méconnu le caractère contradictoire de la procédure et a entaché son jugement d'irrégularité. Ce jugement doit, par suite, être annulé, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens tirés de son irrégularité.
6. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes présentées par M. et Mme F... devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand et la cour.
Sur la légalité des décisions portant refus d'admission au séjour au titre de l'asile :
7. En premier lieu, les décisions en litige sont signées par M. Antoine Planquette, secrétaire général de la préfecture de la Haute-Loire en vertu d'un arrêté du préfet de la Haute-Loire du 23 août 2022, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture, et accessible tant aux parties qu'au juge. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des arrêtés attaqués manque en fait et doit être écarté.
8. En deuxième lieu, les décisions litigieuses, qui rappellent les principales considérations relatives à la situation B... et Mme F..., notamment leurs conditions d'entrée et de séjour en France, ainsi que leur situation familiale et qui indiquent les dispositions législatives sur lesquelles elles sont fondées, et notamment l'article L.542-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont suffisamment motivées au regard des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.
9. En dernier lieu, les requérants soutiennent que le préfet de la Haute-Loire aurait dû les admettre au séjour en faisant usage de son pouvoir discrétionnaire. Toutefois, il est constant que les intéressés qui ne peuvent utilement se prévaloir des menaces dont ils feraient l'objet en cas de retour en Géorgie, les décisions litigieuses n'ayant ni pour objet, ni pour effet de les renvoyer dans leur pays d'origine, ne font état d'aucune circonstance relative à leur situation personnelle ou familiale. Au demeurant, il ressort des pièces du dossier que les intéressés sont entrés récemment sur le territoire français, que leurs demandes d'asile ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et qu'ils n'établissent pas avoir tissé en France des liens suffisamment intenses et stables, ni qu'ils ne démontrent être dépourvus d'attaches dans leur pays d'origine, où ils ont vécu la majeure partie de leur vie. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les décisions litigieuses seraient entachées d'erreur de droit ou d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences qu'elles emportent sur leur situation personnelle. Ces moyens ne sauraient qu'être écartés.
Sur la légalité des décisions d'abrogation des attestations de demande d'asile :
10. En premier lieu, les décisions en litige sont signées par M. Antoine Planquette, secrétaire général de la préfecture de la Haute-Loire en vertu d'un arrêté du préfet de la Haute-Loire du 23 août 2022, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture, et accessible tant aux parties qu'au juge. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des arrêtés attaqués manque en fait et doit être écarté.
11. En deuxième lieu, les décisions en litige qui indiquent que les demandes d'asile B... et Mme F... ayant été rejetées par l'office français de protection des réfugiés et des apatrides, le 27 décembre 2022, ils ne bénéficient plus du droit de se maintenir sur le territoire français, en application des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit le fondement. Par suite, les moyens tirés du défaut de motivation de ces décisions doivent être écartés.
12. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se serait cru à tort en situation de compétence liée pour prononcer l'abrogation des attestations de demande d'asile des intéressés.
13. En dernier lieu, si le préfet a entaché ses décisions d'une erreur de plume en indiquant que M. et Mme F... ont présenté leurs demandes d'asile le 12 septembre 2022, au lieu du 9 septembre, cette seule circonstance ne saurait suffire à établir que le préfet n'a pas procédé à un examen sérieux de la situation personnelle des intéressés.
Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français :
14. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que l'exception tirée, à l'encontre des obligations de quitter le territoire français, de l'illégalité des décisions d'abrogation des attestations de demande d'asile B... et Mme F... ne peut qu'être écartée.
15. En deuxième lieu, ainsi que la Cour de justice de l'Union européenne l'a jugé, notamment par son arrêt C-383/13 M. A..., N. R./Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie du 10 septembre 2013 visé ci-dessus, les auteurs de la directive du 16 décembre 2008, s'ils ont encadré de manière détaillée les garanties accordées aux ressortissants des Etats tiers concernés par les décisions d'éloignement ou de rétention, n'ont pas précisé si et dans quelles conditions devait être assuré le respect du droit de ces ressortissants d'être entendus, qui fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union européenne. Si l'obligation de respecter les droits de la défense pèse en principe sur les administrations des Etats membres lorsqu'elles prennent des mesures entrant dans le champ d'application du droit de l'Union, il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles doit être assuré, pour les ressortissants des Etats tiers en situation irrégulière, le respect du droit d'être entendu. Ce droit, qui se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts, ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause.
16. Dans le cadre ainsi posé, et s'agissant plus particulièrement des décisions relatives au séjour des étrangers, la Cour de justice de l'Union européenne a jugé, dans ses arrêts C-166/13 Sophie Mukarubega du 5 novembre 2014 et C-249/13 Khaled Boudjlida du 11 décembre 2014 visés ci-dessus, que le droit d'être entendu préalablement à l'adoption d'une décision de retour implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité du séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour. Ce droit n'implique toutefois pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu sur l'irrégularité du séjour ou la perspective de l'éloignement.
17. Enfin, il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, notamment de son arrêt du 10 septembre 2013 cité au point 8, que toute irrégularité dans l'exercice des droits de la défense lors d'une procédure administrative concernant un ressortissant d'un pays tiers en vue de son éloignement ne saurait constituer une violation de ces droits et, en conséquence, que tout manquement, notamment, au droit d'être entendu n'est pas de nature à entacher systématiquement d'illégalité la décision prise. Il revient à l'intéressé d'établir devant le juge chargé d'apprécier la légalité de cette décision que les éléments qu'il n'a pas pu présenter à l'administration auraient pu influer sur le sens de cette décision et il appartient au juge saisi d'une telle demande de vérifier, lorsqu'il estime être en présence d'une irrégularité affectant le droit d'être entendu, si, eu égard à l'ensemble des circonstances de fait et de droit spécifiques de l'espèce, cette violation a effectivement privé celui qui l'invoque de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que cette procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent.
18. En l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. et Mme F... auraient été, à un moment de la procédure, informés de ce qu'ils étaient susceptibles de faire l'objet de mesures d'éloignement ou mis à même de présenter des observations, la procédure de demande d'asile n'ayant pas une telle finalité. Dans ces conditions, le préfet de la Haute-Loire a entaché ses décisions d'irrégularité.
19. M. et Mme F... font valoir qu'ils ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle dans le cadre de recours portés devant la Cour nationale du droit d'asile et qu'ils justifient de risques sérieux pesant sur leur intégrité physique et celle des membres de leur famille en cas de retour en Géorgie, compte tenu notamment des éléments à leur disposition, y compris ceux collectés postérieurement aux décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. Toutefois, les éléments qu'ils produisent y compris ceux qui sont postérieurs aux décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides rejetant leurs demandes d'asile ne permettent pas d'établir la réalité des risques de violence dont ils feraient l'objet en cas de retour en Géorgie. Le préfet de la Haute-Savoie n'a, dès lors, pas effectivement privé les intéressés de la possibilité de mieux faire valoir leur défense dans une mesure telle que cette procédure aurait pu aboutir à un résultat différent.
20. En troisième lieu, l'article L. 532-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Les requérants peuvent présenter leurs explications à la Cour nationale du droit d'asile et s'y faire assister d'un conseil et d'un interprète ".
21. M. et Mme F... soutiennent que les décisions portant obligation de quitter le territoire français les priveront de la possibilité de se présenter et d'être entendus au cours de l'audience devant la Cour nationale du droit d'asile. Toutefois, les intéressés ne peuvent utilement invoquer la méconnaissance de l'article L. 532-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont les dispositions n'ont pas pour objet de leur accorder un droit de se maintenir sur le territoire français. Par ailleurs, les requérants, qui sont représentés par leur conseil devant la Cour nationale du droit d'asile, sont mis à même par leurs écritures et les observations de leur conseil, de porter à la connaissance de cette juridiction l'ensemble des éléments utiles à son office. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 532-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.
22. En quatrième lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 16 du présent arrêt, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les décisions en litige seraient entachées d'erreurs de fait ou d'un défaut d'examen de leur situation personnelle,
23. En cinquième lieu, les obligations de quitter le territoire français n'ont pas pour objet de fixer le pays de renvoi, lequel est déterminé par une décision distincte. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet au regard des risques encourus par les intéressés ainsi que par leur famille en cas de retour en Géorgie sont inopérants à l'encontre des décisions portant obligation de quitter le territoire français qui, par elles-mêmes, n'impliquent pas le retour des intéressés dans ce pays.
24. En dernier lieu, aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
25. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se serait abstenu de procéder à un examen réel, sérieux et complet de la situation de leurs enfants. Par ailleurs, il résulte de ce qui vient d'être dit qu'il n'est pas établi que les décisions portant obligation de quitter le territoire français litigieuses exposeraient les enfants B... et Mme F... à une situation d'insécurité de nature à porter atteinte à leur intérêt supérieur. Par suite, le préfet n'a pas méconnu les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Sur la légalité des décisions refusant d'accorder un délai de départ volontaire :
26. En premier lieu, en raison de la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français, M. et Mme F... ne sauraient soutenir que les décisions refusant de leur accorder un délai de départ volontaire seraient illégales pour défaut de base légale.
27. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 16, 22 et 25 du présent arrêt, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les décisions en litige auraient été prises en méconnaissance de leur droit d'être entendus, ni qu'elles seraient entachées d'erreurs de fait ou d'un défaut d'examen de leur situation personnelle, ni que le préfet n'aurait pas procédé à un examen réel, sérieux et complet de la situation de leurs enfants et qu'il aurait méconnu les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
28. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". Aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : 1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour (...) 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français (...) 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale (...) ".
29. Il ressort des pièces du dossier, notamment du document intitulé " déclarations préalables à la notification d'une mesure d'éloignement " signé par M. et Mme F..., le 2 février 2023, et sur lequel le préfet s'est fondé pour prendre les décisions en litige, que les intéressés ont expressément déclaré ne pas avoir l'intention de se conformer aux obligations de quitter le territoire français qui leur seraient notifiées. L'absence de caractère probant de ce document ne saurait se déduire de la seule circonstance qu'ils n'auraient pas bénéficier d'un interprète en langue géorgienne, alors qu'ils ne contestent pas avoir signé de telles déclarations. Par ailleurs, il ressort également de ce document que les intéressés ont indiqué ne pas avoir de document d'identité en leur possession, et en ont expliqué les raisons de manière manuscrite. La seule circonstance qu'ils sont arrivés récemment en France, ne permet pas d'établir qu'ils ne sont pas à l'origine de ces observations manuscrites. Dans ces conditions, le préfet de la Haute-Loire a légalement pu leur refuser un délai de départ volontaire, sur le fondement du 3° de l'article L. 612-2 et des 4° et 8° de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Sur la légalité des décisions fixant le pays de renvoi :
30. En premier lieu, l'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas établie, les moyens tirés de ce que les décisions fixant le pays de renvoi devraient, par voie de conséquence, être annulées, doivent être écartés.
31. En second lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".
32. Les requérants soutiennent qu'alors que M. F... avait décidé de suspendre la diffusion de programmes pro-russes sur la chaîne de télévision qu'il avait fondée, en protestation aux manœuvres militaires menées par la Russie en Ossétie du Sud, des agents du gouvernement géorgien lui ont demandé de la rétablir, en exerçant des pressions et des menaces. Ces pressions se sont renouvelées lorsqu'il a fondé une nouvelle chaîne de télévision et qu'il a pris la décision de suspendre la diffusion de programmes pro-russes, en février 2022, en soutien aux populations ukrainiennes. Il ajoute qu'il a fait l'objet d'une agression en août 2022, que ses agresseurs ont formulé des menaces à l'encontre de ses enfants et qu'il ne peut retourner en Géorgie sans craindre pour sa vie. Toutefois, les éléments qu'ils produisent y compris ceux qui sont postérieurs à la décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides rejetant leurs demandes d'asile ne permettent pas d'établir la réalité des risques de violence dont ils feraient l'objet en cas de retour en Géorgie. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations citées au point précédent ainsi que de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet doivent être écartés.
Sur la légalité des interdictions de retour sur le territoire français pour une durée d'un an :
33. En premier lieu, en raison de la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français, M. et Mme F... ne sauraient soutenir que les décisions leur interdisant le retour sur le territoire français pour une durée d'un an seraient illégales pour défaut de base légale.
34. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 16, 22 et 28 du présent arrêt, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les décisions en litige auraient été prises en méconnaissance de leur droit d'être entendus, ni qu'elles seraient entachées d'erreurs de fait ou d'un défaut d'examen de leur situation personnelle, ni que le préfet n'aurait pas procédé à un examen réel, sérieux et complet de la situation de leurs enfants et qu'il aurait méconnu les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
35. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. (...) ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
36. Il résulte des dispositions des articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux et, le cas échéant, la menace pour l'ordre public que constitue sa présence sur le territoire.
37. Si les requérants arguent de l'existence de circonstances humanitaires, tenant au fait qu'ils ont formé un recours devant la Cour nationale du droit d'asile et qu'un retour en Géorgie méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au regard des risques encourus dans ce pays, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, ils ne sauraient être regardés comme justifiant de circonstances humanitaires, au sens des dispositions citées au point précédent, faisant obstacle à ce que des interdictions de retour sur le territoire français soient prononcées à leur encontre. Par suite, le préfet a pu, sans entacher ses décisions d'erreurs d'appréciation, leur interdire le retour sur le territoire français pour une durée d'un an, alors même qu'ils n'ont jamais fait l'objet de précédentes mesures d'éloignement et qu'ils ne constituent pas une menace pour l'ordre public.
Sur la légalité des décisions portant assignation à résidence :
38. En premier lieu, eu égard à ce qui précède, les moyens soulevés à l'encontre des décisions portant assignation à résidence et tirés de ce qu'elles devraient être annulées par voie de conséquence de l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français, doivent être écartés.
39. En deuxième lieu, les décisions contestées qui visent notamment l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et précisent que les modalités de pointage ne sont pas incompatibles avec la vie privée et familiale des intéressés, comportent les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation doivent être écartés. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier, que le préfet n'aurait pas procédé à un examen réel et sérieux de la situation respective des intéressés en prononçant les mesures d'assignation à résidence contestées.
40. En troisième lieu, s'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. et Mme F... auraient été, à un moment de la procédure, informés de ce qu'ils étaient susceptibles de faire l'objet de mesures d'assignation à résidence ou mis à même de présenter des observations, en méconnaissance des principes exposés aux points 18 à 20 du présent arrêt, en se bornant à faire valoir qu'ils ont été privés de la faculté de communiquer avec l'autorité préfectorale s'agissant de leur situation personnelle et notamment familiale, ainsi que du motif pour lequel ils n'ont pu présenter leurs documents d'identité et de voyage, les requérants n'établissent pas l'existence d'éléments qui auraient pu influer sur le sens des décisions contestées.
41. En quatrième lieu, les moyens tirés de ce que le préfet n'aurait pas procédé à un examen réel, sérieux et complet de la situation de leurs enfants et qu'il aurait méconnu les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 28 du présent arrêt.
42. En dernier lieu, les décisions contestées assignent à résidence les intéressés dans le département de la Haute-Loire pour une durée de quarante-cinq jours et prévoit une obligation de présentation deux fois par semaine, les mercredi et samedi à 14 heures 30, à la brigade de gendarmerie de la commune de Langeac. Il ne ressort pas des pièces du dossier que les modalités de pointage et les limites géographiques fixées dans ces décisions ne seraient pas adaptées, nécessaires et proportionnées aux finalités qu'elles poursuivent, les intéressés n'invoquant aucune difficulté particulière pour se rendre à la gendarmerie.
Sur le signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen :
43. Lorsqu'elle prend à l'égard d'un étranger une décision d'interdiction de retour sur le territoire français, l'autorité administrative se borne à informer l'intéressé de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen. Une telle information ne constitue pas une décision distincte de la mesure d'interdiction de retour et n'est, dès lors, pas susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Par suite, les conclusions tendant à l'annulation du signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen ne peuvent en tout état de cause qu'être rejetées.
Sur les demandes de suspension des obligations de quitter le territoire français :
44. Les requérants soutiennent que leur situation comporte des éléments sérieux justifiant que soit ordonnée la suspension de l'exécution des obligations de quitter le territoire français prises à leur encontre. Toutefois, par une ordonnance du 5 juillet 2023, n° 23010325-23010170, la Cour nationale du droit d'asile a confirmé le rejet de leurs demandes d'asile. Par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur ces conclusions à fin de suspension.
45. Il résulte de ce qui précède que les demandes présentées par M. et Mme F... devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand doivent être rejetées ainsi que leurs conclusions présentées en appel à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE
Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions tendant à la suspension des obligations de quitter le territoire français opposées à M. et Mme F....
Article 2 : Le jugement n° 2300273, 2300274 du 17 mars 2023 de la présidente du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est annulé.
Article 3 : Les demandes présentées par M. et Mme F... devant le tribunal administratif et le surplus des conclusions de leurs requêtes d'appel sont rejetés.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... E..., épouse F..., à M. D... F... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Loire.
Délibéré après l'audience du 23 novembre 2023 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Dèche, présidente assesseure,
Mme Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 décembre 2023.
La rapporteure,
P. Dèche
Le président,
F. Bourrachot,
La greffière,
A-C. Ponnelle
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 23LY01736, 23LY01737