Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 18 juillet 2022 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2206875 du 13 décembre 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 8 février 2023, Mme B..., représenté par Me Zind, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 13 décembre 2022 du tribunal administratif de Strasbourg ;
2°) d'annuler l'arrêté du 18 juillet 2022 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
- elle est entachée d'erreurs de fait dès lors qu'elle ne fait état que de sa première demande de titre de séjour du 14 juin 2021 et non de la seconde du 11 avril 2022 et qu'elle mentionne à tort qu'il s'agit d'un refus de renouvellement ; la préfète n'a pas tenu compte de l'évolution de son parcours scolaire et notamment de l'obtention de son baccalauréat avec mention et de son admission à l'Institut de formation en soins infirmiers (IFSI) de Strasbourg ;
- elle méconnaît les dispositions des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et des demandeurs d'asile et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est entachée d'illégalité du fait de l'irrégularité de la décision de refus de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
La préfète du Bas-Rhin n'a pas produit.
Mme B... été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle de Nancy du 22 mai 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Bauer a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... B..., ressortissante albanaise née le 5 juin 2003, est entrée irrégulièrement en France avec ses parents et ses frère et sœur mineurs en février 2017, selon ses déclarations. Les 14 juin 2021 et 11 avril 2022, elle a sollicité un titre de séjour en se prévalant de sa vie privée et familiale sur le territoire français. Par un arrêté du 18 juillet 2022, la préfète du Bas-Rhin a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par jugement du 13 décembre 2022, dont l'intéressée relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de ces décisions.
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, la circonstance que l'arrêté du 18 juillet 2022 porte à tort l'intitulé d'arrêté " portant refus de renouvellement d'un titre de séjour ", alors que l'intéressée avait fait une demande initiale de délivrance de titre, doit être regardée comme une simple erreur de plume sans incidence sur la légalité de la décision attaquée. Mme B... se prévaut d'une seconde erreur de fait tirée de ce que la décision en litige ne fait état que de la première demande de titre de séjour qu'elle a formée seule le 14 juin 2021 sans mentionner la seconde demande présentée avec ses parents le 11 avril 2022, erreur qui aurait empêché la préfète de tenir compte de l'évolution de son parcours scolaire et notamment de l'obtention de son baccalauréat avec mention et de son admission à l'Institut de formation en soins infirmiers (IFSI) de Strasbourg. Toutefois, en dépit de l'absence de ces précisions relatives à sa scolarité, il résulte de l'instruction que la préfète aurait pris la même décision si elle avait pris en compte ces éléments. Ces omissions ne sauraient par ailleurs à elles seules traduire un défaut d'examen de la situation de l'intéressée. Il s'ensuit que les moyens soulevés doivent être écartés.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...). ".
4. En l'espèce, Mme B... se prévaut de son arrivée en France avec ses parents en février 2017, à l'âge de 13 ans, et d'une durée de présence sur le territoire de plus de cinq ans sans interruption. Elle justifie également de la qualité de ses résultats scolaires lui ayant permis, malgré une scolarisation initiale en classe allophone, d'obtenir son baccalauréat avec mention assez bien et d'être admise à l'IFSI de Strasbourg, antérieurement à la décision attaquée, formation qu'elle n'a pu débuter en l'absence de titre de séjour, et de son inscription actuelle en licence de " Langues, littératures et civilisations étrangères et régionales " à l'université de Strasbourg depuis la rentrée 2022. Elle fait également valoir la présence en France de ses parents, de son frère et de sa sœur, mineurs et scolarisés, ainsi que l'investissement de sa famille dans des activités bénévoles. Toutefois, les dispositions précitées ne garantissent pas à un ressortissant étranger le droit de choisir le lieu le plus approprié pour développer une vie privée et familiale, alors qu'il est constant que la durée de la présence de la famille en France n'est dû qu'au maintien irrégulier des parents de l'intéressée, déboutés de leur demande d'asile et qui ont fait l'objet de mesures d'éloignement respectivement les 22 février 2018 et 23 mars 2021. Il n'est pas soutenu que la cellule familiale ne pourrait se reconstituer en Albanie ou la requérante n'établit ni même n'allègue qu'elle ne pourrait poursuivre ses études supérieures. Ainsi, dans les circonstances de l'espèce, c'est à bon droit que le tribunal a considéré que les dispositions précitées de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'ont pas été méconnues. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...). ".
6. Pour les mêmes motifs que ceux précédemment énoncés, l'intéressée ne justifie pas en l'espèce de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens de ces dispositions, de sorte que le moyen tiré de leur méconnaissance doit être écarté.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
7. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'illégalité, par voie d'exception, de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté.
8. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
9. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 4 du présent arrêt, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations doit être écarté.
Sur la décision fixant le pays de destination :
10. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'illégalité, par voie d'exception, de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 13 décembre 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions à fin d'annulation des décisions attaquées. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'édiction d'une injonction et celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée à la préfète de la région Grand Est, préfète du Bas-Rhin.
Délibéré après l'audience du 14 novembre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Wurtz, président,
Mme Bauer, présidente-assesseure,
M. Meisse, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 décembre 2023.
La rapporteure,
Signé : S. BAUER Le président,
Signé : Ch. WURTZ Le greffier,
Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
F. LORRAIN
N° 23NC00406 2