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05/12/2023 | FRANCE | N°21NC00092

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 05 décembre 2023, 21NC00092


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision du 18 février 2019 par laquelle le maire de la commune de Patornay (Jura) a constaté la péremption de son permis de construire n° PC039408K0003 délivré le 20 janvier 2014.



Par un jugement n° 2000315 du 12 novembre 2020, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enre

gistrée le 12 janvier 2021, M. A..., représenté par Me Diaz, demande à la cour :



1°) d'annuler ce jugement du 12 n...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision du 18 février 2019 par laquelle le maire de la commune de Patornay (Jura) a constaté la péremption de son permis de construire n° PC039408K0003 délivré le 20 janvier 2014.

Par un jugement n° 2000315 du 12 novembre 2020, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 janvier 2021, M. A..., représenté par Me Diaz, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 novembre 2020 du tribunal administratif de Besançon ;

2°) d'annuler la décision du 18 février 2019 du maire de la commune de Patornay constatant la péremption de son permis de construire ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Patornay une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision litigieuse par laquelle le maire entend prononcer " l'annulation " du permis de construire doit ainsi s'analyser comme le retrait de ce dernier ; s'agissant d'une décision créatrice de droit, le retrait ne peut intervenir qu'aux termes d'une procédure contradictoire et sous réserve de respecter les conditions de fond prévues par l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme ; aucune de ces conditions n'est remplie ;

- conformément à l'article R. 424-17 du code de l'urbanisme, l'interruption des travaux ne rend caduc un permis de construire que si sa durée excède un an, ces dispositions n'étant cependant pas applicables si l'inexécution ou l'interruption est imputable au fait d'un tiers ou de l'administration ; en l'espèce le délai de validité du permis de construire interrompu du fait d'un tiers agissant sur instruction de l'administration ne commencera à courir qu'à compter de la date de l'arrêt à intervenir.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 avril 2021, la commune de Patornay, représentée par Me Dravigny, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. A... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le maire a entendu, non pas retirer le permis de construire mais constater sa péremption en conséquence de l'interruption des travaux pendant plus d'un an ;

- la sommation interpellative produite n'est pas de nature à remettre en cause le jugement rendu ; en affirmant que le terrain était inconstructible et qu'il n'y avait pas de permis de construire à la date du 15 octobre 2018, le maire n'a pas encouragé M. B... à faire échec à la réalisation des travaux puisque le permis était déjà devenu caduc ; en tout état de cause, le permis de construire a été accordé en janvier 2014 et les travaux ont été interrompus dès cette année, l'interruption n'est donc pas due aux agissements de M. B... ; M. A... disposait de voies de droit pour mettre fin à cette prétendue interdiction de passage qu'il n'a pas utilisées, c'est donc son inertie qui a empêché la poursuite des travaux.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le décret n° 2014-1661 du 29 décembre 2014 prolongeant le délai de validité des permis de construire, des permis d'aménager, des permis de démolir et des décisions de non-opposition à une déclaration préalable ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bauer,

- et les conclusions de M. Marchal, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 20 janvier 2014, le maire de Patornay a délivré un permis de construire à M. C... en vue de la construction de quatre chalets situés sur les parcelles cadastrées U n° 639, 640, 641, 642, 643 et 644. Une déclaration d'ouverture de chantier a été déposée en mairie le 18 avril 2014 et des travaux de terrassement et de réalisation des fondations ont débuté, avant d'être interrompus la même année. Par acte de vente du 6 juin 2015, la société R2S, représentée par son président, M. A..., a acquis lesdites parcelles et ce dernier, après accord du pétitionnaire, a obtenu le transfert du permis de construire à son profit par un arrêté du 8 novembre 2017. En date du 22 octobre 2018, M. A... a donné à M. C... tout pouvoir afin d'intervenir sur le terrain et de poursuivre les travaux relatifs à l'exécution du permis de construire. Par un courrier du 18 février 2019, le maire a informé M. A... que son permis n'était plus valable faute de réalisation des travaux dans les délais requis. M. A... a demandé au tribunal l'annulation de cette décision. Par un jugement du 12 novembre 2020, dont l'intéressé relève appel, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Aux termes de l'article R. 424-17 du code de l'urbanisme, applicable à la date de délivrance du permis de construire : " Le permis de construire, d'aménager ou de démolir est périmé si les travaux ne sont pas entrepris dans le délai de deux ans à compter de la notification mentionnée à l'article R. 424-10 ou de la date à laquelle la décision tacite est intervenue. / Il en est de même si, passé ce délai, les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année (...) ". L'article 1er du décret n° 2014-1161 du 29 décembre 2014 a, pour les permis de construire intervenus au plus tard le 31 décembre 2015, porté à trois ans le délai mentionné au premier alinéa de l'article R. 424-17 du code de l'urbanisme. En vertu de l'article 2 de ce décret, cette modification s'applique aux autorisations en cours de validité à la date de sa publication, soit le 30 décembre 2014.

3. En premier lieu, nonobstant la maladresse des termes employés, il ressort de la décision attaquée que le maire a entendu, non pas retirer le permis de construire délivré le 20 janvier 2014, mais seulement constater sa péremption du fait de l'absence de réalisation des travaux dans les délais légaux. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que le moyen tiré de ce que les conditions de retrait des actes administratifs n'étaient pas remplies était inopérant et devait être écarté.

4. En second lieu, il résulte des dispositions citées au point 2 que l'interruption des travaux ne rend caduc un permis de construire que si sa durée excède un délai d'un an, commençant à courir après l'expiration du délai de trois ans fixé par le premier alinéa de l'article R. 424-17 du code de l'urbanisme modifié par le décret n° 2014-1161 du 29 décembre 2014. Ces dispositions ne trouvent cependant pas à s'appliquer lorsque l'inexécution des travaux est imputable au fait de l'administration.

5. En l'espèce, faute de précisions quant à la date de notification du permis de construire, le tribunal a valablement retenu qu'il devait être regardé comme notifié au plus tard le 18 avril 2014, date à laquelle le pétitionnaire a déclaré à la commune l'ouverture du chantier. En application de ce qui a été dit au point précédent, le délai d'un an mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 424-17 du code de l'urbanisme était ainsi susceptible de courir à compter du 18 avril 2017, étant précisé que le transfert du permis de construire au requérant par arrêté du 8 novembre 2017 est sans incidence sur les délais de péremption du permis.

6. Il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté que les travaux ont été interrompus depuis 2014 et qu'il n'ont pas repris avant le mois d'octobre 2018, soit postérieurement à la péremption du permis intervenue le 18 avril 2018. M. A... soutient que le maire de la commune aurait, dès 2016, sollicité l'aide des voisins des parcelles d'assiette du projet pour empêcher le déroulement des travaux, de sorte que les dispositions de l'article R. 424-17 ne trouveraient pas à s'appliquer.

7. La main courante du 15 octobre 2018, complétée par la production nouvelle en appel d'une sommation interpellative par voie d'huissier du 8 janvier 2021 faite auprès de M. B..., établissent que ce dernier, voisin du projet, a délibérément fait obstruction au déroulement des travaux dès 2016 par la pose d'une chaîne et le stationnement de son véhicule sur l'unique chemin d'accès aux parcelles, obstruction qu'il indique avoir réalisée à la demande du maire de la commune. Il ne résulte cependant d'aucune disposition législative ou réglementaire que le fait du tiers constitue, par lui-même, une circonstance susceptible de suspendre le délai de validité du permis. A supposer même que les agissements du voisin aient été inspirés par le maire, M. A... ne justifie en tout état de cause d'aucune tentative de reprendre les travaux, interrompus du fait du titulaire du permis en 2014, hormis pour l'établissement d'un devis pour des travaux de terrassement, ni d'aucun recours aux voies de droit dont il disposait, avant l'intervention de la péremption.

8. Il s'ensuit que la décision attaquée constatant la péremption du permis de construire n'est pas entachée d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 424-17 du code de l'urbanisme.

9. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Besançon a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de ladite décision.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Patornay, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande M. A... au titre des frais qu'il a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens.

11. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme demandée par la commune de Patornay au même titre.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Patornay relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et à la commune de Patornay.

Délibéré après l'audience du 14 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Wurtz, président,

- Mme Bauer, présidente-assesseure,

- M. Meisse, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 décembre 2023.

La rapporteure,

Signé : S. BAUER Le président,

Signé : Ch. WURTZ

Le greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au préfet du Jura en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

F. LORRAIN

N° 21NC00092 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC00092
Date de la décision : 05/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: Mme Sandra BAUER
Rapporteur public ?: M. MARCHAL
Avocat(s) : DRAVIGNY

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-05;21nc00092 ?
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