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30/11/2023 | FRANCE | N°21VE03272

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 30 novembre 2023, 21VE03272


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner la société La Poste à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation de ses préjudices et de mettre à la charge de La Poste une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Par un jugement n° 1810216 du 14 octobre 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ainsi que celle présentée par

La Poste sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Proc...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner la société La Poste à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation de ses préjudices et de mettre à la charge de La Poste une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1810216 du 14 octobre 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ainsi que celle présentée par La Poste sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête, des pièces complémentaires et un mémoire enregistrés respectivement le 3 décembre 2021, les 30 mars et 20 septembre 2022, et le 20 octobre 2023, M. A..., représenté par Me Seltène, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision de rejet implicite de sa demande indemnitaire ;

3°) de condamner La Poste à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation des préjudices subis, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation ;

4°) et de mettre à la charge de La Poste la somme de 3 500 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la responsabilité de La Poste est engagée dès lors qu'elle a méconnu à son obligation de sécurité, et qu'il a été victime de harcèlement moral ;

- les préjudices causés par le non-respect par La Poste de son obligation de sécurité doivent être indemnisés à hauteur de 15 000 euros ;

- les préjudices causés par le harcèlement moral qu'il a subi doivent être indemnisés à hauteur de 15 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 octobre 2023, la société La Poste, représentée par Me Bellanger, avocat, conclut au rejet de la requête.

Elle soutient qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n°2002-73 du 17 janvier 2002 ;

- le décret n° 2011-619 du 31 mai 2011 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Cozic,

- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,

- et les observations de Me Seltène, avocate, représentant M. A..., et de Me Tastard, avocat, représentant La Poste.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A... a intégré les services de La Poste, le 4 avril 2002, à la suite de sa réussite à un concours externe. Il a d'abord été nommé stagiaire dans le grade d'agent principal de niveau 1 (APN1) avant d'être titularisé le 3 avril 2003. Alors qu'il occupait les fonctions de pilote de production et de traitement sur le site du centre de traitement du courrier de Nanterre, M. A... a été victime d'un accident de service le 22 décembre 2009. Il a été placé en congé pour accident de service, avant de reprendre son activité sur un emploi aménagé à temps partiel, du 31 janvier 2011 à septembre 2016. Il a été reconnu travailleur handicapé par une décision de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées du 3 janvier 2017, pour la période allant du 20 juin 2016 au 19 juin 2021. M. A... a été placé en congé maladie le 22 janvier 2017 de février à juin 2017, puis de nouveau entre septembre 2017 au 31 août 2019. La commission de réforme, qui s'est réunie le 11 février 2020, a conclu à l'inaptitude absolue et définitive à l'exercice des fonctions de M. A... résultant de l'accident de service du 22 décembre 2009, dont l'état a été considéré comme consolidé au 19 août 2019. Son taux d'invalidité a été évalué à 50% dont 20% d'état préexistant, et la part imputable au service a été évaluée à 30 % pour trouble psychotique. Au terme de cette même réunion de la commission de réforme, il a été reconnu que la lombocruralgie dont souffre M. A... devait être consolidée au 19 juin 2017, avec un taux de 10% imputable à l'accident de service. M. A... a, par un courrier du 31 mai 2018, reçu le 4 juin 2018, adressé une demande indemnitaire à La Poste en vue d'obtenir la réparation des préjudices causés par des faits de harcèlement, et le défaut de respect par l'employeur de son obligation de sécurité. A la suite du rejet implicite de cette demande, M. A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner la société La Poste à lui verser une indemnité de 30 000 euros en réparation des préjudices qu'il allègue avoir subis. M. A... fait appel du jugement n° 1810216 du 14 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Sur la responsabilité de La Poste :

En ce qui concerne la méconnaissance de l'obligation de santé et de sécurité au travail :

2. Aux termes de l'article L. 4121-1 du code du travail : " L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent : / 1° Des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l'article L. 4161-1 ; / 2° Des actions d'information et de formation ; / 3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. / L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes ". Aux termes de l'article L. 4121-2 du même code : " L'employeur met en œuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants : 1° Eviter les risques ; / 2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ; 3° Combattre les risques à la source ; / 4° Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ; (...) Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants (...) ". Aux termes de l'article 1 du décret n° 2011-619 du 31 mai 2011 relatif à la santé et à la sécurité au travail à La Poste : " Sous réserve des dispositions spécifiques prévues dans le présent décret, les dispositions applicables en matière de santé, de sécurité au travail, de contrôle ainsi que de médecine du travail dans les services de La Poste sont les dispositions définies par la quatrième partie du code du travail. / Le présent décret s'applique aux personnels fonctionnaires et aux personnels contractuels de droit public et de droit privé de La Poste. ".

3. Les autorités administratives ont l'obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et morale de leurs agents. Il leur appartient à ce titre, sauf à commettre une faute de service, d'assurer la bonne exécution des dispositions législatives et réglementaires qui ont cet objet.

4. En premier lieu, M. A... soutient qu'à son retour de congé pour accident de service, en novembre 2011, La Poste n'a pas respecté les prescriptions médicales qui avaient été préalablement définies, pendant plusieurs mois jusqu'en 2012. Il fait en particulier valoir que, affecté à la plate-forme industrielle courrier (PIC) de Villeneuve la Garenne, il a été contraint de travailler sur un tabouret sans dossier plusieurs heures par jour. Il verse au dossier, notamment, deux témoignages de collègues faisant état de ses " mauvaises conditions de travail ". Il communique également le courrier de son rhumatologue, daté du 3 février 2012, qui indique que sa réadaptation au travail a d'abord été bien engagée, dans un centre de tri moderne, sur un poste de vidéo-codage " relativement bien adapté à son état " où il disposait d'un siège avec soutien lombaire, avant que ses fonctions évoluent vers la seule activité de tri manuel, effectuée sur un tabouret dépourvu de soutien lombaire, entraînant une dégradation de son état de santé. Ces difficultés auraient conduit l'intéressé à solliciter un temps partiel thérapeutique. Il ne résulte toutefois pas de l'instruction, et il n'est pas allégué par le requérant que, parmi les prescriptions médicales faites à son sujet, aurait figuré l'utilisation exclusive d'un siège disposant d'un soutien lombaire. En outre, il résulte de l'instruction, en particulier des pièces versées au dossier par le requérant lui-même en appel, ainsi que des écritures de la société La Poste, que M. A... a rédigé sur le registre d'hygiène et de sécurité de l'établissement, le 22 décembre 2011, un premier message, laconique, qui n'a pas été compris par sa hiérarchie, suivi d'un second message, rédigé le 3 janvier 2012, par lequel l'intéressé a expressément sollicité la mise à disposition de chaises adaptées, tout en indiquant que ses conditions de travail s'étaient détériorées. Il résulte de ces mêmes pièces que le supérieur hiérarchique de M. A... a répondu à ce dernier, le jour même, en indiquant qu'un rendez-vous était pris pour étudier sa position de travail, le 4 janvier 2012, que des chaises avaient été commandées et qu'un siège venant d'un autre site avait été récupéré pour le mettre à sa disposition. Le requérant n'allègue pas que postérieurement à ce message de sa hiérarchie, il aurait continué à travailler sur un siège inadapté. En outre, la société la Poste fait valoir sans être contestée qu'un suivi médical a été assuré par le service médical de La Poste, et qu'un médecin agréé a pu constater en septembre 2012 que l'état de santé de M. A... s'était amélioré, que les dispenses étaient bien suivies, que ses conditions de travail avaient été améliorées, lui permettant de travailler de manière continue.

5. En second lieu, M. A... soutient qu'à son retour de congé maladie, en février 2016, il s'est vu imposer des horaires de travail inadaptés, de 9h30 à 13h, alors qu'il souhaitait travailler de 6h à 9h30 ou une journée de travail sur deux. Il soutient plus précisément que ces horaires l'ont empêché de se rendre à divers rendez-vous médicaux qu'il avait déjà fixés avant son retour au service. Il ne résulte toutefois pas de l'instruction, et il n'est pas allégué, que M. A... aurait été dans l'impossibilité de déplacer ces rendez-vous ou qu'il aurait sollicité en vain des congés pour se rendre à certains d'entre eux et qu'il aurait ainsi été privé de la possibilité de bénéficier d'un suivi médical approprié.

6. Il résulte de tout ce qui précède, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que La Poste aurait commis une faute, en méconnaissance de son obligation d'assurer sa sécurité.

En ce qui concerne le harcèlement moral :

7. Aux termes du premier alinéa de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa version en vigueur, applicable au présent litige : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel (...) ".

8. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

9. En premier lieu, M. A... soutient qu'il a été mis à l'écart professionnellement et qu'il a subi un traitement défavorable. Il se prévaut au soutien de cette allégation de divers incidents, et tout d'abord, le 6 septembre 2012, d'un réveil brutal par un supérieur hiérarchique alors qu'il dormait dans une salle de repos durant un temps de pause. Si la réalité matérielle de cet incident n'est pas contredite en défense, il résulte de l'instruction que M. A... a été réveillé afin de libérer cette salle de pause, le temps de son nettoyage par une société prestataire, conformément à un planning de nettoyage pré-déterminé. Il résulte en outre de l'extrait du registre d'hygiène et de sécurité versé au dossier par le requérant, sur lequel cet incident est relaté par M. A..., que plusieurs salles de repos étaient disponibles sur le site et que la salle étant petite, son nettoyage a été rapide. Ainsi, si la réalité matérielle de ces faits est établie, ceux-ci ne sont pas susceptibles de faire présumer l'existence du harcèlement allégué.

10. En deuxième lieu, le requérant soutient qu'en 2014 son casier personnel a été ouvert hors de sa présence et que son cadenas a été cassé. Cette allégation est corroborée par deux témoignages concordants versés au dossier. Si ces faits peuvent ainsi être regardés comme étant établis, il résulte toutefois des deux témoignages précités et des écritures de La Poste que c'est " un cadre " de la société, affecté sur le site, qui a lui-même reconnu avoir ouvert ce casier, et qu'il aurait par erreur confondu le cadenas de ce casier avec ceux de l'administration. Il résulte également de l'instruction qu'un précédent incident avait déjà concerné le casier personnel de M. A..., qui avait été fermé, par inadvertance, par un autre agent, alors que l'intéressé ne l'avait pas cadenassé, comme cela se pratiquait pourtant habituellement sur ce site. Ainsi, en dépit de la possibilité d'identifier l'appartenance des casiers, il résulte de ce qui précède que des erreurs sont survenues concernant l'usage des casiers des agents, rendant plausible l'explication selon laquelle le casier de M. A... a été ouvert par erreur. Cependant, ces faits ne sont pas de nature à faire présumer le harcèlement allégué.

11. En troisième lieu, M. A... soutient qu'il a fait l'objet de remarques désobligeantes concernant son état de santé, de la part de trois cadres. Toutefois, il n'apporte aucune précision concernant le contenu de ces remarques, ou les circonstances dans lesquelles elles ont pu être formulées. Il ne renvoie pas davantage à un témoignage en particulier, qui préciserait davantage le contenu et la fréquence des remarques dont il fait état. Ces allégations sont énoncées en des termes trop généraux et trop peu circonstanciés pour permettre de regarder les faits en cause comme étant établis.

12. En quatrième lieu, M. A... soutient que des supérieurs hiérarchiques ne lui disaient pas bonjour. Si deux mains courantes rédigées par l'intéressé le 23 février 2014 et le 29 novembre 2017, ainsi qu'un témoignage d'un collègue, versés au dossier, font effectivement mention de ce que M. A... n'était pas salué, à la différence des autres agents, ces pièces ne détaillent pas les circonstances des faits allégués, ni leur fréquence. Ces allégations sont ainsi, en l'état de l'instruction, insuffisamment détaillées et circonstanciées, et ne peuvent pas en conséquence permettre de regarder les faits allégués comme étant établis.

13. En cinquième lieu, M. A... fait état de la surveillance dont il a fait l'objet sur son lieu de travail, même lorsqu'il se rendait aux toilettes. Des témoignages d'anciens collègues, versés au dossier, attestent de cette surveillance. Ces éléments sont toutefois énoncés en des termes trop peu circonstanciés pour permettre de caractériser la réalité d'une surveillance particulière qui aurait pesé sur M. A....

14. En sixième lieu, M. A... fait mention dans sa requête, de manière aussi générale que laconique, de son " évolution professionnelle ", sans indiquer s'il estime que celle-ci aurait été bloquée ou ralentie, pour une raison quelconque imputable à La Poste. Il se borne à préciser qu'en 2014, son supérieur hiérarchique a cherché à abaisser sa note " excellente ", et qu'il n'a plus bénéficié d'évaluation professionnelle après 2015. Il résulte toutefois de l'instruction que, au titre des années 2012, 2014 et 2015, la note " E " a été attribuée à l'agent pour son évaluation globale, correspondant à une " valeur professionnelle largement dépassée aux exigences du poste ", et ce alors même que dans le cadre des évaluations des années 2012 et 2014, l'évaluateur de M. A... évaluait ses compétences au niveau " parfaitement adapté ". L'intéressé ne communique aucun élément de nature à remettre en cause la pertinence de ces appréciations et ainsi, la seule circonstance, à la supposer établie, qu'en 2014, son supérieur hiérarchique aurait envisagé d'abaisser sa note d'évaluation globale, n'est pas de nature à faire présumer le harcèlement allégué. De même, dans les circonstances de l'espèce, le fait que M. A... n'a pas reçu d'évaluation après 2015 n'est pas à soi seul de nature à faire présumer le harcèlement allégué.

15. En septième lieu, M. A... soutient qu'il a rencontré des difficultés pour obtenir certains documents dont il sollicitait la transmission, notamment ses attestations d'accident de travail du 1er septembre 2015. La Poste affirme sans être contestée que le retard pris dans la transmission d'une feuille d'accident de service est lié au défaut de transmission de certains justificatifs. La Poste justifie par ailleurs d'échanges entre ses services et M. A... concernant la transmission de ces pièces entre le 1er et le 3 septembre 2015, date à laquelle les documents sollicités ont été adressés à l'intéressé. Il résulte également de l'instruction, qu'en août 2017 M. A... a demandé en urgence aux services de La Poste la communication de l'attestation de paiement de ses indemnités d'accident de service pour qu'il les adresse au service des impôts, et que La Poste lui a adressé ce document deux jours après. Enfin, alors qu'une autre demande de communication de documents a été faite le 3 octobre 2017, La Poste a informé l'intéressé le jour même que la transmission des documents demandés était en cours d'envoi. Il résulte de l'ensemble de ces éléments que les retards allégués par M. A... ne sont pas établis.

16. En huitième lieu, si M. A... soutient que La Poste lui a reproché ses nombreuses demandes et sollicitations formulées par courriels, la réalité d'un tel reproche n'est pas établie. La Poste reconnait expressément dans ses écritures que l'intéressé a effectivement adressé de nombreuses demandes par courriels, mais précise que ces demandes ont été traitées sans mauvaise volonté " alors que ce mode de communication n'est pas celui institué entre les agents et les équipes du PIC ".

17. En neuvième lieu, M. A... fait grief à La Poste de ne pas avoir répondu à sa demande d'octroi de l'allocation temporaire d'invalidité, formulée par courrier du 28 juillet 2017. Il résulte toutefois de l'instruction d'une part, que La Poste a répondu une première fois à cette demande par lettre recommandée avec avis de réception en date du 27 octobre 2017, qui lui a été retournée à défaut d'avoir été réclamée par son destinataire, d'autre part, que l'avis de la commission de réforme du 11 février 2020 relative à sa demande d'octroi de l'allocation lui a été notifié par lettre du 20 février 2020, et enfin, que La Poste a effectivement versé à l'intéressé l'allocation sollicitée. Les faits ainsi allégués ne sont pas de nature à faire présumer l'existence de harcèlement moral.

18. En dixième lieu, M. A... fait valoir qu'il n'a appris qu'en mars 2019, indirectement, la fermeture, en juin 2019, de la plateforme industrielle courrier (PIC) de Villeneuve-la-Garenne, et qu'il n'a appris que par un courrier du 22 juillet 2019 son changement d'affectation sur un nouveau site situé à Colombes (CTEDI), à compter du 17 juin 2019, en contradiction avec les termes du plan d'accompagnement conclu le 6 novembre 2018 entre La Poste et les organisations syndicales, s'agissant notamment des agents éloignés du service. Il résulte toutefois de l'instruction que La Poste a tardé à informer M. A... du fait de son placement en congé maladie en raison de la rechute de son accident de service, depuis le 18 septembre 2017, ainsi que de l'engagement d'une procédure de mise à la retraite pour invalidité. La Poste a ainsi estimé que M. A... n'avait pas vocation à reprendre effectivement ses fonctions au sein de l'établissement de Colombes. Eu égard à ces circonstances, les faits allégués par le requérant apparaissent justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement.

19. En dernier lieu, M. A... reproche à La Poste les délais dans lesquels son dossier a été traité. Il souligne en particulier qu'alors que son inaptitude définitive a été déclarée par un médecin en novembre 2017, ce n'est qu'en décembre 2019 que La Poste a sollicité de sa part la transmission de documents en vue de traiter son dossier d'admission à la retraite, et ce n'est qu'en janvier 2020 que la commission de réforme s'est réunie pour statuer sur son admission à la retraite pour invalidité. L'intéressé souligne également que cette réunion est intervenue plus de dix ans après son accident de travail et que La Poste a sollicité pas moins de six expertises médicales. Il résulte toutefois de l'instruction que ces délais ne revêtent pas, en l'espèce, un caractère anormal, eu égard notamment à l'évolution de l'état de santé de M. A..., non encore consolidé entre 2009 et 2019, ainsi qu'aux différentes expertises qui ont dû être conduites, dans différentes spécialités médicales, dans le cadre de la procédure de mise à la retraite de l'agent pour invalidité. Les faits ainsi allégués par M. A... ne sont donc pas susceptibles de faire présumer le harcèlement allégué.

20. Il résulte de ce qui précède que le harcèlement allégué par M. A... n'est pas établi et que la responsabilité de l'administration ne saurait donc être recherchée de ce chef.

21. Il résulte de l'ensemble ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions fondées sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la société La Poste.

Délibéré après l'audience du 16 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Even, président de chambre,

Mme Aventino, première conseillère,

M. Cozic, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 novembre 2023.

Le rapporteur,

H. COZICLe président,

B. EVEN

La greffière,

I.SZYMANSKI

La République mande et ordonne au ministre l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 21VE03272


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE03272
Date de la décision : 30/11/2023
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-03 Responsabilité de la puissance publique. - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. - Agissements administratifs susceptibles d'engager la responsabilité de la puissance publique.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Hervé COZIC
Rapporteur public ?: M. FREMONT
Avocat(s) : SELARL HMS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-11-30;21ve03272 ?
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