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28/11/2023 | FRANCE | N°22NT02441

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 28 novembre 2023, 22NT02441


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. D... A... et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Caen de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2015 et 2016.



Par un jugement n° 2002001 du 31 mai 2022, le tribunal administratif de Caen a prononcé la réduction de la base des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de prélè

vements sociaux et des pénalités correspondantes auxquelles ont été assujettis M. A... et Mme B... à hau...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Caen de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2015 et 2016.

Par un jugement n° 2002001 du 31 mai 2022, le tribunal administratif de Caen a prononcé la réduction de la base des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de prélèvements sociaux et des pénalités correspondantes auxquelles ont été assujettis M. A... et Mme B... à hauteur d'une somme de 272 478 euros au titre de l'année 2015 et de 7 828 euros au titre de l'année 2016, condamné l'Etat à verser la somme de 2 000 euros à M. A... et Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus de leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 27 juillet 2022 et 29 septembre 2023,

M. A... et Mme B..., représentés par Me Courreau, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande ;

2°) de prononcer la décharge restant en litige ;

3°) d'ordonner une expertise sur les factures et les pièces justificatives provenant de la société Cohesion Risk Assessment ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué est irrégulier dès lors que le tribunal administratif s'est abstenu, d'une part, de se prononcer sur chacun des griefs et sur tous les moyens exposés concernant la justification des charges de la société Cohesion Risk Assessment indûment mises à leur charge par voie de distribution et, d'autre part, de mentionner les négligences du service ;

- la proposition de rectification adressée à la SARL Cohesion Risk Assessment est insuffisamment motivée ; le service a refusé à tort à la société la possibilité de présenter des factures et d'autres pièces justificatives ; il s'est abstenu de répondre par écrit après l'entretien hiérarchique ;

- la proposition de rectification qui leur a été adressée n'est pas suffisamment motivée dès lors qu'elle n'expose pas les motifs justifiant les différences entre, d'une part, les revenus distribués réintégrés dans leurs revenus de 2015 et 2016, soit respectivement 393 383 euros et 43 190 euros et, d'autre part, les sommes réintégrées aux résultats imposables de la SARL Cohesion Risk Assessment au titre des exercices clos en 2015 et 2016 à hauteur respectivement de 364 873 euros et 43 190 euros ; elle n'est pas donc motivée en ce qui concerne les différences de 28 510 euros et 5 546 euros ; les sommes déclarées par les sociétés Cohésion Training Center et GRP LTD ne peuvent être regardées comme ayant été distribuées par la société Cohesion Risk Assessment ;

- la même proposition de rectification, en ne mentionnant pas M. A... comme étant le bénéficiaire des revenus distribués relatifs aux véhicules, est irrégulièrement motivée à concurrence de 12 985 euros pour 2015 et 36 634 euros pour 2016 ;

- ils se prévalent, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des énonciations du paragraphe no 80 du commentaire administratif publié au bulletin officiel des finances publiques sous les références BOI-CF-IOR-10-50 n° 400 et BOI-CF-IOR-10-40 n° 80 ;

- la réponse à leurs observations n'a pas mentionné les modalités et le délai de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; elle ne mentionne pas le délai de trente jours pour présenter des observations sur des sanctions fiscales ; elle est entachée d'erreurs de fait erronés sur les démarches de M. A... s'agissant des factures et autres pièces justificatives provenant de la SARL Cohesion Risk Assessment ; l'administration devait répondre sur les différentes modalités de présentation des factures et autres pièces justificatives provenant de la société ;

- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors que l'administration a à tort refusé la présentation et l'examen des factures et autres pièces justificatives provenant de la SARL Cohesion Risk Assessment ;

- des charges doivent être réintégrées dans la reconstitution du chiffre d'affaires dès lors qu'elles sont justifiées par les factures et différentes pièces justificatives ; des sommes déclarées par deux sociétés n'ont pas été distribuées à la SARL Cohesion Risk Assessment ;

- M. A... n'était pas le maître de l'affaire dans la mesure où ses pouvoirs ne s'exerçaient pas sur les fonds sociaux et étaient partagés avec le second associé ou au moins une autre personne.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 octobre 2022, le directeur de contrôle fiscal Ile-de-France conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... et Mme B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Geffray,

- les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public,

- et les observations de Me Courreau, représentant M. A... et Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Après la vérification de comptabilité de la SARL Cohesion Risk Assessment, dont

M. A..., associé à 50 % des parts, est le gérant, l'administration a procédé à un contrôle sur pièces portant sur l'impôt sur le revenu et les prélèvements sociaux au titre des années 2015 et 2016. Par une proposition de rectification du 20 décembre 2018, elle a estimé que des revenus ont été distribués à M. A... sur le fondement des dispositions du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts et que ces revenus ont été réputés appréhendés par M. A... en tant que maître de l'affaire. Par un jugement du 31 mai 2022, le tribunal administratif de Caen. a réduit la base des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de prélèvements sociaux et des pénalités correspondantes auxquelles ont été assujettis M. A... et Mme B... à hauteur d'une somme de 272 478 euros au titre de 2015 et de 7 828 euros au titre de 2016 et condamné l'Etat à verser la somme de 2 000 euros à M. A... et Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative mais a rejeté le surplus des conclusions de leur demande tendant la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux et des pénalités correspondantes auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2015 et 2016. M. A... et Mme B... relèvent appel du jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande.

2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée. ".

Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile. Elle doit également comporter le mode de calcul des rectifications.

3. A l'appui du moyen tiré de l'insuffisante motivation de la proposition de rectification du 20 décembre 2018 en méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales rappelé ci-dessus, M. A... et Mme B... invoquent une incohérence entre, d'une part, les montants des redressements de la base imposable de la SARL Cohesion Risk Assessement rappelés sur la proposition de rectification adressée à M. A... et Mme B... associés de cette société qui sont respectivement de 364 873 euros et de 48 736,14 euros au titre des exercices clos en 2015 et 2016 et, d'autre part, les montants en base retenus sur la même proposition de rectification pour le calcul des sommes réputées avoir été distribuées entre les mains de M. A... en qualité de maître de l'affaire qui sont de 393 383 euros et de 34 552 euros pour les exercices clos en 2015 et 2016, soit une différence inexpliquée de 28 510 euros pour l'année 2015 et de 5 546 euros pour l'année 2016. En effet, les montants des revenus distribués, soit 393 383 euros pour 2015 et 34 552 euros pour 2016 retenus dans la proposition de rectification, avant application à ces sommes regardées comme des distributions, du coefficient de 1,25 prévu au 2° du 7 de l'article 158 du code général des impôts ne sont assortis pour leur calcul d'aucune précision suffisante permettant au contribuable de comprendre comment les montants de revenus distribués mis à leur charge ont été calculés. Ainsi, alors même que le ministre fait valoir que l'erreur de calcul sur le montant des revenus distribués réintégrés aux revenus des requérants et les sommes réintégrées aux résultats imposables de la société est sans incidence sur la motivation de la proposition de rectification en raison du fait que les montants de revenus distribués restant en litige devant la cour sont désormais inférieurs aux montants initiaux notifiés, la motivation de la proposition de rectification du 20 décembre 2018, bien que comportant la désignation de l'impôt concerné, des années d'imposition et de la base d'imposition, mais qui ne permet pas au demeurant aux contribuables de connaître les charges que le vérificateur a écartées au regard des factures produites, est dès lors insuffisante au regard des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales.

4. Il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de leur requête que M. A... et Mme B... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'article 3 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté le surplus de leur demande.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : M. A... et Mme B... sont déchargés, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2015 et 2016.

Article 2 : L'article 3 du jugement n° 2002001 du tribunal administratif de Caen du 31 mai 2022, est annulé.

Article 3 : L'Etat versera à M. A... et Mme B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., Mme C... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 10 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Quillévéré, président de chambre,

- M. Geffray, président-assesseur,

- M. Viéville, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 novembre 2023.

Le rapporteur

J.E. GEFFRAYLe président de chambre

G. QUILLÉVÉRÉ

La greffière

A. MARCHAIS

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22NT0244102


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22NT02441
Date de la décision : 28/11/2023
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. QUILLÉVÉRÉ
Rapporteur ?: M. Jean-Eric GEFFRAY
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : COURREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-11-28;22nt02441 ?
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