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28/11/2023 | FRANCE | N°22NT01769

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 28 novembre 2023, 22NT01769


Vu la procédure suivante :



Procédure devant la cour :



Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 juin 2022 et 12 juillet 2023, la société Ferme éolienne Le Mortier Jumeau, représentée par Me Fazio, demande à la cour :



1°) d'annuler l'arrêté en date du 15 décembre 2021 par lequel par lequel le préfet de la Sarthe a refusé de lui délivrer une autorisation environnementale pour l'installation et l'exploitation de deux éoliennes et d'un poste de livraison sur le territoire des communes de Moitron sur Sarthe

et de Saint Christophe du Jambet ensemble, la décision de rejet de son recours gracieux en date du 8 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 juin 2022 et 12 juillet 2023, la société Ferme éolienne Le Mortier Jumeau, représentée par Me Fazio, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté en date du 15 décembre 2021 par lequel par lequel le préfet de la Sarthe a refusé de lui délivrer une autorisation environnementale pour l'installation et l'exploitation de deux éoliennes et d'un poste de livraison sur le territoire des communes de Moitron sur Sarthe et de Saint Christophe du Jambet ensemble, la décision de rejet de son recours gracieux en date du 8 avril 2022 ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Sarthe de procéder au réexamen de la demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le préfet s'est estimé lié par l'avis de la direction départementale des territoires de la Sarthe du 15 avril 2021 sur le dossier complété ;

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- l'étude d'impact du projet n'est affectée par aucune insuffisance substantielle : l'appréciation de la sensibilité de la zone a été suffisamment approfondie et le choix d'implantation a été décidé en fonction des enjeux chiroptérologiques ; les données recueillies pour établir l'état initial des espèces de chiroptères présentes sur le site sont représentatives des enjeux chiroptérologiques et des études en altitude n'auraient pas permis d'identifier d'autres espèces ; le fait que les recommandations Eurobats, dépourvues de caractère impératif, n'aient pas pleinement été respectées est donc parfaitement justifié ;

- la zone ne présente pas une sensibilité forte aux chiroptères ;

- les études en hauteur de chiroptères n'étaient pas nécessaires dès lors que les recommandations d'élaboration des études d'impact s'agissant des chiroptères n'exigent pas des écoutes en altitude ; les investigations effectuées (6 nuits d'analyse, puis des écoutes en continu à 12 mètres de hauteur), les mesures spécifiques de suivi - en renforcement des prescriptions générales issues de l'arrêté ministériel du 26 août 2011 - ont été proposées ainsi que la mise en place d'un bridage dédié à la préservation des espèces de chiroptères ; la réalisation d'écoutes en hauteur ne fait que confirmer les études réalisées au sol ; l'arrêté est ainsi entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'analyse des impacts bruts du projet sur le Bruant des Roseaux est suffisante : le Bruant des Roseaux n'est pas une espèce patrimoniale sur le site ; les impacts bruts du projet sur cette espèce ont été étudiés. Et il en résulte que le Bruant des Roseaux n'est pas une espèce sensible aux collisions, que les dérangements en phase travaux auront un effet négligeable et ponctuel en période hivernale ou lors des migrations et que le Bruant des Roseaux a une faible sensibilité au risque de collision sur le site d'étude ;

- l'autorité administrative a considéré à tort que la demande de prolongation du délai de remise des compléments d'études d'une durée de 18 mois n'est pas acceptable : cette demande a été formulée en période de pandémie ; le projet éolien, nonobstant une suspension complémentaire de l'instruction de 18 mois aurait pu être autorisé dans un délai de 5 ans à compter de la réalisation des inventaires ; les études complémentaires demandées devaient être réalisées à des moments précis et nécessitaient du temps.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juin 2023, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 ;

- l'arrêté du 23 avril 2007 des ministres chargés de l'agriculture et de l'environnement ;

- l'arrêté du 29 octobre 2009 des ministres chargés de l'agriculture et de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Viéville,

- les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public,

- et les observations de Me Fazio, représentant la société Ferme Éolienne Le Mortier Jumeau.

Une note en délibéré présentée pour la SAS Ferme Éolienne Le Mortier Jumeau a été enregistrée le 14 novembre 2023.

Considérant ce qui suit :

1. Le 12 février 2020, la SAS ferme éolienne Le Mortier Jumeau a déposé auprès du préfet de la Sarthe une demande d'autorisation environnementale portant sur la construction et l'exploitation d'un parc éolien composé de deux éoliennes et d'un poste de livraison, sur le territoire de la commune de Moitron sur Sarthe et de Saint Christophe du Jambet. Une demande de compléments d'études, avec délai de réponse de trois mois, a été formulée le 21 avril 2020. Par courrier du 7 juillet 2020, puis du 15 septembre 2020, la SAS ferme éolienne Le Mortier Jumeau a sollicité une prolongation du délai de remise des compléments, soit jusqu'au 21 février 2021, demande qui a été accordée par un courrier du 9 octobre 2021. La société a complété son dossier le 19 février 2021. La direction départementale des territoires de la Sarthe a émis un avis sur le dossier initial le 15 avril 2020 puis le 23 mars 2021 sur le dossier modifié. Une deuxième demande de compléments a été formulée le 26 avril 2021, prolongeant la phase d'examen de la demande d'autorisation environnementale pour une durée maximum de 4 mois. La société pétitionnaire a sollicité par courrier du 19 juillet 2021 une suspension du délai d'instruction de 18 mois afin de procéder aux études complémentaires demandées. Un rapport a été établi le 22 octobre 2021, proposant de rejeter la demande d'autorisation environnementale en application des dispositions des articles L. 181-9 et R. 181-34 du code de l'environnement. Le projet d'arrêté de rejet de demande d'autorisation environnementale a été porté à la connaissance de la société qui a fait part de ses observations par courrier du 1er décembre 2021. Par arrêté du 15 décembre 2021, le préfet a rejeté la demande d'autorisation environnementale de la SAS ferme éolienne Le Mortier Jumeau. La demande de retrait de cet arrêté a été rejetée le 8 avril 2022.

Sur les conclusions à fins d'annulation :

En ce qui concerne le moyen tiré de l'incompétence négative :

2. Il ne résulte d'aucun élément de l'instruction que le préfet, alors même qu'il s'y est référé, se serait cru lié par l'avis défavorable de la direction départemental des territoires de la Sarthe et se serait abstenu de porter une appréciation propre sur les caractéristiques du projet et ses impacts sur les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement.

En ce qui concerne la motivation :

3. Aux termes de l'article R. 181-34 du code de l'environnement : " (...) La décision de rejet est motivée. ". L'arrêté attaqué comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Ainsi, le moyen tiré du défaut de motivation de cet arrêté doit être écarté.

En ce qui concerne le moyen tiré de la suffisance de l'étude d'impact :

4. D'une part, aux termes de l'article L. 181-9 du code de l'environnement : " L'instruction de la demande d'autorisation environnementale se déroule en trois phases : / 1° Une phase d'examen ; / 2° Une phase d'enquête publique ; / 3° Une phase de décision. / Toutefois, l'autorité administrative compétente peut rejeter la demande à l'issue de la phase d'examen lorsque celle-ci fait apparaître que l'autorisation ne peut être accordée en l'état du dossier ou du projet. / (...) ". Aux termes de l'article R. 181-34 dudit code : " Le préfet est tenu de rejeter la demande d'autorisation environnementale dans les cas suivants : / 1° Lorsque, malgré la ou les demandes de régularisation qui ont été adressées au pétitionnaire, le dossier est demeuré incomplet ou irrégulier ; / 2° Lorsque l'avis de l'une des autorités ou de l'un des organismes consultés auquel il est fait obligation au préfet de se conformer est défavorable ; / 3° Lorsqu'il s'avère que l'autorisation ne peut être accordée dans le respect des dispositions de l'article L. 181-3 ou sans méconnaître les règles, mentionnées à l'article L. 181-4, qui lui sont applicables. (...) ".

5. D'autre part, aux termes de l'article R. 122-5 du code de l'environnement : I.- Le contenu de l'étude d'impact est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, ouvrages et aménagements projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine. (...) 2° Une analyse de l'état initial de la zone et des milieux susceptibles d'être affectés par le projet, portant notamment sur la population, la faune et la flore, les habitats naturels, les sites et paysages, les biens matériels, les continuités écologiques telles que définies par l'article L. 371-1, les équilibres biologiques, les facteurs climatiques, le patrimoine culturel et archéologique, le sol, l'eau, l'air, le bruit, les espaces naturels, agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, ainsi que les interrelations entre ces éléments ; (...)7° Les mesures prévues par le pétitionnaire ou le maître de l'ouvrage pour : - éviter les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine et réduire les effets n'ayant pu être évités ; -compenser, lorsque cela est possible, les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine qui n'ont pu être ni évités ni suffisamment réduits. S'il n'est pas possible de compenser ces effets, le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage justifie cette impossibilité. La description de ces mesures doit être accompagnée de l'estimation des dépenses correspondantes, de l'exposé des effets attendus de ces mesures à l'égard des impacts du projet sur les éléments visés au 3° ainsi que d'une présentation des principales modalités de suivi de ces mesures et du suivi de leurs effets sur les éléments visés au 3° ; 8° Une présentation des méthodes utilisées pour établir l'état initial visé au 2° et évaluer les effets du projet sur l'environnement et, lorsque plusieurs méthodes sont disponibles, une explication des raisons ayant conduit au choix opéré".

6. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que, lorsque le préfet estime qu'une installation soumise à autorisation environnementale nécessite une dérogation aux interdictions relatives à la conservation des espèces protégées alors que la demande d'autorisation ne contient pas les pièces et informations exigées au titre de cette législation spécifique, il doit inviter le pétitionnaire à compléter ou régulariser son dossier dans un délai qu'il définit, avant de pouvoir, le cas échéant, si cette invitation n'est pas suivie d'effet, rejeter la demande d'autorisation dès la phase d'examen en application du 1° de l'article R. 181-34 du code de l'environnement.

7. Il résulte de l'instruction que, pour refuser de délivrer à la requérante, dès la phase d'examen, l'autorisation environnementale sollicitée, le préfet s'est fondé sur l'absence de réalisation, malgré une demande faite en ce sens, de mesures complémentaires permettant d'évaluer l'activité des chiroptères à hauteur de nacelle et sur l'insuffisance de l'inventaire chiroptérologique en découlant. Le préfet s'est fondé par ailleurs sur l'absence d'évaluation concernant le Bruant des roseaux, espèce détectée à l'occasion des inventaires complémentaires.

S'agissant des chiroptères :

8. Le projet consiste en l'implantation d'un parc éolien comprenant deux éoliennes d'une hauteur en haut de nacelle de 121 mètres, d'un diamètre de rotor de 162 mètres et d'une hauteur de garde de 40 mètres, se situant à moins de 200 mètres de matrices boisées et à un peu plus de 50 mètres de boisements ou de haies, qui constituent les habitats fréquentés par les différentes espèces de chiroptères.

9. Des prospections chiroptérologiques ont été faites dans un premier temps sur un cycle biologique complet du 21 mars 2018 au 12 octobre 2018 consistant en des écoutes automatisées et des séances d'écoute active réalisées une fois par mois sur la zone d'implantation potentielle des éoliennes. L'emplacement des points d'écoute a été déterminé de façon à inventorier les espèces présentes et à appréhender l'utilisation des habitats, le site et ses environs présentant des habitats potentiels pour les chiroptères et notamment de vieux arbres à cavité présents sur l'ensemble de la zone d'étude et à proximité. Aux termes de ces premières prospections, seize espèces de chauves-souris ont été inventoriées dans les aires d'études immédiates et ont permis de déterminer que l'activité des chauves-souris est globalement forte sur le site d'étude avec 25 667 contacts enregistrés en huit soirées d'écoute, le peuplement chiroptérologique étant dominé à plus de 94 % par la Pipistrelle commune et la Pipistrelle de Kuhl. L'enjeu de la zone d'implantation potentielle est qualifié de fort pour la pipistrelle commune et de modéré pour la Barbastelle d'Europe, la Pipistrelle de Kuhl, la Pipistrelle de Nathusius et la Sérotine commune.

10. A la suite de la demande de complément formulée le 21 avril 2020 visant notamment à la réalisation d'écoute à hauteur de nacelles, la société requérante a fait réaliser un suivi en hauteur entre le 17 juillet 2020 et le 18 novembre 2020 à l'aide d'un mat de mesure de 12 mètres, qui a permis d'établir une présence des différentes espèces de Chiroptères comparable à celle observée durant la période de mars à octobre 2018. Le préfet fait valoir que l'absence de mesure en hauteur de nacelle n'a pas permis d'appréhender l'importance des populations de chiroptère de haut vol telle la noctule commune et la sérotine. S'il résulte de l'instruction que l'enjeu global pour ces deux espèces a été jugé faible et modéré, leur présence a néanmoins été relevée lors des séances d'écoute active et passive à faible hauteur ou au niveau du sol et il résulte par ailleurs de l'instruction que les espèces les plus représentées lors des prospections chiroptérologiques réalisées (Pipistrelle commune et Pipistrelle de Kuhl) ont une forte sensibilité vis-à-vis de l'éolien. Ainsi, eu égard à l'importance de l'activité chiroptérologique relevé et la présence d'espèces de haut vol ou sensibles vis-à-vis de l'éolien, les études réalisées n'ont pas permis de caractériser avec une précision suffisante la présence des différentes espèces de chauve-souris sur le site.

11. Si la société soutient que le risque de collision ou de barotraumatismes doit être considéré comme faible pour la pipistrelle commune, de Kuhl et de Nathusius et la Sérotine commune, les deux éoliennes étant situées à plus 50 m des lisières, cette argumentation n'est pas de nature à établir l'absence de risque de collision ou de barotraumatismes en altitude alors que l'enjeu de la zone d'implantation potentielle est qualifié de fort pour la pipistrelle commune et de modéré pour la Barbastelle d'Europe, la Pipistrelle de Kuhl, la Pipistrelle de Nathusius et la Sérotine commune.

12. La société requérante fait également valoir que les écoutes à hauteur de nacelle doivent être réalisées sur un cycle biologique complet. Il résulte cependant de l'instruction que si la demande de compléments formulée le 21 avril 2020 avait été suivie de la réalisation d'écoute à la hauteur demandée par l'administration, ces écoutes auraient pu être réalisées sur un cycle biologique complet ou suffisamment important pour apprécier la présence des différentes espèces de chiroptère en altitude.

13. Enfin, si la société requérante a proposé des mesures de bridage afin de pallier aux risques de collisions ou de barotraumastimes aux chiroptères, ces mesures ont été déterminées à partir de relevés effectués à une hauteur de 12 mètres, alors que les conditions de températures et de vent diffèrent de celles qui peuvent être relevées à hauteur de nacelle, soit 121 mètres en l'espèce.

14. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, il ne résulte pas de l'instruction qu'au regard de la méthodologie suivie par la société pétitionnaire pour mesurer l'impact du projet sur les chiroptères ainsi que des données collectées sur la base de cette méthodologie, le dossier constitué notamment de l'étude d'impact, complétée à la suite de la demande du préfet, serait complet ou régulier, ou comporterait les éléments suffisants pour poursuivre l'examen de la demande d'autorisation environnementale de la société Ferme Eolienne le Mortier Jumeau.

S'agissant du Bruant des roseaux :

15. Si la société soutient que les investigations menées suite à la demande de complément formulée en avril 2021 ont permis d'établir que le Bruant des Roseau n'est pas patrimonial sur le site, n'est pas une espèce sensible aux collisions, que les dérangements en phase travaux auront un effet négligeable et ponctuel en période hivernale ou lors des migrations et que le Bruant des Roseaux a une sensibilité faible au risque de collision sur le site d'étude, il est constant que les résultats de ces prospections n'ont pas été transmis à l'autorité administrative avant l'expiration du délai imparti dans le courrier du 26 avril 2021, la société n'ayant formulé le 19 juillet 2021 qu'une demande de prolongation de délai de remise de compléments de 18 mois. En l'absence de réponse apportée à la demande formulée le 26 avril 2021 dans le délai imparti par l'administration, le préfet de la Sarthe a pu à bon droit estimer que la société n'avait apporté aucun élément de nature à apprécier l'importance du risque concernant le Bruant des Roseaux.

16. Les insuffisances de l'étude d'impact concernant les chiroptères et le Bruant des roseaux ont pu avoir pour effet d'exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

En ce qui concerne le délai d'instruction :

17. En dernier lieu, aux termes de l'article R. 181-16 du code de l'environnement : " Le préfet désigné à l'article R. 181-2 délivre un accusé de réception dès le dépôt de la demande d'autorisation lorsque le dossier comprend les pièces exigées par la sous-section 2 de la section 2 du présent chapitre pour l'autorisation qu'il sollicite. / Lorsque l'instruction fait apparaître que le dossier n'est pas complet ou régulier, ou ne comporte pas les éléments suffisants pour en poursuivre l'examen, le préfet invite le demandeur à compléter ou régulariser le dossier dans un délai qu'il fixe. / Le délai d'examen du dossier peut être suspendu à compter de l'envoi de la demande de complément ou de régularisation jusqu'à la réception de la totalité des éléments nécessaires. Cette demande le mentionne alors expressément. (...) ". aux termes de l'article R. 181-17 du code de l'environnement : " La phase d'examen de la demande d'autorisation environnementale prévue par le 1° de l'article L. 181-9 a une durée qui est soit celle indiquée par le certificat de projet lorsqu'un certificat comportant un calendrier d'instruction a été délivré et accepté par le pétitionnaire, soit de quatre mois à compter de la date de l'accusé de réception du dossier. Toutefois, cette durée de quatre mois est : (...) 4° Prolongée pour une durée d'au plus quatre mois lorsque le préfet l'estime nécessaire, pour des motifs dont il informe le demandeur. Le préfet peut alors prolonger d'une durée qu'il fixe les délais des consultations réalisées dans cette phase. ".

18. Il résulte de l'instruction que le délai d'examen de la demande d'autorisation a débuté le 20 février 2020 et a été interrompu le 21 avril 2020 par une première demande de compléments. La computation du délai d'examen a repris à la réception des éléments complémentaires communiqués le 19 février 2021, puis a été de nouveau interrompu le 23 avril 2021. A cette dernière date, le délai de quatre mois imparti à l'administration par les dispositions précitées de l'article R 181-17 du code de l'environnement pour l'examen de la demande était dépassé. Dans la lettre du 23 avril 2021, le préfet a d'une part, informé le pétitionnaire de la prolongation de la période d'examen en application des dispositions du 4° de l'article R. 181-17 précitées, et, d'autre part, demandé des éléments complémentaires au pétitionnaire sur le fondement des dispositions de l'article R. 181-16 précitées. Le préfet a alors invité la société pétitionnaire de produire les éléments demandés dans un délai de trois mois. Dans ce délai de trois mois, le pétitionnaire a seulement formulé une demande visant à l'allongement du délai imparti pour produire les éléments complémentaires.

19. Si la société requérante soutient que la période durant laquelle les demandes de complément ont été faites a été marquée par la survenue de la pandémie de Covid 19, il ne résulte aucunement de l'instruction que la survenue de la pandémie aurait perturbé le déroulement de l'instruction de la demande. Par ailleurs, la circonstance alléguée que les inventaires effectués dans le cadre de la demande d'autorisation auraient toujours été valables en 2023 est sans incidence, la société s'étant abstenu de fournir les éléments attendus ou de de produire la preuve du commencement des investigations complémentaires sollicitées par l'administration alors en particulier que la première demande d'écoute en hauteur des chiroptères a été formulée le 21 avril 2020. Enfin, et pour les mêmes raisons, la société n'est pas fondée à soutenir que la réalisation d'écoutes de chiroptères réalisées en hauteur nécessite du temps et des moyens.

20. Dans ces conditions, alors que dans le délai imparti dans la lettre du 26 avril 2021, aucune des réponses attendues n'a été fournie par le pétitionnaire, le préfet a pu ensuite à bon droit rejeter la demande sur le fondement de l'article R. 181-34 du code de l'environnement.

21. Il résulte de tout ce qui précède que la ferme éolienne le Mortier Jumeau n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le préfet de la Sarthe a rejeté la demande d'autorisation environnementale. Par suite, les conclusions aux d'annulation et par voie de conséquence les conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que demande la société Ferme éolienne Le Mortier Jumeau.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Ferme éolienne Le Mortier Jumeau est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Ferme éolienne Le Mortier Jumeau et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Sarthe.

Délibéré après l'audience du 10 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Quillévéré, président de chambre,

- M. Geffray, président assesseur,

- M. Viéville, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 novembre 2023.

Le rapporteur,

S. VIÉVILLELe président de chambre,

G. QUILLÉVÉRÉ

La greffière,

A. MARCHAIS

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision

N° 22NT0176902


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22NT01769
Date de la décision : 28/11/2023
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. QUILLÉVÉRÉ
Rapporteur ?: M. Sébastien VIEVILLE
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : FAZIO

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-11-28;22nt01769 ?
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