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24/11/2023 | FRANCE | N°22MA00158

France | France, Cour administrative d'appel, 7ème chambre, 24 novembre 2023, 22MA00158


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :





La commune de Roquebillière a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 4 octobre 2017 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes aurait mis un terme au droit d'usage dont elle bénéficie sur la partie de la Terre de Cour cantonnée à son profit, ensemble la décision implicite par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de faire droit à son recours gracieux en date du 7 novembre 2017 et de mettre à la charge de l'Etat une som

me de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.





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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Roquebillière a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 4 octobre 2017 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes aurait mis un terme au droit d'usage dont elle bénéficie sur la partie de la Terre de Cour cantonnée à son profit, ensemble la décision implicite par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de faire droit à son recours gracieux en date du 7 novembre 2017 et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1800627 du 16 novembre 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté la requête de la commune de Roquebillière comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 14 janvier 2022 et un mémoire en réplique enregistré le 28 septembre 2023, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, la commune de Roquebillière, représentée par Me Labetoule, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice ;

2°) d'annuler la décision du préfet des Alpes-Maritimes du 4 octobre 2017, ensemble le rejet implicite de son recours gracieux exercé le 7 novembre 2017 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularité dès lors que la juridiction administrative est compétente pour connaître des décisions attaquées qui mettent un terme au droit d'usage perpétuel dont elle bénéficie sur une partie du territoire de la terre de Cour, domaine privé de l'Etat ;

- le jugement est également entaché d'irrégularité dès lors qu'il n'est pas établi que sa minute aurait été signée ;

- la décision du 4 octobre 2017 a été signée par une autorité incompétente ;

- le préfet des Alpes-Maritimes a commis une erreur de droit dès lors que la loi n° 63-645 du 8 juillet 1963 portant suppression des droits dits de " bandites " n'a pas mis un terme au droit d'usage perpétuel dont elle bénéficie en application de décisions de justice.

Par un mémoire en défense enregistré le 11 septembre 2023, le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la juridiction administrative est incompétente pour connaître de ce litige ;

- la requête de première instance était irrecevable dès lors que les actes attaqués, à caractère purement informatif, ne sont pas de nature à faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ;

- les moyens de la requête sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 63-645 du 8 juillet 1963 portant suppression des droits dits de " bandites " ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vincent,

- les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public,

- et les observations de Me Duguet pour la commune de Roquebillière.

Considérant ce qui suit :

1. Terre de Cour est un vaste ensemble de terres de 6 507 hectares s'étendant sur le territoire de quatre communes des Alpes-Maritimes (Roquebillière, Saint-Martin de Vésubie, Lantosque et Belvédère). Ce territoire a été intégré au domaine privé de l'Etat français à la suite du rattachement du Comté de Nice et de Savoie à la France en 1860 et du traité de paix ayant modifié le tracé de la frontière entre la France et l'Italie en 1947. Par un jugement du 2 février 1925, confirmé par la Cour d'appel d'Aix-en-Provence par arrêt du 21 juin 1926, le tribunal civil de Nice a cantonné les droits d'usage perpétuel dont dispose chacune des quatre communes sur le domaine privé de l'Etat. Par une lettre en date du 4 septembre 2017, le maire de la commune de Roquebillière a, à l'occasion de litiges entre associations de chasseurs des différentes communes précitées, saisi le préfet des Alpes-Maritimes afin que soient confirmés les droits de la commune sur son cantonnement. Par une lettre du 4 octobre 2017, le préfet des Alpes-Maritimes, faisant mention de la loi susvisée du 8 juillet 1963 portant suppression des droits dits de " bandites ", a indiqué qu'il lui semblait que cette loi avait supprimé tous les droits d'usage que les communes détenaient antérieurement sur la Terre de Cour. La commune de Roquebillière, estimant que, par cette lettre, le préfet des Alpes-Maritimes avait entendu mettre un terme à son droit d'usage, a exercé un recours gracieux à l'encontre de celle-ci par lettre du 7 novembre 2017. Une décision implicite de rejet est née sur ce recours gracieux. La commune de Roquebillière interjette appel du jugement du 16 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête dirigée contre la lettre du 4 octobre 2017, ensemble le rejet implicite du recours gracieux, comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Il résulte du dossier de première instance que la minute du jugement attaqué a été signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué ne serait pas signé doit être écarté.

3. En second lieu, par la lettre du 4 octobre 2017, le préfet des Alpes-Maritimes s'est borné à citer la loi précitée du 8 juillet 1963 portant suppression des droits dits de " bandites " et à en tirer la conséquence, qu'il lui semblait que, dès lors, les droits d'usage antérieurs dont disposait notamment la commune requérante avaient, par l'effet de cette loi, disparu. Il a cependant, par la suite, précisé qu'il n'était pas dans les intentions de l'Etat " de remettre en cause l'exercice des activités pastorales et en particulier des vacheries sur ces parcelles, ni celles de la chasse ". Ainsi, contrairement à ce que soutient la commune requérante, le préfet des Alpes-Maritimes n'a, par les décisions attaquées, qui n'ont aucune portée juridique nouvelle, nullement entendu disposer de son domaine privé ou en modifier la consistance ou le périmètre. Il n'a pas non plus entendu mettre un terme au droit d'usage perpétuel dont dispose la commune requérante en vertu des jugement et arrêt précités en date des 2 février 1925 et 21 juin 1926. Par suite, la commune de Roquebillière n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

4. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à la commune de Roquebillière la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête présentée par la commune de Roquebillière est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Roquebillière et au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 10 novembre 2023, où siégeaient :

- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,

- Mme Vincent, présidente assesseure,

- Mme Marchessaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 novembre 2023.

N° 22MA00158 2

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA00158
Date de la décision : 24/11/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

17-03 Compétence. - Répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction.


Composition du Tribunal
Président : Mme CHENAL-PETER
Rapporteur ?: Mme Aurélia VINCENT
Rapporteur public ?: M. GUILLAUMONT
Avocat(s) : CLL AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-11-24;22ma00158 ?
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