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23/11/2023 | FRANCE | N°21MA04753

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 23 novembre 2023, 21MA04753


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Nice, par deux actes introductifs d'instance, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2011, ainsi que des majorations correspondantes.



Par un jugement nos 2004434, 2004442 du 22 octobre 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes.



Procédure deva

nt la cour :



Par une requête, enregistrée le 15 décembre 2021, Mme D..., représentée par Me Ciaudo,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Nice, par deux actes introductifs d'instance, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2011, ainsi que des majorations correspondantes.

Par un jugement nos 2004434, 2004442 du 22 octobre 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 décembre 2021, Mme D..., représentée par Me Ciaudo, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 22 octobre 2021 du tribunal administratif de Nice ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et des majorations en litige ;

3°) de mettre la somme de 2 500 euros à la charge de l'État en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le quantum du litige ne porte pas sur la somme de 25 796 euros, mais sur celle de 106 844 euros ;

- elle est fondée à se prévaloir de la prise de position de l'administration fiscale suite à l'examen de la situation fiscale personnelle de son frère portant sur les années 2008 et 2009 sur le fondement des deux premiers alinéas de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales dans sa rédaction actuelle ;

- les intérêts des emprunts contractés par la SCI Bellevue sont déductibles tant sur le terrain de la loi que sur celui de la doctrine ;

- les charges supportées par la SCP Square Mérimée sont déductibles de ses revenus fonciers.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 juillet 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la demande enregistrée sous le numéro 20004434 par le tribunal administratif de Nice est irrecevable, dès lors que la réclamation du 28 mai 2020 a été enregistrée après l'expiration des délais de réclamation résultant des articles L. 169, R. 196-1 et R. 196-3 du livre des procédures fiscales ;

- la demande enregistrée sous le numéro 2004442 est tardive ;

- les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de M. Mérenne,

- et les conclusions de M. Ury, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... est associée dans plusieurs sociétés relevant de l'article 8 du code général des impôts. L'administration fiscale lui a adressé une proposition de rectification le 16 décembre 2013, l'assujettissant à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre des années 2010 à 2012 pour les revenus fonciers résultant de cinq sociétés relevant de l'article 8 du code général des impôts. Mme D... fait appel du jugement du 22 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012 à raison des revenus fonciers de certaines de ces sociétés.

Sur le quantum du litige :

2. Ainsi que l'a relevé le tribunal administratif de Nice, Mme D... n'ayant présenté de moyens que relativement aux redressements issus des revenus des SCP Square Mérimée et SCI Bellevue, ses conclusions en décharge ne peuvent être accueillies au-delà de la somme de 25 794 euros.

Sur les revenus issus de la SCI Bellevue :

3. Aux termes du 1 de l'article 13 du code général des impôts : " Le bénéfice ou revenu imposable est constitué par l'excédent du produit brut, y compris la valeur des profits et avantages en nature, sur les dépenses effectuées en vue de l'acquisition et de la conservation du revenu ". Aux termes de l'article 15 du même code : " Les revenus des logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu ". Aux termes de l'article 28 du même code : " Le revenu net foncier est égal à la différence entre le montant du revenu brut et le total des charges de la propriété ". Enfin l'article 31 du même code prévoit que : " I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : 1° Pour les propriétés urbaines : (...) d) Les intérêts de dettes contractées pour la conservation, l'acquisition, la construction, la réparation ou l'amélioration des propriétés (...) ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions que, sauf disposition législative spécifique, seuls les intérêts des emprunts contractés pour l'acquisition de biens ou droits immobiliers destinés à procurer des revenus fonciers sont déductibles du revenu brut foncier.

4. Il résulte des dispositions citées au point précédent que les charges afférentes aux logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne peuvent pas venir en déduction pour la détermination du revenu foncier compris dans le revenu global soumis à l'impôt sur le revenu. La réserve de jouissance est établie, notamment, par l'accomplissement ou non de diligences ayant pour objet de donner le bien en location. Il appartient donc au propriétaire d'apporter la preuve qu'il a offert à la location pendant l'année en cause le logement resté vacant au titre duquel il demande la déduction de charges foncières, et qu'il a pris toutes les dispositions nécessaires pour le louer.

5. L'administration fiscale a remis en cause les charges déduites au titre de la SCI Bellevue, qui correspondraient selon la requérante aux intérêts d'emprunts contractés pour financer certains travaux. Toutefois cette société n'avait perçu aucun loyer depuis 2006. Mme D... ne soutient pas qu'elle aurait accompli des diligences pour mettre le bien en location au cours de la période concernée. Pour l'ensemble de ces raisons elle ne peut déduire les intérêts d'emprunts litigieux.

6. Mme D... n'est pas fondée à se prévaloir des doctrines référencées 5 D-2-07 et BOI-RFPI-DECLA-20 n° 160, qui ne comportent pas une interprétation de la loi fiscale différente de celle dont l'administration fait application. Le moyen doit donc être écarté.

Sur les revenus issus de la SCP Square Mérimée :

7. Aux termes de l'article 29 du code général des impôts : " Le revenu brut des immeubles ou parties d'immeubles donnés en location, est constitué par le montant des recettes brutes perçues par le propriétaire (...) / Dans les recettes brutes de la propriété sont comprises notamment celles qui proviennent de la location du droit d'affichage (...) ". L'article 31 du même code prévoit que : " I. - Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : 1° Pour les propriétés urbaines : a) Les dépenses de réparation et d'entretien effectivement supportées par le propriétaire ; (...) ; b) Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement (...) ".

8. La SCP Square Mérimée, dont Mme D... est associée pour 50 % des parts, est également nue-propriétaire d'un autre bien immobilier situé à Cannes. Cette société perçoit en outre les droits résultant de la location du droit d'affichage sur les façades est et ouest de cet immeuble. L'administration fiscale a remis en cause les charges déduites au titre de cette société au motif qu'elles n'avaient pas été exposées en vue de l'acquisition ou de la conservation du revenu constitué par les recettes issues de ce droit d'affichage. En se bornant à produire des documents comptables se rapportant aux années 2008 et 2009, alors que la rectification porte sur les années 2010 à 2012, Mme D... ne conteste pas utilement le redressement dont elle a fait l'objet.

9. Par ailleurs le rejet des charges déduites par la société étant fondé sur les articles 29 et 31 du code général des impôts, et non sur la réponse ministérielle publiée au Journal officiel des débats le 14 octobre 1970, page 1479, à la question écrite n° 9671 de M. A... B..., sénateur, Mme D... n'est pas fondée à se prévaloir de la caducité de cette doctrine.

10. Enfin, et compte tenu de ce qui a été dit au point 8, Mme D... n'est en tout état de cause pas fondée à se prévaloir des doctrines référencées 5 D-2-07 et BOI-RFPI-CHAMP-10 n° 60, dont elle n'établit pas qu'elles lui seraient applicables.

Sur l'absence de prise de position formelle de l'administration fiscale :

11. D'une part, le premier alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales prévoit qu' : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. " D'autre part, il résulte du 1° de l'article L.80 B du même livre que cette garantie est également applicable : " Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ; elle se prononce dans un délai de trois mois lorsqu'elle est saisie d'une demande écrite, précise et complète par un redevable de bonne foi. "

12. L'avis d'absence de rectification adressé au frère de la requérante, détenant 50 % des parts des sociétés Bellevue et Square Mérimée, n'exprime pas une position formelle de l'administration sur l'interprétation d'un texte fiscal ou l'appréciation d'une situation de fait au sens des dispositions précitées. En outre, Mme D... ne peut utilement invoquer les dispositions actuelles du deuxième alinéa de l'article 80 A, qui, conformément au II de l'article 9 de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018, ne sont applicables qu'aux contrôles dont les avis sont adressés à compter du 1er janvier 2019. Le moyen doit donc être écarté.

13. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées par le ministre aux demandes présentées par Mme D... en première instance, que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Sa requête doit donc être rejetée, y compris ses conclusions relatives aux frais non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée pour information à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 9 novembre 2023, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- M. Platillero, président-assesseur,

- M. Mérenne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 novembre 2023.

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No 21MA04753


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA04753
Date de la décision : 23/11/2023
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-02-02 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Revenus fonciers.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: M. Sylvain MERENNE
Rapporteur public ?: M. URY
Avocat(s) : CIAUDO

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-11-23;21ma04753 ?
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